| Critiques1 novembre 2011 
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 Version Flash ici. Disques Aldridge: Elmer 
Gantry Florentine Opera Company; Milwaukee Symphony
 Orchestra/William Boggs
 Naxos (2CD) 8.669032-33 (2 h 21 min 38 s)
 
   On se demande pourquoi les maisons de disques s’entêtent encore à 
produire un enregistrement d’opéra, particulièrement en ce qui concerne 
une création, alors qu’il est nettement plus intéressant de le voir 
sur DVD. C’est la question qui nous vient à l’esprit en écoutant 
cet Elmer Gantry (d’après le roman éponyme de Sinclair Lewis, 
premier écrivain américain récipiendaire du prix Nobel), d’autant 
plus qu’il s’agit d’un enregistrement public où les réactions 
des spectateurs laissent deviner un spectacle fort divertissant. De 
plus, la compréhension de l’action y aurait gagné en clarté puisque 
le livret est riche et touffu. Il ne nous reste donc qu’à écouter 
la musique, franchement traditionnelle, située dans la lignée de Gershwin, 
Copland et Floyd. Loin de révolutionner le genre, la partition de Robert 
Aldridge est néanmoins colorée et propice au théâtre. Bien qu’originaux 
et non issus du répertoire, les divers gospels et hymnes religieux 
sont si convaincants qu’on ne peut qu’admirer l’habilité du compositeur 
à jongler avec ces idiomes musicaux d’une Amérique révolue. Une 
bonne distribution vocale et un bon orchestre sont au rendez-vous. Sans 
être un incontournable, cet opéra plaira à ceux qui s’intéressent 
au répertoire américain ou qui sont avides d’entendre une œuvre 
riche en références historiques.  Éric Champagne
 Beethoven: Quatuors 
op. 18 no 3 et 5 et op. 135 Quatuor Artemis (Natalia Prischepenko, Gregor Sigl, violons, Friedemann 
Weigle, alto, Eckart Runge, violoncelle)
 Virgin Classics 50999 0708342 6 (78 min 34 s)
 
   Comme pour le précédent volume de leur intégrale en cours, on peut 
admirer la maîtrise technique des Artemis sans adhérer à leur conception 
un peu trop spectaculaire des quatuors à cordes de Beethoven. Ainsi, 
la comparaison de leur exécution du dernier mouvement, marqué Presto, 
du Troisième Quatuor avec celle des Pražák ne tourne pas à leur 
avantage : s’ils l’enlèvent de façon époustouflante, non sans 
certains moments de confusion, dus en partie à la prise de son réverbérée, 
les Pražák, eux, sans lui ôter 
en rien son brio, prennent le temps de le construire pour lui conférer 
sens et solidité, avec une transparence constante du dialogue instrumental 
et un souci du chant que leurs concurrents ne possèdent pas au même 
degré. En fait, c’est tout le quatuor qui est ainsi magnifié par 
l’ensemble tchèque. Quant à l’ultime Quatuor op. 135, il 
jouit–ou souffre, selon le point de vue de l’auditeur–de l’approche 
«objective» qui caractérise l’ensemble allemand. 
Alexandre Lazaridès
 Brahms: Symphony 
No. 3 Op. 90 – Tchaikovsky: Symphony No. 6 Op. 74 
“Pathétique” Novaya Rossiya State Symphony Orchestra/Yuri Bashmet
 ICA Classics ICAC 5023 (81 min 28 s)
 
   Altiste soliste bien connu, Yuri Bashmet consacre aussi beaucoup de 
temps à la direction, en Russie notamment. Il dirige depuis dix ans 
l’Orchestre symphonique de la Nouvelle Russie (Novaya Russia). 
La musique qu’il produit avec cet ensemble suffit à le classer parmi 
les chefs les plus intéressants des vingt-cinq dernières années. 
Certains choix interprétatifs (comme l’énorme crescendo des cuivres 
dans les premières mesures du Brahms, par exemple) en rebuteront quelques-uns. 
Quoi qu’il en soit, il y a incontestablement une imagination créative 
et puissante à la barre.
 David Nice, qui a écrit les notes d’accompagnement, ne cesse de le 
comparer à Evgeny Mravinsky alors qu’il me rappelle davantage Furtwängler 
(pas seulement pour les fluctuations de tempo, mais aussi pour l’énergie 
et la précision de jeu). En plus de la grande passion, du cœur et 
de l’âme avec lesquels Bashmet dirige Brahms, il y a une beauté 
exceptionnelle du phrasé. Le Tchaïkovski est exaltant et présente 
des trombones super puissants au point culminant du premier mouvement. 
Je m’attends à ce que Yuri Bashmet, le chef d’orchestre, nous en 
donnera encore beaucoup plus. Paul E. Robinson
 Capricho Latino Rachel Barton Pine, violon
 Cedille 125 (79 min 11 s)
 
