| Critiques1 décembre 2011 
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A Napoli Marc Hervieux, ténor; Louise-Andrée Baril, piano et arrangements 
orchestraux
 ATMA Classique ACD2 2620
 
   L’un des ténors aux talents les plus variés du Canada, Marc Hervieux 
est à l’aise dans plusieurs styles, de l’opéra et l’oratorio 
à la musique populaire, en plus de s’être illustré dans la superproduction 
de l’opéra rock Starmania. Il a enregistré chez ATMA un disque 
d’airs d’opéra avec Yannick Nézet-Séguin et un album de Noël. 
Celui-ci est son troisième, une collection de quinze chansons napolitaines 
accompagnées par dix musiciens québécois dirigés par Louise-Andrée 
Baril. Ces chansons lui vont comme un gant, étant donné son timbre 
de ténor robuste et absolument italien qui parfois nous rappelle un 
jeune Domingo. Non, tout n’est pas parfait, les passages et les aigus 
peuvent sembler un peu inconfortables, même que, parfois, il chante 
en « crooner », mais il interprète tout avec passion et enthousiasme, 
deux qualités bienvenues dans ce répertoire. Mme Baril s’occupe 
des arrangements orchestraux. Quelques fois, on frise le sirupeux et 
le sentimental, mais c’est très napolitain ! Au fait, Hervieux a 
dédié l’album à Jacqueline Desmarais, philanthrope musicale dont 
il fut l’un des protégés depuis le début de sa carrière. Les admirateurs 
de Hervieux trouveront que ce disque est fort divertissant et qu’il 
ferait un excellent cadeau de Noël.  Joseph K. So
 Bach : Cantates BWV 54 et 170/Suite 
en la mineur BWV 1067/Double Concerto BWV 1060 Daniel Taylor, contre-ténor; Tafelmusik/Jeanne Lamon
 Analekta AN 2 9878 (68 min 46 s)
 
   Analekta nous offre ici deux des plus belles cantates pour alto de Bach. 
« Repos béni » BWV 170 pour hautbois d’amour, orgue obligé 
et cordes, nous fait immédiatement entrer dans un état de grâce qui 
se prolongera jusqu’à la fin de ce disque magnifique. Quelles belles 
sonorités, ombres et lumières qui caressent l’âme, larmes et joies 
inspirées par un moment divin! Daniel Taylor chante avec grand art 
et une maîtrise parfaite de sa voix pure. Le contre-ténor semble s’abandonner 
complètement à la musique. « Résiste au péché » BWV 54 
est traitée avec le même soin. Plus de staccato des cordes aurait 
mieux souligné le texte, mais la richesse sonore nous envahit et la 
raison capitule. La suite BWV 1067 est ici interprétée dans une version 
pour violon et cordes. Quelle grâce dans le rondeau ! Quelle tendresse 
dans la sarabande ! Jeanne Lamon conduit son ensemble (un instrument 
par parties) avec tant de savoir-faire qu’on en oublie complètement 
la version pour flûte traversière. Le BWV 1060 est aussi tout à fait 
superbe. Soulignons par contre la piètre qualité visuelle de la pochette, 
pas du tout à l’image des interprètes qu’elle représente.  René 
F. Auclair
 Bartók: Violin Concerto No. 1/Violin 
Concerto No. 2/Viola Concerto James Ehnes, violon et alto; BBC Philharmonic/
 Gianandrea Noseda
 Chandos CHAN 10690 (77 min 45 s)
 
   Le violoniste canadien James Ehnes s’est rapidement hissé au rang 
des plus grands violonistes du monde. Il se sent à l’aise dans un 
vaste répertoire et joue avec autant de maturité que de virtuosité. 
Cet album tout Bartók est probablement l’un de ses meilleurs jusqu’à 
maintenant; il y fait des prouesses au violon comme à l’alto. Le 
Concerto pour violon no 2 de Bartók est 
le concerto pour violon de Bartók, et est reconnu partout comme 
un chef-d’œuvre du vingtième siècle. Le Concerto pour violon 
no 1, l’une des premières œuvres du 
compositeur, jouit d’une moins grande popularité. Le deuxième concerto 
est une pièce beaucoup plus variée et originale, mais le premier a 
un charme bien à lui et mérite d’être joué plus souvent. Ehnes 
les interprète tous les deux sur le Stradivarius « Marsick » de 1715 
avec un son extrêmement riche et une grande compréhension du phrasé. 
Noseda et son orchestre sont merveilleux et la qualité sonore du disque 
est excellente.
 Le Concerto pour alto est resté inachevé à la mort du compositeur. 
Or, Tibor Serly en a fait une version à partir d’esquisses, et c’est 
celle qu’Ehnes utilise. Il interprète fort bien cette belle pièce. 
 Paul E. Robinson
 Brahms on Brass: 
Waltzes Op. 39/Ballade in D minor Op. 10 No.1/Eleven Chorale Preludes 
Op. 122 Canadian Brass
 Opening Day ODR 7415 (50 min 25 s)
 
