Critiques
1 octobre 2011
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DISQUES
Ann Southam : Soundings
for a new piano
R. Andrew Lee, piano
Irritable Hedgehog Music IHM 002 (22 min 44 s)
Magnifiques musiques que ces Soundings for a new piano de la
compositrice canadienne Ann Southam! Sous-titrée 12 meditations
on a twelve tone row, l’œuvre démontre un intérêt pour la
construction sonore élaborée, héritée des techniques sérielles
de Schoenberg. Cependant, Ann Southam se montre nettement plus flexible
que le maître viennois et crée une musique intensément poétique,
aux couleurs chatoyantes et évocatrice. Ces 12 miniatures s’écoutent
avec un vif intérêt et confirment qu’il y a bel et bien une musique
canadienne contemporaine de haut calibre. Le seul défaut, c’est que
l’œuvre ne dure que 22 minutes et que, seule au programme de cet
enregistrement, cela n’en fait pas un disque particulièrement généreux.
Sincèrement, on en aurait demandé plus! L’œuvre de cette compositrice
le mérite grandement, surtout lorsqu’elle est interprétée avec
la rigueur et la sensibilité dont fait preuve R. Andrew Lee. Ce CD
constitue néanmoins une bonne initiation à l’univers sonore de cette
créatrice canadienne décédée en 2010. Éric Champagne
Beethoven: Piano
Sonatas 8 «Pathetique», 17 «Tempest»
& 23 «Appassionata»
Ingrid Fliter, piano
EMI 0945732 (72 min 47 s)
Ingrid Fliter est une pianiste argentine qui nous a déjà offert de
très beaux enregistrements de Chopin. Elle s’attaque ici à trois
sonates beethoveniennes parmi les mieux aimées du grand public. Sa
vision des œuvres est juste, sa technique solide et son discours fluide
et convaincant. Elle amorce sa Pathétique avec profondeur et
solidité rythmique. Sa Tempête
virevolte et frappe avec plus d’incision que plusieurs autres sur
le marché et son Appassionata est intensément contrastée.
Une lecture à découvrir. Frédéric Cardin
Beethoven: Symphony
No. 9 Op. 125 «Choral»
Edith Wiens, soprano; Ute Walter, mezzo-soprano; Reiner Goldberg,
ténor; Karl-Heinz Stryczek, baryton; Dresden State Opera Chorus, Staatskapelle
Dresden/Herbert Blomstedt
Profil Hänssler CD PH11009 (71 min 42 s)
Herbert Blomstedt est devenu, à l’âge de 83 ans, l’un de ces chefs
d’orchestre dont l’expérience et le savoir imposent le respect
des orchestres de partout. En d’autres mots, une légende vivante.
Cette Neuvième Symphonie de Beethoven ne fait qu’augmenter
sa gloire. Bien que les notes d’accompagnement ne précisent ni où
ni quand l’enregistrement eut lieu, les applaudissements retentissant
à la toute fin indiquent qu’il s’agit d’un concert devant public,
ce qui fait de cet album une référence remarquable.
Blomstedt appartient à cette grande lignée de chefs d’orchestre
beethovéniens dont Weingartner, Busch, Böhm et Karajan font partie.
Cette Neuvième, préparée méticuleusement, est terriblement
excitante. Dans le premier mouvement, le point culminant à la récapitulation
est adéquatement apocalyptique, tout comme le finale. Les tempos rapides
n’ont pas l’air pressés. De plus, lors du mouvement lent, on accorde
beaucoup de temps aux phrasés expressifs.
Le Chœur de l’Opéra national de Dresde chante superbement dans le
finale, et les solistes, menés par la soprano canadienne Edith Wiens,
sont tous très bons. Cette interprétation de la Symphonie no 9
figure parmi les meilleures jamais mises sur disque. Paul E. Robinson
Couperin: Concerts
royaux
Bruce Haynes, hautbois; Arthur Haas, clavecin; Susie Napper, viole
de gambe
ATMA Classiques ACD2 2168 (57 min 43 s)
Ce disque est une réédition d’un album paru en 1999, réalisée
en l’honneur de Bruce Haynes, facteur d’instruments, musicien, musicologue,
professeur, éditeur et écrivain décédé trop tôt il y a quelques
mois à peine. L’élégance assurée du jeu de Haynes fait encore
mouche, sa passion et son respect profond de la musique transcendent
encore toute la production. Il est en compagnie d’Arthur Haas au clavecin
et de Susie Napper (son épouse) à la viole de gambe, tous deux intimement
complices de la vision du soliste. La contribution de Bruce Haynes à
l’épanouissement et la reconnaissance du répertoire musical baroque
ainsi que de l’ensemble du contexte historique de cette riche période
de développement humain et artistique reste encore à pleinement mesurer.
