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La Scena Musicale - Vol. 5, No. 4

Le droit de reproduction mécanique

Par Jimmy St-Germain / 1 décembre 1999

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Beaucoup de gens ont de la difficulté à comprendre le concept de droit d'auteur. Cette difficulté se retrouve tant du côté des créateurs -- les auteurs-compositeurs -- que du côté des utilisateurs d'oeuvres musicales -- les compagnies de disques, les réseaux de radio et de télévision et les producteurs de spectacles.

Le droit d'auteur se subdivise selon les trois types d'utilisation possible d'une pièce musicale : le droit d'exécution publique, le droit de reproduction mécanique et le droit de reproduction graphique, tels que définis ci-dessous.

* Le droit de reproduction mécanique permet au créateur de revendiquer une redevance lorsque sa pièce est enregistrée. On emploie le mot mécanique afin de souligner la nécessité d'utiliser un mécanisme pour faire jouer la pièce, tel que le CD, le disque, de vinyle ou DVD, la cassette, la vidéocassette, et même le papier perforé (qui permettait aux pianos mécaniques de jouer automatiquement).

* Le droit d'éxécution publique permet à un auteur-compositeur de revendiquer une redevance lorsque sa pièce est jouée. Lorsque vous entendez de la musique (soit à la radio, à la télévision, sur scène ou dans un endroit public), celui-ci reçoit, normalement, une redevance pour cette utilisation.

* Le droit de reproduction graphique permet à un auteur-compositeur de revendiquer une redevance lorsque sa pièce est écrite dans un document. On parle ici de la partition ou du texte de la chanson, ou des deux à la fois.

Le droit de reproduction mécanique

Le droit de reproduction mécanique est un sujet « chaud » de nos jours, à cause de l'émergence du réseau Internet qui rend accessible, depuis quelques années déjà, des quantités colossales d'information. L'augmentation récente des vitesses de transmission et l'efficacité de la norme de compression MPEG3 (familièrement, MP3) permet maintenant à qui le désire de se procurer et de rendre disponibles des pièces musicales, et ce, sans beaucoup d'efforts. La qualité sonore du format de compression MP3 est similaire à celle obtenue à la lecture d'un CD sur votre appareil à la maison (il y a cependant une différence, et les puristes la remarqueront). Finalement, qui peut résister à la gratuité apparente de pièces musicales pour lesquelles on payerait si on se les procurait en cassettes ou en CD? Pour toutes ces raisons, ce format est rapidement devenu un standard de facto.

On commence cependant à entendre la grogne des compagnies de disques et des auteurs-compositeurs. Pourquoi sont-ils mécontents? A-t-on raison de les croire lorsqu'ils prétendent se faire voler quand quelqu'un télécharge une chanson au moyen d'Internet? Après tout, il ne s'agit pas d'un objet comme un livre ou un CD. Comment peut-on dire qu'un fichier ou une chanson appartient à quelqu'un?

Le concept de droit d'auteur permet à un créateur de revendiquer un droit de possession sur une création immatérielle. Voici pourquoi.

Il doit s'agir du résultat d'un travail. Il est évident qu'une personne a le droit d'être rémunérée pour un travail, même si le résultat est intangible. Si quelqu'un d'autre désire utiliser le fruit de ce travail, il doit demander au détenteur du droit une autorisation qui prend alors la forme d'une licence de reproduction. Lorsqu'une chanson se retrouve sur un CD, c'est donc que la compagnie de disques s'est procurée une licence auprès de l'auteur-compositeur. Plus précisément, les compagnies achètent une licence pour la quantité de disques fabriqués et incluent le coût de celle-ci dans le prix à l'unité des disques qu'elles vendent.

En retour, les compagnies versent au créateur, pour chaque chanson, une petite somme d'argent qu'on appelle une redevance (royalty en anglais). Cette somme (actuellement 0,075 $) est multipliée par le nombre de fois que la chanson est enregistrée. Si le disque est vendu à un million d'exemplaires, c'est 75 000 $ par chanson que recevra l'auteurcompositeur.

Beaucoup de gens ont tendance à associer le roman à son support, c'est-à-dire le livre. Il en va de même pour la musique. On dit : « J 'achète un disque, j'achète une cassette. » C'est vrai, mais ce n'est pas tout à fait exact. Lorsque vous achetez un CD, vous achetez surtout une licence qui vous donne le droit de posséder un (et un seul!) enregistrement de toutes les chansons du disque. Le support lui-même, soit le disque ou la cassette, ne coûte que quelques sous.

Si les compagnies de disques nous font payer cette licence dans le coût du CD, alors pourquoi s'inquiètent-elles de la prolifération des MP3? Des sommes importantes sont mises en jeu pour enregistrer les chansons : les musiciens et les techniciens doivent être payés, on doit inclure les coûts de location du studio et d'instruments parfois dispendieux. Le produit fini, la bande-maîtresse, servira à la duplication des CD et cassettes vendus partout dans le monde. La compagnie détient un droit sur cette bande-maîtresse et, tout comme les auteurs-compositeurs, elle voit le fruit de son travail lui filer entre les doigts lorsque des copies de MP3 sont faites sans autorisation.

On comprend maintenent pourquoi les créateurs et les compagnies de disques sont inquiets de l'apparente gratuité des fichiers MP3. Peu d'auteurs-compositeurs et de compagnies de disques peuvent compter sur des ventes se chiffrant dans les millions. Toutes les sources de revenus sont donc les bienvenues.

Comme il peut rapidement devenir difficile pour les auteurs-compositeurs de contrôler toutes les utilisations de leurs oeuvres musicales, une société de droit mécanique a été créée pour faire ce travail en leur nom : il s'agit de la SODRAC, laquelle récolte auprès des compagnies de disques les redevances dues à ses membres.

Le prochain article parlera du droit d'éxécution publique.


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