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La Scena Musicale - Vol. 16, No. 5

Le musicien : un athlète de la scène!

Par Isabelle Duchesne / 4 février 2011


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L’article qui suit est le deuxième d’une série sur la prévention des blessures spécifiques du musicien. Il est tiré principalement d’un article publié par ¬l’auteure en janvier 2010 dans la revue Le médecin du Québec dans un numéro spécial portant sur la médecine des arts. L’article précédant abordait les particularités du musicien, celui-ci ¬élaborera sur les différents facteurs de risque prédisposant aux lésions musculosquelettiques.

Les facteurs de risque

Il est reconnu que la prévalence des lésions musculosquelettiques chez les musiciens classiques est semblable à celle qui existe chez les autres professionnels, notamment ceux qui doivent effectuer un nombre élevé de répétitions dans le cadre de leur travail. La prévalence de troubles musculosqueletiques liés à l’exécution de la musique est de 39 à 47 % chez les musiciens professionnels et de 17 % chez les étudiants universitaires, selon une étude de C. Zaza, parue dans le Canadian Medical Association Journal en 1998. Jouer d’un instrument nécessite ¬principalement l’utilisation des membres supérieurs. Par conséquent, les bras, les poignets et les mains représentent 77 % des régions atteintes, explique quant à lui J. ¬Bejiani dans une étude.

Le tableau énumère les facteurs de risque qui prédisposent aux blessures musculo¬squelettiques.

Facteurs de risque prédisposant aux lésions musculosquelettiques
ref Brandfonbrener

Le sexe Les femmes (65 %) sont deux fois plus touchées que les hommes (35 %).
L’instrument Les musiciens jouant d’un instrument à clavier et à cordes sont les plus touchés.

Les facteurs individuels du musicien tels que la condition physique, la grandeur de son bras et de sa main.
L’hyperlaxité articulaire généralisée 34 % des musiciens démontrant une douleur au membre supérieur ont une hyperlaxité articulaire généralisée.
L’incapacité de compenser cette hyperlaxité articulaire par un contrôle musculaire adéquat.
Une augmentation récente de temps et d’intensité de la pratique.
La localisation de la blessure est spécifique à l’instrument : par la posture que le musicien doit adopter lors du jeu, par le poids de l’instrument et par le mouvement induit lors du jeu instrumental.

Critères cliniques d’hyperlaxité articulaire généralisée
(que je vous invite à essayer)
ref Larsson

Extension passive des doigts à l’articulation ¬métacarpophalangienne > 90°

Apposition passive du pouce sur l’avant-bras après flexion maximale du poignet

Hyperextension passive du coude (recurvatum) > 10°

Hyperextension du genou > 10°

Poser les mains à plat au sol par flexion antérieure du tronc sans fléchir les genoux

Par exemple, les violonistes et altistes ¬présentent 77 % des troubles de l’articulation temporomandibulaire gauche par l’appui de la mentonnière sur la mâchoire. Ils seront plus souvent affectés par le syndrome de ¬défilé thoracique (problème neurologique sur lequel nous élaborerons plus tard dans la série d’articles) au côté gauche résultant de la pression de l’instrument sur la clavicule et présenteront souvent comme les violoncellistes une tendinopathie de la coiffe des rotateurs à l’épaule droite en raison de la flexion antérieure et de l’abduction plus importante de l’épaule droite nécessaire pour le mouvement d’archet. Contrairement aux violonistes et ¬altistes dont l’instrument est horizontal, les violoncellistes et contrebassistes auront une demande musculotendineuse plus importante du poignet et du coude pour la tenue de l’archet contre la gravité en raison de la position verticale de leur instrument.

Les hautboïstes et les clarinettistes ¬auront, quant à eux, le plus souvent des problèmes avec le pouce droit qui porte l’instrument (la clarinette pèse 800 grammes) conclut un article paru dans Muscle Nerve en 2003, signé R. Lederman.

Les musiciens qui jouent au clavier présenteront plus fréquemment un syndrome de défilé thoracique au côté droit, mais ¬seront affectés de façon équivalente aux coudes droit et gauche par la neuropathie du nerf ulnaire vulnérable aux mouvements ¬répétés de flexion et extension du coude ainsi qu’à la flexion soutenue de celui-ci (nous y reviendrons également). R. Lederman, dans le même article, explique plus difficilement l’affection du nerf ulnaire au côté gauche. Il suggère que la main droite ¬responsable de la mélodie se déplace dans une amplitude plus importante sur le clavier comparativement au bras gauche présentant une flexion plus soutenue. Les instrumentistes à cordes, de leur côté, présenteront plus fréquemment cette condition au coude gauche maintenu en position de flexion ¬prolongée.

Le pouce gauche sera fréquemment douloureux chez les guitaristes et les violonistes/¬altistes par la tenue du manche et la force d’opposition aux doigts sur les cordes. Finalement, chez les cuivres, les muscles du visage grandement sollicités seront les premiers ¬atteints d’un syndrome de surusage.


Duchesne, B.Sc., Pht, FCAMT, est physiothérapeute chez Kinatex Sports Physio Rosemont et Centre-Ville et traite depuis plusieurs années des musiciens professionnels.

»Titulaire d’un Fellow de l’Académie Canadienne de Thérapie Manuelle

» Prochain article : quelles sont les atteintes musculo¬squelettiques les plus fréquentes chez le musicien ?


(c) La Scena Musicale 2002