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La Scena Musicale - Vol. 14, No. 10

Critiques/Reviews

July 8, 2009


HHHHHH indispensable / a must!
HHHHHI excellent / excellent
HHHHII très bon / very good
HHHIII bon / good
HHIIII passable / so-so
HIIIII mauvais / mediocre

$ < 10 $
$$ 10–15 $
$$$ 15–20 $
$$$$ > 20 $

Critiques / Reviewers

RB René Bricault
FC Frédéric Cardin
EC Éric Champagne
PG Philippe Gervais
WSH Stephen Habington
AK Arthur Kaptainis
AL Alexandre Lazaridès
PER Paul E. Robinson
LR Lucie Renaud
CR Camille Rondeau
JKS Joseph K. So

Musique Vocale
Musique Instrumentale
DVD
Livre

Musique Vocale

Handel: Rodrigo

María Bayo, Sharon Rostorf-Zamir, Anne-Catherine Gillet, soprano; Maria Riccarda Wesseling, mezzo-soprano; Max Emanuel Cencic, countertenor; Kobi van Rensburg, tenor; Al Ayre Español/Eduardo Lopez Banzo

Ambroisie AM 132 (3CD)

HHHHHH $$$$

Rodrigo est le premier opéra qu’écrivit Haendel lors de son séjour de formation en Italie, et on y retrouve la fougue et la fraîcheur qui caractérisent les plus belles œuvres de cette période, comme le Dixit dominus et la Résurrection. Les airs de Rodrigo sont généralement courts, mais toujours finement caractérisés et souvent virtuoses. C’est toute la palette des affects baroques dont s’empare ici le jeune Haendel, avec une assurance qu’auraient pu lui envier bien des compositeurs italiens. L’œuvre avait déjà été enregistrée par Alan Curtis en 1999, mais la présente version s’avère infiniment supérieure. Eduardo Lopez Banzo dirige un orchestre sensationnel, dont la vigueur et la précision ne sont pas sans rappeler les Musiciens du Louvre, qui servaient jadis si bien ce répertoire. Sous la baguette du chef espagnol, même les récitatifs prennent vie et n’ennuient jamais, soutenus par un magnifique clavecin de facture italienne. Exception faite du chant un peu maniéré de Maria Bayo, la distribution est plus que satisfaisante. Si le Rodrigo de Maria Riccarda Wesseling séduit dès le premier air, on aura tôt fait d’apprécier aussi l’agilité d’Anne-Catherine Gillet, le timbre androgyne de Max Emanuel Cencic et la bravoure du ténor Kobie van Rensburg, très sollicité ici. Un incontournable pour tout amateur de Haendel. PG

L’Écrit du Cri: Renaissance & 19th to 21st-Century Songs

Ensemble Clément Janequin/Dominique Visse

Harmonia Mundi HMC 902028 (73 min 50 s)

HHHHII $$$

Cet enregistrement de l’ensemble Clément Janequin est une fantaisie et doit être pris comme tel. La première moitié du disque s’articule autour des cris de rue, en prenant pour axe les célèbres Cris de Paris de Janequin, dans une version toutefois moins dynamique que celle de 1982 du même ensemble. Les Cris de Marseille, parodie ingénieuse et truculente qu’on doit à notre contemporain Régis Campo, est tout à fait hilarant, tout comme les extraits d’œuvres de Jean Georges Kastner et d’Édouard Deransart, qui révèlent une part méconnue du répertoire français léger du XIXe siècle. Cependant, le fil conducteur de cette fricassée étonnante se brouille dans la seconde moitié du disque, franchement décevante, où il est question du cri du prisonnier politique torturé, du cri patriotique, d’un mystérieux « cri de blog » et qui se conclut avec le cri des soldats dans les tranchées, réclamant langoureusement une présence féminine… De plus, s’il est rafraîchissant d’entendre des voix formées au chant ancien dans un répertoire plus récent, notamment le baryton Vincent Bouchot, le timbre nasillard de Dominique Visse devient vite irritant. Surtout, on reste plus que perplexe à entendre des arrangements farfelus pour voix, piano, orgue, contrebasse et luth; du drôle, on passe au ridicule. Au moins, on rit encore. CR

