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La Scena Musicale - Vol. 20, No. 6 avril 2015

Un printemps sans frontières

Par René-François Auclair / 1 avril 2015

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Le retour de la belle saison se prête à l’écoute de musiques festives et énergisantes. Voici des suggestions d’écoute célébrant les différentes facettes d’un printemps qui nous invite au voyage.

Les Symphonies
Schumann
Robert-Schumann-Philharmonie. Frank Beermann. CPO. 777536-2. 2010. 122 min 2 s.

On connait bien la symphonie « Le Printemps », composée en seulement quelques jours en janvier 1841. Mais toute l’œuvre symphonique de Schumann est un hommage vibrant à la belle saison. Sa musique regorge de santé et de vigueur, évoquant des scènes vivantes d’une nature qu’il chérissait. De l’appel de la forêt, en passant par les paysages magnifiques de la vallée du Rhin, Schumann nous convie à ses propres impressions d’un bonheur idyllique. Cette nouvelle édition préparée par le musicologue J. Draheim, met à jour le perfectionnisme du compositeur qui a donné des indications très précises sur ses derniers manuscrits révisés. Beermann en donne une lecture aérée, légère sans être frivole, qu’on reçoit comme une bouffée d’air frais. À découvrir.

Rhapsodies, Serenade, In the Mountain Country
Moeran (1894-1950)
Ulster Orchestra. Vernon Handley. Chandos 10235. 1988-89. 69 min 22 s.

Ernest John Moeran est un compositeur anglais d’ascendance irlandaise. Il vécut longtemps dans le Norfolk, fréquentant les gens ordinaires des pubs villageois. Il s’y assoyait en écoutant les folk-songs. Il collectionna ainsi plus de 150 chansons. Grand amateur de plein air, il parcourait à pied de grandes distances le long des côtes anglaises et irlandaises. Sa musique en est grandement inspirée. Elle est un amalgame de tradition et de modernité, évoquant à la fois les chansons d’un terroir près de ses racines et le souffle épique de grands paysages côtiers. La prise de son exceptionnelle de l’équipe Chandos traduit toutes les images verdoyantes et venteuses de cette musique qui nous appelle au voyage.

Drottningholmsmusiken
J. H. Roman (1694-1758)
Musique pour un mariage royal. Ensemble 1700 Lund. Göran Karlsson. CPO 777589-2. 2010. 62 min 12 s.

Le retour des jours heureux est souvent l’occasion de mariages. Celui qui a eu lieu à l’été 1744 au palais de Drottningholm a marqué toute l’histoire de la Suède. Le duc Frederik et la princesse Ulrika se marièrent en grande pompe. Les festivités durèrent quatre jours, et les musiciens semblent avoir été grandement occupés ! Roman, alors appelé le « Haendel de Suède », a composé un florilège de pièces exquises pour accompagner les repas et le cérémonial des dignitaires. Entre l’intimiste et le solennel, cette musique de qualité, souvent teintée d’une certaine mélancolie, est à la fois tendre et joyeuse. Ce petit ensemble suédois a soigneusement préparé ce bouquet au parfum du baroque. Irrésistible.

Quintettes avec 2 altos op. 60 et 62
Boccherini
Ensemble 415. Chiara Banchini. HMA 1901402. 67 min 49 s.

Ces ultimes pièces du maître italien, conçues alors qu’il traversait une grave crise personnelle et financière, laissent à peine filtrer la tristesse de ces jours difficiles. Au contraire, ces quintettes sont gorgés de soleil et des chaleurs de Madrid où Boccherini vécut longtemps comme compositeur de la cour. Ces jours heureux sont maintenant derrière lui et il doit chercher d’autres mécènes. Quelques pointes de nostalgie sont soulignées à travers une écriture toujours riche et élégante. Les allusions au flamenco et aux rythmes des castagnettes sont abondantes. Chiara Banchini et ses amis communiquent toute l’énergie solaire de cette musique irradiante de bonheur.

Les Quatre Saisons
Vivaldi
Version de Dresde avec instruments à vents. L’Arte dell’Arco. Federico Guglielmo. CPO. 777037-2. 56 min 24 s. (+Saisons de G.A.Guido)

Comme un inévitable retour du printemps, l’opus 8 de Vivaldi revient sans cesse à nos oreilles depuis sa redécouverte vers 1940. C’est sûrement l’œuvre la plus enregistrée de toute l’histoire du disque. Les musiciens italiens proposent ici une version enlevante, basée sur des spéculations bien légitimes. À la cour de Dresde, au 18e siècle, il était coutume d’ajouter des parties d’instruments à vent au gré des exécutions. À la lumière de ces pratiques historiques, les Saisons prennent ainsi de nouvelles couleurs. Cela fonctionne à merveille ! Quoi de plus évocateur qu’une flûte pour imiter le piaillement des oiseaux ou les sifflements d’une tempête. Le basson jappe, et les cors appellent pour la chasse ! Réjouissant. 

Poèmes symphoniques vol. 2
Johan Wagenaar (1862-1941)
Nordwestdeutsche Philharmonie. Antony Hermus. CPO 777933-2. 2014. 55 min 26 s.

Ce compositeur néerlandais peu connu a tenté, au tournant du 20e siècle, de faire connaître un art musical typiquement hollandais. Pour lui, la musique de son pays se qualifie de « joyeuse et simple, naïve, au style mélodique presque populaire et humoristique ». Malgré sa belle intention de se démarquer de la grande Allemagne, la musique de Wagenaar demeure de moindre intérêt. Il se rapproche plutôt des Scandinaves par des similitudes évidentes. Mêmes goûts pour de petits motifs inspirés d’un folklore national. Mis à part un certain romantisme désuet, le charme de son œuvre est relevé par de riches orchestrations vives et colorées. Une belle toile de musique primesautière et souriante à découvrir.

René François Auclair est aussi l’auteur d’un blogue, Le Parnasse musical. On peut entendre des extraits des œuvres suggérées dans cette chronique au www.leparnassemusical.com


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