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La Scena Musicale - Vol. 16, No. 2 octobre 2010

Royauté de l’orgue

Par L. H. Tiffany Hsieh / 1 octobre 2010

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L’orgue. Frédéric Champion l’a découvert à l’âge de 15 ans. Bálint Karosi a failli devenir un clarinettiste professionnel avant d’en devenir amoureux. Konstantin Volostnov se dit lui-même « conteur » lorsqu’il en joue. Michael Unger dit qu’il ne l’a pas choisi, mais qu’il a été choisi par l’orgue.

Tous lauréats récents de prestigieux concours d’orgue internationaux, ces quatre virtuoses se réunissent à Montréal pour le Rendez-vous des GRANDS, un concert de gala spécialement organisé ce mois-ci par le Concours international d’orgue du Canada (CIOC), créé par John Grew, titulaire de la chaire d’orgue de l’Université McGill, avec le soutien de gens d’affaires intéressés. Ces quatre jeunes organistes joueront à la basilique Notre-Dame, où se trouve un instrument construit par Casavant Frères doté de 97 jeux et de plus de 9 000 tuyaux.

Frédéric Champion

Frédéric ChampionOrganiste français né à Lyon en 1976, Frédéric Champion a reçu de nombreux prix et récompenses pour son interprétation de la musique d’orgue du 16e au 21e siècle, parmi lesquels des premiers prix au Concours Minoru Yoshida de Tokyo-Musashino, au Concours international Gottfried Silbermann et, en 2008, au Concours international d’orgue du Canada, prestigieuse nouvelle compétition tenue à Montréal qui joue un rôle important dans la connaissance et la promotion de la musique d’orgue. F. Champion agit à titre de premier ambassadeur du CIOC dans le cadre de ses tournées en Amérique du Nord, en Europe et en Asie jusqu’à l’année prochaine.

Il est merveilleux d’être couronné gagnant, mais « il y en a toujours plus à apprendre, a déclaré F. Champion, qui vit près de Zurich, en Suisse. On apprend sur soi-même et sur bien des choses en jouant des instruments différents. »

Très tôt attiré par la musique, c’est en autodidacte que F. Champion se lance dans l’étude de l’orgue. En 1994, il intègre la classe de Louis Robilliard au Conservatoire national de Région de Lyon, avant de suivre les enseignements de Michel Bouvard au Conservatoire national supérieur de Paris, puis la classe de Jan Willem Jansen au Centre d’études supérieures de musique de Toulouse.

« L’orgue est un orchestre dont je suis le chef. J’ai choisi cet instrument à cause de la musique », explique l’organiste lauréat, dont les compositeurs de prédilection sont Bach, Ravel et Robin. Toutefois, « il faut comprendre les différents instruments avant de choisir et d’adapter ses programmes. Il existe beaucoup de types d’orgues et d’acoustiques, ce qui complique la vie. »

En plus de jouer de l’orgue, F. Champion s’est produit avec plusieurs orchestres et ensembles de musique vocale ou de chambre en tant que pianiste et claveciniste. Il a également composé et transcrit de la musique pour orgue seul, ainsi que pour orgue et percussions ou chœur.

Bálint Karosi

KarosiÀ l’instar de Frédéric Champion, Bálint Karosi a obtenu de nombreux prix, dont celui de la 16e édition du Concours international Johann Sebastian Bach à Leipzig en 2008. Ce musicien de 31 ans se spécialise dans l’interprétation historique. Il a commencé l’orgue à l’âge de 16 ans après avoir joué du piano pendant 10 ans et de la clarinette pendant six ans.

« J’ai grandi dans une famille très catholique et bien sûr, j’ai été exposé à beaucoup de musique d’orgue à l’église », déclare le natif de Budapest qui vit maintenant à Boston, où il est organiste et directeur de musique à la First Lutheran Church et joue de la clarinette ancienne avec l’ensemble Boston Baroque.

« Ma mère est cantatrice. À une occasion, elle donnait un concert à l’église historique de Saint-Matthieu, dans le château de Buda, et j’étais au balcon avec cet orgue énorme derrière moi. À ce moment, je lisais un livre sur J.S. Bach. Ces deux expériences m’ont amené à l’orgue. Il n’y a rien de mieux que de belles orgues dans une belle cathédrale gothique. »

Bálint Karosi s’est perfectionné à l’Académie Liszt de Budapest, au Conservatoire supérieur de Genève et au Conservatoire d’Oberlin dans l’Ohio. L’an dernier, il a reçu le prix Prima Primissima Junior de musique, une reconnaissance qui honore les artistes les plus distingués de son pays natal.

