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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 1

Jazz

Par Marc Chénard / 1 septembre 2011

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Lorraine en Chine

par LORRAINE DESMARAIS

Nous sommes lundi soir le 6 juin 2011. Une soirée parmi tant d’autres me direz-vous? En fait, je rentre d’un périple de dix jours en Chine! Pour la première fois de ma vie, j’ai eu l’honneur et le privilège de donner quatre concerts solo dans de magnifiques salles à l’autre bout du monde, animée comme toujours par ce désir de partager ma musique avec un nouveau public. Dans les lignes qui suivent, je vous offre à peine quelques souvenirs d’un voyage inoubliable.

Shanghai, 28 mai » Après un long vol d’au moins quatorze heures, plus reposant qu’on ne pourrait le croire, je cueille mes bagages au carrousel. Quelques instants plus tard, en passant au hall des arrivées, mes yeux se posent sur une affiche où il ne fait plus aucun doute que je suis attendue. « Ni hao ! », dis-je avec mon plus beau sourire. Je prends enfin ma première bouffée d’air en sol chinois.

29 mai » Ce soir-là, je donne ma première prestation à la superbe salle du Oriental Art Center. L’acoustique de ce lieu ravissant m’a tout de suite mise dans l’ambiance, tout comme le superbe piano de concert. Une salle comble me réserve un accueil chaleureux à mon entrée en scène. On y voit des gens de tous âges, mais je suis frappée par la présence de jeunes enfants. Demeureront-ils tous attentifs jusqu’à la fin? Mais oui! Çà et là, j’entends un soupir, une exclamation, mais le public fait preuve d’un respect exemplaire. Sa sérénité m’impressionne particulièrement, tout comme sa volonté de vouloir découvrir le jazz. Après le concert, on me réserve un dîner gastronomique au restaurant Club Jin Mao, son authentique cuisine locale étant autant un délice pour le palais qu’un festin pour les yeux, le tout agrémenté d’une vue d’ensemble de la ville des plus impressionnantes.

Xiamen, 31 mai» Arrivés à la ville de Xiamen, à environ 2 heures d’avion de Shanghai, mon guide-interprète et moi-même prenons le traversier vers l’île avoisinante de Gulangyu. Exotisme, beauté, arbres envahissants, plages ravissantes et boutiques typiquement chinoises entourent sa magnifique salle de spectacles.

Ce deuxième concert de ma tournée est accueilli avec grand enthousiasme dans cette île envoûtante. Encore une fois, la présence de jeunes, même de très jeunes, me surprend agréablement, toujours en compagnie de leurs parents qui, eux, leur donnent cette chance de s’ouvrir à la musique et aux arts. À l’instar des autres peuples asiatiques, la discipline extraordinaire de ces jeunes Chinois est remarquable, une qualité qui, de mon avis, dessert bien la culture.

Combien grande est ma surprise de les voir m’accueillir après le concert en réclamant avec enthousiasme signatures de programmes et autant de photos souvenir… «Xiexie, Xiexie!», clament les spectateurs. (Merci, merci!) L’atmosphère là était beaucoup plus à la fête qu’à Shanghai, un brin plus réservée.

Mais pourquoi donc cet engouement pour le piano? Cette petite communauté de quelque 20 000 âmes, nous informe-t-on, possède plus de pianos «par tête» que tout autre endroit sur la planète! On ne s’étonne pas que l’on surnomme Gulangyu «l’île aux pianos». On y trouve du reste un musée du piano, certes le plus grand en son genre en Asie, et un autre consacré uniquement à l’orgue.

Qingdao, 4 juin » Après un autre vol d’environ deux heures en provenance de Xiamen, je me rends vers la grande ville de Qingdao (7,5 millions d’habitants). Je profite de l’occasion pour vous présenter mes hôtes Catherine et Paul-Arnaud, deux Français qui agissent en véritables promoteurs de la série Pianos aux Jacobins, événement basé à Toulouse. Durant la tournée, j’avais le plaisir de côtoyer et d’entendre deux talentueux pianistes classiques, messieurs Geoffroy Couteau et Sergio Tiempo. Nous partagions les différentes scènes à raison d’un pianiste par soir, mes confrères donnaient leurs récitals en rotation avec moi, qui assurait la prestation de jazz dans cette tournée.