   Les disques consacrés au répertoire pour violon solo ne sont pas légion, 
alors imaginez ceux d’œuvres latines pour violon solo! Rachel 
Barton Pine aime beaucoup explorer les sentiers peu fréquentés de 
la musique de concert, ce qui constitue déjà une source de plaisir 
pour le mélomane investigateur, mais en plus, elle le fait avec une 
passion et une conviction débordantes. Sur ce disque, des figures connues, 
telles qu’Albéniz (Asturias, dans un arrangement fort réussi), 
Rodrigo (Presto extrait du Capriccio), Piazzolla (Tango 
Étude no 3) et Tarrega (Recuerdos de la Alhambra), mais 
aussi des compositeurs plutôt obscurs comme Espéjo (Prélude ibérique), 
White (Étude no 6) ou le contemporain Ridout (Ferdinand the 
Bull). Il serait fastidieux d’offrir un commentaire sur chaque 
pièce de ce copieux programme; il suffira de dire que chacune est interprétée 
avec panache par Mme Pine et qu’aucune n’est moins qu’intéressante 
pour le mélomane averti.  Frédéric Cardin
 Concord Chamber 
Music Society: Brubeck, Gandolfi, Foss Concord Chamber Music Society
 Reference Recordings RR-122 (63 min 30 s)
 
   La Concord Chamber Music Society présente trois œuvres américaines 
contemporaines, quoique d’une esthétique résolument consonante et 
accessible. Si l’œuvre de Michael Gandolfi (Line Drawings, 
pour clarinette, violon et piano) semble la plus complexe du côté 
de la technique d’écriture, elle n’en demeure pas moins intéressante 
et très accrocheuse. Quant à Chris Brubeck (fils du pianiste de jazz 
Dave Brubeck), il offre un heureux mélange de rythmes latins et de 
structure classique. Conçue pour six musiciens, Danza del Soul 
est une œuvre accomplie, cohérente et très agréable à écouter. 
Un plaisir renouvelé avec le Central Park Reel de Lukas Foss, 
pour violon et piano, qui clôt ce disque. Oui, il s’agit bel et bien 
d’un reel, mais loin d’être bêtement folklorique, cette 
musique se métamorphose de façon saugrenue et surprenante, conservant 
constamment l’attention de l’auditeur tout en éveillant un petit 
sourire ici et là. Les musiciens sont de très haut calibre (certains 
sont membres de l’Orchestre symphonique de Boston!) et ils offrent 
une prestation à la fois soignée et profondément engagée. Un disque 
sympathique et divertissant. Éric Champagne
 Debussy: Orchestral 
Works Volume 6 (Suite bergamasque/Petite Suite/En blanc et noir/Printemps/Symphony 
in B minor) Orchestre National de Lyon/Jun Märkl
 Naxos 8.572583 (74 min 21 s)
 
