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La Scena Musicale - Vol. 14, No. 2 October 2008

Jazz

October 16, 2008


Sonnez hautbois, résonnez musettes

Les instruments « autres » du jazz

Marc Chénard

Dans les sondages américains effectués auprès des lecteurs et des critiques, on les désigne par le terme miscellaneous. Catégorie fourre-tout s’il en est une, celle des «instruments divers» est insérée le plus souvent en bas de l’habituel défilé des rubriques de musiciens les plus prisés du public ou des critiques. En jazz, bien sûr, les saxos, trompettes, pianos ou batteries sont de loin les plus emblématiques, mais compte tenu de l’histoire de la note bleue et d’un certain esprit d’ouverture à d’autres outils d’expression, sa palette instrumentale est tout de même assez étendue. Au fil des ans, certains de ces instruments dits marginaux ont perdu ce qualificatif pour être reconnu à part entière – la flûte pour ne citer qu’un exemple, voire le saxo soprano (dans la foulée de Coltrane) ou la guitare qui, d’un rôle accessoire dans le jazz classique, s’est hissée aux premiers rangs du jazz fusion des années 1970. Certains ont en revanche perdu de leur faveur, notamment la clarinette, cet enfant chéri du swing d’antan mis au ban par le bop et ses rejetons, mais réhabilitée ces dernières années dans des créneaux résolument plus modernes.

Cuivres et anches

Comme les vents ont une place de choix en jazz, commençons par les cuivres. La trompette et son cousin plus moelleux le bugle sont les plus fréquemment entendus, le trombone ayant conservé sa place au soleil en dépit d’une certaine éclipse durant le passage de l’ère du swing au jazz moderne. Le cor français, par contre, fait figure d’intrus. Seuls Julius Watkins à New York et Johnny Graas à Los Angeles se sont démarqués comme solistes pendant les années 1950 et 1960. Un demi-siècle plus tard, les cornistes de jazz ne sont toujours pas légion, mais citons en tête de liste les Américains Tom Varner, John Clarke, Mark Taylor et Vincent Chancey, sans oublier l’éblouissant russe Arkhady Shilkloper. Quant au tuba, Bill Barber était un pionnier (dans l’orchestre Birth of the Cool de 1949), mais son confrère Ray Draper passe pour le premier vrai soliste (disque avec John Coltrane en 1957). Depuis, d’autres sont apparus, Howard Johnson, bien sûr, mais des Européens dont le Belge Michel Massot, le Suisse Bernard Viradez, le Suédois Per-Åke Holmlander et deux exilés outre-Atlantique, John Sass et Andy Grappy. Plus rare encore est l’euphonium, dont seul Kiyane Zawadi a laissé quelque trace discographique.

Dans les anches, Eric Dolphy fut le comme premier grand soliste de la clarinette basse, quoique Herbie Mann et Buddy de Franco s’y soient aussi essayés. Le roi du swing Bennie Goodman en a aussi joué, une seule fois dans une obscure séance d’enregistrement de 1936 sous la direction d’un pianiste noir britannique tout à fait oublié dans les annales du jazz, Reginald Forsythe. Pourtant, Dolphy a ouvert la voie à d’autres tels Louis Sclavis et John Surman, des spécialistes modernes comme Michael Pilz, Rudi Mahall et Gene Coleman ou une kyrielle de saxophonistes, dont l’Italien Gianluigi Trovesi ou la vedette David Murray.