Heureusement, c’est grâce à des productions comme celles-ci que
sa mémoire sera conservée et nourrie. Frédéric Cardin
Daniel Janke:
Cinco Puntos Cardinales
Mark Fewer, violon; Daniel Janke, piano préparé;
Coro in Limine
Centredisques CMCCD 16911 (34 min 23 s)
Cette nouvelle parution sur étiquette Centredisques regroupe les musiques
composées par Daniel Janke pour une œuvre chorégraphique d’Yvonne
von Mollendorff créée en 2002 à Lima au Pérou. À la musique originale
conçue pour ce projet (des œuvres pour violon solo et d’autres pour
ensemble de voix d’hommes) se sont ajoutées des séquences électroacoustiques
et quelques autres pièces aux formations instrumentales variées. Le
résultat, malgré sa courte durée, est très intéressant de par son
amalgame sonore et la grande diversité des styles. Les passages pour
violon solo sont particulièrement fascinants: simples et épurés,
ils nous transportent dans un état de méditation et de contemplation
d’une profondeur insoupçonnée. Il est difficile de concevoir l’apport
de cette musique au spectacle de danse sans l’avoir vu, mais lorsque
écoutée pour elle même, cette œuvre musicale se révèle à la fois
très ludique (la Grand Waltz en est un bon exemple) et profondément
réfléchie, imagée et inspirante. Une très belle réalisation.
Éric Champagne
Dvořák:
Variations symphoniques - Symphonie n°
8
Orchestre philharmonique de Londres/Charles Mackerras
LPO – 0055 (CD : 60 min 21 s)
Les affinités de Charles Mackerras avec la musique tchèque avaient
fait du chef australien un spécialiste et un promoteur internationalement
admiré de Janáček, de Smetana et de Dvořák. En témoigne, entre
autres, le présent enregistrement capté devant le public londonien
en 1992. Le programme vaut surtout pour la Symphonie, les
Variations symphoniques semblant moins enlevées, quoique tout à
fait honnêtes. Cette Huitième est comme saisie de l’intérieur
tant elle respire naturellement. L’Orchestre philharmonique de Londres
se laisse galvaniser par le chef, encore que la prise de son puisse
laisser à désirer dans les passages puissants. Reste que Mackerras
s’était surpassé avec cette même Huitième
dans l’exécution qu’il en avait donnée à la tête de l’Orchestre
symphonique de Prague, en communion totale avec le chef (Supraphon,
2005). Le refus de tout effet, même justifiable, démontrait que Mackerras
avait maîtrisé l’art supérieur de la transition, étant donné
que, dans cette œuvre, les contrastes rythmiques et mélodiques abondent.
C’était là une des très grandes interprétations de cette superbe
Symphonie, peut-être la plus belle du compositeur. Alexandre
Lazaridès
Jadin: Quatuors
à cordes Œuvre 1re
Quatuor Franz Joseph
ATMA Classiques ACD2 2610 (65 min 17 s)
Hyacinthe Jadin (1776-1800) est un enfant prodige dont nous ne conservons
que très peu de traces aujourd’hui, malgré le fait que sa courte
vie (abruptement interrompue par la tuberculose) et encore plus courte
carrière virent la création de plusieurs œuvres marquantes pour le
développement de la musique française, en particulier sa marche vers
le romantisme. Avant sa mort à 24 ans, Jadin composa pas moins de trois
concertos pour piano, une douzaine de quatuors à cordes, des trios
et plusieurs sonates. La profondeur de caractère et d’inspiration
est étonnante chez ce jeune homme. Le Quatuor Franz Joseph apporte
une assurance sans failles à la lecture des trois opus ici présentés,
soit les trois premiers du cycle de douze conçu par Jadin. Les membres
de l’ensemble montréalais offrent une interprétation décisive de
ce répertoire richissime qui attendait une telle maîtrise pour être
dignement ressuscité. De façon surprenante, c’est le premier (en
si bémol majeur) qui est le plus dramatique. Les deux autres sont d’une
écriture plus légère et bon enfant, tout en demeurant grandement