Midsummer Night: Arias by Alwyn, Barber, Britten, Dvofiák, Floyd, Herrmann, Korngold, Lehár, Messager, Stravinsky, Walton

Kate Royal, soprano; Crouch End Festival Chorus; English National Opera Orchestra/Edward Gardner

EMI 50999 2 68192 2 8 (61 min 45 s)

HHHHHI $$$

This is the British soprano’s second album for EMI and to my ears superior to her debut disc. The album title refers to the surfeit of emotions – love in all its guises – that bubble over on a midsummer night, a theme that links rather loosely a collection of thirteen arias on the disc. It is an interesting mixture of the familiar (‘Vilja Lied’, ‘Song to the Moon’) and the obscure (‘Midsummer Night’ from William Alwyn’s Miss Julie). Royal’s soft-grained, cool, silvery tone is lovely, a little reminiscent of a young Kiri Te Kanawa. Particularly beautiful are the arias from Stravinsky’s Le Rossignol, Ellen Orford’s ‘Embroidery Aria’, and ‘The Trees on the Mountains’ from Carlyle Floyd’s Susannah. The only drawback is the presence of a borderline slow vibrato, a beat in the voice in the high fortissimos when she puts too much pressure on the voice – not a healthy sign in a young singer. The ENO Orchestra and Edward Gardner do yeoman service. The recorded sound is spacious, with the voice well captured. This is an interesting and rewarding disc for anyone keen to discover a new voice. JKS

Mozart: Idomeneo

Richard Croft (Idomeneo); Bernarda Fink (Idamante); Sunhae Im (Ilia); Alexandrina Pendatchanska (Elettra); Kenneth Tarver (Arbace); Nicolas Rivenq (Gran Sacerdote); Luca Tittoto (La Voce); RIAS Kammerchor; Freiburger Barockorchester/René Jacobs

Harmonia Mundi HMC 902036.38 (3CD: 3 h 11 min + 1DVD: 45 min 50 s)

HHHHII $$$$

Quel orchestre et quel chef ! À la tête d’un ensemble baroque galvanisé, René Jacobs conduit sans faillir le premier véritable chef-d’œuvre que Mozart aura donné au genre lyrique. Après Harnoncourt et Gardiner, il réussit à nous en faire saisir d’autres beautés, loin du hiératisme figé de l’opera seria. Il réitère ainsi le tour de force accompli, il y a trois ans, avec La Clemenza di Tito, faisant des récitatifs des moments dramatiques ou à tout le moins significatifs. Notre bonheur aurait été complet si la prestation soliste ou chorale était toujours de la même qualité. Oubliant qu’il fut grand guerrier, Richard Croft réduit un peu trop son Idoménée au ton élégiaque, ce qui fait double emploi avec le rôle d’Idamante, et la voix de Sunhae Im est trop éthérée pour faire croire à l’éprouvée Ilia, mais Bernarda Fink et Alexandrina Pendatchanska sont bien à leur place. Ces réserves peuvent être tenues pour mineures en regard d’une magnifique réalisation d’ensemble. Un DVD nous permet de jeter un coup d’œil sur les séances de travail intensif qui ont précédé l’enregistrement, tout en nous livrant les réflexions du chef et des artistes sur l’œuvre. AL

Penderecki: Utrenja

Iwona Hossa, soprano; Agnieszka Rehlis, mezzo-soprano; Piotr Kusiewicz, tenor; Piotr Nowacki, bass; Gennady Bezzubenkov, basso profondo; Warsaw Boys’ Choir; Warsaw Philharmonic Choir and Orchestra/Antonio Wit

Naxos 8.572031 (74 min 51 s)