Quant aux anches doubles, leur rareté s’explique autant par la difficulté de maîtrise de l’embouchure que par la capacité de les jouer avec puissance et vélocité. Ainsi en est-il du basson que certains saxophonistes ont osé utiliser (Ken McIntyre et, chose surprenante, Illinois Jacquet). De nos jours, l’Américain Michael Rabinowitz réussit de manière assez étonnante à articuler des lignes de be-bop avec toute la fluidité d’un saxophoniste. Le hautbois, en contrepartie, a trouvé un équivalent avec le saxophone soprano, ce qui n’a pas empêché Yusef Lateef de s’en servir à la fin des années 1950. Plus singulier est le cor anglais, instrument utilisé par le saxo ténor californien Bob Cooper durant la période épique du West Coast Cool, puis par l’altiste noir associé au free jazz, Sonny Simmons. Instrument marginal, l’harmonica est plus associé au blues qu’au jazz, mais l’increvable Toots Thielmans (87 ans !) en est le plus célèbre praticien; ne passons pas cependant sous silence Howard Levy, qui s’illustre dans des contextes plus modernes. Instrument à vent et clavier en même temps, l’accordéon ne manque pas de représentants. Le premier solo sur disque était joué en 1930 par un certain Charlie Melrose. Par la suite, Joe Mooney connut un certain succès dans son quintette à cheval entre le swing et le bop, traçant le chemin à des successeurs comme Art van Damme, Leon Sash et le Montréalais Gordie Fleming. De nos jours, la formation Accordeon Tribe de Guy Klucevsek inscrit l’instrument dans une nouvelle modernité.

Cordes

Sauf pour la guitare et la contrebasse, les instruments à cordes n’ont jamais joui de la même cote en jazz qu’en musique classique. Pourtant, le violon a eu sa part de pionniers : Eddie South, Stuff Smith en Amérique et, en Europe, l’immortel Stéphane Grappelli ainsi qu’un homologue danois toujours parmi nous à 92 ans, Svend Asmussen. En ce qui concerne le violoncelle, ses premiers utilisateurs étaient des contrebassistes qui ne le jouaient qu’en pizzicato, ce qui fut le cas de Harry Babasin et son plus célèbre contemporain Oscar Pettiford suivi, plus tard et de manière épisodique, de Ray Brown et Ron Carter. Toutefois, c’est Fred Katz, dans les ensembles du batteur Chico Hamilton d’avant 1960, qui a été le premier à jouer des solos avec l’archet. Une bonne dizaine d’années s’écouleront avant que d’autres violoncellistes se manifestent, soit David Baker (ex-tromboniste), Abdul Wadud, David Eyges, Dierdre Murray et Tristan Honsinger, ce dernier rejoignant les rangs de la musique improvisée européenne qui accueillera d’autres protagonistes tels Günther Christmann, Ernst Reijsiger, Paolo Damiani, Jean-Charles Capon, Vincent Courtois… Rares sont les altistes, mais Matt Maneri à New York et la Hollandaise Ig Henneman sont des exceptions notables. Si toutefois l’on devait choisir l’instrument le plus inusité, la harpe pourrait figurer en tête de liste. Bien avant Alice Coltrane, il y eut Dorothy Ashby, Corky Hale et Adèle Girard, mais c’est en 1934, au sein d’un ensemble de Jack Teagarden, que Caspar Reardon exécuta le premier solo de harpe dans les annales du jazz.

On pourrait facilement s’étendre en incluant le vibraphone, les timbales et autres percussions, sans compter la panoplie d’instruments non occidentaux ou carrément inventés, mais au-delà de la kyrielle de noms, retenons simplement que ces instruments marginaux ont contribué à élargir la palette sonore du jazz avec des nuances aussi riches que surprenantes.







Au rayon du disque / Off the Record

Marc Chénard, Félix-Antoine Hamel, Annie Landreville, Paul Serralheiro

Other musics, other instruments

Miscellaneous instruments have often played bit parts in jazz history, but they can be heard to greater advantage nowadays. In fact, there are more offbeat and boundary-stretching instrumental jazz combinations than ever in today’s expanding musical universe. Here are but three examples of this state of affairs.

Fusing non-Western music and jazz is now commonplace, but Bill Cole’s Untempered Ensemble has carved out a niche of its own. In keeping with its name, this six-man ensemble weaves in and out of the Western tuning system. Its latest release (Proverbs for Sam Boxholder Records BXH056 HHHIII) is dedicated to one of its members, the late alto saxophonist and flutist Sam Furnace. “Proverbs” is comprised of four long pieces recorded in two locations in 2001. This is grooving, earthy music, with bassist William Parker providing the vamping foundation, spurned on by three percussionists, the low-end horns of Joe Daly, Furnace, in one of his last recordings, and Cole on an assortment of Eastern double-reeds and flutes. Compositional material is scant and the gist of the music is extended blows, especially from the leader, who seems not to know when to stop. This coupled with a sub-par sound and a 75-minute playing length may dampen some listeners’ enthusiasm, but those accustomed to field-like recordings will appreciate its raw honesty.