dignes d’intérêt. On ne pourra nier que la patte de Haydn n’est
pas très loin, mais la puissance dramatique de certains passages démontre
que Jadin s’apprêtait à transporter la musique française dans un
tout autre registre. Dommage qu’il n’ait pas eu le temps de réaliser
cette vision. Frédéric Cardin
Mathieu Lussier :
Passages
Quintette à vents Pentaèdre, Claudia Schaetzle, saxophone alto;
Fraser Jackson, contrebasson; Louise Lessard, piano
ATMA classique ACD2 2657 (71 min 39 s)
Musicien très actif sur la scène musicale québécoise (Arion, les
Violons du Roy, Pentaèdre...), le bassoniste Mathieu Lussier s’adonne
à la composition depuis 15 ans. Naturellement, c’est vers le basson
et les instruments à vents que son intérêt se porte. Avec Passages,
Mathieu Lussier, le compositeur, regroupe pour la première fois un
programme complet de sa musique, interprétée par ses collègues du
quintette à vents Pentaèdre et quelques musiciens invités. De langage
tonal et d’esthétique classique, ses œuvres sont à des années-lumière
de toute avant-garde ! Néanmoins, certaines pièces possèdent un charme
suranné au lyrisme généreux, évoquant la musique de chambre du XIXe
siècle. D’une qualité d’écriture certaine, sa musique demeure
très traditionnelle, et parfois même un peu trop sage (on pense à
la Bacchanale qu’on aurait aimée plus orgiaque). Il faut néanmoins
souligner le magnifique Sextuor, d’une plus grande liberté
et dont les variations finales captent l’attention et amusent grandement.
Un joli disque, à l’interprétation impeccable, qui intéressera
les amateurs d’instruments à vents et de musique de chambre. Éric
Champagne
Les Caractères
de la Danse
Duo Baroque La Tour (Tim Blackmore, flûtes à bec, clavecin; Michel
Cardin, théorbe, luth baroque)
La Tour LT1-11CD (72 min 51 s)
Le Duo Baroque La Tour nous offre un programme intéressant sur ce disque
consacré à la musique prébaroque jusqu’au début du XVIIIe
siècle. Des œuvres de compositeurs aussi variés que Gabrieli, Van
Eyck, Couperin, Corelli, Hotteterre et Rebel, entre autres, nous font
découvrir une partie du grand répertoire de la flûte à bec et de
nombreuses danses écrites pour l’instrument. L’ensemble est entrecoupé
de solos de clavecin ou de théorbe. Cette variété, tant sur le plan
instrumental que dans le choix des œuvres, sert admirablement bien
le propos des musiciens. Aucune place à l’ennui ! De l’ensemble
se dégage un sentiment paisible de recueillement. Michel Cardin se
permet quelques libertés en adaptant au luth baroque le Canon
de Pachelbel et Greensleeves. Ces pièces très connues semblent
renouvelées grâce à la sonorité profonde de l’instrument. L’un
des beaux moments du disque est sans doute l’interprétation de la
dixième sonate de Corelli tiré de l’op. 5, originalement écrite
pour violon et basse continue. La flûte et le théorbe conviennent
très bien à cette musique belle et simple. L’émotion et la musicalité
sont au rendez-vous tout au long de ce très beau disque. René
François Auclair
Martha Argerich
& friends live from
Lugano 2010
Martha Argerich, piano; artistes variés
EMI Classics 50999 0 70836 2 4 (CD1: 80 min 33 s; CD2: 80 min 38 s;
CD3: 78 min 53 s)
Depuis quelques années, le festival de Lugano est devenu le projet
Martha Argerich. Les amis de la pianiste s’amènent tous les ans en
juin, et les moments historiques, les interprétations magistrales se
succèdent et font l’objet de coffrets comme celui-ci. Palmarès?
Non: impressions. S’il y a très peu de ratages (on peut imaginer
qu’ils ne font pas partie de la compilation), il y a parfois certains
malaises. Comme dans le duo Argerich-Rivera ramant péniblement à travers
Les Préludes de Liszt. Mais on retient un nombre tel de purs moments
de grâce que ces petits écarts comptent pour très peu. Le Concerto
numéro 1 de Chopin reçoit une exécution hallucinée d’Argerich.
