LSM-ONLINE-LOGO2JPG.jpg (4855 bytes)

 

Current
Home
Calendar
Back Issues
LSM Issues
LSV Issues
Features
WebNews
Newswire
Throat Doctor
Interviews
Concert Reviews
CD Critics
Books Reviews
PDF Files

Links
Audio
Midi
LSM
About LSM
LSM News
Distribution
Advertising
Guest Book
Contact Us
Site Search
Web Search

LSM Online Reviews / Critiques


Critiques de La Scena Musicale Online. [Index]


Alexander Kobrin, vainqueur du Van Cliburn 2005

Par Stéphane Villemin / le 6 juin 2005


FORT WORTH. Dimanche 5 juin, 2005. En décernant la médaille d’or à Alexander Kobrin, le jury du douzième concours international de piano Van Cliburn couronne le parcours d’un pianiste russe de 25 ans, élève de Lev Naumov au conservatoire Tchaikovsky de Moscou. Bien que slave, Kobrin rappelle plutôt certains pianistes modernes de l’Ouest, au jeu distancié, hautement concentré et toujours maîtrisé. La beauté apollinienne de ses phrasés rivalise parfois avec un jeu impérial aux allures marmoréennes. Cette après-midi, il a interprété la deuxième Sonate de Rachmaninov de façon mémorable. Hier soir, dans la Rhapsodie sur un thème de Paganini du même compositeur, il révélait le même souci de méticulosité, ainsi qu’un grand soin porté à la progression de la pièce. Son concerto de Mozart, jeudi soir, fut un exemple de bon goût, dans laquelle Kobrin se plaça en retrait, snoba toutes les sirènes des afféteries pour laisser parler la pièce tout en respectant son style. En revanche, il n’a pas convaincu dans les redoutables Études symphoniques de Schumann, encore moins dans l’Ondine de Gaspard de la Nuit, curieusement maniérée avec des rubatos déplacés, fait sans doute de mauvais conseils dans l’art subtil de Ravel.

En donnant la médaille d’argent à Joyce Yang, qui se voit également décerner le prix de la meilleure interprétation en musique de chambre (Quintette de Dvorak) ainsi que le prix de la meilleure interprétation d’œuvre contemporaine (Scarlatti Cadences + Brainstorm de Currier), le jury reconnaît les talents incontestables de cette jeune Sud-coréenne de 19 ans. Charismatique, cette pianiste l’est assurément, avec en outre une pointe d’espièglerie et de théâtralité qui ne peut laisser le public indifférent. C’est avec une joie de vivre non dissimulée qu’elle a dynamisé l’orchestre (son troisième concerto de Beethoven aura été le plus inventif et le plus frais de ce que l’on aura pu entendre cette semaine) et les membres du quatuor Takacs avec lesquels elle ne faisait qu’un. Elle a également révélé sa propension à prendre des risques (deuxième concerto de Prokofiev) sans jamais céder ni au manque d’intelligibilité, ni à la rugosité sonore qu’ont parfois les pianistes trop pressés.

A la troisième place, la Chinoise Sa Chen représente la plus grosse surprise. Cette féline aux doigts d’acier brille surtout pour son art pyrotechnique. En excellente pianiste, elle fut encensée pour son interprétation du Gaspard de la Nuit lors de préliminaires. Son jeu impeccable, manucuré relève d’une force tellurique à faire rougir plus d’un pianiste de le gente masculine. Avec ses tempos effrénés et ses lots d’effets, l’ensemble demeure pourtant superficiel.

Parmi les concurrents qui n’ont pas été admis en finale, Sodi Braide, Jie Chen, Gabriela Martinez et Maria Mazo reçoivent un prix spécial. Quant aux Italiens, Roberto Plano et Davide Cabassi et à la Chinoise Chu-Fang Huang, sans aucun prix, on se rappellera d’eux comme des trois finalistes du Van Cliburn de 2005.

Déception donc pour Roberto Plano qui s’était pourtant inscrit en poète du piano dès les premières épreuves. Plus artiste que pianiste, par un geste qui procède du cœur (mais également de l’esprit), il effleure le piano à la recherche de l’essence des sons et des mélodies. Sa démarche peut revêtir des contours intellectualisés au point que l’extase de l’instant représente un obstacle à l’architecture de l’ensemble : chaque mesure ne mérite pas toujours la densité d’une journée alla Léopold Bloom. Personnalité portée à la rêverie d’un promeneur solitaire, Plano semble s’accommoder plus aisément à l’exercice en solo voire en musique de chambre. Mangé par l’orchestre lors du deuxième concerto de Rachmaninov, il devint le capitaine Ahab du concours sans avoir eu l’occasion de prendre sa revanche.

Ouverte jusqu’à la fin, cette édition aura tenu le public, les critiques et les bloggers en haleine jusqu’au dernier moment. Kobrin est devenu le nouveau roi dont on entendra beaucoup parler, au moins dans les trois années à venir. Et pour la suite que l’on se rassure : il possède de sérieux atouts pour se bonifier avec le temps.


Critiques de La Scena Musicale Online. [Index]

 

 

 

(c) La Scena Musicale 2001