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La Scena Musicale - Vol. 20, No. 3

Métropole culturelle : La nouvelle gouvernance culturelle

Par Hassan Laghcha / 1 novembre 2014

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Des membres du comité de pilotage du Plan d’action (2007-2017) lors du lancement du Coup d’œil 2013. De gauche à droite : M. Maka Kotto, M. Jean-François Lisée, Mme Manon Gauthier, M. Denis Coderre, M. Simon Brault, Mme Shelly Glover et Mme Manuela Goya. Photo Ville de Montréal
Des membres du comité de pilotage du Plan d’action (2007-2017) lors du lancement du Coup d’œil 2013. De gauche à droite : M. Maka Kotto, M. Jean-François Lisée, Mme Manon Gauthier, M. Denis Coderre, M. Simon Brault, Mme Shelly Glover et Mme Manuela Goya.

Jusqu’en 2005, la Ville de Montréal n’avait pas de politique culturelle en tant que telle », rappelle Manuela Goya, secrétaire générale du comité de pilotage du Plan d’action (2007-2017) Montréal, métropole culturelle. Par la suite, la mise en place d’une politique culturelle propre à Montréal devait conjuguer avec la pluralité des intervenants dans ce secteur. « Cette caractéristique intrinsèque au modèle fédéraliste avec ses différents paliers, fédéral, provincial et local, a créé la nécessité d’un plan d’action et d’une vision pour orchestrer et harmoniser les différentes interventions », dit cette responsable en expliquant le rôle assigné au comité de pilotage du Plan d’action lancé lors du grand Rendez-vous de Montréal, en novembre 2007.

Cette rencontre avait réuni quelque 1200 personnes pendant deux jours au Palais des congrès et permis aux gens de la culture et des milieux d’affaires d’exprimer toutes sortes de préoccupations par rapport à l’avenir de Montréal comme métropole culturelle. Résultat : un plan d’action échelonné sur dix ans, selon quatre priorités : l’accès plus large des citoyens à la culture, la promotion des investissements dans les infrastructures culturelles, le développement du financement des organismes artistiques et le rayonnement de Montréal au niveau provincial, national et international.

Sept ans et neuf élections plus tard

Depuis, il fallait veiller à ce que les objectifs du Plan d’action ne soient nullement affectés par les changements d’équipes politiques en place. « On a passé sept ans et neuf élections de toutes sortes, fédérales, provinciales, municipales », rappelle Mme Goya. Elle souligne l’une des forces du secteur culturel : « On ne peut pas ne pas être d’accord sur les principes en culture », dit-elle avant de décrire le fonctionnement des mécanismes de suivi dont s’est doté le secrétariat général du comité de pilotage. Le suivi des engagements pris est également assuré par un comité de coordination qui veille à surmonter les blocages éventuels. « Cette nouvelle forme de gouvernance culturelle fait ses preuves. D’ailleurs, son caractère novateur a été soulignée par l’Union européenne », signale la secrétaire générale. Le comité de pilotage est « une entité unique au Canada ».

Quartier des spectacles, premier test majeur !

Selon Manuela Goya, le projet du Quartier des spectacles (QdS) est le premier test majeur sur la clarté des engagements pris par les différentes instances, fédérale, provinciale et locale. « Montréal a réussi ce test admirablement », se réjouit-elle. La preuve, selon elle : « Sept ans après, l’Office national du film du Canada s’installe au QdS ! Une grande nouvelle qui atteste de la qualité du travail accompli depuis 2007. »

Cependant, il y a encore du pain sur la planche. Exemple : les bibliothèques. « On est en train de rattraper le retard historique et culturel en matière de bibliothèques qu’on avait par rapport au réseau anglais », indique Mme Goya. Elle souligne aussi que la métropole culturelle englobe également les quartiers culturels. À ce propos, elle énumère les nombreuses places publiques aménagées pour permettre le déploiement des expressions culturelles et artistiques et les nouvelles configurations des parcs pour faire la promotion de l’art public.

En résumé : « Quand la volonté est très forte, on finit par trouver les moyens ! Seulement, il faut être astucieux. Et surtout être convaincu qu’on ne peut plus se permettre de travailler seul ». Manuela Goya se réfère au principe de la physique quantique : « Le tout est plus grand que la somme des parties » pour dire le principe fondateur du travail du comité de pilotage.

« Bien entendu, les projets doivent être convaincants et surtout bien ficelés. » Elle admet que les gouvernements adoptent des critères de plus en plus exigeants. Toutefois, ces critères ne sont pas figés.

« On peut toujours repenser les critères, notamment lorsqu’il s’agit d’investissements de nature stratégique », note-t-elle, citant comme exemple le festival Complètement cirque. Ou encore, le soutien de 9,4 millions $ accordé à la compagnie de cirque Les 7 doigts de la main annoncé en juillet dernier par la ministre de la Culture Hélène David. La subvention permettra à cette troupe emblématique, très utile pour la renommée mondiale de Montréal comme capitale du cirque, de se doter pour la première fois d’un centre de création en plein Quartier des spectacles.

Changement de culture chez les gens d’affaires

« On observe un grand changement de culture au sein des milieux d’affaires », constate la secrétaire générale. Elle raconte comment, il y a dix ou quinze ans, les gens de culture ne supportaient pas d’entendre parler de gestion culturelle. « Ils criaient au meurtre ! Alors que les gens d’affaires, eux, ne savaient pas quel langage utiliser avec les créateurs. »

Aujourd’hui, les attitudes ont changé. La fameuse question de la rentabilité (ou non) de la culture ne se pose même plus. Avec 91 000 emplois directs en 2012, le secteur de la culture se situe parmi les principales industries et représente aujourd’hui 5,1 % de l’emploi total avec 56 000 travailleurs culturels.

