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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 7 avril 2012

Informations instrumentales : violon

Par Carissa Klopoushak / 1 avril 2012

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Les premiers chapitres

Le violon est l’instrument le plus aigu de la famille des cordes. Ses ancêtres remontent au neuvième siècle de notre ère et comptent le rebab arabe et les instruments des cultures nomades équestres de l’Asie centrale. Le violon a hérité de l’archet fait de crin, encore utilisé aujourd’hui.
Les échanges tant commerciaux que culturels se sont multipliés entre l’Orient et l’Occident. La toute première variante du rebab, appelée rebec, apparaît en Espagne pendant le 11e siècle; d’autres variétés ont suivi, telle que la vielle en France au 13e siècle. L’instrument poursuit son chemin en Europe, passe de deux à trois cordes et échange son corps de gourde pour un corps fait en bois. Ces instruments proches du violon foisonnaient dans les années 1500, mais le violon proprement dit nous vient directement de la viola da braccio, au début du 16e siècle. Le violon connut sa plus importante période évolutive en Italie pour ensuite devenir l’instrument de musique répandu et aimé qu’on connaît aujourd’hui. Le violon à quatre cordes, dont le premier spécimen est attribué à Andrea Amati en 1555, est rapidement devenu très populaire dans certaines cours. Vers le 17e siècle, le violon était connu de tous et remplaçait même les instruments traditionnels partout en Europe. La famille Amati participe à l’histoire des instruments à cordes par l’élaboration des proportions de base du violon, de l’alto et du violoncelle, et c’est le modèle Amati original qu’on a perfectionné pendant deux cents ans. La famille contribue à l’art de la fabrication du violon non seulement par l’amélioration de l’instrument, mais aussi par la transmission des techniques. En effet, on compte parmi ses apprentis d’autres luthiers de talent tels Andrea Guarneri et Antonio Stradivarius.
Reconnu comme le plus grand luthier de tous les temps, Stradivarius nous a laissé des instruments encore prisés aujourd’hui. Il a défini et raffiné le format et la symétrie du violon en plus d’avoir testé différentes essences et épaisseurs de bois afin d’en améliorer l’acoustique. À cette époque, le violon possédait la plupart des caractéristiques du violon moderne, à quelques modifications près. Au cours du 19e siècle, les luthiers ont retravaillé la longueur du violon, l’angle de son manche, la longueur de la barre d’harmonie et la hauteur du chevalet. Le violon jouit d’une grande popularité à l’époque baroque: il est devenu un véritable pilier de la musique occidentale tant en solo et en musique de chambre qu’en musique orchestrale.

ViolonLa maîtrise moderne

La place qu’occupe le violon dans la musique occidentale fait l’envie. Aucun autre instrument ne jouit d’un répertoire aussi vaste et musicalement varié que le violon. Des maîtres compositeurs, des interprètes et des pédagogues ont bâti une riche tradition au cours des deux cent cinquante dernières années. Bon nombre des plus grands violonistes composaient aussi pour leur instrument: Corelli, Vivaldi, Tartini, Kreisler, Ysaÿe, Enescu, Sarasate et Paganini. D’autres violonistes ont travaillé avec des compositeurs dans des collaborations mémorables, comme Joachim et Brahms, David et Mendelssohn, Oïstrakh avec Chostakovitch et Prokofiev. Lors du siècle dernier, les violonistes se sont concentrés davantage sur l’interprétation plutôt que la composition, ce qui a produit des violonistes virtuoses comme Heifetz, Menuhin, Mullova, Bell, Hahn, Haendel, Neveu, Gitlis, Stern, Mintz, Ehnes, Faust, Kremer, Mutter, Kavakos, Zehetmair, Perlman, Szeryng, Tetzlaff, Shaham, Znaider et Zukerman. Une bonne proportion des violonistes virtuoses se réservent à la musique de chambre ou à la musique ancienne plutôt que de poursuivre une carrière de soliste.
Le violon tient aussi un rôle important à l’extérieur de la sphère musicale occidentale traditionnelle. La culture musicale classique de l’Inde, par exemple, utilise énormément le violon. Le violon est extrêmement important dans le folklore de différentes cultures dont celle des Maritimes et de l’Acadie au Canada. Le violoniste tsigane Roby Lakatos et Gilles Apap, qui comblent l’écart entre les traditions folkloriques et classiques, sont des artistes du genre de premier plan. Le violon est très présent sur la scène jazz, grâce à des musiciens tels Stéphane Grappelli et Stuff Smith. Owen Pallent, violoniste compositeur basé à Toronto, est un excellent exemple du mélange des mondes classique et indépendant de la musique.