   Le sixième, et probablement dernier, volume de cette série contient 
des adaptations orchestrales de pièces pour piano, quelques-unes transcrites 
par des collègues de Debussy et d’autres par nos contemporains. La 
Suite bergamasque en quatre mouvements est l’une des pièces les 
plus accessibles du compositeur et inclut le très populaire Clair 
de lune. Cette pièce mérite bien sa popularité, et on pourrait 
difficilement imaginer une orchestration plus fidèle que celle proposée 
ici par André Caplet. Aussi, la transcription de Henri Büsser de la 
Petite Suite saisit parfaitement le charme évocateur de la musique.
 En outre, Büssler orchestra Printemps, la pièce la plus impressionniste 
de Debussy et encore là, il trouve un mélange idéal de couleurs subtiles. 
En blanc et en noir est un ensemble de pièces bien plus singulières, 
et l’arrangement de Robin Holloway fait en 2002 souligne cette étrangeté. 
Je soupçonne que Caplet ou Büssler auraient adouci certaines aspérités.
 Enfin, il y a la première tentative symphonique de Debussy. Il avait 
18 ans quand il l’a commencée. Il n’a écrit qu’un premier mouvement 
pour piano quatre mains avant d’abandonner. Tony Finno en a fait une 
orchestration. Son travail nous permet de mieux comprendre Debussy, 
mais ne réussit pas à nous convaincre qu’il s’agit d’un chef 
d’œuvre négligé. Les interprétations entendues sur le CD sont 
adéquates.  Paul E. Robinson
 Echoes: Classic 
Works Transformed Seattle Symphony Orchestra/Gerard Schwarz
 Naxos 8.559676 (53 min 41 s)
 
   L’idée était amusante: demander à un compositeur contemporain de 
transformer selon son imagination une œuvre du répertoire classique. 
Cependant, le résultat est plutôt inégal. Certains compositeurs se 
sont limités à réaliser une orchestration bien sage (comme cet intermezzo 
de Brahms choisi par Bright Sheng) ou encore à concevoir un arrangement 
sans trop de saveur (comme le concerto grosso de Haendel arrangé par 
le chef Gerard Schwarz). La plus décevante est peut-être la pièce 
d’Aaron Jay Kernis, qui est une orchestration de son propre quatuor 
à cordes. Ce n’est pas mauvais, mais ce n’est pas un classique 
revisité. Lui a-t-on bien expliqué le concept? Néanmoins, certaines 
pièces se démarquent avantageusement du lot. David Stock présente 
sa vision du Trumpet Volontary de Clarke avec une maîtrise surprenante 
des effets orchestraux. Quand à John Harbison, il propose une relecture 
symphonique du célèbre Ruby, My Dear de Thelonius Monk. Cette 
relecture un peu sage apporte cependant une classe et une élégance 
touchante à cette musique envoûtante. La plus grande réussite du 
projet est probablement Infernal de David Schiff : une version 
jazzy de la Danse infernale 
de L’Oiseau de feu de Stravinski, qui a le mérite d’être 
tout aussi originale qu’intéressante.  Éric Champagne
 Elgar: In the 
South – Introduction and Allegro 
– Enigma Variations Stuttgart Radio Symphony Orchestra (SWR)/Roger Norrington
 Hänssler Classic CD 93.191 (70 min 16 s)
 
   Roger Norrington dirige l’Orchestre symphonique de la Radio de Stuttgart 
depuis 1998. Au dire de tous, son règne est mémorable. Son legs est 
généreux chez Hänssler Classics: un répertoire vaste et varié. 
Les mélomanes qui ont grandi en écoutant Boult diriger Elgar trouveront 
qu’ici, l’Elgar de Norrington est bien plus robuste. Norrington 
ne se gêne pas pour donner beaucoup de poids aux sections de cuivres 
et de percussion. La perspective sonore nous laisse assez peu apprécier 
les cordes, ce qui est probablement causé par l’enregistrement. L’ouverture 
de In the South n’a jamais eu, à mon avis, un caractère aussi 
straussien. Or, Norrington parvient à extraire toute la tristesse de 
l’œuvre avec le solo d’alto. Les excellentes cordes du Stuttgart 
sont mises à l’honneur dans Introduction and Allegro, par 
contre (encore une fois), les techniciens du son ne leur ont pas donné 
beaucoup de chaleur ni de profondeur. Les Variations Enigma sont 
impressionnantes: le caractère de chacun des personnages est brillamment 
représenté.  Paul E. Robinson
 Ferrara: Fantasia 
Tragica; Notte di Tempesta; Burlesca; Prelude Orchestra Sinfonica di Roma/Francesco La Vecchia
 Naxos 8.572410 (46 min 41 s)
 