Le moment fort de ma soirée à Qingdao s’est en fait passé après le concert. Une jeune Chinoise non-voyante s’installe au piano sur la grande scène du Grand théâtre de Qingdao et se met à improviser avec une musicalité et une dextérité exemplaires: que d’instants émouvants et mémorables...

Beijing, 5 juin » Beijing, la capitale, demeure pour moi le point culminant du voyage. Genre de Manhattan en perpétuel développement, cette ville carbure constamment, tournant en quatrième vitesse. Quelle intensité ! Chaque citoyen négocie constamment son espace vital sur le grand boulevard qui me conduit tout droit vers la salle de concert de la célèbre Cité interdite. Tout à coup, on se croit atterrir sur une autre planète en débarquant à la place Tian’anmen! Se dévoile sous mes yeux le superbe jardin du parc Zhongshan, comme par enchantement. Traversant une longue allée bordée de pins et de cyprès, je découvre avec bonheur ce charmant palais musical, ce lieu magique qui m’était demeuré jusqu’à cet instant une véritable énigme.

Ce soir-là, un public de connaisseurs m’attendait, les jeunes en revanche n’y étaient pas –peut-être les avait-on laissés jouer dehors?... Dans la salle, l’atmosphère était digne d’un grand festival de jazz occidental. Les dernières notes qui résonnent dans ma tête sont celles d’une chanson populaire chinoise sur laquelle j’adorais improviser à la fin de chaque concert (Qui Si Ni De Wen Rou). Les voyages forment la jeunesse, nous dit-on, mais l’âge importe peu à vrai dire quand on se dit mission accomplie! «Zaijian!» (Au revoir!)

Eh oui, me voilà de retour chez moi en ce lundi soir du 6 juin 2011… Une soirée parmi tant d’autres me direz-vous?...

Au rayon du disque

par Marc Chénard, Annie Landreville

Hommages au présent

Misses Satchmo: The Sun Will Shine
Disques Bros BROS11104

Misses Satchmo a pour mission de rendre hommage à toute une époque avec comme beau prétexte la musique de Louis Armstrong. Les «Misses» sont quatre, deux femmes et... deux hommes! L’instigatrice de ce projet, la trompettiste Lysandre Champagne (une ancienne élève de Ron di Lauro) s’est notamment produite aux côtés de Marco Calliari et de Collectivo; ici, par contre, elle plonge tête première dans l’œuvre de Louis Armstrong, tout simplement parce qu’elle a eu envie de retravailler ces musiques d’antan. Et ça marche: cette jeune musicienne est en train de réussir le difficile pari de faire découvrir le jazz classique à un public plus jeune et pas forcément attiré par le genre. Pour vraiment comprendre la magie de ce projet musical, il faut avoir vu le groupe sur scène, comme j’ai eu l’occasion de le faire l’été dernier sur une scène extérieure à Montréal. Délicate d’apparence, la musicienne n’a rien du gabarit de son modèle, mais elle a du souffle, du style et une voix mordante. Ce n’est pas autant un disque axé sur la performance qu’un travail d’artisan sincère, bien mené du côté des arrangements et de l’interprétation. Signalons aussi ses accompagnateurs, soit la pianiste Maude Alain-Gendreau, le batteur Marton Maderspach (Sagapool, Les gitans de Sarajevo) et le contrebassiste Frédéric Pauzé. Au programme, on reconnaîtra plusieurs classiques de Pops, soit On the Sunny Side of the Street, Mack the Knife et, en version bilingue, My Man/Mon homme. Ce disque est à l’image de son titre, The Sun Will Shine. Ensoleillé en effet! Et un plaisir contagieux avec ça. AL

