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The Lebrecht Weekly

 

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Une grandeur rarement égalée (le Barbican center)

By Norman Lebrecht / le 7 mars 2002


[English Version: A rarely seen grandeur]

Le 7 mars 2002, par Norman Lebrecht et Giles Worsley

Lors de son ouverture, le Barbican center, complexe de résidences privées et de lieux consacrés à l'art a attiré de sévères critiques. 20 ans après, les mentalités ont bien changées, mais le Barbican aussi.

C'est toujours une erreur que de juger un lieu d'exécution lorsqu'il est neuf. Cela prend du temps pour que l'acoustique s'installe et davantage encore pour que le bâtiment conquière une place dans les habitudes du public. Vingt ans est une bonne période de rodage, un cap que le Barbican Center vient juste de franchir, modestement et avec un minimum de fastes.

La tour du pouvoir : le Barbican a le sens du drame, comme un profond défilé entouré de falaises escarpées. Il a connu un grand succès en tant que lieu d'habitation. Les problèmes sont arrivés lors de l'adjonction de centre culturel.

Le Barbican a toutes les raisons de rester modeste. Construit a partir d'une excavation béante dans le sol à l'aide de matériaux qui paraissent obsolescents en plein jour, le plan du centre d'art s'est révélé plus tortueux encore que le dédale des ruelles de Hampton Court, et la salle de concert résonne dans les passages pp du bruit des pots d'échappement et des chasses d'eau.

Bien que bâti en 1982, ses déficiences rappellent le malaise d'une industrie mal remise du choc, d'une Grande Bretagne mise à genoux. Ces vices de forme ont été le sujet de soins constants depuis deux décennies. Il est à présent possible d'entrer dans le Barbican avec l'espoir de trouver son siège avant l'entracte. L'acoustique du concert a été nettement améliorée l'année dernière après 7 millions (11 millions d'Euros) de réfection. L'éclairage n'a rien d'une luminosité viennoise, et il faudrait qu'une météorite perfore les plafonds pour améliorer l'obscurité lugubre du vestibule. Cependant, par contraste avec son rival civil invalide, le centre naufragé d'état de la South Banque, le Barbican est parvenu à se créer une niche spécifique au sein du marché culturel rapidement changeant de Londres.

Sa rédemption est née d'un changement d'orientation au cours de ses années de jeunesse. La Ville de Londres avaient conçu ses 153 millions comme un "cadeau à la nation" destiné à devenir un haut lieu de la culture. Sous la direction artistique de Graham Sheffield, le Barbican est devenu au contraire un leader dans l'ajustement et le remplissage de son agenda. Ses espaces grouillent aujourd'hui de World music, de jazz et d'art postmoderne. Le London Symphony Orchestra domines certes admirablement sa salle de concert, mais la Royal Shakespeare Company est sur le départ, près d'être remplacée par l'expression d'un drame européen plus contemporain. La tradition est remise en question et se recompose. Le Barbican, cerné de lieux interlopes, semble plus jeune et plus vivant que le Centre Pompidou à Paris et le Kennedy Center à Washington, ses presque contemporains.

Faire abstraction de sa chrysalide de béton requiert d'importants efforts de volonté et d'imagination. La salle de concert, à la première audition s'est révélée catastrophique. Claudio Abbado, alors directeur artistique du LSO, a demandé un revêtement de bois autour de la scène pour humaniser le son. Il disparaîtra pendant des mois après que cela ait échoué. Rafael Kubelik s'est battu en répétition pour extraire un peu de chaleur brahmsienne d'un orchestre pourtant de bonne volonté, hissant quelques musiciens sur des estrades pour qu'il puisse les entendre. Le cycle de Kubelik eu lieu devant une salle à moitié vide, et il ne revint jamais.

Le LSO termina avec un déficit de 10 pence le cycle Berlioz-Tippet de Colin Davis, avec chaque concert répété deux ou trois fois. Je suis à l'époque allé voir le manager, Peter Hemmings. Il était assis à une table vide, attendant que le téléphone sonne pour une offre d'emploi ou une saisie d'huissier. Par chance, il fut appelé par Los Angeles pour fonder une compagnie d'Opéra, et le LSO s'est remis les pieds à l'étrier sur le devant de la scène nationale grâce à la direction astucieuse de Clive Gillinson

Henry Wrong, le premier patron du Barbican, n'arrêtait pas circuler dans les accoutrements les plus excentriques, tout comme les lavabos en marbre des Toilettes pour dame avec leur dispositif intégré d'incinération des objets hygiéniques. Alors que les designers s'extasiaient, l'éclairage, la chaleur et les tuyauteries tapaient dans l'oeil. Le successeur de Wrong, Detta O'Cathain, a passé son temps à se battre avec les ensembles d'interprètes. Il a fallu le civilisé John Tusa, un ancien présentateur et chef du service monde de la BBC, pour réhabiliter pièce par pièce le centre, et la tache est loin d'être finie.

Tusa voudrait ôter les affreux revêtement gris et autres ornements "de style" de la dernière redécoration. Il veut de meilleurs accès, un guichet que les spectateurs puissent retrouver sans chien d'aveugle et une transformation de l'éclairage. Cela va coûter 17 autres millions, mais l'un des succès majeurs du Barbican a été sa capacité de transformer la Ville de Londres en le troisième mécène culturel national, en parvenant à lui soustraire près de 70 millions de livres par an. Les pères de la Cité feront ce qu'il faut pour que tout rentre en ordre. Tusa a signé à nouveau pour trois ans, et le futur semble dégagé pour lui.

Si cela peut se lire comme un classique de l'esprit britannique triomphant de l'adversité, c'est exactement ce que représente le Barbican. Sa leçon a été bien et largement comprise. Je peux vous assurer que nous ne verrons jamais renaître l'un de ses semblables.

Aucune salle de concert dans ce pays ne sera confiée à l'avenir à un architecte sans qu'un acousticien ne puisse exercer son droit de veto. Simon Rattle a instauré ce principe à Birmingham, et il a payé à Glasgow, Manchester, Basingstoke et dans bien d'autres endroits. Le Barbican est le dernier grand exemple à ne pas suivre pour construire une salle de concert.

C'est aussi le dernier centre culturel que nous avons la chance de voir se réaliser. Le concept d'une Gesamkunstgebau - un bâtiment consacré à l'ensemble des beaux arts - a fait son temps. Le concept a été dépassé par un nouvel éclectisme,par notre réticence à nous faire mener par le bout du nez par des conservateurs et par notre soif de nous abreuver à différentes sources de culture. Les "centres culturels" ont un ton pédagogique qui offense l'esprit cultivé. Ils appartiennent à un univers d'haltes-garderies. Le public, comme le Barbican, a grandi dans les 20 dernières années et l’enjeu est à présent de se faire plaisir, et non pas de s'effondrer sous le poids des ans.



Traduction effectuée par le DESS Musique Sorbonne (Paris). Vous pouvez accéder au site de l'organisme en cliquant sur le lien suivant http://admuSorbonne.free.fr.

Le DESS d'administration et de gestion de la musique de l'Université Paris IV Sorbonne forme chaque année une vingtaine de responsables qui opéreront dans le domaine de la culture et de la musique classique en particulier, tant dans le domaine privé (orchestres, industries du disque) que dans le domaine public. La promotion actuelle est soutenu par AD'MUSES, association des anciens du DESS Musique Sorbonne.

[English Version: A rarely seen grandeur]


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