   Franco Ferrara (1911-1985) était professeur et chef d’orchestre en 
plus d’être, apparemment, un compositeur efficace. Bien entendu, 
le plus grand exemple de chef d’orchestre dont on redécouvrit plus 
tard l’œuvre écrite est Gustav Mahler. Mais depuis quelques années, 
on ressuscite également les partitions de Furtwängler, Szell et même 
Serebrier. Bien que Ferrara n’ait pas été du calibre de ces grands 
chefs (la maladie l’empêcha de s’épanouir en ce sens, mais il 
fut un professeur privé grandement recherché), il laissa néanmoins 
sa marque et ses compositions apparaissent éminemment agréables et 
accessibles tout en étant bien enracinées dans le 20e siècle. 
La Fantasia Tragica se développe lentement mais inexorablement 
vers une conclusion émotivement intense et contient une mélodie plutôt 
accrocheuse. Les autres œuvres au programme ont quelque chose de Chostakovitch, 
sans cependant manifester une certaine véhémence du compositeur russe.  
Frédéric Cardin
 Haydn: Symphonies 
nos 104, 88 & 101 Philharmonia Baroque Orchestra/Nicholas McGegan
 Philharmonia Baroque Productions PBP-02 0945732 (62 min 14 s)
 
   Le Philharmonia Baroque (de San Francisco) est l’un des meilleurs 
ensembles consacrés à la musique ancienne et surtout baroque. Nicholas 
McGegan sait insuffler une énergie fringante aux œuvres qu’il touche 
de sa baguette. Ces symphonies de maturité de « Papa Haydn » ne font 
pas exception. Sous la direction énergique de McGegan, les bois s’envolent, 
les cordes virevoltent et les mélodies de Haydn prennent une tournure 
toute pimpante. L’orchestre manque parfois de tonus pour bien équilibrer 
l’effet recherché, surtout dans les finales, mais l’éclat de l’ensemble 
demeure sémillant.  Frédéric Cardin
 J.-S. Bach et 
I. F. Biber: Sonates Evgeny Sviridov, violon; Zita Mikijanska, clavecin
 Genuin GEN 11207 (CD : 65 min 46 s)
 
   L’étiquette allemande Genuin a réservé au lauréat russe du Concours 
international Bach, catégorie violon, tenu à Leipzig en 2000, le traitement 
accordé d’habitude aux célébrités: sur la pochette du CD, son 
nom domine largement, autant par la disposition que par la typographie, 
ceux des compositeurs. Son accompagnatrice, Lettonne talentueuse, en 
est tout à fait absente. À l’écoute, une telle « médiatisation» 
ne paraît guère justifiée. Les deux sonates de Bach (BWV 1016 et 
1021) et la Troisième Partita, œuvres supérieurement difficiles, 
si elles sont rendues avec fidélité, « telles quelles», pourrait-on 
dire, ne démontrent pas une aisance affirmée de la part du violoniste. 
Le registre aigu semble même quelquefois imparfaitement maîtrisé 
(la prise de son trop proche et la réverbération du lieu pourraient 
y être pour quelque chose). Sviridov manifeste plus d’assurance dans 
les deux ingénieuses sonates de Biber, plus extérieures aussi, sans 
que, pour autant, la beauté sonore soit entière. Il s’agit donc 
d’un talent prometteur qu’il serait intéressant de réentendre 
dans quelques années. Alexandre Lazaridès
 Max Reger: Four 
Sonatinas John Newmark, piano
 XXI-21 Productions XXI-CD 2 1691 (CD1: 41 min 15 s; CD2: 45 min 11 s)
 
   Comme toujours depuis sa création, la maison XXI s’emploie à faire 
connaître des enregistrements rares en les rééditant sur CD et l’auditeur 
découvre ou redécouvre des compositeurs moins connus, mais non moins 
intéressants. Il s’agit cette fois du compositeur bavarois Max Reger 
(1873-1916). Peut-être mieux connu pour ses variations et fugues sur 
des thèmes de Bach et Mozart, c’est dans de petites pièces pour 
piano que Reger démontra tout son talent et sa grande sensibilité. 
Le pianiste John Newmark a enregistré ces sonatines de Reger en 1964 
et, grâce à l’équipe de la maison XXI, cette musique à la fois 
intense et sensible fait le bonheur des mélomanes d’aujourd’hui. 
Le coffret de deux CD, sobre et classique, ne passe pas inaperçu sur 
les présentoirs. Un bémol cependant: le livret d’accompagnement 
est en anglais seulement.  Francine Bélanger
 Robert Moran: 
Trinity Requiem Trinity Choir &Trinity Wall Street/Robert Ridgell
 Innova 244 (66 min 8 s)
 