Vrai ou faux?
Une corde est « fausse » si elle ne produit pas le ton voulu quand elle est flambant neuve. Si les cordes neuves en boyau ont plus tendance à l’être que les synthétiques, il reste que tout type de corde risque de sonner faux avec l’usage. Plusieurs violonistes utilisent ce terme pour désigner toute corde qui sonne mal. La durée de vie d’une corde dépend de son matériau, de la fréquence d’utilisation et même de la sueur. Certains musiciens remplacent leurs cordes après quelques semaines alors que d’autres peuvent gaiement jouer sur les mêmes cordes pendant plus d’un an.

En sourdine
Installées sur le chevalet de l’instrument afin d’étouffer les vibrations, les sourdines sont faites de métal, de caoutchouc, de cuir ou de bois. Il est bon d’essayer différentes sourdines puisque parfois, l’utilisation de la sourdine est obligatoire, comme dans le premier concerto pour violon de Prokofiev. Quelques violonistes préfèrent la résonance chaude d’une sourdine de cuir tandis que d’autres aiment mieux la sourdine de métal et de caoutchouc à la Heifetz. N’oublions surtout pas la fameuse sourdine de pratique, un incontournable pour l’hôtel en tournée!

Le saviez-vous?
La colophane que l’on applique sur les crins de l’archet pour qu’ils adhèrent mieux aux cordes et les fassent mieux chanter est faite à base de sève de conifère. Pour choisir la colophane adéquate, il faut tenir compte du climat. Une colophane pâle est de mise dans les climats humides alors qu’une foncée convient aux climats secs. En voyage, il vaut mieux avoir avec soi différentes sortes de colophane. 

Les trucs de Carissa Klopoushak

POUR LE VIOLONISTE DÉBUTANT
Que serait d’après vous une règle importante (mais souvent négligée) d’entretien de l’instrument que tout violoniste devrait suivre?
Il est important de prendre le plus tôt possible de bonnes habitudes pour ranger votre violon. Vous devez vous rappeler de détendre l’archet, d’essuyer la résine sur le violon et de le placer dans un étui fermé en portant particulièrement attention à la température et à l’humidité. Évitez d’y faire vous-même des réparations; consultez plutôt un spécialiste chaque fois que nécessaire!

POUR LE VIOLONISTE INTERMÉDIAIRE
Quel exercice un violoniste de niveau intermédiaire devrait-il faire quotidiennement afin de conserver son niveau de jeu et de le développer?
Un étirement et un échauffement bien fait sont primordiaux. Les bonnes habitudes prises à ce niveau de jeu ont tendance à rester. Les gammes et les études, bien utilisées, aident à réduire le temps d’apprentissage du nouveau matériel. Une fois que vous maîtrisez les méthodes traditionnelles (Flesch, Sevcik, etc.), essayez les gammes jazz ou modales ou la méthode de Terje Moe Hansen.

POUR LE VIOLONISTE AVANCÉ
Que recommanderiez-vous au musicien avancé qui désire avoir un meilleur violon, mais qui n’a pas les ressources pécuniaires pour se procurer un instrument de qualité professionnelle?
Tout comme Pemi Paull l’avait recommandé dans le numéro de février de LSM, il est important de rendre visite régulièrement à un luthier reconnu. Les cordes et les crins doivent être remplacés souvent, et faire ajuster l’âme du violon aide énormément (une longue expérimentation permet de trouver son emplacement idéal). Le remplacement du cordier, de l’attache, de la mentonnière et de l’épaulière peut apporter des changements positifs au son et à la projection de votre instrument. Toutefois, il ne faut pas surestimer l’équipement, car souvent, ce n’est pas à lui que revient la faute!

Si vous ne pouviez recommander qu’une œuvre et un enregistrement pour faire tomber n’importe qui amoureux du violon, quels seraient-ils et pourquoi ?
La Sonate en sol majeur de Johannes Brahms. Il s’agit peut-être de la composition la plus lyrique de toutes les œuvres instrumentales de Brahms. Elle vous fait vivre toutes sortes d’émotions, de la béatitude au chagrin, du ravissement à la nostalgie. Il y a plusieurs enregistrements merveilleux, mais l’un de mes préférés est celui de Joseph Suk et Julius Katchen [Brahms: The Violin Sonatas; Joseph Suk, violon; Julius Katchen, piano; Decca: Legendary Legends (1967)]


Gagnante de l’édition 2009 du concours Eckhardt-Grammatté, Carissa Klopoushak est très en demande comme récitaliste et musicienne de chambre. Elle joue avec des ensembles tels Mooncrest, Portmantô, Boundary et l’Orchestre du Centre national des Arts en plus d’être la directrice du Festival de musique de chambre Ritornello à Saskatoon. Elle est doctorante en interprétation à l’Université McGill avec Jonathan Crow.
www.carissaklopoushak.com, www.ritornello.ca, www.tytitam.com


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