   L’ensemble Canadian Brass (CB) est maintenant l’un des plus vieux 
de ce genre. Après quarante ans, il n’est pas surprenant qu’il 
y ait eu des changements au sein du groupe. Aujourd’hui, il ne reste 
que le tubiste Chuck Daellenbach comme membre fondateur. Les critères 
de sélection élevés n’ont pas changé, eux, et la polyvalence incroyable 
est restée intacte.
 Mais... Brahms joué par des cuivres ? Tout un album ? Le Canadian Brass 
a toujours été innovateur dans son choix de répertoire, mais ici 
on va un peu trop loin. L’inclination du compositeur pour le contrepoint 
et sa préférence pour les couleurs plus sombres jurent avec un arrangement 
pour cuivres. Par contre, j’ai été agréablement surpris par les 
Valses op. 39, composées à l’origine pour piano quatre mains. 
Elles ont été arrangées par deux trompettistes du CB, Chris Coletti 
et Brandon Ridenour. Cette musique fait partie des pièces de Brahms 
plus légères, et le CB l’interprète avec un sens du style merveilleux. 
Les trompettes sont bonnes et le tout sent bien le rythme et le phrasé.
 L’autre œuvre majeure, les onze Préludes de choral op. 122, 
est arrangée par Ralph Sauer. Voilà du Brahms pur et dur et, même 
dans leur version originale à l’orgue, ces préludes ne sont pas 
faciles à écouter. Dans l’arrangement pour cuivres, la partie de 
trompette est plutôt maladroite et les notes de pédale, toutes naturelles 
à l’orgue, deviennent ici un problème majeur.  Paul E. Robinson
 Bruckner: Symphony No. 4 
“Romantic” Orchestre Métropolitain/Yannick Nézet-Séguin
 ATMA Classique ACD2 2667 (69 min 47 s)
 
   Yannick Nézet-Séguin enregistre lentement mais sûrement toutes les 
neuf symphonies de Bruckner, et voici le dernier fascicule. Encore une 
fois, la qualité de jeu et de la direction étonnent. L’Orchestre 
Métropolitain joue tout aussi bien que la plupart des grands orchestres 
qui ont enregistré ces œuvres. On doit attribuer une bonne partie 
du mérite aux musiciens, mais Nézet-Séguin établit la norme et impose 
une vision aussi exacte que sensible. Le chef d’orchestre se sert 
de l’édition de 1936 de Haas, qui est la version la plus répandue. 
Nézet-Séguin n’ajoute aucune surprise interprétative. Il fait une 
lecture mûrie de l’œuvre et soigne le tempo, les nuances et l’équilibre, 
tout en faisant monter les points culminants avec goût et noblesse. 
Puisque nous avons récemment entendu Nagano et l’OSM interpréter 
cette pièce dans la nouvelle Maison symphonique, les comparaisons nous 
viennent facilement en tête. Les deux orchestres jouent bien sûr très 
bien, et Nagano est un brucknérien beaucoup plus expérimenté que 
Nézet-Séguin. N’empêche, je donnerais l’avantage à Nézet-Séguin 
pour son interprétation plus joyeuse et exubérante que celle de Nagano. 
Le son de l’enregistrement d’ATMA plaît et il a été pris dans 
l’église Saint-Ferdinand.  Paul E. Robinson
 Bruckner: Symphony No. 7 Bayerisches Staatsorchester/Kent Nagano
 Sony 88697909452 (64 min 17 s)
 
