Au rayon du disque

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L’Orchestre national de Jazz de Montréal
Dans la forêt de ma mémoire–Disques Atma CD2 2730

Premier-né de cette formation orchestrale montréalaise toutes-étoiles, ce disque présente la création d’une œuvre commandée à la pianiste attitrée de l’ensemble, Marianne Trudel. Enregistrée en concert en mai 2014, sa composition, dont le titre donne son nom au disque, est une suite en sept parties, incluant de courts segments d’introduction à deux mouvements. Outre sa distribution de seize musiciens, l’ensemble accueille la trompettiste Ingrid Jensen, qui brille à chaque intervention, la chanteuse Anne Schaefer, qui donne la note lyrique, et Christine Jensen dirigeant le tout. Les résultats sont tout à fait probants, autant sur le plan de l’enregistrement et du mixage que sur le plan musical. En effet, la compositrice a relevé le défi d’orchestrer la suite avec imagination, créant des textures évocatrices d’un Gil Evans, mais ouvrant le tout à des improvisations plus libres. À 42 minutes, cependant, la surface est un peu brève et on aurait bien aimé un autre morceau ou deux joués lors de cette excellente soirée consacrée aux femmes compositrices. De plus, les applaudissements entre les pièces troublent l’écoute et on aurait pu les éliminer au montage. Pour l’essentiel, l’ONJ–Mtl offre un jazz orchestral moderne de haut calibre.

 » En concert : 1^er juillet – Scène General Motors, 21 h et 23 h (FIJM); 2 août –Spectacle de clôture du Festival de Lanaudière, Amphitéâtre Fernand-Lindsay (14 h); Duke Ellington’s Sound of Love – Avec chef invité : Mathias Rüegg; 8 août – Festival d’été d’Orford (20 h)

Paal Nilssen-Love Large Unit
Erta Ale – PNL Records PNL025CD

Un coffret de trois disques totalisant trois heures d’écoute fait beaucoup de musique à digérer, surtout par un collectif musical qui aime casser la baraque à coups de magmas sonores. Les deux premiers disques ont été réalisés en studio, le troisième devant un public enthousiaste au festival de Moers en Allemagne. Les quatre longs titres de ce disque sont également entendus sur les deux autres, et un morceau (Round About Nothing) est repris trois autres fois. On se demande donc, pourquoi cette surenchère pour une improvisation essentiellement collective avec un minimum de matériel écrit ? Le batteur et âme dirigeante de cette formation, Paal Nilssen-Love, compte parmi les chefs de file de la musique improvisée européenne et demeure l’un des plus puissants cogneurs sur son instrument–et il faut l’être quand on croise le fer avec Peter Brötzmann ou Ken Vandermark. Mais il rallie aussi ses dix musiciens avec des passages composés qui permettent de mener la musique sur d’autres terrains. Mais à notre époque où le disque compact est en perte de vitesse, on s’interroge sur la pertinence de produire de tels coffrets.

 » Suoni per il Popolo, 20 et 21 juin.

Roddy Ellias Trio
Monday’s Dream–Kwimu Music (Production d’artiste)

Dix compositions du guitariste Roddy Ellias défilent ici en 48 minutes et 11 secondes, les unes aussi détendues que les autres. La douceur de son propos relève autant de sa guitare acoustique que de l’accompagnement subtil du bassiste Adrian Vedady et du batteur Thom Gossage. La couverture, arborée d’une peinture abstraite en tons diffus de gris bleutés, représente bien l’ambiance de cet album tout en nuances, mais qui exige tout de même une attention d’écoute certaine. Compte tenu de sa réputation parmi les guitaristes locaux, il ne fait aucun doute que cette clientèle sera bien servie par l’offrande d’un musicien expérimenté, mais trop peu documenté sur disque.

 » FIJM–5 juillet, scène CBC

André Leroux
Synchronie-Cités–Disques Effendi FND140

Vivement attendu, ce second album du saxophoniste André Leroux à son nom sortait en début d’année. Produit en studio comme son prédécesseur Corpus Callosum (en 2011), cette nouveauté le présente en formations à géométries variables, un duo (avec le pianiste James Gelfand), un trio (avec Frédéric Alarie, b. et Christian Lajoie, btr.) en quartette avec piano ou guitare (Ben Charest), voire en quintette avec le tromboniste Mohammad Abdul Al Khabyyr. Sauf un bref aparté à la clarinette basse (sixième plage), il s’en tient au ténor, son arme la plus redoutable. Coltranien dans ses tripes, Leroux construit ses phrases en volutes sur tout le registre, incluant le suraigu et l’usage de multiphoniques (intégrées à son jeu sans doute par son travail au sein du quatuor de saxophones Quasar). Bien que ses acolytes lui donnent un bon soutien et qu’il leur accorde beaucoup de place, le chef offre les moments les plus forts, même dans l’ambiance plus contrôlée du studio. En attendant un album live de sa part, et on le souhaite, il aura l’occasion de faire lever cette musique davantage sur scène lors du festival.

 » FIJM, Série Jazz d’ici, 3 juillet, 18 h.

Cory Weeds
As of Now – Cellar Live CL10033

En février 2014, le saxophoniste vancouvérois Cory Weeds mit la clé à la porte de son club The Cellar pour se consacrer à sa propre musique et surtout à son étiquette de disques. Preuve à l’appui, cet album récent le présente dans son élément musical : du hard bop pure laine. Tous les ingrédients y sont : thèmes aux tons bluesy par-ci, harmonies modales par-là, le plus souvent défilant à tempo rapide. Le saxo semble avoir Dexter Gordon pour modèle, son assurance lui permettant même d’être un brin plus véloce. Dans d’autres mains, cela sentirait le réchauffé, mais Weeds est accompagné par un authentique praticien du genre : le pianiste Harold Mabern. Frisant les 80 ans, ce musicien joue avec une verve égale ou supérieure à n’importe quel jeune talent. Ses solos sur Edward Lee et Aon sont simplement haletants. Outre un standard obscur (Lost in the Stars), on compte six originaux typiques du genre et une reprise de la rengaine Pop Goes the Weasel, rhabillée ici de façon à faire presque oublier sa banalité. Même si Weeds ne passera pas chez nous cet été, comme le bassiste de cette séance, le pianiste fera son tour (accompagné du batteur Joe Farnsworth). Une rare occasion de voir un vrai maître du genre en action, son quartette arrondi par la bassiste Brandi Disterheft et le trompettiste Jeremy Pelt.

 » Bar Upstairs, le 30 juin.