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La Scena Musicale - Vol. 15, No. 10 juillet 2011

André Mathieu : Retour sur le printemps

Par Éric Champagne / 1 juillet 2011


Version Flash ici.

Le printemps 2010 aura été le printemps André Mathieu. Biographie, documentaire et film de fiction : force est de constater que ces efforts de réhabilitation n’ont pas tous la même qualité. Bref retour.

Les documentaires : du problème de bien cerner le sujet

Diffusé à la télévision de Radio-Canada, Alain Lefèvre signe André Mathieu abordait le sujet sur deux fronts distincts, à savoir d’un côté le portrait biographique du compositeur et, en alternance, le travail de réhabilitation qu’effectue Alain Lefèvre. Le résultat est ambigu, la portion biographique semblant être survolée rapidement au profit de la partie consacrée à Alain Lefèvre. On aurait aimé avoir plus d’entretiens avec ceux qui ont connu Mathieu (notamment Jacques Languirand et Vic Vogel) et avec les autres artisans de sa renaissance, dont Gilles Bellemare est certainement le plus négligé. À l’opposé de la production télévisuelle, le documentaire-radio À la recherche d’André Mathieu offrait un portrait honnête et plus détaillé du sujet. Ici, tout était mis en œuvre pour comprendre et éclairer le personnage et son destin, en plus de tenter de cerner les qualités de l’œuvre.

Le film : entre deux eaux

Le film L’enfant prodige laisse partagé. Les qualités purement cinématographiques du film de Luc Dionne sont malheureusement obscurcies par un scénario morcelé où l’intrigue se perd dans des épisodes anecdotiques un peu décousus. Il est difficile dans ce contexte de bien cerner les enjeux psychologiques et dramatiques et le sujet semble alors survolé ou escamoté.

Là où le bât blesse, c’est dans la rigueur. Si l’on prétend créer un film biographique de facture classique, comme c’est le cas ici, les éléments de fiction ou romancé sont inhérents, voire incontournables, mais les faussetés historiques sont inacceptables, à moins que la digression biographique ne soit un parti pris esthétique en soi (comme l’a fait Ken Russel dans ses films sur Mahler, Tchaïkovski et Liszt). De nombreuses légendes ou faussetés sont présentes dans L’enfant prodige et il devient donc difficile de départager le vrai du faux.

La biographie : un monument de rigueur et d’honnêteté

Dans toute cette déferlante émerge la « vraie » biographie d’André Mathieu. LA référence, rien de moins, voici ce qu’offre le livre de Georges Nicholson. Fruit d’un travail colossal, cette biographie est la plus complète et certainement le moins complaisant des écrits consacrés à cet artiste iconoclaste. Son mérite premier est de départager les faits et les légendes qui continuent encore aujourd’hui d’enjoliver la vie de ce personnage complexe et insaisissable.

De l’homme, on suit le parcours musical pas à pas, de ses débuts étonnants à Montréal jusqu’à sa célébrité d’enfant prodige en France et à New York. La longue descente aux enfers de Mathieu est détaillée avec une minutie inflexible. Au delà de l’homme, c’est toute une période de l’histoire du Québec qui est présente en filigrane. Les éléments biographiques sont constamment mis en perspective dans la réalité du temps, ce qui permet de mieux comprendre la grandeur et la chute du personnage.


(c) La Scena Musicale 2002