   La musique du compositeur américain Robert Moran, associé au mouvement 
minimaliste (surtout après une collaboration avec Philip Glass), se 
caractérise par une économie de moyen et sa sensibilité. Son Trinity 
Requiem arrive juste à temps pour souligner le 10e anniversaire 
des attentats du 11 septembre. D’une sérénité étonnante, cette 
œuvre possède l’aura de douceur du Requiem de Fauré, tout 
en conservant une couleur éminemment américaine. Le programme est 
complété par deux œuvres chorales emblématiques du travail du compositeur. 
On retiendra sans réserve les Seven Sounds Unseen pour chœur 
mixte a capella. La science d’écriture et le souffle mélodique se 
concertent en une musique envoûtante et hypnotisante, digne des grands 
chefs-d’œuvre vocaux de la Renaissance. Là encore, l’économie 
de moyens et la simplicité du geste sonore vont droit au but et touchent 
le cœur et l’esprit. Finalement, le disque se termine sur un étrange 
hommage du compositeur Philip Blackburn qui crée un remix du Trinity 
Requiem à partir de diverses pistes préenregistrées. Étrange 
idée, quoique le résultat demeure dans l’esprit de Moran. Un beau 
disque, à la fois apaisant et inspirant, pour tout amateur de musique 
chorale. Éric Champagne
 Schoenberg: Symphonie 
de chambre no 1 op. 9, Suite 
op. 29 Ensemble Zahir/Juan García Rodríguez
 Naxos 8.5721442 (CD : 56 min 52 s)
 
   Bien que conçue et écrite pour quinze instruments (cinq cordes, huit 
bois, deux cuivres), la Première Symphonie de chambre (1907) 
est donnée ici dans la transcription qu’en a faite Webern pour cinq 
instruments, le piano remplaçant ceux qui ont été mis de côté. 
Cette transcription, menée avec un remarquable savoir-faire et une 
compréhension approfondie de l’opus 9, met en valeur la structure 
et les thèmes, mais elle sacrifie les sonorités voulues par Schoenberg, 
et peut-être un peu de l’esprit iconoclaste qui l’animait, même 
si le principe de la tonalité n’y est pas encore abandonné. Quant 
à la Suite (1927), écrite pour sept instruments (trois cordes, 
trois bois, piano) et formée de quatre mouvements, elle subvertit avec 
ironie la suite de danses traditionnelle, intégrant aussi jazz et musique 
populaire sans tomber dans le fourre-tout du métissage. L’ensemble 
sévillan Zahir, fondé en 2005 par Rodríguez, défend cette musique 
avec conviction, mais on aurait souhaité un peu plus d’allant.
 Alexandre Lazaridès
 Schubert: Symphonie 
no 9 en do «La Grande» Royal Flemish Philharmonic/Philippe Herreweghe
 Pentatone Classics PTC 5186372 (57min 49 s)
 
   En 1826, après plusieurs essais inachevés, Franz Schubert termina 
enfin sa «Grande». Elle fut jugée à l’époque trop difficile pour 
être exécutée convenablement. Depuis, elle a été enregistrée plus 
d’une fois par les plus grands orchestres. C’est une œuvre majestueuse 
et de grande proportion. Herreweghe, reconnu surtout comme chef de chœur 
et spécialiste de la musique baroque, a opté pour une approche plus 
légère: cordes sans vibrato, effectifs de l’orchestre réduits, 
tempi rapides… On reconnaît dès le départ sa signature: pureté 
des lignes mélodiques, clarté du discours musical, attaques précises 
de l’orchestre. Le chef conduit la Philharmonie Royale de Flandre 
avec beaucoup d’énergie et de virtuosité. Ces choix esthétiques 
peuvent plaire et surprendre dès la première écoute, mais ils peuvent 
aussi décevoir l’auditeur, habitué à plus de lenteurs et de grandeur 
solennelle. Ainsi, certains passages semblent manquer de lyrisme et 
de chaleur. On cherche en vain le drame et l’émotion dans certains 
mouvements. Dans les passages forts, la sonorité de l’orchestre devient 
parfois tapageuse. Et l’on remarque aussi quelques manques de justesse 
chez les vents. Finalement, le résultat d’ensemble est décevant 
malgré les qualités esthétiques mentionnées. Pour plus de profondeur, 
on préférera Wand (RCA), Böhm (DG) ou Blomstedt (BC).  René 
François Auclair
 Schumann: Requiem 
- Der Königssohn - Nachtlied Sibylla Rubens, soprano; Ingeborg Danz, alto; Christoph Prégardien, 
ténor; Adolph Seidel, baryton; Yorck Felix Speer, basse; Kammerchor 
Saarbrücken; Deutsche Radio Philharmonie; Saarbrücken Kaiserslautern/Georg 
Grün
 Hänssler CD 93.270 (72 min 20 s)
 
