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La Scena Musicale - Vol. 7, No. 6

Autour de MusiMars

Par Marc Chénard / 1 mars 2002

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« Il n'y a peut-être pas aujourd'hui de compositeur et de chef d'orchestre plus authentiquement “mondial” que Tan Dun. » Il sera l'invité d'honneur de la prochaine édition de Musimars, placée sous le signe du métissage musical.

Qu'on la qualifie de « contemporaine » ou de « savante », la musique de concert de notre temps demeure l'enfant mal aimé de notre culture. Bien qu'elle ne soit pas dénuée d'un public ni d'un réseau spécialisé d'information pour l'appuyer, cela ne suffit pas pour pallier l'indifférence générale des grands médias. Qui plus est, les grandes institutions de concert font preuve de timidité en ce qui concerne l'inclusion d'oeuvres nouvelles dans leurs programmes. Mais, en dépit d'un manque de reconnaissance, ces musiques ont elles aussi leurs personnalités de renom, si bien qu'il arrive à l'une ou l'autre d'entre elles d'être propulsée au rang des vedettes.

 

Un invité de marque

Tan Dun

À ce titre, le compositeur chinois Tan Dun fait partie de ce petit nombre de « contemporains » qui ont percé sur la scène internationale. Armé d'un contrat d'enregistrement exclusif chez Sony Classical, il a vu sa cote grimper en flèche l'année dernière, à la suite de la parution du long métrage Crouching Tiger Hidden Dragon, de son compatriote cinéaste Ang Lee, film pour lequel il a composé la trame sonore. Et, comme Hollywood peut faire des miracles pour quiconque sait jouer son jeu, M. Dun a pu rejoindre un auditoire bien plus vaste que celui des seuls habitués des salles de concert.

Quoi qu'on dise de ses succès, Tan Dun incarne une actualité musicale particulièrement prégnante. Reprenant fidèlement le descriptif fourni par sa maison de disque, le réseau France Musique proclame sur son site Web : « Il n'y a peut-être pas aujourd'hui de compositeur et de chef d'orchestre plus authentiquement “mondial” que Tan Dun. » Bien entendu, le fait d'avoir vu le jour en Chine (en 1957) et de vivre maintenant à New York lui donne une certaine crédibilité et l'on ne peut se surprendre du fait qu'il soit devenu une figure emblématique du phénomène bien en vogue des métissages entre les traditions musicales du monde. Mais de là à le considérer comme un modèle, ou une figure de proue, cela reste à discuter, comme ce sera d'ailleurs le cas lors de sa visite prochaine à Montréal dans le cadre de l'événement MusiMars 2002.

Par-delà tout le battage publicitaire qui l'entoure, Tan Dun est arrivé à formuler une certaine vision personnelle des choses. Hybride de nature, son oeuvre n'est pas le produit de simples collages stylistiques, mais la résultante de schèmes conceptuels plus élaborés. Auteur d'un cycle de théâtre orchestral multimédia, il incorpore la technologie moderne et des effectifs symphoniques dans un processus rituel provenant de la tradition chinoise des chamans. Dans sa Symphonie 1997, il met en scène un violoncelle solo (en l'occurrence Yo-Yo Ma, vedette musicale interculturelle, s'il en est une) et un jeu de 64 cloches chinoises (les bianzhong), datant de 400 ans avant Jésus-Christ. Plus ambitieux encore, son opéra Marco Polo, monté en première à Munich en 1996, constitue une exploration nouvelle du langage musical et des arts de la scène par une fusion entre la musique contemporaine de l'Occident et celles de l'Orient. L'an dernier, à cette époque, son Concerto pour violoncelle, toujours avec M. Ma, fut présenté en première à Boston sous la direction du chef émérite Seiji Ozawa.

Lorsqu'il ne sillonne pas le globe comme chef d'orchestre itinérant, Tan Dun est plongé dans ses projets de composition, tous plus ambitieux les uns que les autres. En octobre prochain, il sera au pupitre du NHK de Tokyo pour la première mondiale de son nouvel opéra intitulé Tea. Mais, d'ici là, Montréal l'accueillera comme invité d'honneur d'une initiative conjointe entre l'Université McGill, la Société de musique contemporaine du Québec et, pour la première fois, l'Orchestre symphonique de Montréal.

 

Un événement qui se démarque

Compositeur, chef d'orchestre, pédagogue et initiateur de projets musicaux, Denys Bouliane revient à la charge avec MusiMars 2002, un événement de quatre jours qui se tiendra du 4 au 7 mars prochain à l'Université McGill. Après une relâche d'une année, voici que la troisième édition se déroulera sous la thématique du métissage musical, sujet particulièrement en vogue dans tous les genres, y compris le classique. Au total, 13 oeuvres seront inscrites au programme, dont 4 créations. Par ailleurs, des 10 compositeurs primés, 8 seront présents à ce rendez-vous. Parmi eux, mentionnons, entres autres, deux Sino-Canadiennes, Alexina Louie et Melissa Hui, ainsi que Xiaogong Ye, beaucoup moins connu que M. Dun, mais fort prometteur, nous dit-on. Tout aussi importantes aux yeux du directeur artistique, des tables rondes et des conférences seront tenues les après-midi, question de présenter les participants et d'engager le débat autour du thème proposé.

Denys Bouliane

Dans son rôle d'invité d'honneur, Tan Dun s'entretiendra sur sa musique (le mercredi 6) et dirigera l'OSM (les 6 et 7) dans deux de ses oeuvres, soit son Orchestral Theater No. 1 et une suite issue de la trame sonore du film Crouching Tiger Hidden Dragon. Pour cette dernière, on nous promet d'ailleurs la projection d'une vidéo constituée d'extraits du long métrage.

Interrogé sur les choix de Tan Dun, Denys Bouliane explique que la proposition provenait de Charles Dutoit, car ce dernier connaît sa musique pour l'avoir dirigée et la tient en estime. Assuré de la participation d'un compositeur de renom, Bouliane pouvait donc compter sur la participation de l'OSM, une première qui ouvrira la voie à d'autres collaborations avec l'orchestre. «Avec son concours, il est sûr que des partenariats avec d'autres organismes vont se développer et évoluer d'année en année », conclut-il avec un certain optimisme. «Cela pourrait avoir lieu en d'autre temps que le mois de mars, mais, chose certaine, on pourra compter sur cette initiative dans l'avenir comme un lieu privilégié de rencontres et d'échanges entre les compositeurs, les étudiants et le public : c'est là le but de l'exercice. »

Le calendrier complet de MusiMars peut-être consulté sur le site Web de la SMCQ au . Renseignements et billets: (514) 843-9305


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