   Il n’y a pas si longtemps, Kent Nagano a dirigé l’OSM dans la 
Symphonie no 4 de Bruckner dans la nouvelle 
salle de Montréal. Cette interprétation et le présent enregistrement 
montrent une vision constante dans l’art de jouer et diriger Bruckner. 
Dans les deux cas, l’orchestre joue très bien et l’équilibre est 
méticuleusement calibré. Or, chacune des prestations, bien qu’elles 
soient fort admirables et agréables, semble avoir écarté l’essentiel. 
Où est toute la force de ces points culminants brucknériens ? Où 
est la vie intérieure de la musique ?
 Nagano semble presque désolé des nuances extrêmes de la musique. 
Pour lui, il est plus important que l’on puisse tout le temps entendre 
chacun des instruments, même si quelques-uns ont manifestement plus 
à dire que d’autres. Nagano se montre particulièrement prudent avec 
les trompettes. On les entend rarement dans ces interprétations de 
Bruckner, même lorsqu’elles jouent la mélodie ou animent le rythme 
des points culminants.
 La qualité sonore de cet enregistrement est excellente, et la prestation 
devant public a eu lieu dans la cathédrale de Gand en Belgique, le 
23 septembre 2010. D’autres chefs d’orchestre tirent davantage de 
cette musique.  Paul E. Robinson
 Colinda 
– Noëls de Provence Strada
 Analekta, AN 2 9840 (40 min 49 s)
 
   Voici un disque tout chaud de la maison Analekta, juste à temps pour 
Noël. Le groupe Strada, qui fait revivre les plus belles traditions 
musicales des quatre coins de l’Europe, présente cette fois ces chants 
de Noël de Provence, élaborés autour des Noëls de Notre-Dame des 
Doms, manuscrit du 17e siècle conservé à la cathédrale 
d’Avignon. Avec leurs instruments de musique anciens, et accompagnés 
par le musicien virtuose Miquèu Montanaro, les chanteurs du groupe 
Strada, au son de cette musique polyphonique, transportent l’auditeur 
aux temps anciens des fêtes du solstice d’hiver. Bien loin des disques 
populaires des Noëls modernes, cet enregistrement de voix claires et 
de musique vive et joyeuse saura bien accompagner les préparatifs des 
fêtes et les soirées de retrouvailles de ce temps hivernal.  Francine 
Bélanger
 Convivencia La Mandragore
 Fidelio Musique FACD031 (55 min 2 s)
 
   Convivencia peut se traduire par convivialité ou cohabitation. 
L’ensemble montréalais La Mandragore, spécialisé dans la musique 
médiévale, tente de faire revivre cette époque lointaine de l’Espagne 
où différentes cultures réunies ont vécu ensemble dans la paix. 
C’est dans la région de l’Andalousie qu’ont cohabité juifs, 
musulmans et chrétiens entre 929 et 1031.C’est ce qu’on appelle 
le califat de Cordoue. La musique présentée ici se veut un hommage 
à cette époque bénie. Plusieurs pièces sont des adaptations de textes 
séfarades, arabes et même français, la plupart provenant des 12e 
et 13e siècles. Certaines plages du disque sont de nouvelles 
compositions d’inspiration médiévale des musiciens de l’ensemble, 
tous excellents. L’utilisation anachronique d’instruments divers 
qui n’existaient pas à cette époque a de quoi étonner ! Pour l’exégèse 
musicale, on repassera. Toutefois, le résultat d’ensemble est plus 
qu’agréable. C’est un festin exotique pour l’oreille et le cœur. 
Les voix, les instruments et même les tambours sont très bien rendus 
par une prise de son de grande qualité. Quel bonheur d’entendre ces 
sonorités qui nous transportent au loin ! Dans le passé, dans un monde 
de rêve, dans une Andalousie mythique…  René François Auclair
 Franck, Debussy, Poulenc : Sonates Anne Gastinel, violoncelle, Claire Désert, piano
 Naïve V 5259 (61 min)
 
  comme 
dans un rêve, en prenant la respiration nécessaire pour laisser s’épanouir 
le son du Testore de Gastinel. En fin de compte, elles réussissent 
à faire oublier l’original, tout un exploit ! Elles réussissent 
aussi l’équilibre délicat entre lyrisme retenu et humour mordant 
dans la <i>Sonate</i> de Debussy (que le compositeur pensait intituler 
« Pierrot fâché avec la lune »), chef-d’œuvre de concision qui 
paraît trop bref ici, en particulier le mouvement central, Sérénade. 
La <i>Sonate</i> de Poulenc n’est généralement pas tenue en grande 
estime. Les deux interprètes donnent quand même l’impression qu’elles 
prennent grand plaisir à la jouer. L’auditeur finit par s’en laisser 
convaincre à cause de l’élégance apportée à rendre les pirouettes 
du compositeur. Prise de son naturelle, donc agréable. <b>Alexandre 
Lazaridès</b></font></p>
<p><font size=) From Here on Out: Muhly, Greenwood, 
Perry Kitchener-Waterloo Symphony/Edwin Outwater
 Analekta AN 29992 (68 min 34 s)
 