« J’essaie d’être très expressif sur l’orgue. La virtuosité ne compte pas tant que cela pour moi. Communiquer au public ce que la musique signifie pour moi, voilà mon objectif, dit-il. J’aime l’improvisation par-dessus tout, surtout dans le style baroque. Il faut connaître énormément de théorie, d’harmonie et de contrepoint et savoir transposer ses idées d’un seul coup. C’est un travail de toute une vie, un défi toujours renouvelé, une source d’inspiration inépuisable, et c’est très gratifiant sur un bel instrument. »

Chaque concours est unique et a ses propres mérites, mais B. Karosi estime que le concours Bach de Leipzig a une immense réputation en Europe, surtout en Allemagne. « Cela m’a vraiment aidé à me faire un nom et à ouvrir des portes, dit-il. Je suis toutefois très prudent. C’est un grand honneur d’être le gagnant du premier prix, mais il ne faut pas que cela devienne la seule chose qui compte à long terme. C’est un bon début, je dirais. »

Konstantin Volostnov

Konstantin VolostnovKonstantin Volostnov estime que sa victoire l’a aidé à devenir plus confiant quand il s’agit de communiquer des idées musicales.

Natif de Moscou, il a commencé à jouer de l’instrument quand il avait 11 ans. Maintenant âgé de 30 ans, il a remporté le premier prix au Concours de Schramberg (Allemagne) en 2008, au Concours A.F. Goedicke de Moscou en 2008 et au Concours d’orgue de St. Albans au Royaume-Uni en 2009.

« Bien entendu, j’ai commencé par étudier le piano, mais avec l’influence de la musique de Bach et celle de ma mère qui m’a montré l’instrument à la télévision, l’orgue a pris la place centrale dans mon esprit », se remémore K. Volostnov.

Il a entamé ses études en musique d’orgue dans la classe de Maria Potashnikova à l’École de musique Serge Prokofiev. De 1994 à 1999, il a étudié au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou, où il a étudié l’orgue auprès d’Alexei Parchine. Il en aime plusieurs, mais son orgue préféré entre tous est celui de Cavaillé-Coll dans la grande salle du Conservatoire.

« Plus on joue d’instruments différents, plus on s’adapte rapidement, déclare  le jeune organiste. Au début, bien sûr, on doit être attentif au son et à l’acoustique. Ensuite, on passe à la technique. »

Lorsqu’on lui demande s’il y a beaucoup de pression à jouer aux côtés d’autres lauréats au Rendez-vous des GRANDS, Volostnov répond que malgré la compétition, l’événement est surtout au service de l’art de l’orgue. « De tels événements peuvent produire des rencontres agréables avec les confrères; en s’écoutant les uns les autres, on peut apprendre quelque chose de nouveau », dit-il.

Michael Unger

Michael UngerSeul Canadien des quatre organistes en vedette, Michael Unger ne connaît pas personnellement Volostnov et Champion (il a fait la connaissance de Karosi il y a quelques années), mais il est sûr « qu’il y aura une certaine pression à partager cet événement avec des talents d’un tel calibre ».

Originaire de Thornhill, dans la banlieue de Toronto, M. Unger a commencé le piano à l’âge de six ans et l’orgue à 13 ans, mais ce n’est qu’à la faculté de musique de l’Université Western Ontario qu’il est devenu fasciné par cet instrument.

« J’adore les couleurs, le répertoire, et la possibilité de jouer dans des lieux uniques et historiques, raconte-t-il. J’ai toujours aimé la musique baroque, mais plus j’en apprends sur les autres époques et répertoires, plus j’ai envie d’en apprendre. Pour l’instant, la musique de Robert Schumann me plaît particulièrement. »

Ces jours-ci, l’organiste de 31 ans se produit régulièrement en solo et comme chambriste à l’orgue et au clavecin. Il vit à Rochester, dans l’État de New York, où il est directeur musical de l’église luthérienne. Ce professeur et compositeur publié termine son doctorat à l’école de musique Eastman.

Pour couronner le tout, en 2008 M. Unger s’est vu décerner le premier prix de la 6e édition du Concours international d’orgue de Tokyo-Musashino et du concours national des jeunes organistes de concert de l’American Guild of Organists.

« Les concours de musique sont de nature très subjective. Si les jurys ou les circonstances avaient été différents, les résultats auraient peut-être été également différents, dit-il. C’est un honneur et un plaisir d’être choisi, mais également intimidant. Je pense que certains ont décrit mon jeu comme “élégant”, un adjectif qui me plaît bien. »

Vous pouvez être juge de tout cela et plus encore le 16 octobre prochain à 20 heures, au Rendez-vous des GRANDS à la basilique Notre-Dame. Le concert sera projeté en direct sur grand écran, offrant au public une expérience unique.

Une première sur la scène musicale du monde, le Rendez-vous des GRANDS est un prélude au Concours international d’orgue du Canada, qui aura lieu du 5 à 16 octobre 2011. Le concours est ouvert aux organistes de toutes nationalités âgés de moins de 35 ans. Seize d’entre eux seront choisis pour se produire devant un jury composé de neuf sommités afin de briguer des prix prestigieux. En plus d’être doté d’une bourse, le premier prix vaudra au lauréat un contrat de développement de carrière, un enregistrement de CD sous étiquette ATMA Classique et des récitals.

www.ciocm.org


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