Catherine Potter, interprète du bansuri Par Bruno Deschênes
/ 14 juin 2007
English Version...
L’intérêt à l’égard des
musiques du monde passe notamment, chez certains musiciens
occidentaux, par le désir d’apprendre un instrument de musique inconnu.
Certains optent pour un cheminement sans concessions : non seulement
ils s'initient à un nouvel instrument, ils tiennent aussi à pénétrer
une culture musicale et esthétique différente de la nôtre pour pouvoir
l’exprimer, si possible, à la façon des musiciens du pays d’origine.
C’est le cas de Catherine Potter, interprète montréalaise du bansuri
indien spécialisée dans la musique de l’Inde du Nord, et connue
grâce à son ensemble, Duniya Project, dont le premier CD est sorti
en mars 2006. Catherine Potter a étudié et s'est perfectionnée auprès
du célèbre flûtiste indien Hariprasad Chaurasia, considéré comme
le plus grand représentant de la flûte dans la musique classique de
l’Inde du Nord.
En 1980, Potter part à la conquête
de l’Asie. Après un séjour de 18 mois en Asie du Sud-Est, elle se
retrouve à Bénarès où, par l’entremise d’une amie étudiant
le sitar, elle se met à la flûte indienne, le bansuri. C'est
le coup de foudre. Elle, qui joue déjà de la flûte et du piano, se
découvre une grande affinité avec l’esthétique et la pensée musicales
du continent indien. C’est l'époque où, à Bénarès, on peut assister
à des concerts de grands maîtres comme Ravi Shankar, Zakir Hussain
ou Ali Akbhar Khan, et baigner littéralement dans la musique indienne.
En 1983, en route vers le Canada,
elle rencontre Hariprasad Chaurasia. Il se trouve à Amsterdam pour
donner un concert. Potter lui fait part de son désir d’étudier plus
à fond le bansuri. Chaurasia l’invite à venir étudier avec
lui en Inde. Elle hésite, souhaitant d'abord acquérir une formation
académique solide. Elle ira cependant le rejoindre sept ans plus tard,
en 1990, après avoir décroché deux baccalauréats (dont un en jazz),
et avoir entrepris une maîtrise en ethnomusicologie avec un mémoire
consacré au jeu et au style innovateur de Hariprasad Chaurasia. Tous
les deux ou trois ans, sinon davantage, elle fait le voyage pour étudier
avec Chaurasia. Lorsqu'il est en tournée au Canada ou aux États-Unis,
elle le rencontre pour suivre des cours et l’accompagner dans ses
concerts, au tanpura. Depuis 1998, c'est au bansuri et
non au tanpura qu'elle accompagne son maître. Pour Catherine,
il est extrêmement formateur d’être avec lui sur scène, de l’entendre
improviser avec le joueur de tabla, d'observer attentivement
le rapport qu’il établit avec l’auditoire. « Chaurasia est un
homme d’une grande simplicité profondément humain et sans prétention
», dit-elle. Avec lui, elle n’a pas appris seulement à jouer d’un
instrument et à interpréter de la musique, elle a aussi pénétré
le sens spirituel et humain de la musique.
Catherine Potter a donné des concerts
en Inde. Elle raconte qu'en 1997, le Dr Vidyadhar Vyas, alors directeur
du département de musique de l’Université de Mumbai, l’avait invitée
à donner un concert. À la fin, il s'adresse aux membres de l’auditoire
: « J’espère que vous réalisez que cette musique ne vous appartient
pas. Elle appartient à ceux et celles qui l’étudient et y travaillent.
Ce que Catherine a fait en est la preuve. » Cette observation d'un
grand musicien indien peut surprendre, surtout à l’égard d’une
Occidentale, car la musique indienne est généralement l’apanage
des hommes.
Potter commence sa carrière d’interprète
du bansuri en 1987. En 1995, elle donne ses premiers concerts
de musique classique indienne et en 1997 lance un premier CD de ragas
indiens. En 2002, elle fonde le Duniya Project, créant un langage musical
personnel qui incorpore à la musique indienne les sonorités jazz,
africaines, indonésiennes et contemporaines. À la suite du lancement
du CD en Inde, sous étiquette Music Today, Duniya Project fera une
tournée en Inde et en Europe en janvier et février 2008.
De son côté, Hariprasad Chaurasia
fera une visite très attendue à Montréal le 28 juillet 2007 dans
le cadre d’un concert au Théâtre Outremont où il sera l’invité
de l’ensemble Duniya Project en première partie; en deuxième partie,
Catherine se joindra à lui dans une prestation de musique classique
de l’Inde du Nord. Ils seront accompagnés de Subhankar Bannerjee
au tabla. n
Nomade
Kleztory
Amerix, 2006, AM1006, 64 m 22 s
Le klezmer est une musique traditionnelle
juive aux origines hassidique et ashkénaze qui a vu le jour en Europe
de l’Est au Moyen Âge. Au début du XXe siècle, il subit
un important déclin mais connaît bientôt un nouvel essor grâce aux
nombreux immigrants juifs qui viennent s’établir aux États-Unis.
Après la Deuxième Grande Guerre, le rayonnement du klezmer diminue
de nouveau pour recommencer à s'étendre au début des années quatre-vingt
sous l'impulsion de la jeune génération, avide de renouer avec la
tradition. Le Québec est connu pour abriter d’excellents groupes
de musique klezmer. Kleztory est indéniablement l'un des meilleurs.
À preuve le magnifique CD qu’il a enregistré en collaboration avec
I Musici de Montréal en 2004, et qui me semble être l'un des meilleurs
CD de 2004 en musique du monde. Kleztory joue une musique remplie de
joie de vivre et de verve. Mais elle exprime aussi le combat pour la
vie, avec tout son désarroi et toute sa passion! English Version... |
|