   Trois jeunes compositeurs sont représentés sur ce disque de l’orchestre 
symphonique de Kitchener-Waterloo, dont deux issus de l’univers du 
rock dit alternatif, soit Jonny Greenwood (du groupe Radiohead) et Richard 
Reed Parry (d’Arcade Fire). Curieusement, l’œuvre la plus consonante 
et « accessible » est celle écrite par le seul compositeur de formation 
« classique », Nico Muhly, basé à New York. Sa pièce From Here 
on Out procède d’un type de modernisme américain post-impressionniste 
qui est très agréable. Les textures sont toujours kaléïdoscopiques, 
mettant en contrepoint lumineux les différents instruments de l’orchestre 
de façon très définie. Hautbois, flûte, violon, percussions à clavier, 
tout s’entremêle de façon évocatrice. Il y a très peu de blocs 
sonores, et jamais de sections utilisées comme masse. Tout est diaphane 
et scintillant. Cette musique me fait penser par moments à celle du 
Russe Valentin Silvestrov. C’est très joli. À l’autre bout du 
spectre, Jonny Greenwood propose, avec Popcorn Superhet Receiver 
un hommage bien senti à Penderecki, du moins celui des années 1960 
et 70, des quarts de tons grinçants et de la dissonance sans compromis. 
Puis, Richard Reed Parry y va d’une œuvre intrigante où les musiciens, 
connectés à des stéthoscopes, suivent les rythmes sonores de leur 
corps. For Heart, Breath and Orchestra, malgré son caractère 
aléatoire, est agréable et même ludique.  Frédéric Cardin
 Grands Trios avec Piano : Mozart, 
Beethoven, Schubert, Mendelssohn, Chostakovitch Gryphon Trio
 Analekta AN 2 9510-8 (9CD)
 
   L’ensemble canadien Gryphon Trio a enregistré pour Analekta un vaste 
répertoire de musique de chambre. Les enregistrements représentent 
bien l’évolution du trio pour piano de la période classique au préromantisme. 
Pourquoi alors avoir écarté les trios de Haydn que l’ensemble a 
déjà gravés ? On aurait aimé sa présence au coffret autant que 
celle d’un Chostakovitch qui, malgré sa musique saisissante, vient 
troubler l’unité. Ce choix s’explique mal… Mais cela n’enlève 
rien aux interprètes. Le coffret rend hommage à l’excellence de 
la formation. De Mozart à la presque intégrale Beethoven (particulièrement 
bien réussie) en passant par Schubert et Mendelssohn, la qualité musicale 
est constamment présente. Le jeu au piano de Jamie Parker est superbe 
et toujours inspiré. Les violon et violoncelle, jouant sans trop de 
vibrato, soutiennent de manière discrète le pianiste, sans jamais 
d’agressivité excessive. Ainsi, le son de l’ensemble est agréable 
et chaleureux. Les solistes n’ont ni la dureté ni la passion fiévreuse 
du Trio Borodin (Chandos). Mais à défaut d’être contrasté à l’extrême 
comme le sont d’autres ensembles, le Gryphon Trio nous fait passer 
des moments exquis, le cœur et l’esprit sont parfaitement comblés. 
 René F. Auclair
 Handel: Streams of Pleasure Karina Gauvin, soprano; Marie-Nicole  Lemieux,
 contralto; Il Complesso barocco/Alan Curtis
 Naïve V5261
 
