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La Scena Musicale - Vol. 8, No. 6

Les droits d'auteur : l'envers de la création

Par Sophie-Natacha Robichaud / 2 mars 2003


La symphonie est achevée. Le compositeur s'y est complètement dévoilé, transformant la musique en une oeuvre personnelle. Le restera-t-elle longtemps ? Après tout, les efforts intellectuels pour produire une oeuvre ne méritent-ils pas à son instigateur de conserver la paternité de sa réalisation ? La réponse à ces interrogations n'est pas si évidente.

Les étapes pour protéger une symphonie sont les mêmes que pour toute création originale, qu'elle soit littéraire, théâtrale ou musicale. Les arts s'apprécient, mais trop souvent se plagient aux dépens d'un auteur inconscient de l'utilisation indue de sa création. Or les mécanismes légaux devant la multiplication des formes de copiage ne cessent de se raffiner au profit des auteurs. Aussi, les différentes associations d'artistes et d'auteurs sont devenues de puissants groupes de pression, habiles dans leur mandat de représentation.

Trois droits font la loi

Pour le compositeur, pourtant, l'exercice de la protection de ses droits peut être déroutant. Pour mieux saisir le processus, il faut d'abord comprendre que la notion de droits d'auteur sur une oeuvre musicale couvre, en vertu de la Loi sur les droits d'auteur, le droit de reproduire ou de copier (dans le cas où l'on ferait une photocopie non autorisée de la partition de la symphonie), le droit de reproduire la pièce et, enfin, le droit de l'exécuter. Ce dernier droit permet, par exemple, au compositeur d'autoriser l'Orchestre symphonique de Montréal à mettre la pièce au programme.

La protection d'une oeuvre ne garantit par contre aucunement de plagiat ou d'exécution non autorisée de la pièce musicale. La Commission des droits d'auteur du Canada ainsi que les associations professionnelles ne font pas office de policiers. La Commission constate plutôt l'existence des droits et facilite le recours devant les tribunaux en cas de litige sur la paternité d'une oeuvre couverte par des droits d'auteur reconnus. De leur côté, les associations gèrent les divers droits d'auteur à titre de mandataires auprès des compositeurs.

Le compositeur soucieux d'assurer la reconnaissance des droits sur son oeuvre peut choisir entre les deux démarches suivantes : gérer lui-même ses droits ou obtenir un certificat d'enregistrement de son oeuvre auprès du Bureau des droits d'auteur, une agence de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. Il s'avère cependant que, la majorité du temps, les compositeurs s'en remettent à une association de l'industrie.

Les sociétés de gestion : on s'occupe de vos affaires

Ces intermédiaires agissent en temps que sociétés de gestion. Nombreuses, elles se spécialisent selon la forme, artistique ou médiatique, par exemple, ou selon le droit défendu. Pour les fins de protection de la nouvelle oeuvre symphonique évoquée précédemment, les organismes pertinents seront les sociétés de droits d'exécution et de reproduction.

Pour être protégé, le compositeur devra donc devenir membre d'une de ces sociétés. Au Canada, l'organisme compétent en matière de droit d'exécution est la SOCAN. Cette société perçoit les droits de licences sur les oeuvres exécutées, en conformité avec les permis, et répartit les redevances à ses membres. Selon madame France Lafleur, directrice de la section québécoise de la SOCAN, les membres issus du milieu de la musique contemporaine représentent une partie marginale de la clientèle, mais la protection du droit d'exécution demeure pertinente dans leur cas. Sur le plan du droit de reproduction, la SODRAC, la Société du droit de reproduction des auteurs compositeurs et éditeurs du Canada, négociera en faveur du compositeur les ententes pour la reproduction mécanique de la symphonie et redistribuera les redevances. La SPACQ, la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec, pourra aussi assister le musicien dans ses démarches.

Ces sociétés, en plus de leurs services respectifs, offrent à l'auteur une représentation de ses intérêts auprès des instances gouvernementales et servent de liens entre les membres.

Dans l'éventualité où la symphonie est jouée en concert ou enregistrée, le compositeur devra se questionner sur la pertinence des conventions de chaque aspect du régime de protection des droits d'auteur.

Les mécanismes des droits d'auteur et les associations gravitant autour de cet enjeu visent en bout de ligne le même but : favoriser la création et l'appréciation des oeuvres par le public en reconnaissant, de façon officielle, l'artisan.


(c) La Scena Musicale 2002