La musique classique 101 : L’évolution de la symphonie Par Claudio Pinto
/ 1 décembre 2010
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Dans notre chronique du mois dernier,
nous avons abordé la nature de la symphonie. Voici un deuxième volet
qui explore les traits essentiels du genre, d’hier
à aujourd’hui.
Si la symphonie atteint sa forme définitive
autour de 1770, notamment grâce aux contributions de C.P.E. Bach, Mozart
et Haydn, c’est Beethoven (1770-1827) qui hisse le genre à de nouveaux
sommets – des innovations majeures sont présentes surtout dans ses
Troisième et Neuvième
symphonies (voir article du dernier numéro). Il est suivi par Bruckner
(1824-1896), Mahler (1860-1911) et Chostakovitch (1906-1975), qui apportent,
chacun à sa manière, d’autres innovations. Les symphonies de Bruckner
requièrent une augmentation de l’effectif orchestral, de même que
chez Mahler qui, en plus, combine lied et symphonie en intégrant d’importantes
parties vocales à plusieurs de ses chefs-d’œuvres orchestraux. Chostakovitch
quant à lui ajoute le célesta et le piano à l’orchestre, tandis
que le compositeur français Camille Saint-Saëns (1835-1921) innove
avec sa Symphonie no 3
dite « avec orgue », l’une de ses pages les plus célèbres.
L’évolution de la symphonie a entraîné
non seulement une augmentation du volume de l’orchestre, mais également
l’ajout de mouvements et l’étirement de la durée. Il n’est donc
pas étonnant que d’un siècle à l’autre, la production des grands
compositeurs soit marquée par une différence notable du nombre de
symphonies. Haydn, que l’on qualifie souvent de « père de la symphonie
», en a laissé 104, alors que ses illustres successeurs en ont composé
moins : 41 pour Mozart, neuf pour Beethoven, Schubert, Dvorˇák, Bruckner
et Mahler, quatre pour Brahms et 15 pour Chostakovitch. Ces maîtres
n’ont pourtant pas manqué d’inspiration ! Leur contribution au
genre n’est pas inférieure à celle de « papa Haydn », seulement
la symphonie subit de si grandes transformations d’un siècle à l’autre
que l’investissement qu’elle exige du compositeur s’en trouvera
doublé. Comparons seulement la durée de quelques-unes : par exemple,
la Symphonie « L’horloge »
de Haydn fait environ 30 minutes, alors que la célèbre Neuvième
de Beethoven dure un peu plus de 70 minutes. Du côté de Bruckner,
sa Huitième peut être exécutée en 76 minutes, tandis que
la Troisième de Mahler dépasse les 90 minutes ! Par les possibilités
infinies qu’elle présente, le terrain d’expérimentation qu’elle
constitue, la symphonie demeure un genre privilégié par les compositeurs
de musique orchestrale.
Si Beethoven disait que chacune de ses
inspirations apparaissait d’abord sous la forme de morceaux pour orchestre,
Mahler, lui, affirmait que « la symphonie est un monde ». Bien que
la musique parle parfois plus directement à ses exécutants (le quatuor
à cordes en est un bel exemple), la symphonie s’adresse au public
avant tout. Nous pourrions même dire qu’elle sait, mieux que tout
autre genre, exprimer les tremblements et les espérances de son époque.
Il ne reste plus qu’à écouter et réécouter les grandes symphonies
du répertoire, de Haydn à Honegger en passant par Mozart et Mahler,
pour pouvoir « lire » exhaustivement et d’une tout autre manière
les pages de l’histoire de l’humanité. |
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