   Ce nouvel album de Haendel avec Karina Gauvin et Marie-Nicole Lemieux, 
enregistré en Italie tôt cette année, s’intitule Streams of 
Pleasure. Quel titre adéquat ! Avec les cordes vocales de ces deux 
premières dames du chant classique canadien, tout le plaisir est pour 
nous ! Le disque comprend une sélection généreuse de quinze arias 
et duos et de neuf oratorios de Haendel, tous composés entre 1744 et 
1750, la dernière période créatrice du compositeur. Quelques-uns 
sont bien connus (Judas Maccabaeus, Hercules, Theodora), 
les deux derniers sont même parfois mis en scène comme des opéras; 
d’autres (Susanna, Joseph and his Brethren) sont relativement 
méconnus. Gauvin a un son lisse et doux, et la contralto Lemieux a 
une sonorité opulente, résonnante et puissante. Leurs voix se mélangent 
à merveille dans les quelques duos; il est difficile d’imaginer que 
l’on puisse mieux chanter To thee, thou glorious son of worth 
et Streams of Pleasure ever flowing, deux airs de Theodora. 
Si seulement tous les chanteurs avaient une diction anglaise aussi impeccable 
que la leur ! Alan Curtis a travaillé en profondeur avec les deux Canadiennes, 
et sa direction incisive et fidèle est fantastique. Le tout comporte 
de l’information utile : un essai instructif, une biographie des chanteuses, 
les paroles en français et en anglais et, le meilleur, quatre photos 
des deux femmes prises lors des séances d’enregistrement. La qualité 
sonore est de premier ordre. À mon avis, ce disque sera un concurrent 
féroce pour le titre de disque de l’année dans la catégorie vocale/oratorio. 
 Joseph K. So
 Human Misery-Human Love - Beethoven: 
Symphony No. 9 in D minor Op. 125 “Choral”  Erin Wall, soprano; Mihoko Fujimura, mezzo-soprano; Simon O’Neill, 
ténor; Mikhail Petrenko, basse; Chœur de l'OSM et Tafelmusik Chamber 
Choir/Ivars Taurins, chef de chœur invité; Orchestre symphonique de 
Montréal/Kent Nagano
 Analekta AN2 9885
 
   En septembre dernier, l'OSM a célébré l'ouverture de sa nouvelle 
salle, la Maison symphonique, en jouant la Neuvième de Beethoven. Analekta 
a sauté sur l'occasion pour l'enregistrer afin d'inclure cette interprétation 
à son projet actuel : l'enregistrement de toutes les symphonies de 
Beethoven avec l'OSM et Nagano. Or, Analekta ne se contente pas de laisser 
la musique parler d'elle-même. Chacun des fascicules porte un titre 
philosophique. Le disque de la Neuvième s'intitule « Human Misery-Human 
Love », titre qui laisse perplexe. L'explication de Nagano dans le 
livret d'accompagnement est encore plus obscure, et les mots de Yann 
Martel ajoutent à la confusion.
 En revanche, très peu de chefs d'orchestre atteignent le niveau de 
clarté qui est habituel chez Nagano, et son interprétation de la Neuvième 
est remarquable à tout point de vue. Chaque détail a été poli et 
équilibré, et l'OSM joue à merveille. Le tempo, le phrasé, le vibrato 
et l'équilibre sont fidèles au style de l'époque, ce qui veut dire 
que cette interprétation de la Neuvième est « moderne » comparée 
aux versions plus vieux jeu de Toscanini, Walter, Klemperer ou Karajan. 
Malheureusement, ce choix interprétatif implique qu'il n'y ait pas 
de réelle fougue beethovénienne. La Neuvième de Nagano ressemble 
plus à un plan qu'à une véritable exécution.
 Les solistes semblent suivre un tout autre chef d'orchestre. En effet, 
leur sonorité et leur phrasé sont beaucoup plus traditionnels que 
ce que Nagano a en tête. Quant au chœur, il chante en étant très 
fidèle au style de l'époque et semble tenu en laisse.
 Si vous aimez l'approche de Nagano, cette prestation est un triomphe 
pour l'OSM et son chef. Sinon, tournez-vous vers Blomstedt, qui a récemment 
enregistré la Neuvième. (Profil Hänssler CD PH11009).  Paul E. Robinson
 Jeffrey Ryan : Fugitive Colours Gryphon Trio, Vancouver Symphony Orchestra/
 Bramwell Tovey
 Naxos 8.572765 (69 min 13 s)
 