HHHHHH $

Dès les premières mesures, simple pianissimo aux voix graves, on sent que quelque chose d’extraordinaire se prépare. Il faut dire que Wit nous a habitués au grandiose avec ses Penderecki sur Naxos (la Passion selon Saint Luc et le Requiem polonais, entre autres), mais ici il se surpasse. L’intensité est palpable, sans perte de contrôle de l’imposante masse orchestrale. Wit fait preuve d’une grande maîtrise de la partition, prouvée par sa façon de bien différencier la couleur de chaque cluster, de chaque bruit vocal, de chaque glissando. Au milieu de tant de modernisme, les sporadiques et humbles sections tonales en deviennent écrasantes d’émotion. Malgré quelques petites anicroches, les solistes chantent fort bien, avec chaleur et conviction. On aurait souhaité une réverbération plus discrète, mais on se console en constatant qu’elle rehausse certains passages. Qui ne paierait pas dix dollars pour risquer une révélation spirituelle ? RB

Songs by Ravel

Gerald Finley, baritone; Julius Drake, piano

Hyperion CDA67728 (73 min 28 s)

HHHIII $$$

Le baryton canadien Gerald Finley ne cesse d’éblouir par la beauté de son timbre et son agilité à chanter du répertoire de tout genre avec un égal bonheur. Il propose ici un programme entièrement consacré aux mélodies de Ravel. Le choix du répertoire est bien équilibré, alternant des œuvres plus connues (Don Quichotte à Dulcinée, Cinq mélodies populaires grecques) avec des pièces moins souvent jouées (Sur l’herbe, Un grand sommeil noir). L’interprétation est excellente : bon phrasé, grande sensibilité, prononciation juste. L’accompagnement de Julius Drake est sans faille. Un disque parfait? Malheureusement non ! La prise de son est des plus étranges : le piano semble placé à l’avant-plan de la voix. De plus, autant la couleur du piano est très claire, autant Finley semble éloigné, voire étouffé, ce qui crée un contraste particulièrement déplaisant. On réussit à tendre l’oreille pour apprécier la musique, mais cette prise de son nous rattrape souvent. Dommage, car ces musiciens de grand talent offraient une interprétation des plus intéressantes de ces charmantes mélodies. EC

Musique Instrumentale

A French Collection : Pièces de clavecin

Skip Sempé, clavecin

Paradizo PA0007 (62 min 11 s)

HHHHHI $$$$

C’est une sélection des plus colorées que propose Skip Sempé dans son récent disque consacré aux pièces de clavecin françaises du XVIIIe siècle. Presque toutes sont à peu près inconnues, à l’exception de la flamboyante Marche des Scythes de Joseph Nicolas Pancrace Royer qui clôt le disque dans un feu d’artifice de virtuosité. Ce sont donc d’heureuses découvertes que Les Grâces de Jacques Duphly et Les Etoiles de Michel Corrette, véritables joyaux d’une tendresse exquise. Le jeu de Sempé est sensible et raffiné, mais il prend des libertés discutables quant au texte, notamment en ce qui a trait aux reprises et à l’ornementation. C’est par contre un plaisir que d’entendre dans une prise de son aussi chaleureuse un son de clavecin à la fois clair et riche qui saura séduire toutes les oreilles, les amoureux de clavecin tout comme ceux qui restent à convaincre. Un beau disque de découvertes à déguster. CR

Albinoni : Sinfonie a Cinque

Chiara Banchini, violon & dir.; Ensemble 415

Zig Zag Territories ZZT090202 (54 min 10 s)

HHHHHH $$$$

La lumière fragile d’un matin vénitien, l’éclat d’un midi sur les gondoles et la moiteur aux mille odeurs d’un crépuscule se déposant doucement sur la place Saint-Marc, voilà ce que ressent l’auditeur de ce merveilleux disque et de sa musique, placés sous la magistrale direction de Chiara Banchini et la tendre ferveur des musiciens de l’Ensemble 415. Que dire de plus, sinon que tout y est parfait, savamment dosé, admirablement exprimé, suavement enveloppé dans une prise de son qui respire sans délaisser le caractère intimiste de la musique. Du grand art. FC

Bach : Sonates BWV 1027-1029, Chorals & Trios

Les Basses Réunies (Bruno Cocset, alto « Bettera », ténor & grande basse de violon « alla bastarda »; Bertrand Cuiller, clavecin et orgue positif; Richard Myron, contrebasse)

Alpha 139 (58 min 28 s)

