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La Scena Musicale - Vol. 17, No. 1

Le nozze di Figaro : Le joyau musical de Mozart arrive à l’Opéra de Montréal

Par Joseph K. So / 1 septembre 2011

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L’opéra-bouffe de Mozart Le nozze di Figaro a été composé en 1786 sur un livret de Da Ponte basé sur une pièce de Beaumarchais. Deux cent vingt-cinq ans plus tard, il reste l’un des opéras les plus populaires de tous les temps. D’après operabase.com, pendant les cinq dernières saisons (2005-2006 à 2009-2010), Le nozze di Figaro était le 5e opéra le plus populaire au monde, avec un total de 399 représentations professionnelles. Seulement La Flûte enchantée (451), La Traviata (447), Carmen (424) et La Bohème (420) ont été joués plus souvent.

Ainsi, Mozart occupe deux parmi les cinq places dans ce concours officieux de popularité. À la différence du symbolisme maçonnique et des songes profondément philosophiques dans La Flûte Enchantée, Les Noces est l’opéra le plus humain de Mozart. Le sujet comique et à la fois dramatique parlant de l’amour et du désir, de la jalousie et de l’infidélité et à la fin du pardon, demeure indémodable, surtout encadré d’une musique divine remplie d’airs, de duos et d’ensembles brillants.

Sous les apparences des Noces se trouve un commentaire social de Mozart, assez courageux pour son temps, sur la tension entre deux mondes séparés par la classe et la richesse: le niveau supérieur est représenté par le Comte et la Comtesse tandis que le niveau inférieur est formé des gens ordinaires, de travailleurs comme Susanna et Figaro. Il n’y a ni dieux ni déesses, mais des personnes en chair et en os et leurs vies restent d’actualité aussi bien aujourd’hui qu’au temps de Mozart.

La première des Noces à Vienne en mai 1786, sous la direction de Mozart lui-même, a reçu un accueil modérément positif.

Plus tard dans la même année, les Noces ont été repris à Prague, avec un vif succès. Les rôles de Figaro et du comte Almaviva sont chantés par des barytons, bien que du temps de Mozart, le baryton n’existât pas encore comme catégorie de voix. De façon similaire, Cherubino, d’habitude attribué à un mezzo de nos jours, était classé comme un soprano.

Étant l’un des opéras les plus longs de Mozart, avec 4 actes et 3 heures de musique, Les Noces sont souvent représentées avec un nombre de coupures standard : les airs de Marcellina et Basilio dans l’acte 4, un duo, les reprises du chœur et diverses coupures dans les récitatifs. Mozart a également réutilisé de la musique dans d’autres œuvres: l’air de Figaro «Non più andrai» a une citation instrumentale à l’acte 2 de Don Giovanni et l’air de la Comtesse «Dove sono» a comme origine la partie Agnus Dei de la Messe du Couronnement.

Les personnages principaux dans les Noces (Figaro, Susanna, le Comte et la Comtesse) sont des rôles très exigeants qui nécessitent des chanteurs de premier ordre. Par exemple, l’air d’ouverture de l’acte 2 «Porgi amor» chanté par la Comtesse doit être abordé «à froid» sans possibilité pour la soprano de réchauffer sa voix. Cela demande un long souffle, une intonation précise, une pureté du son et un legato inébranlable – une rude épreuve pour n’importe quel chanteur. De la même manière, l’air de bravoure du Comte «Hai gia vinta la causa… Vedro mentr’io sospiro» exige un libre registre supérieur combiné avec un puissant sens dramatique. Considérée généralement comme la prima donna dans les Noces, Susanna n’a qu’un seul air, «Deh vieni non tardar», d’une tessiture peu remarquable, mais le rôle exige une grande endurance, car Susanna chante beaucoup dans les ensembles et se trouve sur scène pendant la plus grande partie de l’opéra. Aujourd’hui, les metteurs en scène semblent préférer les jeunes chanteurs pour les rôles de Figaro et de Susanna, car à part le chant, ces rôles exigent aussi un jeu solide et une bonne entente entre les acteurs est indispensable.

L’Opéra de Montréal a réuni une distribution parfaite. Au sommet de ma liste est le baryton Phillip Addis dans le rôle du Comte. Addis, avec son spectaculaire baryton lyrique, est également une personnalité puissante sur scène et ce rôle lui va à merveille. Sa partenaire dans le rôle de la Comtesse est une soprano américaine, Nicole Cabell. Gagnante du Concours mondial de chant de Cardiff en 2005, Cabell va sûrement éclairer la scène par son riche soprano brillant et sa présence séduisante. Robert Gleadow a déjà interprété le rôle de Figaro avec la Canadian Opera Company. Sa personnalité joviale est un réel atout pour le rôle de Figaro. Hélène Guilmette interprétera Susanna.

[Traduction: Proshunina Svetlana]

Le nozze di Figaro, Opéra de Montréal, 17, 20, 22 et 24 septembre, 19 h 30, salle Wilfrid-Pelletier. operademontreal.com

» Discographie

C’est un des opéras de Mozart les plus enregistrés et il y a beaucoup de versions des Noces. Certaines d’entre elles sont sorties au milieu des années 1950 pour célébrer le bicentenaire du compositeur. L’enregistrement d’Erich Kleiber chez Decca (1955) a le grand Cesare Siepi et Hilde Gueden comme Figaro et Susanna. Un autre indispensable est l’enregistrement de Giulini chez EMI (1959) avec Schwarzkopf dans un de ses rôles marquants en Comtesse et avec Anna Moffo en Susanna étonnamment efficace, à côté de Giuseppe Taddei en tant qu’un Figaro idiomatique. Aussi remarquable est l’enregistrement de 1970 de Colin Davis chez Philips, avec la voix magnifique de Mirella Freni (Susanna) et la somptueuse Comtesse de Jessye Norman.

Quant aux vidéos, une des plus intéressantes est la représentation de 1975 dirigée par Karl Böhm et mise en scène par Jean-Pierre Ponnelle. On y trouve une distribution de rêve: l’adorable Susanna – Freni, accompagnée de Figaro – Hermann Prey, plein de maturité et de douceur dans la voix. La très jeune Kiri Te Kanawa est une Comtesse remplie de fraîcheur. Le grand Dietrich Fischer-Dieskau dans le rôle du Comte restera filmé pour la postérité. La mezzo-soprano américaine Maria Ewing dans le rôle d’un curieux Cherubino est filmée ici avant son déclin vocal. Parmi les productions récentes, la version la plus exceptionnelle est celle de 2001 de René Jacobs avec Simon Keenlyside (Comte) et Véronique Gens (Comtesse). Aussi brillante est la production de «l’année Mozart» filmée à Salzburg en 2006, disponible sur CD et DVD. Anna Netrebko est éblouissante en Susanna, rôle qu’elle a délaissé par la suite.


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