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LSM Online Reviews / Critiques


Critiques de La Scena Musicale Online. [Index]


L’irrésistible badin du Voyage à Reims

Par Stéphane Villemin / le 18 février 2002

Mercredi 24 janvier 2002, Hummingbird Center for the Arts, Toronto

Il viaggio a Reims, Gioacchino Rossini
Maddalena: Sonya Gosse
Don Prudenzio: Alain Coulombe
Antonio: Gregory Dahl
Madama Cortese: Elena Voznessenskaia
La Contessa di Folleville: Ekaterina Morozova
Modestina: Colleen Skull
Don Luigino: David Pomeroy
Il Barone di Trombonok: Patrick Carfizzi
La Marchesa Melibea: Viktoria Vizin
Il Conte di Libenskof: Michael Schade
Don Alvaro: Olivier Laquerre
Don Profondo: Gustav Belacek
Lord Sidney: Ayk Martirossian
Corinna: Henriette Bonde-Hansen
Delia: Shannon Mercer
Il Cavalier Belfiore: Michael Colvin
Zefirino: Roger Honeywell
Gelsomino: Peter Collins
Choeurs et orchestre de la Compagnie de l’Opéra du Canada, Richard Bradshaw
Mise en scène: James Robinson. Coproduction avec le New York City Opera

Voyage Reims

Dire que Plombières-les-Bains, perle des Vosges au même titre que Vittel et Contrexéville, était le St-Tropez français du XIXè siècle peut laisser songeur lorsque l’on connaît l’agreste de l’endroit. Tout le gotha parisien s’y retrouvait et faut-il rappeler que Louis Napoléon y invita Cavour afin de préparer l’affaire italienne, et même Bismark quelques années plus tard. En 1825, à l’époque du Voyage à Reims, l’Europe des petits princes revigorée par Talleyrand et Metternich, venait y partager les frivolités de la Restauration. A l’Europe napoléonienne, se substituait celle des nations que Rossini dépeint, non sans une pointe d’un chauvinisme français (y aurait-il pléonasme?) circonstancié puisque l’opéra fut écrit en l’honneur du couronnement de Charles X.

Comme les robes de bal qui ne se portent qu’une fois, la partition du Voyage à Reims fut consignée dans un placard, après que Rossini l’eût recyclée et remaniée pour donner Le Comte Ory, créé en 1828. C’est dans les années 1970 qu’un musicologue canadien débusqua le manuscrit à la Bibliothèque du Conservatoire de Paris, ouvrant la perspective d’une renaissance qui se concrétisa avec la représentation historique dirigée par Abbado au Festival de Pesaro de 1984.

Plus que la quintessence de l’opéra rossinien, Le Voyage à Reims en est une excroissance caricaturale. Tout pour le chant, rien pour la dramaturgie: tel est ce tribut payé à la gloire du bel canto. Avec quatorze premiers rôles et seulement quatre seconds, il représente un casse-tête pour les directeurs artistiques, doublé d’un gouffre pour les argentiers.

La représentation torontoise rencontra l’esprit de l’oeuvre en bien des points. Quoiqu’il eût pu s’avérer plus brillant encore, le concours de chant inhérent aux joutes vocales qui animent une bonne part de l’opéra, n’en était pas moins pétillant de jeunesse et de naturel. Au sein d’une distribution sans géniales divas mais sans mauvaises voix, le jeu des comparaisons tournait clairement à l’avantage de la soprano danoise Henriette Bonde-Hansen (Corinne) qui démontra un sens avéré du phrasé et de la couleur dans le registre médium, contrastant avec le brio de ses aigus virtuoses. Chez les hommes, Gustav Belacek, dont l’accent slave trahissait ses origines, composa pourtant le personnage de Don Profondo avec un sens profond de la ligne musicale, disputé sans doute pas Michael Schade en Comte de Libenskof, qui présentait l’avantage d’une diction plus claire. Vétiller sur les détails vocaux serait certes passer à côté de la réussite de l’ensemble, mais ce Gran Pezzo Concertato a 14 Voci, comme le nommait Rossini, avec son sublime épisode a capella, révéla à cet instant paroxystique un regrettable inaboutissement. Sortir la tête de sa partition eût permis à Richard Bradshaw de contrôler la fusion de l’ensemble et de mieux soigner les transitions.

Les décors du New York City Opera et la mise en scène inspirée de James Robinson tirèrent profit avec intelligence des longueurs de la pièce. Avec un sens édifiant de la facétie n’ayant pour égal que la finesse des jeux de rôles composés dans une même veine d’élégance spirituelle, cette production du Voyage à Reims avait quelque chose de la badinerie sociale parisienne. Viatique de la bonne humeur et du dilettantisme de luxe, elle fut un rempart momentané contre les syllogismes de l’amertume qui nous guettent un peu plus chaque jour.


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