   Cet enregistrement est un événement en soi. Trois œuvres chorales 
méconnues de Schumann sont illuminées avec panache et sensibilité 
dans cette gravure rien de moins qu’exceptionnelle. Presque mozartien 
dans sa fatalité, ce Requiem composé en 1852 (quatre ans avant 
le décès du compositeur) ne fut jamais entendu par Schumann. Il se 
déploie avec aisance et retenue, l’équivalent schumanien, dirait-on, 
du même exercice accompli par Fauré bien des années plus tard. Ici, 
Schumann semble confier son âme à son inexorable destin, à mille 
lieux des tourments dévastateurs de ses dernières années. La beauté 
de ce chef-d’œuvre de spiritualité intime est remarquable. Son oubli 
et son obscurité, encore de nos jours, sont totalement incompréhensibles. 
La ballade Königssohn (Le Fils du roi), op. 116, date de 1851 
et raconte en six mouvements l’histoire d’un fils de roi qui part 
sans le sou à la recherche d’un royaume à conquérir. Typiquement 
romantique, le dévoilement du destin du héros, de son courage et de 
sa réussite complète une sorte de rite de passage caractéristique 
des contes anciens. Schumann accompagne le texte d’une musique édifiante 
et lyrique. Nachtlied, op.108, est une courte pièce pour chœur 
et orchestre, magnifiquement orchestrée, toute en subtiles teintes 
et contours harmoniques et vocaux. Frédéric Cardin
 Tabarinades Les Boréades/Francis Colpron
 ATMA Classique ACD2 2658 (CD : 59 min)
 
   Deux précisions fournies par le programme éclairent le titre du CD: 
«Musiques pour le théâtre de Tabarin» et «Danses et chansons françaises 
aux instruments (1550-1650)». Il s’agit donc d’une musique pour 
un théâtre populaire, divertissant, certes, mais aussi critique à 
l’égard des travers sociaux de l’époque. Tabarin en avait été 
l’âme, et Molière n’a pas manqué de reconnaître en lui un précurseur 
et un inspirateur. Musique festive aussi, que les Boréades en grande 
forme, avec treize instrumentistes, réussissent à recréer pour nous, 
sous la direction attentive de Francis Colpron. Quelque trente pièces, 
dont plusieurs ont été adaptées par le chef, sont signées d’une 
quinzaine de compositeurs plus ou moins connus. Même enjouées et fortement 
rythmées par d’entraînantes percussions, elles semblent toutes empreintes 
d’une nostalgie, voire d’une mélancolie, venue du fond des âges, 
ce que l’on ressent en particulier dans celles qui sont réservées 
aux seules cordes, à cause de leur timbre voilé peut-être. À la 
flûte, Francis Colpron emballe son monde avec les pépiements et les 
gazouillements dont il a le secret. Un régal... pour les oreilles!  
Alexandre Lazaridès
 The Pulitzer Project Grant Park Orchestra and Chorus/Carlos Kalmar
 Cedille Records CDR 90000 125 (74 min)
 