Trio 3: Celebrating Mary Lou Williams – Live at Birdland New York
Intakt CD 187 (intaktrec.ch)

Sur ce quatrième disque publié par l’excellent label suisse Intakt, on retrouve un trio de grosses pointures de la musique afro-américaine qui sort un peu de ses plates-bandes habituelles du post-free jazz. Cette fois-ci, il accueille de nouveau la pianiste Gerri Allen (entendue dans At this Time, Intakt 162) dans un concert-hommage à l’une des figures historiques les plus mésestimées dans les annales de la note bleue: la pianiste Mary-Lou Williams (1910-1981). Compositrice et arrangeure dès les années 1930, elle n’a pas seulement vécu l’histoire en direct, mais en a assimilé les développements dans son art, du blues au swing, du bop à la musique modale, même un détour vers le free jazz par sa rencontre (hélas plutôt houleuse) avec Cecil Taylor. En l’an 2000, le trompettiste Dave Douglas rectifia un peu la situation avec Soul on Soul sur RCA. Dix ans plus tard, voici le tour de cette formation américaine de la saluer à l’occasion du centenaire de sa naissance. L’auditeur peut juger un peu de l’œuvre de cette musicienne légendaire, car on y trouve des compositions échelonnées sur une période de plus de quarante ans. Menant le bal ici, le saxophoniste alto Oliver Lake a fait ses classes dans le free jazz et sa sonorité acide est parfois agressante, trahissant certains problèmes de justesse qui ne seront pas de tout repos pour les gens doués d’une oreille absolue. Quant à la rythmique, rien n’est à l’abri de Reggie Workman (cb.) et d’Andrew Cyrille (btr.), deux septuagénaires qui ont joué avec tous les grands, le second ayant même été un protégé de Williams au début des années 1960 –ce qui ajoute une indéniable note d’authenticité à ce concert new-yorkais de l’été 2010. Plus traditionnelle, la pianiste campe la musique du trio un peu plus au centre du spectre, sa présence étant toutefois bénéfique dans cette entreprise. Sans nostalgie aucune, ce disque hommage est résolument décliné au temps présent. MC

Bird Lives

Deux vues sur l’héritage parkerien

Rémi Bolduc Jazz ensemble:
Hommage à Charlie Parker
Effendi, FND108

Les hommages à Charlie Parker, on ne les compte plus tellement il y en a. Rémi Bolduc a voulu aussi rendre hommage au maître, mais également à son instrument, le saxophone alto. Pour l’occasion, il a su bien s’entourer: sur la pochette, on voit trois oiseaux perchés sur un fil, donc un pour chaque saxophoniste, ses acolytes étant ici Janis Streprans et Alexandre Côté, tous trois excellents interprètes qui ont aussi collaboré dans les arrangements. C’est une belle rencontre pour ces trois souffleurs qui se relaient constamment dans des solos, révélant leurs traits de jeu respectifs. La section rythmique, pour sa part, est constituée de trois complices de longue date: Dave Laing à la batterie, Fraser Hollins à la contrebasse et Steve Amirault au piano. Le disque comporte bien sûr des pièces de celui que l’on surnommait «Bird», mais aussi d’autres incontournables de son répertoire, désormais tous des standards : Moose the Mooche, Parker’s Mood, Donna Lee, Embraceable You et Little Suede Shoes. Au total, ce sextette s’attaque à neuf morceaux, les abordant d’une manière très classique, donc tout à fait accessible pour l’auditeur. La musique est donc précise, les rythmes enlevants, les solos pertinents. En un mot : une musique rafraîchissante qui ne se démode jamais. AL

