Zakir Hussain Par Bruno Deschênes
/ 12 décembre 2005
English Version... Zakir
Hussain est sans contredit le musicien indien le plus populaire actuellement.
Ravi Shankar a fait connaître la musique indienne en Occident ; je dirais, sans
trop me fourvoyer, que Zakir Hussain l'a fait apprécier sous toutes ses formes.
Il faut dire que ce dernier est le fils de Alla Rakha, le tablaïste de Ravi
Shankar pendant plus de 30 ans. Lors du festival de jazz de Montréal de l'été
2005, il nous a offert une série de quatre concerts lors desquels ses fans
pouvaient se gaver de son talent. Le premier concert, aux côtés de Sultan Khan
au sârangî, la vièle indienne, était plus classique. Lors du deuxième se sont
joints deux autres percussionnistes, nous présentant une forme modernisée de la
musique indienne classique. Lors des deux autres concerts, il était joint par
des musiciens jazz bien connus, dont John McLaughlin.
J'ai assisté aux deux premiers concerts. Ce qui m'a
frappé lors du premier des deux est que Zakir Hussain était ouvertement à
l'avant-plan alors que, traditionnellement, le joueur de tabla est un
accompagnateur. Hussain démontre un charisme et un charme hors du commun. Il
envoûte carrément son auditoire.
Je lui ai demandé s'il y avait, selon lui, une
différence entre un auditoire indien et un auditoire occidental lors de ses
concerts de musique indienne classique. On sait que la musique indienne est
plus intimiste et que l'improvisation du musicien est influencée par les
réactions de l'auditoire. Voici sa réponse :
« Aujourd'hui, sûrement pas. Il est certain que les
auditoires occidentaux réagissaient différemment à la musique indienne il y a
25 ans. Lorsque les premiers musiciens indiens donnaient des concerts en
Occident, cette musique était nouvelle; on désirait la connaître. Aujourd'hui,
c'est impensable de considérer que personne n'ait entendu de musique indienne.
Elle est devenue une musique familière en Occident et ce, depuis au moins 40
ans. Tout le monde a pu l'entendre à un moment ou l'autre, a appris à la
connaître, en a acheté des CD. Lorsque je donne un concert avec Sultan Khan, le
joueur de sârangî avec qui je vais jouer ce soir (soit le 30 juin 2005),
l'auditoire qui y assiste connaît les instruments et notre spécialité.
Aujourd'hui, l'auditoire sait très bien à quoi s'attendre de notre musique.
Il y a 25 ans, c'était différent. J'ai surtout
constaté une différence au cours des 10 à 15 dernières années. Les auditoires
d'aujourd'hui sont intelligents et connaisseurs. En assistant à un concert de
musique indienne, ils savent très bien à quoi s'attendre. En fait, les
auditoires d'aujourd'hui connaissent toutes les musiques de la Terre. Les
mélomanes de musique du monde iront entendre Youssou N'Dour, John McLaughlin,
Ravi Shankar, Ali Fatah Khan, Zakir Hussain ou Jack de Johnnette, ou n'importe
quel autre musicien. L'auditoire sait à quoi s'attendre avec chacun de ces
musiciens. Cela nous rend la tâche plus facile, peu importe le type de musique
que l'on joue. Plusieurs musiciens indiens qui viennent jouer en Amérique pour
la première fois sont surpris de découvrir comment les auditoires occidentaux
connaissent la musique indienne, et même connaissent leur nom. Aujourd'hui,
tout est beaucoup plus facile pour nous, musiciens du monde. » *
CD
Sunda Song
Evergreen Club Contemporary Gamelan
Naxos World, 76061-2 (56 min 53 s)
***** $$$$
Parmi
les diverses musiques du monde, le type de musique qui a attiré le premier les
compositeurs de musique d'avant-garde est la musique de gamelan et ce,
dès le début des années 1970. Le gamelan demeure, encore aujourd'hui, une
musique de prédilection pour les compositeurs de musique actuelle ; un nombre
restreint de compositeurs écrit pour d'autres instruments non occidentaux. On
remarque cependant une évolution du côté de ces orchestres : ils sortent des
universités pour devenir des ensembles professionnels à part entière. Le
Evergreen Club Contemporary Gamelan de Toronto est un de ces ensembles qui a
été formé en 1983 par huit musiciens canadiens de formation classique. Leur
répertoire provient du style de la région de Sunda, dans l'ouest de Java, qui
diffère des styles javanais ou balinais qui sont plus connus en Occident. Ce CD
nous offre un mélange de pièces traditionnelles et d'œuvres originales écrites
par des membres de l'ensemble. Il est fascinant d'entendre des musiciens se
départir de leurs propres racines pour en intégrer qui ne sont aucunement les
leurs.
Livre
The Single Tone, A Personal Journey into Shakuhachi
Music
Christopher Yohmei Blasdel
Printed Matter Press, Tokyo, 2005, 167 p.
Le
shakuhachi est la célèbre flûte de bambou japonaise qui a été l'apanage
exclusif des moines Zen bouddhistes pendant plus de 400 ans. Son répertoire
comprend principalement des pièces solos, mystiques, introspectives,
méditatives et austères. Cet instrument a un très grand attrait en Occident. On
estime à plusieurs milliers les occidentaux l'apprenant. Dans ce livre,
l'américain Christopher Yohmei Blasdel raconte son parcours de l'apprentissage
de cette grande tradition si différente de la nôtre. Blasdel présente le récit
de sa découverte de cet instrument, de son cheminement, de son combat avec un
instrument difficile à apprendre, mais aussi avec une culture stricte et
exigeante, qui possède un esthétisme musical souvent contraire à la nôtre. Il
est maintenant entre deux chaises : il ne sera jamais totalement Japonais, mais
il n'est plus vraiment Occidental. La culture japonaise l'a changé. Ce qui
frappe à la lecture de ce livre est cette honnêteté de cœur et je dirais même
la candeur qui anime profondément le choix d'une vie par l'apprentissage d'un
instrument de musique.
En bref
Deux sites pour ceux qui désirent acheter des
instruments de musique du monde :
www.larkinthemorning.com
www.worldmusicalinstruments.com
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