   Avec cette parution, Naxos inaugure sa nouvelle série Classiques 
Canadiens, notre pendant national de la série American Classics, 
déjà fort populaire et très variée. La venue d’une telle série 
est des plus prometteuses pour la diffusion de la musique d’ici, surtout 
quand on connaît l’immense réseau de distribution de Naxos ainsi 
que sa banque de musique en ligne. Pour l’instant, une seule parution 
est disponible, mais il est à espérer que cette collection suivra 
la même orientation que sa consœur du sud, c’est-à-dire qu’elle 
proposera autant des œuvres contemporaines que de la musique plus ancienne, 
jalons d’un patrimoine à promouvoir et à diffuser. Pour l’instant, 
il nous est donné d’apprécier trois œuvres de Jeffrey Rayn, un 
compositeur de Vancouver qui manie un langage accessible à une recherche 
constante de couleur instrumentale chatoyante. Le poème symphonique 
The Linearity of Light et la symphonie Fugitive Colours sont 
très intéressants et envoûtent l’auditeur. Le triple concerto 
Equilateral est quant a lui un peu plus étrange : on y entend à 
la fois du Vivier et du Chostakovitch! Néanmoins, la dynamique entre 
les trois solistes et l’orchestre est sentie. Les interprètes sont 
excellents et soutiennent avec rigueur et passion ces œuvres créées 
en collaboration étroite avec le compositeur.   Éric Champagne
 Johann Christian Bach: Missa da 
Requiem Lenneke Ruiten, soprano; Ruth Sandhoff, alto; Colin Balzer, ténor; 
Thomas E. Bauer, basse; RIAS Kammerchor; Akademie für Alte Musik Berlin/Hans-Christoph 
Rademann
 Harmonia Mundi HMC 902098 (74 min 55 s)
 
   Quelle merveilleuse découverte ! Le plus jeune Bach a écrit ici l’une 
de ses plus belles œuvres. Bien que relativement traditionnel dans 
son architecture, ce Requiem se démarque par son expression 
lyrique italianisante, lumineuse et superbement équilibrée. C’est 
à Milan que Bach composa cette Missa da Requiem peu attentive 
à la rigueur de la forme, car seules les parties Introitus, 
Kyrie et la Sequenz (déclinée en douze parties) s’y retrouvent. 
Les solistes bénéficient de partitions aérées et parfois enlevantes 
qui offrent plusieurs occasions de briller, ce qu’ils ne manquent 
pas de faire. En prime, Hans-Christoph Rademann nous propose un Miserere 
en si bémol majeur, composé à Milan également. On perçoit dans 
cette œuvre la source du Johann Christian Bach à venir, le symphonisme 
émergent, la clarté de l’expression et la puissance des affects 
suggérés. La direction de Rademann est soignée, convaincante et radieuse. 
Magnifique, à tous points de vue.  Frédéric Cardin
 Mahler : Lieder Julie Boulianne, mezzo-soprano; Marc Bourdeau, piano; Ensemble Orford/Jean-François 
Rivest
 ATMA ACD2 2665 (56 min 45 s)
 
   Le mérite de cet enregistrement est de faire connaître une version 
de chambre de deux recueils de lieder mahlériens. Leur réduction instrumentale 
est due à Arnold Schoenberg (1920) pour les Lieder eines fahrenden 
Gesellen et à Reinbert de Leeuw (1991) pour les Kindertotenlieder. 
Schoenberg a réussi son coup, et, de leur côté, Julie Boulianne et 
l’Ensemble Orford rendent bien l’esprit populaire ou nostalgique 
des « chants d’un compagnon errant » composés en 1884-1885. Mais 
une quinzaine d’années plus tard, l’écriture de Mahler est plus 
liée que jamais aux couleurs des instruments. Est-ce pour cela que 
leur réduction s’en trouve moins convaincante ? Elle sonne par moments 
comme une vague parodie de l’original, tel le début de In diesem 
Wetter, in diesem Braus. L’auditeur n’est guère ému par ce 
joyau noir incrusté dans le chef-d’œuvre. De plus, la mezzo-soprano 
semble moins à l’aise dans ce cycle. Le programme est complété 
par cinq lieder, d’un caractère tantôt convenu, tantôt torturé, 
d’Alma Mahler. Julie Boulianne les rend avec aisance, accompagnée 
au piano par Marc Bourdeau.  Alexandre Lazaridès
 Mozart : Dissonances Quatuor Ebène
 Virgin Classics 5 0999 070922 2 0 (71 min 5 s)
 
   Le jeune quatuor français Ebène, dont l’intérêt pour le crossover 
musical a consolidé la réputation, soutient que, dans le style mozartien, 
la dissonance est « un signe de maturité », ce qu’il a voulu illustrer 
en enregistrant deux des quatuors dédiés à Haydn, ceux en ré mineur 
et en do majeur, et le Divertimento KV 138, pourtant bien antérieur. 
L’exécution est, à l’évidence, calculée, sinon millimétrée; 
les indications dynamiques sont scrupuleusement rendues, dans des tempi 
en général plus lents que ceux que l’on entend d’habitude. Mais 
il est bien connu que le respect de la lettre, en soi louable, n’assure 
guère l’esprit d’une œuvre. Celui qui prévaut ici, par une emphase 
qui exclut la spontanéité et par le choix de souligner partout les 
effets, semble étranger à un compositeur aimé pour des qualités 
contraires. Le quatuor en ré mineur, cri du cœur étreignant, en souffre 
plus que celui des « Dissonances ». Une prise de son très rapprochée 
produit par moments l’impression d’une composition aux dimensions 
symphoniques, avec un violoncelle énorme. Reprenons maintenant les 
« vieux » Italiano : quel chant fluide, naturel, émouvant !  Alexandre 
Lazaridès
 Mozart: Piano Concertos nos 6, 
8 & 9 Angela Hewitt, piano et dir.; Orchestra da camera di Mantova
 Hyperion CDA67840 (75 min 23 s)
 