Heiner Stadler : Tribute to Bird and Monk
Labor records, LAB 7074

Moins sage que le disque précédent, cette réédition remastérisée de ce double hommage à Charlie Parker et à Thelonious Monk fait revivre un enregistrement de 1978 réalisé par le pianiste et arrangeur Heiner Stadler. Jubilatoire, exubérant, complètement free, cet album n’a pas pris une ride depuis sa parution originale: il reste à l’avant-garde, même aujourd’hui. Les arrangements de Stadler (qui ne joue pas dans cette séance) déconstruisent et réinventent les thèmes de Straight No Chaser (de Monk) ou Air Conditioning (de Parker). Les pièces sont aussi longues (il n’y a que six plages étalées sur 78 minutes), ce qui permet d’apprécier amplement les performances du cornettiste Thad Jones, du batteur Lenny White, du saxo ténor Georges Adams et du bassiste Reggie Workman, parmi d’autres. Simplement époustouflant. AL

La théorie des (grands) ensembles

par Félix-Antoine Hamel

Bill Dixon: Envoi
Victo cd 120 (victo.qc.ca)

Au crépuscule de sa vie (il est mort l’an dernier à 84 ans), Bill Dixon, peu prolifique, eut enfin la chance de documenter quelques projets d’envergure, dont 17 Musicians in Search of a Sound: Darfur (Aum Fidelity), Bill Dixon with Exploding Star Orchestra (Thrill Jockey), puis Tapestries for Small Orchestra (Firehouse 12). C’est justement avec le projet Tapestries qu’il devait donner sa dernière performance publique, au festival de Victoriaville en mai 2010, moins d’un mois avant sa disparition. Composé pour l’occasion, Envoi continue le travail amorcé à la fin des années 1960 sur Intents and Purposes (récemment réédité – enfin !), alliant la liberté improvisationnelle à une construction texturale très riche. Les quatre trompettistes-cornettistes (Rob Mazurek, Stephen Haynes, Taylor Ho Bynum, Graham Haynes) sont autant d’extensions de la pensée musicale de Dixon : ceux-ci tissent de subtils contrepoints se fondant dans un ensemble cohérent, lequel plane au-dessus des sombres textures fournies par le reste de l’ensemble aux dominantes graves (violoncelle, contrebasse, clarinette contrebasse, timbales). Par un court mais saisissant solo préenregistré (Shrike, au début de la deuxième section), Dixon affirme aussi sa présence comme instrumentiste. À la fin de cette performance d’une cinquantaine de minutes, que l’on peut considérer comme son testament musical, les mots du maître résonnent comme jadis ceux d’Eric Dolphy à la fin d’une autre célèbre «last date»: «Ce n’est pas si facile de tenter de faire ce que l’on veut faire devant des gens qui savent ce qu’ils voudraient que l’on fasse. Alors, on fait de son mieux, toujours, et on souhaite le meilleur, toujours. Merci.». Émouvant.

ICP Orchestra
ICP 049 (icporchestra.com)

Fondé en 1967 par un collectif d’improvisateurs, l’ICP (Instant Composers Pool) est désormais une vénérable institution de la musique improvisée européenne. L’ICP Orchestra, son incarnation la plus visible depuis les années 1980, est un regroupement d’une dizaine de fortes personnalités musicales. On a souvent évoqué l’humour décalé de ses deux pères fondateurs, le pianiste Misha Mengelberg et son compatriote hollandais le batteur Han Bennink, puis leur héritage de la musique de théâtre continentale, un bon exemple étant la petite chanson qui ouvre ce disque, Niet Zus, Maar Zo (tantôt comme ci, tantôt comme ça, en français); pourtant, l’orchestre se montre aussi un digne héritier de la démarche musicale ellingtonienne. Ceux qui ont vu l’orchestre en concert ne peuvent qu’être quelque peu déçus de ses disques–comment trouver un équivalent sonore à la performance scénique de Bennink? Malgré cette réserve, le présent album s’avère une collection plus que satisfaisante, où se succèdent des pièces au swing déjanté (Sumptious, The Lepaerd), de courtes improvisations en sous-ensembles et une paire de relectures (Sonnet in Search of a Moor d’Ellington et Busy Beaver de Herbie Nichols). Les compositions et les arrangements, divisés entre Mengelberg et les saxophonistes Ab Baars et Michael Moore, utilisent toutes les sonorités de l’ensemble, depuis la trompette volontiers microtonale de Thomas Heberer jusqu’aux enchevêtrements des cordes de Mary Oliver (violon, alto), de Tristan Honsinger (violoncelle) et d’Ernst Glerum (contrebasse). Outre Baars (ténor, clarinette) et Moore (alto, clarinette), Tobias Delius (ténor) complète la section des anches. Par leurs styles aussi contrastants que complémentaires, ces souffleurs contribuent de manière décisive à définir la personnalité de cet ensemble unique.

