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La Scena Musicale - Vol. 20, No. 3

La nouvelle salle de concert Isabel

Par Marc-Olivier Laramée / 1 novembre 2014

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L'Isabel, vu du lac Ontario.

Les grandes institutions musicales du Canada renouvellent peu à peu leurs installations. Après la salle Koerner du Conservatoire royal de musique à Toronto et la Maison symphonique à Montréal, l’Université Queens, de Kingston en Ontario, fait de même. C’est sans surprise que plusieurs reconnaîtront des traits communs avec la nouvelle salle de Montréal, puisque c’est la même firme d’acousticiens, Artec, maintenant intégrée avec la firme Arup, qui a participé à la conception de la salle. S’ajoute à la conception une collaboration avec Snøhetta et N45 Architecture et Theatre Projects Consultants pour l’élaboration du plan de la salle.

L’Université Queens voulait offrir un espace multifonctionnel pour ses étudiants en musique, mais aussi en cinéma et médias, en art dramatique ainsi qu’en beaux-arts. Le complexe jonglerait alors avec les fonctions de production et d’enseignement. Il comprend la salle de concert, un studio théâtre, une salle de projection, une salle de répétition polyvalente, un studio de production ainsi que des espaces dédiés à l’enseignement pour les multiples départements.

La réalisation de la salle a été rendue possible grâce à la contribution remarquable de 31 millions de dollars du couple Bader. Alfred Bader, époux d’Isabel Bader, est un diplômé de l’Université Queens. M. Bader y a fait deux baccalauréats en chimie et en histoire ainsi qu’une maîtrise en chimie. Les Bader sont des philanthropes de longue date et sont à l’origine de plusieurs bourses à l’Université Queens. La famille est aussi à la direction d’une galerie d’art constituée de la collection privée de la famille. La salle a été nommée en l’honneur de Mme Isabel Bader. Son coût total est de 72 millions de dollars.

Arrivée

Ce qui frappe d’abord l’œil du visiteur, c’est l’architecture moderne, mais aussi le subtil mariage avec la partie patrimoniale de la bâtisse. En raison de la nature patrimoniale du bâtiment de pierre ayant eu de multiples usages par le passé, dont celui de brasserie, il ne pouvait être altéré. C’est une cohabitation réussie entre la pierre du vieux bâtiment, le verre et l’acier inoxydable de la partie contemporaine. Le hall lui-même est une pièce d’art en soi. L’acoustique y est presque aussi parfaite que dans la salle de concert.

De l’entrée tout comme à partir du foyer de la salle, nous avons une vue imprenable sur le lac Ontario. L’aménagement extérieur sur la terrasse arrière est tout aussi soigné, avec un effet de terre se jetant dans l’eau telle une piscine infinie des grands palaces.

Salle

On retrouve, dans la salle d’environ 566 places, toutes les conditions idéales pour des récitals, des petits ensembles ou bien de petits orchestres ou chœurs. Un intérieur exclusivement fait de bois offre une acoustique exquise.

« Nous voulions créer une salle où chacun des spectateurs a l’impression d’être assis sur scène à côté des musiciens », dit Joe Solway, un acousticien de la firme Arup. L’auditeur est comblé et surpris de percevoir le son du piano, par exemple, comme s’il assistait à un concert privé.

De chaque côté du parterre, deux sections de loges font la totalité de sa longueur. Un balcon ainsi qu’une section de sièges face au chef, pouvant servir de gradins pour chœurs comme dans plusieurs salles du monde, sont aussi présents.

Pour plusieurs néophytes de l’acoustique moderne, la disposition de chacune des insertions de bois dans la salle semble aléatoire, donnant un effet réussi de dégradés de bois. Mais tout est calculé au millimètre près. L’équipe d’Arup dispose d’un laboratoire sonore dans ses bureaux de New York et d’un logiciel qui lui permet de recréer l’acoustique exacte en modélisant la salle. C’est de cette façon que fut alors pensé chaque détail de la conception sonore et architecturale.

« Toutes nos décisions devaient toujours préserver l’essence du projet, une salle de calibre international », dit Takeshi Tornier, responsable du projet chez Snøhetta.

La salle est pourvue d’une acoustique variable grâce au système intégré aux murs de rideaux pouvant être déployés. Elle peut ainsi convenir à la musique classique, jazz, rock, pop ainsi qu’à la projection cinématographique, tel qu’il a été prévu lors de sa construction.

L’acoustique de la salle

L’acoustique de la salle est parfaite pour un récital de piano. Un répertoire français y sera des mieux présentés. Les graves du piano sonnent particulièrement bien, les harmoniques sont parfaitement perceptibles. La salle est totalement silencieuse, il en est de même au chapitre de la ventilation et de l’éclairage; en fait, elle est tellement silencieuse que chacun des coups de marteau du piano est entendu, ce qui peut déconcentrer un peu.

Cette salle est idéale pour un ensemble de musique de chambre, ni trop gros ni trop petit. L’avantage de l’acoustique est qu’il est possible d’entendre chacun des musiciens individuellement. Le son perçu pourrait être comparé à celui qu’entend un régisseur de son en studio.

La combinaison cordes et piano s’harmonise bien avec la salle. Par contre, un instrument comme le piano semble couvrir facilement un ensemble à cordes. Il faudra donc faire attention à l’équilibre sonore.

La salle Isabel est sans contredit un bijou d’acoustique, la musique de chambre y sera à son meilleur, la musique vocale aussi. La musique jazz, pop ou rock reste encore à évaluer. Chose certaine, la salle Isabel sera dorénavant un splendide fleuron de la ville de Kingston.  

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