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La Scena Musicale - Vol. 8, No. 7

Les sentiers du jazz - Le facteur IKS

Par Marc Chénard / 3 avril 2003


«Le jour où je produirai deux disques semblables, ce sera le temps pour moi d'arrêter de faire de la musique », déclare d'emblée le bassiste électrique Pierre-Alexandre Tremblay. Leader de la formation montréalaise IKS, un quintette dont l'instrumentation mi-électrique, mi-acoustique semble tout à fait coulée dans le moule du jazz fusion, ce musicien et compositeur au verbe facile ne tient pas particulièrement à se faire étiqueter de la sorte. Fondé en 1996, cet ensemble a tracé un parcours assez remarquable : non seulement a-t-il produit quatre disques sous sa propre étiquette (Ora), mais il effectué deux séjours outre-Atlantique, dont un long périple de trois mois au Sénégal en 2001. Cette aventure africaine fait justement l'objet de son plus récent enregistrement, « Le Journal de Sable » (avec un clip en sus), un DVD et, cerise sur le gâteau, un film documentaire présenté en première le 2 mai prochain, durant le festival Vue d'Afrique.

Non sans l'aide de notre vénérable festival du jazz – qui a toujours eu un faible pour les musiques électrifiées –, cette formation s'est produite régulièrement sur ses grandes scènes extérieures, des occasions que le leader estime plus efficaces pour développer un public que les seuls concerts en salle. Toujours à l'affût de nouveaux auditoires, le groupe a aussi parcouru la ville l'automne dernier dans le cadre de l'initiative « Jouer dans l'île ». Puisant dans ses expériences sur le continent africain, l'ensemble a conçu un programme en fonction d'un jeune public, adapté pour la circonstance par le guitariste Sylvain Pohu (et seul autre membre de la formation d'origine). « On n'a pas coupé les coins sur la musique, affirme Pierre-Alexandre Tremblay, et on jouait avec pas mal d'intensité par moments, mais les enfants aimaient ça, plus que leurs parents qui, eux, étaient surpris des réactions de leurs petits. »

Si les deux années précédentes ont permis à ces cinq musiciens entreprenants de se faire connaître chez nous, celle en cours leur permettra de se déplacer vers des horizons plus lointains. En juin, le quintette se rendra dans l'Ouest canadien pour participer à quatre festivals, prélude à une grande tournée européenne qui les conduira dans neuf villes, dont La Haye, Montreux, Pori (en Finlande), Umbria (en Italie), les deux Vienne (la française et l'autrichienne), Molde (en Norvège) et Istambul.

Avant d'amorcer leur grande conquête internationale, ils proposent un concert spécial le 5 avril au Club Soda : inscrite dans le cadre des événements Jazz à l'année du FIJM, cette prestation se déroulera avec sept invités, autant des jeunes de la relève que des valeurs sûres, Charles Papasoff en tête de liste. Reprise en quelque sorte d'un programme donné il y a deux ans, cette nouvelle version comprendra des pièces du groupe et d'autres de ses invités. Toujours en avril, les cinq complices gagneront le studio pour réaliser leur prochain enregistrement ; si l'on se fie aux dires du leader, ce sera une surface très pleine, peut-être un double, en raison de la quantité de nouveau matériel dont il dispose. Par ailleurs, le saxophoniste du groupe, le ténor Sean Craig, présentera son propre disque intitulé « Under Glass » à la mi-mai, un quintette avec batterie, guitare et deux contrebasses. Comme son nom est dérivé de la lettre X et que celle-ci symbolise le plus souvent l'inconnu, cette formation semble pointer dans cette direction, du moins musicalement, mais, ce faisant, elle est résolue à percer le voile de l'anonymat sous lequel beaucoup trop de nos musiciens évoluent.

IKS en concert : le 5 avril à 20 h au Club Soda. Info sur le groupe : www. iksperience.com

Orchestre National de Jazz de France

Dir. Paolo Damiani

Charméditerranéen

ECM 1828

Véritable institution musicale en France, l'Orchestre National de Jazz (ONJ) a vu le jour dans les années 80, sous le règne du gouvernement Mitterand. Chose remarquable, le personnel de cet ensemble se renouvelle tous les deux ou trois ans, à l'arrivée d'un nouveau chef. Par le passé, la maison de disques Label Bleu avait publié la majorité de ses enregistrements, mais voici que sa dernière mouture se présente sous la prestigieuse étiquette allemande ECM. Titre révélateur s'il en est, « Charméditerranéen » nous plonge tout de suite dans l'ambiance festive d'une fanfare italienne, toute en tambours et en trompettes. Mais ce virage méridional, pour ainsi dire, ne surprend pas vraiment puisque la direction musicale relève ici du violoncelliste italien Paolo Damiani, le premier non-français à obtenir ce poste. Deux invités spéciaux se joignent aux 11 musiciens de cet orchestre réduit, en l'occurrence le joueur d'anches Gianluigi Trovesi (sax alto et clarinette), auteur d'une suite de six pièces, la « Sequenza Orfiche », et le joueur d'oud Anouar Brahem, qui empreint le tout des sonorités caractéristiques du Moyen-Orient. Même si le climat musical est bien défini, la musique ne tient pas qu'à cela : les compositions s'inscrivent tout à fait dans le créneau du jazz orchestral européen, qui mise beaucoup sur des arrangements bien ficelés et interprétés sans bavure aucune. Par-ci, par-là, un soliste fait preuve de brillance, entre autres le saxophoniste soprano François Jeanneau (qui assume lui aussi une part de la direction musicale du groupe) et Médéric Colignon, qui se laisse aller dans son solo de cornet amplifié électroniquement dans la pièce-titre de cet enregistrement, la plus aventureuse et satisfaisante des 15 plages garnissant cette généreuse surface de plus de 76 minutes. En dépit de sa durée, ce copieux programme saura retenir l'attention des amateurs de grandes formations de jazz modernes. Tout ce qu'il faut souhaiter maintenant, c'est de voir l'ONJ dans nos parages un de ces jours. À quand la tournée canadienne ?

On Stage

As in March, April looks to be incredibly busy on the Montreal music scene. Among other events, the Winter-Spring schedule of the Convergences 2003 series, launched last fall by Productions Traquen'Art, has two shows on tap: At 9 p.m. on April 1st, Amsterdam's own ICP Orchestra (Instant Composers Pool) will be at La Salla Rosa for its return engagement, a year and half after its sold-out Montreal premiere performance. Pianist Misha Mengelberg leads this group of nine highly skilled improvisers (piano, two saxes, trumpet, trombone, violin, cello, and bass) anchored by the formidable drumming of Han Bennink (who is worth the price of the ticket just by himself).

On Sunday April 6, there is a Montreal-Amsterdam music meeting in the offing at the Casa del Popolo when ICP's trombonist Wolter Wierbos and bassist Ernst Glerum return to the city for a first-time encounter with Montreal's own slide meister Tom Walsh and drummer Thom Gossage. For information and ticket purchases : 396-3388. Paul Serralheiro


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