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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 5 février 2012

Critiques

1 février 2012

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Version Flash ici.

CARTE POSTALE : Music by Brandao, Annunziata, Evangelista, Del Aquila, Nicolau, D’Rivera and Ichmouratov
Quatuor Alcan
ATMA Classique ACD2 2502 (64 min 28 s)

Voici le genre de programme éclectique qui a fait la célébrité du Kronos Quartet. Qui plus est, les musiciens du Quatuor Alcan de Chicoutimi arrivent à égaler leurs collègues américains au chapitre du répertoire imaginatif. Il s’agit ici d’un album de nouvelles pièces pour quatuor à cordes inspirées de la musique folklorique de nombreux pays. La plus longue pièce, qui dure environ 24 minutes, est le Quatuor no 2 d’Airat Ichmouratov, œuvre qui fusionne le klezmer et Beethoven (le motif Muss es sein du quatuor op. 135). Ichmouratov a vu le jour en Russie, mais vit maintenant au Canada. Son quatuor est un peu trop ambitieux pour ses matériaux. L’autre compositeur canadien représenté sur ce disque est José Evangelista et son Spanish Garlana est inspiré de mélodies de son pays d’origine, l’Espagne. Le problème, c’est que la présence de douze thèmes différents dans une pièce de onze minutes empêche qu’il y ait assez de développement. Toutefois, Evangelista se sert habilement du quatuor à cordes pour en tirer un son moyen-oriental convaincant. Le morceau le plus impressionnant est probablement Meltini d’Alessandro Annunziata, qui exploite adroitement le son et la structure afin de créer une ambiance unique. Le Quatuor Alcan joue évidemment très bien. La qualité sonore est limpide, quoiqu’un peu sèche. Paul E. Robinson

Liszt Recital
Janina Fialkowska, piano
ATMA Classique ACD2 2641

Janina Fialkowska a un grand talent : celui de savoir programmer. Dans le cadre des célébrations du bicentenaire de naissance de Liszt, la pianiste canadienne, qui a enregistré nombre d’œuvres du compositeur hongrois, a choisi un répertoire peu fréquenté et offre à l’auditeur un regard assez neuf sur l’œuvre lisztienne. Encadré de deux grandes valses, le programme comprend deux très longues œuvres méditatives, Bénédiction de Dieu dans la solitude et Gretchen, tiré d’un arrangement pour piano de la Faust-Symphonie. Au milieu, Six chants polonais, d’abord connus par Chopin et que son ami-rival Liszt a repris en ajoutant moult difficultés. Malheureusement, l’intérêt pour cet enregistrement s’arrête ici. La pianiste semble incapable de choisir entre mélodies, accompagnements et contre-chants et joue donc le tout avec une force et une intensité égales. Le discours devient rapidement incompréhensible, le jeu scolaire et aride irrite et ennuie. Seul moment de véritable joie, la Valse de Faust, selon l’œuvre de Gounod, clôt avec grâce un programme qui fonctionne bien mieux sur papier qu’à l’écoute. Normand Babin

Maki Ishii Live
Ryan Scott, percussions; Esprit Orchestra/Alex Pauk
Innova 809 (52 min 21 s)

Le compositeur japonais Maki Ishii a connu une grande carrière internationale, étant régulièrement interprété en Amérique, en Europe et en Asie à partir des années 1970 jusqu’à sa mort, survenue en 2003. Un peu comme son confrère Takemitsu, Ishii utilise des techniques de composition issues de l’avant-garde européenne tout en intégrant diverses facettes de la musique traditionnelle japonaise. Il en résulte une musique fort originale, peut-être un peu plus énergique que celle de Takemitsu, mais qui ne renie en rien le pouvoir de contemplation et de beauté qu’apporte la tradition japonaise à ce métissage astucieux. Le percussionniste canadien Ryan Scott le prouve avec une énergie flamboyante en interprétant trois œuvres à la virtuosité féroce. Saidoki est une explosion de force et de vigueur qui tient en haleine jusqu’à la fin. Concertante, pour marimba et petit ensemble de percussion, est tout aussi intéressant, quoique d’une énergie plus modérée. Finalement, le concerto South – Fire – Summer est nettement plus contemplatif avant de s’achever dans une joute rythmée et étourdissante. Enregistré en concert par la CBC, ce disque témoigne d’une interprétation investie et solide de Ryan Scott et de l’Esprit Orchestra, méticuleusement dirigé par Alex Pauk. Une belle découverte ! Éric Champagne