   Merveilleuse initiative musicologique que ce Pulitzer Project, qui nous 
fait revivre les années quarante, époque difficile, mais charnière 
de l’histoire musicale américaine. À entendre les œuvres magnifiques 
de William Schuman (A Free Song, 1943), Aaron Copland (Appalachian 
Spring) et Leo Sowerby (The Canticle of the Sun), on saisit 
le prestige du prix. L’acoustique est remarquable et la prise de son 
si impeccable que les éclats des grands chœurs et ensembles n’en 
paraissent que plus brillants, plus polis. La production est à la hauteur 
de la monumentalité des œuvres, à l’esthétique, il va sans dire, 
très américaine. Soulignons la précision inouïe du chœur, qui fait 
preuve d’une subtilité d’expression remarquable pour un ensemble 
d’une telle envergure. Finalement, on note le sens de la mélodie 
du chef Carlos Kalmar, qui manie à merveille les Appalachian Songs, 
les présentant avec le sérieux qu’ils méritent, sans tomber dans 
l’emphase.  Julie Berardino
 Vivaldi: Vespro 
a San Marco Les Agrémens; Chœur de chambre de Namur/
 Leonardo Garcia Alarcon
 Ambronay AMY029 (2CD: 117 min 48 s)
 
   Un cycle de Vêpres à la Vierge de Vivaldi ? Est-ce possible? Grâce 
aux recherches de Leonardo Garcia Alarcon, ancien membre de la troupe 
de Gabriel Garrido, il semble que oui (bien que quelques entourloupettes 
aient été nécessaires). Alarcon s’est servi de pièces déjà existantes 
composées par le Prêtre Roux qui s’insèrent logiquement dans la 
séquence habituelle du cycle des vêpres. Le résultat, bien qu’indéniablement 
attrayant, ressemble plus à une collection d’œuvres sacrées (toujours 
bienvenue dans le cas de Vivaldi) qu’à un cycle vraiment cohérent 
comme celui de Monteverdi. Qu’à cela ne tienne, Alarcon réussit 
à créer l’illusion assez réjouissante de ce qu’aurait pu être 
un tel cycle composé par le célèbre Vénitien s’il en avait décidé 
ainsi. Les solistes sont très solides, bien que parfois un peu poussifs 
dans la projection des affects. Malgré quelques bémols bien légers, 
on ne peut que saluer une entreprise aussi originale que bien intentionnée.  
Frédéric Cardin
 DVD Argerich & 
Maisky: Dvořák, Shchedrin, Franck 
and Shostakovich Martha Argerich, piano; Mischa Maisky, violoncelle; Lucerne Symphony 
Orchestra/Neeme Järvi
 Accentus Music DVD ACC 20224 (111 min 36 s)
 
   En voici de la nouveauté: Martha Argerich jouant en première mondiale 
de la musique d’un compositeur vivant! Sa réputation s’assoit sur 
des exécutions à couper le souffle de pièces du répertoire du 19e 
siècle. Mais Argerich est une musicienne d’exception et qu’elle 
puisse jouer n’importe quoi ne surprend guère, cela ne dépend que 
de son bon vouloir. Ici, le compositeur russe Rodion Shchedrin, dans 
un élan d’inspiration, a écrit une pièce pour Argerich et son collègue 
et ami de longue date Mischa Maisky. Après l’avoir écouté deux 
fois, j’ai trouvé ce morceau de plus en plus intéressant: il fait 
preuve de beaucoup de réflexion et d’énergie. Un autre duo osera-t-il 
s’attaquer à cette œuvre après avoir entendu ce qu’Argerich et 
Maisky peuvent en faire? Ce concert était donné à Lucerne l’an 
dernier et, bien que le programme soit bizarrement construit, toutes 
les pièces sont époustouflantes. Argerich et Maisky interprètent 
la très populaire sonate de Franck comme s’il s’agissait d’une 
longue improvisation inspirée, tout simplement magnifique. Bien que 
Neeme Järvi et l’Orchestre symphonique de Lucerne (à ne pas confondre 
avec l’ensemble glorieux de l’Orchestre symphonique du Festival 
de Lucerne) se retrouvent quelque peu dans l’ombre de ce grand duo, 
ils font tout de même de la grande musique. L’orchestre est excellent 
et Järvi dirige comme un maître les œuvres de Dvořák et de Chostakovitch. 
Paul E. Robinson
 Haendel: Theodora Christine Schäfer (Theodora), Bejun Mehta (Didymus), Joseph Kaiser 
(Septimius), Johannes Martin Kränzle (Valens), Bernarda Fink (Irene) 
et Ryland Davies (Messager); Freiburger Barockorchester, Salzburger 
Bachchor/Ivor Bolton
 Christof Loy, metteur en scène
 Cmajor 705708 (2 DVD : 189 min)
 