The Resonance Ensemble: Kafka in Flight
NotTwo MW 860-2 (nottwo.com)

Ken Vandermark semble toujours avoir deux ou trois nouveaux projets dans sa manche, mais l’une des constantes de son travail est un attachement particulier aux ensembles de moyenne envergure qui lui permettent d’élargir l’éventail de ses méthodes de composition. Après la dernière mouture du Territory Band en 2006, il s’est tourné vers le Resonance Ensemble, un tentette qui fait la part belle aux souffleurs. Il y a déjà belle lurette que l’homme de Chicago a bâti des ponts avec le Vieux Continent, notamment la Scandinavie (bien représentée ici par deux Suédois, le trompettiste Magnus Broo et le tubiste Per Åke Holmlander). Ces derniers temps, toutefois, il semble lorgner vers la jeune scène polonaise, enregistrant plusieurs disques sur l’étiquette nationale émergente NotTwo et engageant un dialogue avec des musiciens tels Mikolaj Trzaska (saxo alto, clarinette basse) et Waclaw Zimpel (clarinettes), tous deux présents ici. C’est à Gdansk en octobre 2009 que fut enregistré Kafka in Flight, point culminant d’une des nombreuses tournées du saxophoniste-compositeur. Si les notes de pochette de l’Américain témoignent des difficultés rencontrées (il dut entre autres proposer une autre approche compositionnelle par manque de temps de répétition), la performance électrisante dément tout manque de préparation. Propulsés par les batteurs Michael Zerang et Tim Daisy ainsi que le contrebassiste ukrainien Mark Tokar, les sept souffleurs interprètent brillamment trois compositions de Vandermark qui, forcé de simplifier quelque peu les structures de celles-ci, a simplement renforcé la cohésion de l’ensemble, qui donne l’impression de compter bien plus que dix musiciens parlant le même langage.

AIMToronto Orchestra: Year of the Boar
Barnyard Records BR0322 (barnyardrecords.com)

Les musiciens du collectif AIMToronto, réunis autour de l’étiquette Barnyard Records, font preuve d’une activité salutaire dans la métropole ontarienne. Réuni autour du saxophoniste et directeur artistique Kyle Brenders, l’AIMToronto Orchestra s’inspire des techniques contemporaines de composition et de performance pour grandes formations, notamment des travaux d’Anthony Braxton, qui fut leur invité pour une série de concerts en 2007. Sur Year of the Boar, 17 musiciens interprètent sept compositions originales de Brenders, du guitariste Justin Haynes, du batteur Joe Sorbara et de la vibraphoniste Germaine Liu. Mais plutôt que de tabler sur la puissance, les compositions privilégient des mélodies en suspension ou fragmentées, de discrets contrepoints et un espace sonore aéré. Les contributions individuelles sont généralement sacrifiées au profit d’une sonorité collective qui n’est pas sans évoquer le concept braxtonien de la Ghost Trance Music. Mais en tant que disque, Year of the Boar manque un peu de tonus et de diversité pour être totalement satisfaisant.

Pour son audace, on lui accorde volontiers trois étoiles et demie, mais un peu plus de substance aurait tout de même été bienvenue.

