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La Scena Musicale - Vol. 20, No. 3 novembre 2014

Daniil Trifonov

Par L.H. Tiffany Hsieh / 1 novembre 2014

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Daniil Trifonov. Photo: Daario Acosta/DG

Il ne fait aucun doute que Daniil Trifonov est un vrai romantique. Nous l’avons joint au téléphone, dans son pays en Russie. Ce jeune pianiste de 23 ans a récemment séduit le monde de la musique classique par une élégance nous rappelant celle d’un Liszt. Timide de nature, il le devient plus encore lorsqu’il affirme, avec un petit rire : « Je pense que les artistes doivent faire en sorte que les gens deviennent amoureux. »

Quoi qu’il en soit, lorsqu’on le questionne sur sa récente notoriété, que des critiques et des proches qualifient de véritable conte de fées, M. Trifonov, cherchant les mots justes, rejette cette conception un peu romantique d’un succès instantané.

« Ça s’est fait peu à peu », dit Trifonov, parlant de son parcours musical à travers les salles de concert prestigieuses du monde, qui aboutira en un contrat de disque exclusif avec Deutsche Grammophon (DG). Son premier enregistrement sous le « label jaune » est une captation en direct de son premier concert au Carnegie Hall donné le 5 février 2013, un jour seulement avant la signature de son contrat avec DG. L’enregistrement comprend la Sonate en si mineur de Liszt, la Sonate no 2 en sol dièse majeur, op. 19 de Scriabine et les 24 Préludes de Chopin, op. 28.

Natif de Nijni Novgorod, une des plus grandes villes de Russie, Trifonov est l’enfant unique de parents musiciens. Son père est compositeur et sa mère est professeure de théorie musicale. Ils le mettent très tôt au piano, à l’âge de 5, lorsqu’ils s’aperçoivent qu’il possède un talent pour la musique.

« J’ai l’oreille absolue. Si j’entends une mélodie, j’essaierai toujours de la rejouer au piano, dit Trifonov. Mes parents ont dit très bien, ce sera le piano. »

Quelques années plus tard, la famille Trifonov emballe ses affaires et déménage à Moscou où le jeune Daniil étudie avec la professeure de piano renommée Tatiana Zeligman à l’Académie russe de musique Gnessine.

« J’ai étudié avec Tatiana de l’âge de neuf à dix-huit ans. Elle est une des meilleures professeures de piano, et Gnessine, une des meilleures écoles de musique de Russie, dit Trifonov. Quand j’étais plus jeune, mes parents m’ont évidemment aidé dans mes études, mais c’est Tatiana qui m’a le plus aidé à développer mes connaissances musicales. »

Grâce à la collection de vieux enregistrements de Tatiana Zeligman, Daniil Trifonov a eu accès aux interprétations des plus grands pianistes comme Rachmaninov, Josef Hofmann, Vladimir Horowitz et Ignaz Friedman.

« J’étais intéressé par les musiciens de cet âge d’or de Russie, d’Europe et des États-Unis », dit Trifonov, qui donnera son premier concert avec orchestre à l’âge de huit ans. Dès l’âge de 16 ans, il participe à des concours qui l’aident, selon lui, à améliorer son jeu. Bien qu’il y ait toujours eu de la pression lors des concours, elle ne venait ni de ses parents ni de son professeur : « Ils voulaient uniquement que je fasse de mon mieux », se rappelle-t-il.

Faire de son mieux était déjà remarquable. À dix-sept ans, il obtient le cinquième prix au 4e Concours international de piano Scriabine de Moscou et le premier prix au 3e Concours international de piano de San Marino. En 2010, il fut l’un des sept finalistes au Concours Eurovision des jeunes musiciens et il est médaillé au 16e Concours international de piano Frédéric Chopin à Varsovie.

Puis, en 2011, à l’âge de vingt ans, Trifonov gagne le 13e Concours international de piano Arthur Rubinstein à Tel-Aviv autant que le Concours international Tchaïkovski. Sa prestation au Concours Tchaïkovski fut si éblouissante que la pianiste Martha Argerich, une de ses idoles, dira au Financial Times : « Hier soir je l’ai écouté de nouveau sur YouTube. Il a tout et plus encore. Ce qu’il fait avec ses mains est techniquement incroyable. Et son touché est tendre et démoniaque. Je n’ai jamais entendu quelque chose de pareil. »

Depuis, Trifonov est monté sur plusieurs scènes internationales comme récitaliste et comme soliste avec de grands orchestres. Ses débuts à Toronto au Koerner Hall, en 2013, ont été salués par une salle comble et enthousiaste. Son premier concert avec l’Orchestre symphonique de Toronto fut une telle réussite qu’il gratifia son public d’un rappel après avoir interprété la Rhapsodie sur un thème de Paganini de Rachamaninov.

En plus de jouer plus d’une centaine de concerts par année, Daniil Trifonov a complété récemment – il est récipiendaire d’une bourse d’études – ses certificate studies au Cleveland Institute of Music (CIM). Son professeur est le pianiste et pédagogue renommé Sergei Babayan avec qui Trifonov continue d’étudier autant qu’il le peut et interprète, en concert, des œuvres pour deux pianos. Il étudie de plus la composition au CIM avec Keith Fitch qui lui a commandé l’écriture d’un concerto pour son programme Year of the Composer/Virtuoso dont le but est de créer une nouvelle génération de compositeurs virtuoses. Il a présenté son Concerto pour piano en mi bémol en première mondiale au CIM en avril dernier.

« C’est un plaisir de jouer pour toutes les générations dit Trifonov, mais il est important pour les artistes de s’engager auprès des jeunes. Une de mes expériences les plus stimulantes fut de voir, en Corée, un auditoire composé de jeunes à plus de 30 %. Et parce que je touche un piano différent dans chacune des villes, je cherche toujours quelque chose de nouveau, une nouvelle couleur, un nouveau caractère, une nouvelle interprétation. »

Daniil Trifonov revient au Canada l’an prochain avec le violoniste Gidon Kremer à Toronto (le 20 janvier) et à Montréal (le 21 janvier).  

www.daniiltrifonov.com ; www.rcmusic.ca ; www.showoneproductions.ca


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