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William Christie, ce Français

Par Stéphane Villemin / le 22 février 2001

Dimanche 11 février 2001, Roy Thomson Hall, Toronto
Marc-Antoine Charpentier: Actéon
Henry Purcell: Didon et Enée
Actéon: Paul Agnew, Diane: Sophie Daneman, Junon: Stéphanie d'Oustrac, Arthébuze et Daphné: Gaëlle Méchaly, Hyale: Camilla Johansen.
Didon: Stéphanie d'Oustrac, Enée: Nicolas Rivenq, Belinda: Sophie Daneman, magicienne: Michel Puissant, première sorcière: Gaëlle Méchaly, deuxième sorcière: Camilla Johansen
Orchestre des Arts Florissants dirigé par William Christie
Mise en espace: Vincent Boussard. Robes: Christian Lacroix


William Christie

La juxtaposition de Charpentier et de Purcell, quoique surprenante de prime abord, s'est totalement justifiée à plus d'un titre. Natif de Buffalo, William Christie désormais citoyen français revenait presque à ses sources en nous offrant ce reflet des deux cultures, plus qu'un symbole pour le Canada. Moins prosaïquement, ces deux opéras qui s'opposent par le style se répondent par leurs livrets puisque la tragédie qui se tisse au second acte de Didon fait clairement référence au funeste destin d'Actéon. Enfin la pièce de Charpentier, sorte de divertissement galant destiné à distraire la cour du Roi-Soleil, s'est avérée une excellente ouverture pour aiguiser les oreilles et les yeux au plat de résistance qu'est Didon.

Les mises en scène de Boussard, aussi sobres qu'efficaces, ont mis en relief l'action dramatique et les chanteurs avec une étonnante économie de moyens. Dans Didon, la scène des furies qui raillent les musiciens de l'orchestre, crécelles à la main, est rien moins qu'hilarante, tout comme la magicienne de Michel Puissant. Dans Actéon, les oppositions d'humeur font l'objet d'une recherche constante. La danse de la verte Arthébuze autour du ruisseau imaginaire illustrant la feinte et le badin (non, Gaëlle Méchaly ne joue pas à la marelle) tranche avec la rouge Junon au visage voilé qui, immobile, réserve son ire pour la fin comme pour mieux le concentrer.

Passant de Junon à Didon, Stéphanie d'Orsac s'impose par une forte présence scénique allant de pair avec une voix pleine, ronde et puissante permettant de passer du pianissimo au fortissimo sans devoir forcer. Elle s'inscrit déjà dans la digne succession de Guillemette Laurens. Les répliques de Sophie Daneman ne manquent pas non plus de légéreté et de style. William Christie dirigeant le tout mentalement (moralement aurait-on dit à Topaze) depuis son clavecin chante ici et là avec un choeur mais semble surtout encourager les individualités et les libertés des musiciens. Chaque instrumentiste et chanteur veut partager sa joie de jouer, ce qui fait des merveilles dans les solos mais quelquefois des dégâts dans les choeurs. And Carthage flames tomorrow par exemple n'était pas en place. Bien sûr, l'esprit l'emporte sur la forme. L'éclat et l'émotion sont plus forts que ces décalages que l'on ne remarque plus qu'en dehors de l'hexagone. Comme si William Christie atteint d'amnésie avait mis son passé dans sa poche afin de devenir un Français plus vrai que nature..


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