Worlds apart from the previous disc, French violinist Régis Huby’s “Simple Sound” (le chant du Monde 274 1413 HHHHII) is quintessentially European in approach. No one should be surprised when considering its lineup of violin, cello, bass, guitar, clarinet and bass clarinet. There are 12 short to medium length tracks in this 52-minute offering whose main asset are the leader’s compositions. Anyone familiar with Louis Sclavis will immediately make the connections: layered repetitive lines that suddenly shift gears and tempos, segueing into and out of solo and collectively improvised sections. Lyrical in true classical form, the music becomes rhythmically charged at times, with some extra bite provided by guitarist Olivier Benoît’s occasional distortions. That said, the written parts start to sound alike after a couple of tracks, and in spite of the music’s craftiness, its stylistic contingencies may well justify shaving off a half star from this rating.

Any aficionado of free improv knows Fred Frith. Maybe Monday is a coop unit he shares with saxman Larry Ochs and koto player Miya Masaoka. In their newest recording (“Unsquare” Intakt Records CD132 HHHHII), they are joined by percussionist Gerry Hemingway, violinist Karla Kihlstedt, harpist Zeena Parkins and Ikue Mori on computer. The five tracks are essentially electro-acoustic soundscapes that range from dream-like mood pieces (tracks 2 and 3) to highly distorted skronk fests (track 4 and the first part of the final and title track). As is often the case with such free form music, the effects are arresting when it works, but when it doesn’t, you hope it won’t meander for too long..

MC

Piano trios contemporains (1er volet)

Trio M : Big Picture

Cryptogramophone CG134

HHHHHH

Trois M pour Myra Melford, Mark Dresser et Matt Wilson… et un E pour éblouissant ! Dès le départ, l’auditeur saura que ce disque sera une sacrée belle aventure. Les trois musiciens nous dévoilent immédiatement leur jeu avec Brainfire and Budlight, où ils sont tour à tour mis en valeur. De plus, ils puisent dans leurs vastes ressources musicales, avec des allusions aux folklores ibérique et indien, voire au romantisme européen et à la musique contemporaine... À les écouter jouer, on se croirait témoin d’une corrida à trois. À tour de rôle, sinon en parallèle et ensemble, ces artistes se servent pleinement de leurs palettes colorées. C’est d’un jazz actuel et énergique dont nous font cadeau ces musiciens inventifs, leurs improvisations étant parfois très libres et fougueuses, parfois empreintes de beaux moments mélodiques et de rythmes fort inspirés. Le contrebassiste Mark Dresser, pour sa part, est particulièrement mis en relief dans Secret to tell you qu’il interprète à l’archet avec une extrême sensibilité. Quant à Myra Melford, elle semble s’amuser beaucoup dans Naïve Art, une pièce aux accents de blues que le batteur Matt Wilson a écrite pour rendre hommage au grand Paul Motian. Ce disque s’écoute comme on regarde un film : départ en lion, développement graduel d’une intrigue qui culmine durant la pièce-titre, puis atterrissage en douce au déroulement du générique.

Marcin Wasilewski Trio : January

ECM 2019

HHHHHI

Peu de musiciens de jazz polonais réussissent à percer sur les scènes internationales. Le trio du pianiste Marcin Wasilewski, qui existe depuis près de 20 ans, est l’un des rares. Avec ses compères, le contrebassiste Slawomir Kurkiewicz et le batteur Michal Miskiewicz, ils furent découverts par le trompettiste Tomasz Stanko, probablement le plus connu des jazzmen polonais à ce jour. Ils ont accompagné ce dernier sur trois albums ECM avant de s’envoler de leurs propres ailes, toujours sur cette même étiquette. Une fidélité et une constance qui peuvent s’expliquer aussi par la forte influence de Keith Jarret sur le leader de la formation, qui aurait découvert le jazz en regardant jouer le pianiste à la télévision. Il ne faut donc pas s’étonner d’entendre ici cette influence bien assumée, sans cependant verser dans l’imitation. La musique du trio est à la fois cool et lyrique, souvent jouée avec délicatesse. Aux compositions du pianiste s’ajoutent des reprises issues de la pop (très belle version de Diamonds and Pearls de Prince), du jazz (des compositions de Carla Bley et de Gary Peacock) et une lecture très personnelle de Cinema Paradisio de Morricone. Solides techniciens, ces musiciens sont aussi doués d’une grande sensibilité; quant à leur musique, elle peut, par endroits, se comparer à une dentelle finement brodée autour de nœuds, là où ils se lient ensemble pour tisser une toile sonore des plus impeccables.

