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La Scena Musicale - Vol. 18, No. 6

Tim Brady – le symphoniste

Par Réjean Beaucage / 1 avril 2013

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Tim Brady

Le compositeur Tim Brady navigue entre les frontières floues qui délimitent tant bien que mal la musique actuelle et la musique contemporaine, alors qu’il écrit de plus en plus souvent pour orchestre symphonique, mais sans abandonner sa guitare électrique pour autant !

Le 22 mars dernier, la Symphony Nova Scotia interprétait sa Guess Who Symphony (2007), alors que le 13 mars, l’Orchestre symphonique de Laval (OSL) donnait la création de son Concerto pour alto (avec Jutta Puchhammer-Sédillot). En février, Brady participait au Mois Multi en dirigeant l’Orchestre symphonique de Québec dans une interprétation de sa pièce The Absence of Shelling is Almost Like Music ; enfin, en janvier, c’est le Conseil québécois de la musique qui soulignait le travail du compositeur en lui remettant le prix Opus de la création de l’année 2011-2012 pour Atacama : Symphonie no 3 (2007-2012), dont l’enregistrement est paru depuis chez Atma. Il y a de pires débuts d’année !

Un enregistrement de la Symphonie no 1 (1997-2002) de Brady, sous-titrée Playing Guitar, est paru chez Ambiances Magnétiques dans la version du Nouvel Ensemble Moderne, qui l’a commandée, mais on ne trouve malheureusement pas d’enregistrement de sa Symphonie no 2, The Choreography of Time (2004-2010), commandée en partie par le Winnipeg Symphony Orchestra. « Il s’agit d’une pièce très compliquée, presque injouable, avec un orchestre complet et, dans la version originale, un quatuor de saxophones. Son défaut, c’est qu’elle requiert de 6 à 8 heures de répétitions, et aucun orchestre n’est prêt à mettre autant de temps pour une seule pièce. J’ai donc appris quelque chose sur les orchestres grâce à elle ! »

Cinq ans en tant que compositeur en résidence à l’OSL ont aussi contribué à l’apprentissage de Tim Brady : « C’est une éducation hallucinante ! J’ai pu y composer près d’une heure de musique orchestrale par année. Ce travail m’a permis d’aller m’asseoir dans l’orchestre et d’entendre ce que les musiciens entendent ; ça m’a certainement aidé à mieux écrire pour eux. » Cependant, sa troisième symphonie n’est pas écrite pour orchestre symphonique, mais pour un ensemble assez particulier : un piano et un piano électrique, deux percussionnistes, trois vents (flûte, clarinette et saxophone) et trois cordes (violon, alto et contrebasse) au milieu desquels s’ajoute la guitare électrique du compositeur, le tout entouré par un chœur mixte de 20 voix (VivaVoce, dirigé par Peter Schubert). « Lorsque je travaille avec du texte, il s’agit presque toujours d’écrits à connotation politique, dont la teneur rejoint mes propres intérêts, alors avec ce recueil de poèmes d’Elías Letelier intitulé Symphonie et inspiré des difficultés à vivre au Chili sous le régime Pinochet, j’étais gagné d’avance. Le fait que le texte, que j’ai d’abord lu en anglais, soit en espagnol, une langue que je comprends tout de même moins que l’anglais, fait qu’il devient une matière un peu abstraite que je peux travailler avec un certain détachement.  C’est bien la musique qui est à l’avant ici, ce n’est pas un opéra. »

Même s’il est conscient des difficultés techniques qui font qu’une œuvre sera reprise ou non, le créateur doit suivre ce que lui dicte son instinct : « On doit parfois accepter sa vision, même si le résultat est hors-normes. On peut choisir de n’écrire que des quatuors à cordes en se disant que beaucoup de formations pourront les reprendre, mais il faut aussi se demander si c’est bien le genre de musique que l’on veut faire... Si on fait une musique anonyme simplement parce qu’elle sera plus facile à jouer, je pense qu’on fait fausse route. »

Les compositions de Tim Brady ne se transforment plus en symphonies « par hasard », comme ce fut le cas pour les deux premières, qui avaient commencé par être des concertos avant de prendre de l’expansion. Aujourd’hui, le compositeur a la piqûre ! « La Symphonie no 4 a la même instrumentation que la Cinquième de Beethoven, et sa création par la Symphony Nova Scotia est déjà prévue pour le 27 mars 2014. » D’ici là, le public du concert d’ouverture du Festival international de musique actuelle de Victoriaville sera accueilli le 16 mai prochain par sa Symphonie no 3, ce qui relance un peu le débat sur la nature de la « musique actuelle ». « Tout est composé ici, souligne Brady ; il n’y a aucune improvisation. » On ne s’embourbera donc pas dans une recherche de définition de ce qui est, ou non, de la musique actuelle, car comme le dit si bien Tim Brady : « Si le directeur artistique du FIMAV, Michel Levasseur, dit que c’est de la musique actuelle, alors ce doit être de la musique actuelle ! »


Tim Brady sera le compositeur-en-résidence invité au Scotia Festival avec la performances de plusieurs de ses pièces, y compris une création pour guitare électrique, hautbois, piano et trio à cordes, intitulé "FLOW", et commandée par le Scotia Festival. Le 26 mai jusqu'au 7 juin, Halifax, NS www.scotiafestival.ns.ca


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