Elle est le concerto, tenant en haleine public et orchestre. La Sonate
pour deux pianos et percussion de Bartók, avec le duo Argerich
et Kovacevic et deux percussionnistes, est magnifiée par une joute
musicale envoûtante à la limite de la sauvagerie, aux grandes montées
jouissives. Sublime. Deux quintettes pour piano et cordes, peu connus,
intéressent vivement. Korngold et Granados se voient hissés au rang
de compositeurs majeurs par les grands interprètes et amis de la reine
du piano. La liste pourrait s’allonger. Retenons qu’il s’agit
là d’un document important, à acquérir et chérir. Normand Babin
Mozart & me,
Piano Works
Lucille Chung, piano
XXI XXI-CD 2 1732 (65 min 49 s)
La pianiste Lucille Chung, née à Montréal, explique dans son texte
de présentation de ce nouvel enregistrement comment elle perçoit l’œuvre
de Mozart, comment elle s’y est adonnée dès le plus jeune âge et
en quoi ce corpus est important pour elle. Le Mozart de Chung est un
Mozart joyeux, tendre, accessible. Elle oublie peut-être que le compositeur
viennois était aussi reconnu pour ses bizarreries et ses frasques,
et sans doute que Mozart a fini par devenir adulte et a connu des périodes
de sa vie, et compositionnelles, assez sombres. Tout le disque respire
donc la fraîcheur, l’innocence, la propreté, la bienséance. En
clair, il manque cruellement de mordant, de passion et de prise de risque.
La pianiste a choisi un répertoire méconnu, qui ne mérite pas nécessairement
d’être ramené sous les feux de la rampe. En fin de programme, trois
œuvres de Mozart transcrites par Liszt dont l’interprétation déçoit
sérieusement. Imaginez un Confutatis extrait du Requiem
trop joli, un Ave verum corpus qui sonne comme une boîte à
musique. Oui, Lucille Chung possède une très belle technique, mais
sa vision de Mozart semble avoir figé dans son imaginaire enfantin.
Normand Babin
Per la Vergine
Maria
Concerto Italiano/Rinaldo Alessandrini
Naïve OP 30505 (CD : 63 min)
Le programme du présent enregistrement regroupe des œuvres de musique
sacrée qui couvrent le XVIIe et le XVIIIe siècles,
sur des textes mariaux latins des plus connus – en particulier le
Magnificat et le Salve Regina –, signées Monteverdi, Bencini,
Melani, Soler, A. Scarlatti et Carissimi. La seule exception, d’époque
et de ton, est le très bref Ave Maria de Stravinski. Le chœur,
rompu à ce genre d’œuvres, comprend neuf voix et est soutenu par
deux théorbes et un orgue. La direction d’Alessandrini, soignée
comme d’habitude, mais ici sans éclat, cultive le côté mondain
de ces compositions, ce qui n’est pas en fait si paradoxal, puisque
l’office catholique voulait être un spectacle édifiant. On se croirait
même à l’opéra avec le Salve Regina à neuf voix de Melani
(rappelons que le fondateur du Concerto Italiano a dirigé beaucoup
d’opéras ces dernières années). En revanche, l’élévation spirituelle
des Litanies à six voix de Monteverdi à laquelle on s’attendait
est absente. Quoi qu’il en soit de ces réserves, le disque donne
lieu à d’intéressantes comparaisons. Alexandre Lazaridès
Schubert: Quatuor
en sol majeur D. 887; Beethoven: Quatuor en fa majeur op. 135
Nouveau quatuor à cordes Orford (Jonathan Crow, Andrew Wan, violons ;
Eric Nowlin, alto; Brian Manker, violoncelle)
Bridge 9363 (CD : 74 min 57 s)
La formation en quatuor est une des plus difficiles qui soient. Il y
faut une entente qui, en règle générale, est le fruit d’un travail
longuement poursuivi en commun. C’est que le dialogue entre les voix
en quête de la fusion instrumentale doit respecter à la fois le texte
et les personnalités, entreprise presque paradoxale qui expliquerait
pourquoi d’éminents solistes, réunis autour d’une partition de
chambre, n’ont pas toujours réussi à s’entendre. Le Nouveau Quatuor
à cordes Orford, composé d’instrumentistes respectés du milieu
musical canadien, a été constitué il y a deux ans, mais le programme
ambitieux de cet enregistrement aurait exigé un ensemble autrement
chevronné. L’approche des Orford, trop précautionneuse, a pour inconvénient
majeur de freiner l’élan de ces pages célèbres, avec des intonations