   Angela Hewitt se lance dans une intégrale des concertos pour piano 
de Mozart, après avoir bien servi l’œuvre de Bach, entre autres. 
Elle amorce la lecture de ce corpus imposant par les premiers concertos 
véritablement « adultes » de Mozart. À travers ces trois partitions 
enjouées et faussement juvéniles, Hewitt fait preuve d’une technique 
impeccable, agréablement allègre sans être précipitée, et d’un 
touché perlé et précis, tel qu’on l’a connu dans ses interprétations 
de Bach. L’orchestre italien qui l’accompagne est bien équilibré 
et sensible aux dynamiques imposées par la soliste. La prise de son 
favorise un piano posté bien au devant de l’orchestre, mais cela 
sans disproportion inconvenante. Aucune véritable révolution dans 
cette approche, mais une exécution solide, bien mesurée et, surtout, 
très plaisante. Vraiment joli.  Frédéric Cardin
 Musica Vaticana : Musique Polychorale Studio de musique ancienne de Montréal/
 Christopher Jackson
 ATMA ACD2 2508 (57 min 5 s)
 
   Les œuvres présentées ici proviennent presque toutes de compositeurs 
italiens qui furent directeurs de la Cappella Giulia à Rome entre 1600 
et 1743. L’autre chapelle bien connue dans la ville éternelle fut, 
bien entendu, la Sistina. Ici, cependant, nous ne sommes pas 
à Rome, mais bien à l’église Saint-Augustin de Mirabel, dont la 
sonorité chaude et feutrée a été très bien captée. Les voix riches 
de l’ensemble possèdent dans ce lieu une grande douceur d’expression 
qui plonge l’auditeur dans la contemplation et l’admiration. Les 
parties vocales se répondent à tour de rôle dans un doux balancement 
perpétuel. Les 16 voix du SMAM sont assez bien représentées dans 
l’espace sonore, ce qui nous permet de « visualiser » sans trop 
de difficulté les différentes voix et d’en apprécier le contrepoint. 
Les solistes sont regroupés en 3 ou 4 chœurs distincts et sont accompagnés 
quelques fois par une basse continue (violoncelle, harpe et orgue). 
Par contre, deux motets de Benevoli sont pour trois et quatre sopranos 
solistes. Ils sont brillamment exécutés avec des mélismes joyeux 
d’une grande virtuosité. À noter aussi la fugue qui termine le 
Dixit Dominus de Pitoni pour 16 voix en 4 chœurs : un morceau de 
bravoure !  René F. Auclair
 Schnittke : Quatuors 1-4 Quatuor Molinari
 ATMA ACD22634 (2 CD; 103 min 20 s)
 
   Si le Quatuor Molinari n’atteint pas les sommets de puissance dramatique 
du Kronos Quartet ou de précision chirurgicale du Arditti String Quartet, 
il rivalise avec ces géants— voire les surpasse—du point de vue 
du timbre (ce qui n’est pas peu dire, tout de même). En effet, la 
fusion des couleurs instrumentales s’avère si réussie qu’on croirait 
entendre à l’œuvre un instrumentiste soliste. Ce soliste imaginaire 
n’est sans doute pas immunisé contre les accrocs et une passion parfois 
affectée, mais on en compte bien peu qui le soient immanquablement. 
De toute façon, l’auditeur ne s’attarde pas longtemps aux imperfections, 
interpellé comme il l’est par les trémolos chatoyants du premier 
quatuor, la tristesse mélancolique des second et quatrième, les tutti 
enveloppants du troisième. Si cet imposant répertoire vous intéresse, 
plongez sans crainte.  René Bricault
 Schumann: Piano Sonata No. 2 in 
G minor Op. 22/Fantasie in C major Op. 17 Anton Kuerti, piano
 DOREMI DDR-6608
 
