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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 6 mars 2012

Jean-Michaël Lavoie : Une belle carrière prend son élan

Par Caroline Rodgers / 1 mars 2012

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Jean-Michaëlle LavoieIl a trente ans ce mois-ci, et des projets plein la tête. Jean-Michaël Lavoie est en train de s’affirmer comme un excellent chef de la nouvelle génération. Depuis deux ans, il enchaîne les débuts avec de grands orchestres. Après quelques années en Europe et aux États-Unis où il a eu la chance d’apprendre le métier avec les plus grands, le public d’ici aura davantage l’occasion de l’entendre au cours des prochaines années.

Natif de Saint-Césaire, en Montérégie, Jean-Michaël Lavoie a pris des leçons de piano enfant, comme tant d’autres. Plus tard, au secondaire, il a dirigé le chœur de son école. Il a ensuite étudié la musique à l’Université McGill, d’abord au baccalauréat en théorie musicale et en piano, ensuite à la maîtrise en direction d’orchestre.

C’est là que le compositeur, professeur et chef d’orchestre Denys Bouliane l’a pris sous son aile pendant quatre ans. « Il me donnait des responsabilités et je dirigeais beaucoup de concerts en parallèle à mes études, raconte le musicien. Cela m’a permis d’acquérir beaucoup d’expérience rapidement, surtout en musique contemporaine. Denys Bouliane a été la personne qui m’a aidé le plus dans mes débuts. »

Pendant deux ans, de 2008 à 2010, il a eu la chance de diriger l’Ensemble intercontemporain de Paris aux côtés d’un géant de la musique: Pierre Boulez. 

« La musique contemporaine est devenue l’une de mes grandes forces, ce qui m’ouvre les portes d’orchestres importants, puisque peu de jeunes chefs s’en font une spécialité », dit-il.

Lauréat 2010 du prix Opus Découverte de l’année, il signait la même année un contrat avec l’agence International Classical Artists, celle qui représente aussi Kent Nagano. Il a aussi dirigé en 2010 le Los Angeles Philharmonic dans le cadre du programme de résidence Dudamel Conducting Fellow, qui incluait plusieurs concerts pour la jeunesse.

Il apprécie diriger les concerts pour enfants, ce qu’il a fait jusqu’à maintenant avec trois orchestres. En plus de la vocation pédagogique de ces concerts, il s’agit d’un bon moyen d’apprendre à connaître un orchestre avant d’entamer des concerts plus ambitieux. C’est lui qui dirigeait l’OSM, en novembre dernier, pour le spectacle Le Petit Prince destiné aux écoles.

« Les enfants réagissent de manière très spontanée, ce n’est pas la même dynamique qu’un concert symphonique, dit-il. Bien que le programme soit moins substantiel, il y a une grande énergie sur scène et dans la salle. Cela nous permet de voir ce qui se fait en pédagogie. Je constate le grand travail que les orchestres font de plus en plus dans les écoles auprès des très jeunes. »

Au cours de la dernière année, Jean-Michaël Lavoie a notamment fait ses débuts avec l’OSM, l’OSQ, le Toronto Symphony Orchestra, l’orchestre de la BBC, l’Orchestre du Centre national des Arts d’Ottawa, l’Opéra de Rennes et l’Orchestre d’Auvergne en France. Parmi les débuts à venir, mentionnons l’Orchestre national de Lille, l’Opéra de Rouen et l’Opéra de Bordeaux.

La technologie au service de la musique

Ce mois-ci, il dirige à Québec le concert « Tchaïkovski à l’heure du multimédia », un projet incluant des projections vidéo, un comédien sur scène (Jack Robitaille) et un narrateur. « C’est une expérience nouvelle pour mieux comprendre la symphonie, dont on fait une démonstration à plusieurs niveaux avec le narrateur et les images », dit le jeune maestro qui ne se fait pas prier pour participer à ce genre de projets.

« La technologie est au service de ce que l’on essaie de transmettre au public, elle permet d’agrémenter et d’animer le concert, ajoute-t-il. Je crois que cela répond aux besoins d’une clientèle qui ne vient pas régulièrement à l’orchestre, en nous permettant de créer des liens avec lui et de lui donner le goût d’en savoir plus sur la musique classique. En première partie du concert, c’est la narration avec des extraits de l’œuvre joués par l’orchestre, et en deuxième partie, on joue la symphonie en entier. Je crois que c’est plus intéressant que de laisser ce nouveau public à lui-même avec simplement des notes de programme. »

La technologie peut aussi être mise au service de créations audacieuses, et ce, même dans les salles de concert les plus anciennes. Ce fut le cas à la Scala de Milan, en avril dernier, où il a participé à la création de l’opéra Quartett, de Luca Francesconi, compositeur italien très en vue actuellement. Basée sur la pièce éponyme de Heiner Müller, elle-même adaptée des Liaisons dangereuses de Laclos, l’œuvre faisait appel à deux orchestres et seulement deux personnages à l’intérieur d’une boîte suspendue dans les airs à l’aide de câbles.

Tandis qu’un autre chef dirigeait l’orchestre principal dans la fosse, Jean-Michaël Lavoie, dans une salle à un autre étage, dirigeait un second orchestre formé de 80 musiciens avec un chœur de 40 chanteurs, invisibles du public, et dont le rôle était de rendre musicalement les pensées et sentiments des protagonistes, jouant un rôle à part entière. Le tout était retransmis par des haut-parleurs disposés de manière circulaire autour du public, et il devait garder un contact visuel avec le chef principal en gardant les yeux rivés à un écran pour bien synchroniser le tout.

« C’était vraiment inespéré pour moi d’avoir la chance de passer deux mois à Milan et un grand défi de participer à cette création avec ses contraintes technologiques. C’était aussi ma première expérience à l’opéra, ce que j’ai beaucoup aimé. Le public a adoré. J’ai dirigé six représentations. »

Il avoue d’ailleurs avoir eu la piqûre pour la direction d’opéra. « J’ai eu un gros coup de cœur et je compte bien développer cet aspect de ma carrière au cours des prochaines années. »


Concert de l’OSQ: Tchaïkovski à l’heure du multimédia, 21 mars, Grand Théâtre de Québec  

www.osq.org
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