Old Friends: Simon & Garfunkel—Hommage
Valérie Milot, harpe; Antoine Bareil, violon; Marjolaine Goulet, cor; Christian Prévost, violon; Dominic Girard, contrebasse
Analekta AN 29883 (49 min 52 s)

« Pas encore des arrangements de chansons pop ! », se dira probablement le mélomane moyen. Ce serait une erreur – que j’ai moi-même commise. À l’écoute de ces fort charmantes petites pièces, on ne peut qu’être séduit par la qualité des arrangements, économes, et la musicalité des interprétations, sensibles et honnêtes. Il faut bien sûr retenir le duo principal qui est à l’origine du projet, le violoniste Antoine Bareil et la harpiste Valérie Milot, une révélation Radio-Canada musique. Mais les trois autres musiciens qui interviennent régulièrement pour les uns, occasionnellement pour d’autres, sont tout aussi solides. Au programme, plusieurs chansons de Paul Simon (popularisées par son duo avec Art Garfunkel), dont des petits bijoux comme America, Mrs Robinson, Old Friends, Bridge Over Troubled Water, etc., puis quelques traditionnels comme Scarborough Fair. L’on découvre ici en Paul Simon un troubadour moderne de la trempe d’un Stephen Foster et dont les mélodies s’adaptent très bien à un contexte de musique de chambre. Le secret est dans les arrangements, comme dans toute aventure de ce genre. Ici, la recette fonctionne et on se surprend à en redemander.
 Frédéric Cardin

Tapestries
Christina Petrowska Quilico, piano; Canadian Ukranian Opera Chorus/Wolodymyr Kolesnyk; Kitchener-Waterloo Symphony Orchestra/Daniel Warren
Centredisques CMCCD 17011 (65 min 52 s)

Christina Petrowska Quilico et le Centre de musique canadienne présentent ici deux concertos pour piano de compositeurs canadiens fort différents. Le Concerto Cantata de George Fiala est une œuvre lourde et assez hermétique. Le piano se trouve ici accompagné d’un chœur et d’un carillon. Mais l’écriture tonale, néoromantique, proche de Hindemith, le nombre incalculable d’accords plaqués, l’absence de mélodie, l’utilisation d’un chœur toujours harmonique lassent bien avant la fin des 40 longues minutes. Une transcription des textes chantés dans le livret aurait peut-être aidé à la compréhension de l’œuvre. A contrario, Heather Schmidt, jeune pianiste et compositrice, séduit. Son Concerto pour piano numéro 2 offre autant au néophyte qu’au spécialiste de la musique contemporaine. L’instrumentation est intéressante d’un bout à l’autre et le piano brille dans cette œuvre chatoyante. Le dernier mouvement, très réussi, devrait provoquer une ruée vers la partition chez les pianistes et donner le goût aux auditeurs de mieux connaître l’œuvre de Schmidt. La courageuse pianiste nous présente deux difficiles concertos jamais enregistrés jusqu’ici. Les deux enregistrements ont été faits en public. Un public qu’on entend tout au long du disque sauf au moment des applaudissements. Normand Babin

Vivaldi: Cello Concertos
Jean-Guihen Queyras, violoncelle; Akademie für Alte Musik/Georg Kallweit
Harmonia Mundi HMC 902095 (68 min 34 s)

Mordant, incisif, contrasté, baroque, quoi ! Ce tout nouveau disque du violoncelliste Jean-Guihen Queyras invite à un petit tour du propriétaire de l’œuvre pour violoncelle du Prêtre Roux. Sept concertos (dont un pour violoncelle et basson, une révélation), une sinfonia en do majeur (RV 709) et deux pièces (des sinfonias, également) d’Antonio Caldara, question de diversifier l’offre et d’éviter la monotonie formelle des structures strictement tripartites de Vivaldi. L’Akademie est au sommet de sa forme. Que dire de plus ? Superbe ! Frédéric Cardin

Traduction : Jérôme Côté et Fabrice Petit


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