Trio DAG

Effendi FND085

HHHHII

Une autre formation, française celle-là, laquelle utilise les initiales de ses membres en guise de nom : le trio DAG, c’est la pianiste Sophia Domancich, le contrebassiste Jean-Jacques Avenel et le batteur Simon Goubert. Trois musiciens qui n’ont plus besoin de faire leurs preuves et qui savent allier de nombreuses qualités : rigueur, écoute, échanges inspirés. Ce disque, qui vient tout juste de paraître ici au Québec chez Effendi, a d’abord vu le jour en Europe sous étiquette Cristal Records en 2006. La pianiste et compositrice Sophia Domancich, première femme à remporter le prix Django Reinhardt, apporte aussi, outre ses improvisations, une touche de classicisme à ce trio. On penserait volontiers à un genre d’équivalent musical de Baudelaire : «Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté...» Voilà une offrande que l’on qualifierait bien… d’introspective.

AL

Trumpets in Tempo

Freddie Hubbard: On the Real Side

Times Square Records FQT-CD-1810

HHHHII

Most jazz fans are keenly aware of Freddy Hubbard’s past glories. The sizzling tone, the fiery attack, the passion and the precision have secured this Indianapolis native a permanent place in jazz history. This recording finds the hornman in a large ensemble setting that provides a comfortable cushion for his currently more subdued playing. Although he doesn’t hold back—this is Freddie Hubbard, after all—a lip injury sustained about 15 years ago compromised his career for a while and has since dampened his trademark edgy sound. The ideas are still there, too, and that alone is an incentive to hear out this master in his twilight years. And what better vehicles to express himself than seven of his own originals, first rate numbers like “Up Jumped Spring,” “Skydive” and “Gibraltar.” The program here reminds us (as Tim Hagans and Marcus Printup did a few years ago with their Hubsongs,) that Mr. Hubbard has been a prolific and successful composer, crafting pieces that explored the popular rhythms of his day while extending the repertoire of the improvising musician with tunes that range from modal and riffy flagwavers to intricate neo-bop numbers. But Hubbard’s playing of the fluegelhorn throughout this disc makes for a stark contrast to the burning trumpet-tone he is best known for. Yet that larger-sized horn with a mellower edge is sensitively supported in arrangements, penned for the most part by disciple David Weiss and scored for ten sidemen, including Myron Walden on alto sax, baritone saxophonist Norbert Stachel and guitarist Russell Malone who makes a single guest appearance on the title track of this fifty minute-plus side of solid, mainstream, music making.

The Roy Hargrove Quintet: Earfood

Emarcy 1764181

HHHHII

Despite the unfortunate title, this is a winning disc with a combination of qualities missing from most of the new arrivals turning up in the jazz bins these days. Earfood respects the mass audience’s need for simple yet meaningful melodies coupled with genuine earthy rhythms and an awesome technical command of the material at hand. Hargrove is a seasoned veteran trumpeter now in his late thirties. He has been leading groups since he was 19 and has paraded his enormous talent and infectious fire around the globe more than a few times. He has lost none of the sparkle of his first forays on the jazz scene, when he was one of the neo-conservative young lions emerging in the wake of Wynton Marsalis. To his credit, Hargrove has continued to evolve stylistically, and his performing and recording with rappers and turntable artists indicate an obvious preference for the sounds of the hip club scene and city streets. Yet he is equally interested in lush harmonies and the baroque art of the bop solo. This makes for a soulful helping of music, which is probably why the title of this disc is appropriate. In Earfood the trumpeter and his cohorts (Justin Robinson on alto sax and flute, Gerald Clayton on piano, Danton Boller on bass and Montez Coleman, drums) offer varied fare all linked by a soulful thread. Funky numbers like the 70s classic “Starmaker,” Hargrove’s own bluesy tunes and wistful ballads (like “Brown” and “Joy is Sorrow Unmasked”), a respectful treatment of the old standard “Speak Low” and the believable soul of Sam Cooke’s “Bring It On Home To Me” all guarantee the “sonic pleasure” promised in the liner notes.