souvent incertaines, des phrasés trop hésitants et des rythmes peu
assurés. On aura compris que cette exécution des ultimes quatuors
de deux génies ne convainc pas vraiment. Alexandre Lazaridès
Lucerne Festival
Academy: Webern, Stravinsky, Mahler
Lucerne Festival Academy Orchestra/Pierre Boulez
Accentus Music ACC30230 (1 h 54 min)
Il faut l’admettre, Boulez sait maintenir le cap, même à l’âge
vénérable de 85 ans. Sa Sixième de Mahler ressemble à s’y
méprendre à sa superbe version de 1995 avec le Philharmonique de Vienne,
surtout des points de vue du tempo et du phrasé. S’il y manque un
tout petit peu de souplesse et d’intensité (mais à peine), le sens
de la couleur gagne en raffinement. Couleur: voilà d’ailleurs le
mot d’ordre, comme en témoigne son éclatant Stravinski (Le Chant
du Rossignol dans sa trop rare mouture de poème symphonique) et
ses irréprochables Webern. Le respect de longue date envers ce dernier
propulse Boulez vers des sommets de maturité musicale, au point où
la Passacaille op. 1 devient aussi accessible que Im Sommerwind,
et que les dodécaphoniques Variations
op. 30 prennent une allure tout à fait « classique ». Les contrastes
dynamiques s’avérant extrêmes, des conditions d’écoute optimales
sont requises. René Bricault
DVD
Somers: Louis
Riel
Bernard Turgeon (Riel), Patricia Rideout (Julie), Mary Morrison
(Sara), Roxolana Roslak (Marguerite), Donald Rutherford (Sir John A.
MacDonald), Joseph Rouleau (Bishop Taché); Victor Feldbrill, chef
Centrediscs CMCDVD 16711 (126 min 26 s)
Sommet de l’opéra canadien, Louis Riel, composé par Harry
Somers sur un livret de Mavor Moore, fut présenté pour la première
fois par la Canadian Opera Company
au centre O’Keefe et à la Place des Arts à l’occasion du centième
anniversaire du Canada. En 1975, il fut mis en scène à nouveau et
présenté à Toronto, Ottawa et au centre Kennedy à Washington. Depuis
lors, seul l’opéra de McGill l’a repris en 2005. Jusqu’à maintenant,
aucune vidéo de cet opéra n’a été produite, mais un enregistrement
sonore du concert donné au centre Kennedy a été publié en 1985.
L’opéra a été filmé pour la télévision de CBC en 1969, avec
presque la même distribution, produit par Franz Krämer et réalisé
par Leon Major. Le livret d’accompagnement ne donne aucune information
sur l’orchestre, mais on y dit que le chef d’orchestre est Victor
Feldbrill, celui-là même qui a dirigé la première. Le phrasé musical
du compositeur Harry Somers saute aux yeux: une orchestration clairsemée
et percutante, style austère assez populaire à l’époque de la composition
de Louis Riel. La distribution importante met à l’honneur
bon nombre des plus grands chanteurs canadiens, tous à leur meilleur,
et le rôle-titre est particulièrement bien tenu par Bernard Turgeon.
Roxolana Roslak interprète Marguerite, sa femme, et chante donc la
redoutable berceuse Kujas. La regrettée mezzo Patricia Rideout
incarne la mère de Riel et offre une bonne prestation. (Pour être
pointilleux, je dirais qu’elle a l’air bien trop jeune pour être
la mère de Riel). Un Joseph Rouleau à l’allure juvénile est excellent
dans le rôle de l’évêque Taché, et quel plaisir de voir Mary Morrison,
qui apparaît peu sur vidéo, jouer la sœur de Riel. Cependant, le
film, tourné dans un studio de télévision, semble vieilli. Les grands
espaces de la scène d’opéra manquent à la production, ce qui diminue
l’impact des passages à grand déploiement. Les sous-titres sont
absents, bien qu’ils soient souvent tenus pour acquis par le public
d’opéra d’aujourd’hui. Le livret d’accompagnement comporte
un essai par Andrew Zinck. Cependant, rien n’indique qu’il s’agit
d’un téléfilm, et aucune information plus récente n’est transmise.
En plus, une erreur de montage gêne l’introduction de Mavor Moore
dans les suppléments. Malgré ces petits défauts, cela reste une sortie
importante et longtemps attendue qui marque un chapitre de l’histoire
opératique canadienne. Joseph K. So
Traduction de l’anglais:
Jérôme Côté English Version... |
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