   Au cours des dernières années, Anton Kuerti a enregistré une bonne 
partie de la musique pour piano de Schumann, incluant sa musique de 
chambre et le Concerto pour piano (CBC SMCD-5218). Dans toutes 
ces productions, Kuerti a fait preuve d’une grande empathie pour les 
émotions bipolaires exprimées dans cette musique. C’est le cas ici 
aussi, mais en plus, il faut souligner une maîtrise remarquable de 
la subtilité des nuances et des tonalités qui caractérisent la contribution 
de Schumann au répertoire pianistique.
 Les prestations sont incommensurablement mises en valeur par un son 
de piano riche et clair. Il ne fait aucune doute que l’attention de 
Kuerti portée à la sonorité de son instrument a quelque chose à 
y voir, mais il faut aussi reconnaître le mérite des producteurs Jacob 
Harnoy et Clive Allen. On peut aussi supposer que l’acoustique de 
l’église unie de Willowdale de Toronto a contribué à cette belle 
réussite.
 L’inclusion du finale original de l’opus 22 est l’une des caractéristiques 
intéressantes de cet enregistrement. Kuerti a choisi de l’ajouter, 
disant qu’il s’agit d’un « deuxième scherzo ». Je pense comme 
lui que la fin du mouvement est trop abrupte pour en faire un finale 
convaincant. Le deuxième finale rassemble beaucoup plus de puissance. 
 Paul E. Robinson
 Honens Laureate Series 1) Bach: Goldberg Variations BWV 988
 Minsoo Sohn, piano
 2) Debussy/Holliger/Honegger/Ravel
 Gilles Vonsattel, piano
 3) Hindemith/Schoenberg/Stravinsky/Szymanowski
 Evgeny Starodubtsev, piano
 4) Schubert: Sonata in A major D.664/
 Drei Klavierstücke D.946/Fantasy in C major D.760/
 Allegretto in C minor D.915
 Georgy Tchaidze, piano
 
   Étant donné les contraintes d’espace et les répertoires extrêmement 
différents, on se torture à comparer et à classer tous les disques 
de ce coffret. Qu’il suffise de dire que chaque pianiste y apporte 
un petit quelque chose d’unique. Au premier rang figurent Minsoo Sohn 
et son interprétation des Variations Goldberg. Après un fabuleux 
premier disque des transcriptions de Liszt, Sohn dévoile une autre 
de ses forces avec une prestation qui rivalise avec les meilleures (oui, 
même celles de Glenn Gould de 1955 et 1981). La noblesse innée de 
son phrasé, sa sonorité chantante et surtout son imagination poétique 
coupent le souffle. Après avoir joué cette œuvre monumentale devant 
public, il la consigne enfin sur disque. Le programme tout français 
de Gilles Vonsattel se démarque également. Ce dernier montre une affinité 
hors du commun pour Debussy et Ravel et il les joue ici avec un son 
enchanteur, un grande palette de couleurs et un touché magique. Bien 
qu’elle soit un peu distante, la prise de son légèrement aérienne 
correspond au style. Comme il est écrit dans les notes d’accompagnement, 
le premier lauréat de 2009, Georgy Tchaidze, se sent particulièrement 
attiré vers Schubert et cela paraît. Il rend parfaitement justice 
à l’ouverture joyeuse et élégante, premier mouvement de la Sonate 
en la majeur. Là, son tempo animé donne un air de fraîcheur à 
cette pièce très connue. À mon avis, le jeu de Tchaidze est convaincant 
dans les morceaux lyriques et introspectifs, alors qu’il tend à en 
faire trop dans les pièces plus dramatiques et sombres comme la 
Fantaisie en do majeur. Le programme « moderne » de Starodubtsev 
est peut-être le moins connu des quatre, mais il le joue avec grande 
conviction et lyrisme. Il fait ressortir la parenté de Szymanowski 
et Hindemith avec Debussy. C’est tout à son honneur d’arriver à 
rendre Schoenberg accessible aux oreilles indifférentes. La production 
est sans tache : qualité sonore excellente, notes d’accompagnement 
pertinentes (en particulier les questions et réponses posées aux pianistes 
par Eric Friesen) et bel emballage. Si seulement il y avait une ou deux 
photos des séances d’enregistrement ! Ces quatre pianistes sont déjà 
reconnus comme étant parmi les artistes les plus prometteurs d’aujourd’hui, 
et ce coffret est une confirmation de leur talent grandissant.  Joseph 
K. So
 Traduction : Jérôme Côté English Version...
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