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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 4 décembre 2011

Christian Lane, lauréat 2011 du CIOC

Par Crystal Chan / 1 décembre 2011

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Christian Lane ne croyait pas revenir. C’était en 2008, au moment où il quittait Montréal après s’être rendu en demi-finale de la première édition du Concours international d’orgue du Canada (CIOC). La fatigue consécutive au concours s’est abattue sur lui : « Dans ma tête, je n’en pouvais plus des concours », explique-t-il.

Rien de plus normal. Depuis son tout jeune âge, Christian participe à une suite ininterrompue de concours avec une assiduité qu’on rencontre davantage chez d’autres joueurs de clavier, soit les pianistes. D’abord, il se fait la main à l’orgue à l’âge de cinq ans. Dès sa deuxième année scolaire, il s’y met sérieusement : son père étant pasteur méthodiste à Hampstead, puis à Walkersville, dans le Maryland, l’enfant qui grandit a facilement accès à des orgues. Avant même d’atteindre 21 ans, il remporte les honneurs de quatre concours d’orgue américains prestigieux : le concours Albert Schweitzer, le concours pour jeunes organistes de sa région de l’American Guild of Organists, le concours Augustana Arts/Reuter National, destiné aux étudiants de premier cycle, et le concours national Arthur Poister. Sur cette lancée, il remporte la deuxième place du prestigieux concours – national, cette fois – de l’American Guild of Organists, puis du Concours international d’orgue de Miami.

Aujourd’hui, Christian Lane a 30 ans et, depuis l’automne 2008, il est organiste adjoint et maître de chapelle à l’université Harvard. À ce titre, il joue et enseigne le répertoire des grands maîtres, de Frescobaldi à Bach, de Bach à Messiaen. Il s’intéresse aussi vivement aux musiques nouvelles pour lesquelles il fait des commandes, souvent en partenariat avec sa proche collaboratrice, la soprano Jolle Greenleaf : « Je crois qu’un bon organiste doit acquérir des compétences dans tous les styles, affirme-t-il. Les tendances sont changeantes. Si on observe ce qui s’est passé dans les années 1960 et 70, on constate qu’il y a eu un puissant mouvement contre toute forme de musique romantique. On ne parlait que de pratiques d’interprétation, et la musique ancienne était la seule musique qui vaille. C’est absurde ! Il me semble qu’on a besoin, comme organiste, de prendre la mesure du répertoire de notre instrument – répertoire qui, pour notre plus grand bonheur, est le plus vaste de tous les instruments modernes : de nos jours, on trouve en effet des musiques pour orgue vraiment inventives, mais des compositeurs écrivaient déjà pour l’orgue au xve siècle ! »

Pourquoi avoir tenté de nouveau l’aventure du CIOC ? « Ce concours a tellement de classe ! lance-t-il. Les organisateurs savent vraiment ce qu’ils font. De plus, l’orgue Casavant de la basilique Notre-Dame est monumental, et c’est un réel plaisir de le jouer. » Christian était aussi enthousiaste à l’idée de rencontrer des collègues organistes – parmi les meilleurs au monde. Tout cela semblait plus stimulant pour lui que de gagner le premier prix, mais il avoue que cette récompense lui ouvre un marché exceptionnel.

« Depuis mon retour, tout le monde me demande si je suis au septième ciel, continue-t-il. Mais non ! Pour moi, c’est la vie – je joue de l’orgue ! Je m’étais fixé un but : aller à Montréal et jouer de mon mieux. Mais le fait d’avoir atteint mon objectif ne change pas ma vie à ce point. L’issue de ces concours, c’est une question de chance, jusqu’à un certain point. Ça m’a vraiment surpris… je ne suis jamais totalement satisfait de mon jeu. »

Faisant fi de l’idée que tout le système de points du concours témoignait de l’excellence de son jeu, il poursuit : « Ma force, ce n’est pas de jouer toutes les bonnes notes et d’avoir la technique la plus parfaite. Certainement pas ! Mais je pense que j’ai quelque chose à dire. Et je sais comment apprivoiser cet instrument qui est tellement intraitable – même pour les plus habiles techniciens. » D’après lui, la recette consiste à donner vie au rythme malgré les limites d’un instrument qui ne permet pas d’établir de dynamique entre les notes. « Le défi de l’organiste, c’est de réussir à rendre la musique à travers un rythme plein de vitalité, déclare-t-il. On base généralement la notion de rythme sur l’accentuation des temps forts, mais à l’orgue, c’est impossible. On doit trouver d’autres moyens pour que l’auditeur perçoive cette dynamique. » Les techniques pour y arriver consistent à allonger légèrement les notes qui forment ces temps forts. « Je crois être capable de bien traduire le rythme. C’est probablement ma plus grande force, celle qui me permet de communiquer. »

En définitive, communiquer avec son public à travers l’orgue constitue pour Christian Lane un geste éminemment personnel. « La musique en général et son véhicule particulier qu’est l’orgue contribuent à mon équilibre et posent les fondements de ma vie spirituelle. »

Traduction : Hélène Panneton

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Récital d’orgue solo le 18 mai 2012, dans le cadre du festival Organix de Toronto, à l’église Metropolitan United.

www.organixconcerts.ca

www.christianlane.com


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