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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 1

Hélène Guilmette : Un enthousiasme fou pour l’art lyrique

Par Daniel Turp / 1 septembre 2011

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Dès les premiers échanges avec celle qui incarnera Susanna dans Le nozze di Figaro de Mozart à l’Opéra de Montréal en ouverture de la saison 2011-2012, la passion pour la profession d’artiste lyrique qu’a épousée Hélène Guilmette est palpable. Qu’il s’agisse de cette rentrée montréalaise, de son rapport avec les collègues du métier ou de ses prochains engagements sur les scènes lyriques du monde, son enthousiasme pour l’art lyrique est total, bien qu’elle affectionne aussi le concert et le récital.

Après y avoir chanté dans Thaïs de Jules Massenet en 2003 et La clemenza di Tito de Mozart en 2006, elle est «excitée» par son retour à la salle Wilfrid-Pelletier. Elle est d’autant plus heureuse que Le nozze di Figaro est son œuvre préférée et que la musique de Mozart incarne pour elle la beauté dans la simplicité. Et le personnage de Susanna lui ressemble beaucoup! Si elle a déjà interprété ce rôle très exigeant à l’Opéra de Lille et au Théâtre des Champs-Elysées, elle dit vouloir être extrêmement bien préparée. L’un de ses grands défis sera de maîtriser le texte de récitatifs qui ne sont pas, en raison de coupures, les mêmes que ceux qu’elle a dû apprendre pour les productions précédentes. Elle rappelle aussi que la présence sur scène de Susanna est constante durant les quatre actes de l’opéra. Le rôle s’avère en conséquence, au plan vocal, un véritable marathon auquel l’a par ailleurs bien initiée sa vie antérieure d’athlète en nage synchronisée. Son souci sera aussi de préserver sa voix jusqu'au dernier acte pour réussir l’air «Deh vieni, non tardar» qui demeure, selon elle, l’une des plus belles pages du répertoire lyrique.

L’attitude enthousiaste de l’artiste est aussi perceptible lorsque l’on aborde le rapport qu’elle entretient avec ses collègues. Dans l’attente du début des répétitions à Montréal, Guilmette anticipe le plaisir de travailler avec celle dont elle sera la camériste et qui incarnera la comtesse Almaviva, la soprano lyrique américaine Nicole Cabell. Elle n’a que de bons mots pour sa collègue québécoise Julie Boulianne qui se transformera en Cherubino pour l’occasion. Son intérêt pour les approches que proposeront le chef Paul Nadler et le metteur en scène Paul Diamond pour la production montréalaise est sincère. Elle manifeste toujours de l’ouverture à l’égard des femmes et hommes de théâtre qui réclament des interprètes lyriques une réelle théâtralité, l’ont fait sortir de sa «zone de confort» et lui ont permis de mieux incarner ses personnages.

Depuis qu’elle s’est distinguée au Concours Voix nouvelles en 2002 et au Concours musical international Reine Élisabeth en 2004, Guilmette a foulé les planches de plusieurs grandes maisons d’opéra d’Europe. Les grandes scènes lyriques françaises ont fait appel à la soprano québécoise et celle-ci a déjà chanté à l’Opéra national de Paris et à l’Opéra comique, comme elle a également été l’invitée du Théâtre de la Monnaie à Bruxelles. À l’Opéra de Munich, elle a joué dans l’opéra Le Dialogue des Carmélites de Poulenc sous la direction musicale de Kent Nagano, une production parue en DVD de la maison BelAir Classiques au printemps 2011.

L’un des grands moments de sa prochaine saison lyrique sera la création en France de l’opéra Amadis de Gaule de Johann Christian Bach, d’abord à l’Opéra Royal de Versailles et ensuite à l’Opéra comique. Elle incarnera aussi Eurydice dans l’opéra Orphée et Eurydice de Christoph Willibald Gluck à la compagnie Nantes-Angers Opéra, et sera Hébé et Fatime dans Les Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau à l’Opéra de Toulouse. Et sa prochaine Susanna portera des costumes de Jean Paul Gaultier dans Le nozze di Figaro à l’Opéra de Montpellier.

Guilmette dit vouloir privilégier le mélange de l’opéra, du concert et du récital dont elle «se nourrit personnellement et musicalement». Elle a réservé jusqu’ici une place de choix au concert et au récital, tant en Europe qu’au Québec, comme en font foi ses apparitions avec l’orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam et avec Les Violons du Roy, auxquels elle a été associée en 2009 pour leur 25e anniversaire. La soprano a également chanté en concert cet été au Festival de Lanaudière et au Festival international du Domaine Forget. Durant la prochaine saison, elle sera la soliste du Gloria de Poulenc au Théâtre des Champs-Élysées.

Si l’on veut entendre Guilmette sur disque, son enregistrement d’Airs chantés sur étiquette Ambroisie permettra d’apprécier son talent dans des mélodies de Hahn, Poulenc et notre Lionel Daunais. Elle a aussi enregistré deux programmes Haendel avec Andreas Scholl (Il duello amoroso et Ode pour l’anniversaire de la reine Anne) sur la prestigieuse étiquette française Harmonia Mundi. Que réserve l’avenir à cet égard? On peut espérer que le programme Musiques de femmes, comprenant des mélodies de la regrettée Jeanne Landry, qu’elle a conçu et présenté au Palais Montcalm en 2010, soit pérennisé par le disque. Sans doute la soprano voudra-t-elle, comme elle me le confie, commémorer l’œuvre d’un grand mélodiste français dont on célébrera en 2012 le 75e anniversaire de la mort.

L’opéra ne saurait être mieux servi par des personnes qui, comme Guilmette, valorisent le travail et souhaitent s’inscrire dans la durée. Elle tient à acquérir le respect de son milieu et veut éviter d’être une étoile filante. Mais pour celle dont l’étoile brille déjà dans l’espace lyrique, l’avenir devrait réserver de grands moments.

Hélène Guilmette interprétera le rôle de Susanna dans l’opéra Le nozze di Figaro présenté par l’Opéra de Montréal à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts les 17, 20, 22 et 24 septembre, horaire variable. operademontreal.com


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