PS

Wadada Leo Smith’s Golden Quartet : Tabligh

Cuneiform RUNE 270

HHHHHI

Sur un parcours musical de plus de 40 ans, le trompettiste et compositeur Wadada Leo Smith a su concilier lyrisme et abstraction au sein d’une musique sans cesse actuelle. Membre de l’AACM et compagnon de route d’Anthony Braxton dans les années 1960 et 1970, pionnier de l’autoproduction (les disques de son étiquette Kabell ont été réédités dans un coffret essentiel chez Tzadik), il est aussi un grand explorateur de la spiritualité humaine, s’engageant tour à tour dans le mouvement rastafari et dans l’Islam, le « tabligh » étant justement un mouvement musulman né en Inde dans les années 1920. Si certains de ses projets sont assez difficiles d’accès, le Golden Quartet est son groupe qui fait le plus appel à la tradition du jazz. Ce nouveau disque du quartette prolonge l’esthétique amorcée dans l’album initial Golden Quartet (Tzadik, 2000) et The Year of the Elephant (Pi, 2002), quoique la formation ait été complètement remaniée ici avec l’arrivée de Vijay Iyer au piano et aux claviers, de John Lindberg à la contrebasse et de Ronald Shannon Jackson à la batterie. Quatre pièces composent ce nouvel opus. Le premier morceau, Rosa Parks, s’ouvre et se termine sur des solos de trompette très lyriques, le milieu dominé par un groove abstrait développé par une section rythmique électrifiée évoquant le Miles Davis de la fin des années 1960. Smith enchaîne tout de suite avec un motif répété qui reviendra tout au long de sa pièce DeJohnette, évocation, bien sûr, du grand batteur qui a fait partie de la première formation. À huit minutes, Caravan of Winter est la pièce la plus courte du disque, trouvant son point culminant dans un solo percussif et dynamique d’Iyer. Tabligh, enfin, constitue la pièce de résistance de l’album; en plus de 20 minutes, la musique offre des moments de grand dépouillement et d’autres résolument plus exacerbés, notamment un solo remarquablement musclé de Lindberg, le tout dirigé de main de maître par Smith. On ne pourrait pas s’attendre à moins d’un musicien de ce calibre, capable d’abolir les frontières entre composition et improvisation; n’est-ce pas là la marque des plus grands disques de jazz ?

FAH

The Roy Campbell Ensemble : Akhenaten Suite

AUM Fidelity AUM045

HHHHII

Parmi les trompettistes actuels, Roy Campbell pourrait devenir une figure de proue: fermement ancré dans la tradition afro-américaine sans tomber dans le conservatisme musical, possédant un jeu dynamique et polyvalent de nature, il sait aussi collaborer avec quelques-uns des musiciens les plus brillants de sa génération (certains connaissent son superbe disque Ethnic Stew & Brew avec William Parker et Hamid Drake). Avec ce nouvel album, enregistré au Vision Festival en 2007, Campbell s’affirme aussi comme compositeur. Dans l’ensemble, il y a quelque chose de vaguement rétro dans cette Akhenaten Suite, dont les thèmes volontiers modaux n’auraient pas dépareillé une séance d’enregistrement des années 1970. Le vibraphone de Bryan Carrott n’est pas sans donner à l’ensemble une sonorité proche de ces séances Blue Note des années 1960 où Bobby Hutcherson faisait merveille. En revanche, c’est le violon de Billy Bang, ici au meilleur de sa forme, qui donne un son plus distinctif au quintette, complété par les excellents Hilliard Greene (contrebasse) et Zen Matsuura (batterie). Campbell livre donc un disque somme toute excellent, plongeant ses racines dans le passé tout en gardant les yeux bien fixés sur l’avenir.

FAH


(c) La Scena Musicale