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La Scena Musicale - Vol. 4, No. 4

Book Reviews / Critique des Livres

Par Pierre M. Bellemare / 1 décembre 1998


Robert Savoie : Figaro-ci, Figaro-là — Mémoires d'un baryton voyageur.
Les éditions Varia (ISBN 2-922245-08-X) 263 pages

Book-Savoie.jpg (34395 bytes)Le baryton Robert Savoie a eu une triple carrière dont il a raison d'être fier. Il s'est d'abord fait connaître comme chanteur. Cette partie de sa carrière, vouée essentiellement à l'opéra, a débuté dans un petit théâtre de Milan, où le Montréalais d'origine acadienne était allé étudier en 1952, pour se poursuivre à Montréal, à une époque où l'art lyrique occupait une place très importante dans la programmation de la radio et de la télévision de Radio-Canada. De retour en Italie en 1958, il y évoluait à la limite de l'illégalité, se faisant passer pour un Italien, sous le nom de Roberto Savoia. Sur le point d'être découvert, en 1961, il se rend à Londres, pour se joindre à la troupe permanente du Covent Garden (jusqu'en 1967), avant de se faire pigiste international, avec un pied-à-terre à Montréal (jusqu'à sa retraite de la scène, en 1981).

Parallèlement à ses activités de «baryton voyageur», son intérêt pour les aspects techniques et administratifs des évènements culturels l'amenait, dès 1976, à accepter le poste de directeur des activités artistiques de la ville de Lachine, à la demande du maire Guy Descary, poste qu'il devait occuper pendant 20 ans. Enfin, et de plus en plus depuis quelques années, il se consacre à l'enseignement du chant, ayant formé, entre autres, son propre neveu, le baryton Gaétan Laperrière.

Michèle Gaudreau, qui a aidé Robert Savoie à mettre en forme ses souvenirs, a fait un excellent travail : en dépit de petites inexactitudes ici et là, le livre se lit avec un intérêt constant du début à la fin.

Le chanteur est un conteur plaisant et, tout en mettant l’accent sur les événements, son récit abonde en anecdotes, tant dans le corps du texte que dans des encadrés. Toutes ces anecdotes sont amusantes, mais certaines plus que d'autres. Un bon exemple : dans une production de Tosca à Marseille, où les partenaires de son Scarpia n'étaient pas des meilleurs, juste au moment où son personnage s'écroule, frappé au cœur du poignard du soprano, un spectateur installé au poulailler lance d'une voix forte et avec son plus bel accent marseillais : «Quel dommage, on a tué le meilleur!»

L'anecdote est typique, en ceci qu'elle montre M. Savoie à son avantage, tandis que les autres membres de la distribution (dont il a la gentillesse de taire les noms) en prennent parfois pour leur rhume... Ce n'est pas qu'il aime médire des autres. Au contraire, il dit même beaucoup de bien de tous ceux et celles de ses collègues qu'il nomme et, en particulier, de ses grands amis de toujours, les André Turp, Joseph Rouleau, Yoland Guérard et autres. Il rend également un hommage ému et reconnaissant à l’ex-maire Jean Drapeau, dont il souligne les efforts répétés pour établir à Montréal une maison d'opéra permanente. En fait, la seule personne dont il dise à la fois des choses peu flatteuses et qu'il nomme par son nom, c'est la mezzo americane Marilyn Horne. Cela s'imposait presque : on imaginerait mal les Mémoires d'un baryton sans le portrait haut en couleur d'une diva!

Mais il y a dans son livre plus que des souvenirs et des anecdotes. Dans un chapitre spécial, Savoie dispense des conseils avisés sur des moyens pratiques d'entretenir la voix. Dans une autre section, il expose sa vision de l’avenir de l'opéra au Québec, sous forme d'un plan détaillé de création d'une académie nationale de chant qui serait épaulée par une troupe d'opéra permanente.

L'ouvrage, solidement relié, contient beaucoup de photographies en noir et blanc, ainsi qu'une liste des rôles interprétés par le chanteur. - Pierre M. Bellemare

(c) La Scena Musicale 2002