Accueil     Sommaire     Article     La Scena Musicale     Recherche   

La Scena Musicale - Vol. 14, No. 9 juin 2009

La Joie de Vivre, La Joie de la Musique : Entrevue avec Marie-Josee Simard et Marie Fabi

Par Gina Ryan / 14 juin 2009


J’arrive chez Marie-Josée Simard, où elle m’attend avec Marie Fabi. Je me trouve en face de deux belles femmes pleines de joie de vivre, en train de rigoler et de discuter à une vitesse impressionnante. Tout de suite en les regardant, on aperçoit une grande complicité entre ces deux musiciennes accomplies.

C’est grâce à cette complicité que, depuis une vingtaine d’années, elles continuent de se retrouver périodiquement pour faire de la musique. C’est aussi pourquoi elles ont choisi de jouer cette musique de chambre – pour continuer leur dialogue. C’est cette même complicité qu’on entend immédiatement en les écoutant jouer. Le plus récent de leurs projets est un enregistrement des sonates et sonatine de Grieg, Poulenc et Dvo˘rák par le Disques XXI (le disque du mois pour les abonnés de LSM).

Originalement écrites pour la flûte (Poulenc) et le violon (Grieg et Dvo˘rák), Simard et Fabi ont adapté ces œuvres pour vibraphone et piano. Parmi les possibilités de répertoire, un critère pragmatique pour Simard était de trouver la musique qui tombait dans les trois octaves de son vibraphone. Aussi, pendant sa recherche, elle se demandait si la musique allait bien sonner sur son instrument. Comment ces musiciennes conçoivent-elles leurs rôles dans ce projet ?

MJS : Quand je transcris les pièces, je n’essaie pas de les arranger, je cherche à les jouer le plus possible comme le compositeur le voulait. Je tiens à respecter la forme, chaque mesure du compositeur veut dire quelque chose. Quel défi en musique de chambre.

MF : Comme tu dis, le but n’est pas de modifier, au contraire. On essaie de l’adapter le plus possible dans le ton du compositeur, mais en fonction de la nature de nos instruments. Tout est dans l’équilibre, dans l’architecture musicale. Qu’on joue n’importe quel instrument, qu’on fasse une adaption, tout est dans la structure, la grande ligne. Il faut que ça chante. Que ce soit à la flûte ou au violon, il faut se dire : « Ah oui, la ligne part de là et s’en va là. »

Le chant

Le chant n’est peut-être pas le premier mot qu’on associe à un ensemble percussion-piano, mais c’est un thème qui revient souvent au cours de l’entrevue.

MF : Moi j’entends un son dans ma tête. J’entends une phrase, une direction (elle chante). Ça pourrait être une voix…

MJS : Marie chante beaucoup, puis je chante aussi. Quand je travaille, je chante toutes mes pièces… Je chante beaucoup avant de jouer.

MF : La musique n’est de la musique que lorsqu’elle respire. Il faut comprendre où le phrasé s’en va. En la chantant, on la sent, puis on la reproduit avec des baguettes, un archet, la voix, avec le piano. On ne peut faire de la musique si on ne chante pas à l’intérieur.

La complicité

Au début de l’entrevue, MF et MSJ ont parlé de complicité. Qu’est ce qui a créé cette belle complicité ?

MF : La complicité, c’est être capable de se retrouver, comme une ancienne amitié renouée comme si on s’était vues la veille. La complicité, ce n’est pas toujours de travailler ensemble.

MJS : Ce n’est pas avec tous les musiciens que je peux être comme ça. Moi je suis une trippeuse (elles rient). J’ai besoin d’avoir du plaisir sur la scène, d’avoir une complicité avec le pianiste. Il n’y a pas de rivalité.

MF : Pas du tout.

MJS : Toi tu pars, tu fonces, je te réponds. Quand on est sur scène, le public ne voit pas plus une Marie que l’autre. Entre Marie et Marie, il y a une fusion qui se fait. Je ferais n’importe quoi pour ça.

MF : Mais la complicité aussi, c’est deux personnes qui s’estiment beaucoup et qui travaillent ensemble pour la musique.

Nouvelles dimensions ?

Le projet a duré deux ans, mais MF et MJS sont ravies de leur expérience avec les Disques XXI. Maintenant que le disque vient de sortir, quelles nouvelles dimensions pensent-elles que ces transcriptions peuvent apporter à la musique des compositeurs ?

MJS : Je n’avais pas pour but de voir une évolution. Les circonstances ont fait que Marie et moi nous nou sommes rencontrées et je me suis dit : « Là voilà, la pianiste avec qui je veux travailler. » Le but, c’était de faire chanter mon instrument.

MF : Pour ma part, je n’aurai jamais la prétention de penser que j’ai ajouté quelque chose à un compositeur. Mon seul rôle est d’essayer, à partir de son écriture et de ce que je ressens, de sortir la musique et de la vivre.

MJS : Ces compositeurs sont comme le vibraphone, ils sont jeunes. Le vibraphone

est né en 1920. Se priver de jouer les jeunes compositeurs, c’est comme avoir manqué quelque chose dans sa vie.

MF : Ça démontre à quel point les œuvres sont grandes, qu’elles puissent être adaptées. Elles réussissent à passer d’un instrument à un autre. C’est quand même extraordinaire. n


CD Découverte

Le cinquième CD Découverte de La Scena Musicale est un disque de musique pour vibraphone et piano, mettant en vedette la percussioniste Marie-Josée Simard et la pianiste

Marie Fabi. Le CD Découverte est une coproduction avec les Disques XXI et est offert en exclusivité aux abonnés payants de LSM et dans les exemplaires vendus en kiosques. Voir le formulaire d’abonnement à la page 15.


(c) La Scena Musicale 2002