   Cette production salzbourgeoise de 2009 donne raison à Haendel qui 
affirmait préférer Theodora à ses autres compositions. Cet 
oratorio, riche en arias comme en interventions chorales magnifiques, 
est servi par un plateau de solistes idéal, avec une Schäfer bouleversante 
d’intériorité, en particulier dans le grand moment du deuxième 
acte, With darkness deep as my woe. Le Freiburger Barockorchester 
est bien mené par le chef, quoique peut-être alourdi par des basses 
trop en relief. Reste que Theodora n’est pas un opéra: Haendel 
y a subordonné le heurt entre les deux martyrs chrétiens et Valens, 
le brutal gouverneur romain, à l’introspection à saveur mystique. 
Pour compenser l’absence d’effets visuels, le metteur en scène 
a opté pour une modernisation audacieuse, voire forcée, à lire de 
toute manière à un autre niveau que celui du livret. Acteurs et figurants 
sont en tenue de ville, certains jeux de scène sont à tout le moins 
gratuits, et, dans cette optique dramatisée, Septimius (un officier 
romain) ou Irene (une chrétienne) perdent leur déjà faible pertinence. 
La vaste scène parsemée de chaises et fermée par un immense orgue 
est le théâtre de multiples va-et-vient, ce que le découpage vidéo, 
très morcelé, rend souvent difficile à suivre.  Alexandre Lazaridès
 Verdi: Un ballo 
in maschera Placido Domingo (Gustavo), Josephine Barstow (Amelia), Leo Nucci 
(Anckarström), Sumi Jo (Oscar), Florence Quivar (Ulrica); Wiener Philharmoniker/Sir 
Georg Solti
 Arthaus Musik 107 271 (145 min)
 
   Cet opéra aurait dû être dirigé par Herbert von Karajan, mais il 
s’est éteint lors des répétitions. Georg Solti a sauvé la situation 
en prenant le tout en charge à la dernière minute. John Schlesinger 
et William Dudley ont fait une production fort extravagante et très 
adéquate qui fut présentée à nouveau l’année suivante et marqua 
l’histoire. Les raisons pour lesquelles cette production extrêmement 
chère n’a eu qu’une durée de vie aussi courte restent inconnues, 
mais on pourrait supposer que son style ultratraditionnel déplaisait 
à l’esthétique de l’élite artistique. Ce Un ballo in maschera 
se sert d’un décor suisse fidèle à l’idée de Verdi (quoique 
Riccardo remplace le roi Gustavo III et Renato, le conte Ankarström). 
Le baguette de Solti est incisive et excitante, mais n’a pas la beauté 
lyrique que Karajan avait apportée à l’œuvre. (Pour faire vous-même 
la comparaison, trouvez l’enregistrement studio chez DG où un an 
plus tôt, Karajan dirige les mêmes musiciens). Le chant est très 
solide dans son ensemble: Riccardo est l’un des plus grands rôles 
de Domingo, il le joue avec beaucoup d’intensité et le chante d’une 
voix lustrée et résonante. Par contre, il contracte quelques notes 
hautes et omet le do aigu dans le duo d’amour. La voix de Josephine 
Barstow ne se prête pas naturellement à Verdi, mais elle a relevé 
le défi et s’en est bien sortie. Leo Nucci est un Renato impeccable; 
Florence Quivar, une protégée de Karajan, incarne Ulrica tout aussi 
bien. Sumi Jo (Oscar) a une voix cristalline, mais petite. Il n’y 
a aucune date d’enregistrement exacte dans le livret d’accompagnement, 
mais la prestation est sans doute un montage. L’image est excellente, 
quoiqu’un peu sombre. Il s’agit probablement du meilleur Un ballo 
in maschera sur vidéo, surtout avec Domingo comme principal plaisir. 
On peut entendre et voir ce ténor dans de nombreux enregistrements 
différents de cet opéra. Les interprétations de 1975 avec Muti et 
de 1975 au Covent Garden devant public montrent un Riccardo bien plus 
jeune et sont aussi d’excellents choix. Joseph K. So
 Traduction: 
Jérôme Côté English Version...
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