« Ces changements ont fait qu’on ne parle presque plus de commandites, mais de partenariats entre les milieux d’affaires, d’une part, et les artistes et festivals, de l’autre. L’ère des conditions imposées est révolue », dit-elle, émerveillée du chemin parcouru en l’espace d’une décennie.

Montréal se fait-elle plus attrayante ?

À quelques années de la date butoir du Plan d’action (2007-2017), est-on en mesure de dire que la compétitivité culturelle et artistique de Montréal s’améliore ? Pour Manuela Goya, la réponse est un « oui » fier et entier – et les preuves sur les avancées de la métropole ne manquent pas. Exemple : la prédominance de Montréal en tant que ville d’accueil de congrès internationaux en Amérique. Elle se place pour l’année 2013 au premier rang du classement de l’International Meetings Statistics publié par l’Union des Associations Internationales (UAI). Elle devance ainsi, pour la troisième année consécutive, New York, Chicago et Rio de Janeiro ! À souligner également que Montréal, qui figure au Top 5 des villes interculturelles du réseau des villes européennes, assure la coprésidence de la Commission Culture de Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU), association de villes responsable de la mise en œuvre de l’Agenda 21 de la culture.

Côté performances des grandes institutions culturelles, l’exemple le plus édifiant actuellement, selon Manuela Goya, est donné par l’exposition La planète mode de Jean Paul Gaultier produite et mise en tournée par le Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). Cette exposition connaît un succès mondial retentissant et sera présentée en 2015 à Paris, après avoir été vue à Montréal, Dallas, San Francisco, Madrid, Rotterdam, Stockholm, Brooklyn, Londres et Melbourne.

L’expérience nantaise

« Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ce ne sont pas les grandes métropoles qui m’inspirent le plus, mais plutôt les expériences originales de certaines villes de taille moyenne comme Düsseldorf, Seattle et surtout Nantes ! » Manuela Goya aborde avec vivacité l’expérience de cette ville française qui ressemble à plusieurs égards à celle de Montréal. Notamment, le fait que Nantes, comme c’est le cas pour Montréal, a vu ses activités portuaires diminuer et prendre moins d’importance dans l’économie.

« Nantes avait les mêmes lacunes que Montréal, les Nantais tournaient le dos à leur fleuve la Loire, comme nous pour le Saint-Laurent », mentionne la responsable montréalaise et explique comment Nantes s’est ressaisie et a réussi sa renaissance. « La culture a été choisie par Nantes et son administration comme le fer de lance de sa relance. Il y a eu promotion de l’art public et les plans d’urbanisme ont été structurés autour des pôles culturels. » Inspirant !

375e anniversaire de Montréal : appel de projets

La Société des célébrations du 375e anniversaire de Montréal invite les créateurs à proposer des projets exclusifs qui laisseront des traces au-delà des festivités de 2017. Cet appel a été lancé lors d’une conférence de presse à laquelle ont participé le maire de Montréal, Denis Coderre, le ministre des Transports du Québec et ministre responsable de la région de Montréal, Robert Poëti, ainsi que le ministre de l’Infrastructure, des Collectivités et des Affaires intergouvernementales et ministre de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Denis Lebel.

 Les projets proposés doivent répondre aux critères suivants : être exclusifs, se tenir entre le 21 décembre 2016 et le 31 décembre 2017 et assurer des retombées socioéconomiques ou touristiques, tout en laissant un héritage au-delà de 2017. La Société souhaite recevoir les propositions des projets sur son site Internet.

À signaler qu’en 2015, un second appel sera lancé et concernera des projets à rayonnement plus local afin de célébrer le 375e dans les quartiers montréalais. « Les choix de programmation seront faits en fonction du retour sur investissement qu’ils généreront, tant sur le plan du nouvel élan de fierté et du rayonnement que des retombées socioéconomiques et touristiques », a déclaré France Chrétien Desmarais, présidente du conseil d’administration de la Société. Pour plus d’information : www.375mtl.com

Je vois Mtl, 120 projets citoyens

Le 17 novembre, la plateforme citoyenne Je vois Mtl, lancée récemment par des gens d’affaires et des acteurs de la communauté, organise à la Place des Arts un grand débat autour de 120 projets proposés par des citoyens. Mille Montréalais engagés participeront à cette consultation publique visant à donner un nouvel élan au Grand Montréal.

Les initiateurs de Je vois Mtl avaient invité les Montréalais à déposer, commenter ou appuyer des projets qui peuvent contribuer à la prospérité de la ville au moyen de cette plateforme web.

Je vois Mtl est née suite de la publication du rapport de BMO Groupe financier et du Boston Consulting Group intitulé Créer un nouvel élan à Montréal : 10 propositions pour un programme de relance. Les recommandations de ce rapport portent sur quatre chantiers prioritaires : Talent et compétences, Entreprises, Cadre de vie et Identité et aspiration. On y suggère notamment de doter Montréal d’un tableau de bord pour suivre les solutions mises de l’avant et mesurer leur impact. Le rapport recommande également d’adopter des indicateurs qui « permettraient de comparer la performance de Montréal avec celle des autres villes canadiennes ».


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