Perspectives d’automne

par Marc Chénard

Si le calendrier culturel de l’été est largement dominé par les festivals, comme c’est le cas dans le jazz, ce sont les saisons de concerts qui assurent le relais dans le reste de l’année. Signalons entre autres celles du FIJM (Jazz à l’année longue) ou du Centre Segal (Power Jazz), sans oublier l’activité régulière dans les clubs, le Upstairs Jazz Bar, le Dièse Onze, même la Maison du Jazz.

Mais en octobre prochain, il faut souligner un fait nouveau, soit la tenue de deux festivals de jazz dans la province. Outre l’Off Festival de Jazz de Montréal (OFJM), de retour cette année du 8 au 15 du mois pour sa douzième édition, la Vieille Capitale sera également le théâtre de son festival de jazz. Pour marquer le coup d’envoi de leur cinquième édition annuelle, les organisateurs annoncent déjà un concert préouverture (le 19) avec l’une des divas jazz de l’heure, Roberta Gambarini. D’autres grosses pointures seront aussi au rendez-vous des dix jours de festivités (du 20 au 30), notamment Dave Liebman et Joe Lovano (ce dernier à la tête de son ensemble US Five avec, bien sûr, la nouvelle star de la contrebasse Esperanza Spalding).

Vedette de la contrebasse elle aussi, mais campée dans un univers musical radicalement différent, Joëlle Léandre foulera le sol québécois pendant 10 jours. En effet, cette grande dame de la musique improvisée d’outre-Atlantique se rendra chez nous sur une invitation des productions SuperMusique, et ce, trois semaines après le 60e anniversaire de la musicienne, soit le 12 du mois courant. L’OFJM la présentera le vendredi 8 octobre, d’abord en solo, puis avec l’ensemble SuperMusique. Avant son concert montréalais, elle se rendra à Rimouski pour animer un stage et donner un concert conjoint avec le regroupement musical Tour de bras. Quant au Off, il propose une brochette de 27 concerts cette année, misant principalement sur les talents de chez nous, avec quelques visiteurs de marque, notamment les saxophonistes Jerry Bergonzi et Phil Dwyer (en tandem avec l’altiste Rémi Bolduc et son ensemble le 14 octobre). En octobre, nous reparlerons plus en détail de ces deux festivals ainsi que de la visite de Madame Léandre.

Pour revenir aux saisons de concerts, notons d’abord celle du Segal Center, maintenant dans sa troisième année. S’ouvrant le 25 septembre avec les frères Doxas (voir détails dans le calendrier Jazz+ ci-dessous), elle se poursuivra sous le signe des hommages, soit à Miles Davis et son album fétiche Kind of Blue, revisité par le sextette de Ron di Lauro (9 octobre) et à Kurt Weill (le 27 novembre), gracieuseté de la chanteuse Kerry-Anne Kurtz. Cinq autres concerts sont aussi inscrits à sa programmation à compter de janvier 2012.

Quant à la saison Jazz à l’année longue du FIJM, la programmation sera à dominante blues (John Mayall, Matt Anderson et Coco Montoya, d’la guitare t’en veux…). Le 12 octobre, le San Francisco Jazz Collective revient à Montréal après plus de trois ans, rendant hommage cette année à… Stevie Wonder (on dérive pas mal du jazz, quoi). Dix jours plus tard, nous annonce-t-on, la rockeuse Térez Montcalm offrira son hommage (encore un!) à Shirley Horn. Mais il y a toujours cette autre diva Sophie Milman le 3 novembre, si ça vous chante…

Notons en terminant d’autres faits saillants dans les clubs. Au Upstairs, le tandem Châteauguay Tenors (Cameron Wallis et Al McLean) chaufferont les planches de cette boîte dès septembre, accueillant d’ailleurs le saxo baryton new-yorkais Gary Smulyan en décembre. Nous vous aviserons des dates précises dans les prochains calendriers Jazz+. Bonne rentrée musicale!


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(c) La Scena Musicale 2002