HHHHHH $$$$

Les trois Sonates pour clavecin et viole de gambe ne sont pas données ici en continuité, étant encadrées chacune par un choral et un trio, pour un total de neuf titres. Un tel encadrement, choisi toujours à bon escient, abolit les frontières entre le profane et le sacré et met en valeur la sonate en préparant et en prolongeant son atmosphère propre. Bruno Cocset nous en livre une interprétation prenante en compagnie de ses deux complices des Basses Réunies. Il joue de trois instruments, dont l’un, l’alto « Bettera », a été fabriqué d’après un tableau du peintre italien du même nom qui vécut au dix-septième siècle. C’est donc un exemplaire unique aux sonorités lumineuses. Pour accomplir son projet, Cocset a dû changer d’instrument au cours d’un même mouvement, ou encore recourir au play-back. La beauté sonore et l’intelligence de l’interprétation sont constamment au rendez-vous. La prise de son a été idéalement réalisée à l’église de Pampigny, en Suisse. AL

Beethoven: Piano Concertos WoO 4 & No. 2

Ronald Brautigam, piano; Norrköping Symphony Orchestra/Andrew Parrott

BIS-SACD-1792 (58 min 4 s)

HHHHHH $$$$

Celui qu’on pourrait appeler l’ancêtre des cinq concertos pour piano de Beethoven a été composé alors que ce dernier avait moins de quatorze ans. La partie d’orchestre étant depuis restée introuvable, c’est Ronald Brautigam qui l’a reconstruite à partir d’une réduction pour piano et sa propre connaissance de l’écriture classique. Le résultat est tout à fait convaincant. L’on est heureux de découvrir une œuvre qui, sans ajouter beaucoup à la gloire du compositeur, nous permet de comprendre qu’il ne s’est pas créé d’un seul coup, mais a dû se dégager des lourdes influences de Haydn et de Mozart, malgré certaines caractéristiques déjà reconnaissables. Le Deuxième concerto opus 19, qui a en fait été composé en premier après le WoO4, possède, sous les doigts de Brautigam et la baguette de Parrott, une transparence toute particulière. Le piano a été placé au centre de l’orchestre pour atteindre à l’intimité idéale de la musique de chambre. Le Rondo en si bémol WoO6, prévu d’abord comme dernier mouvement de l’opus 19, complète intelligemment ce programme brillant et inattendu. AL

Franz Schubert: Symphony No 8 in C major “The Great”

Bamberger Symphoniker/Jonathan Nott

Tudor 7144 (Hybrid SACD – 61 min 47 s)

HHHHII $$$$

Until the relatively recent but belated arrival of the Zurich-based Tudor label, we had been denied a Schubert symphony cycle in super audio. Now the omission has been handsomely rectified. This disc (in the revised numerology in which the ‘Unfinished’ is designated No 7) caps a cycle of the highest merit and in state-of-the art sound. The other symphonies have been coupled as 1, 3 and 7 (7141); 2 and 4 (7142); and 5 and 6 (7143). Recorded between 2004 and 2008, these are performances to rival the effervescent finesse of the 1980s cycle from Claudio Abbado and the Chamber Orchestra of Europe (DG). In this account of the ‘Great’ C major, Jonathan Nott treads a lighter and more flexible path than we may be accustomed to. This pays off in the wider dynamic of the super audio sound stage. If you overlooked RB’s enthusiastic reviews of Nott in Mahler and Janáãek (LSM 14.9, June), this is a rewarding introduction to an up-and-coming British conductor and a highly responsive orchestra. WSH

Gustav Mahler: Symphony No 6

London Philharmonic Orchestra/Klaus Tennstedt

LPO-0038 (2CD: 83 min 53 s)

HHHHHI $$$
In 1991, Norman Lebrecht wrote of the phenomenal effect of Klaus Tennstedt in concert: “He found his favourite audience in London, where luridly coifed punks stood motionless in the bear pit of the Royal Albert Hall through his 90-minute performance of Mahler’s Sixth.” About the conductor’s return to the podium after surgery and treatment for cancer, Lebrecht went on, “He returned to give an awesome Mahler Sixth… that left many in tears.” And here is Tennstedt live in this crucial work captured by BBC engineers at the peak of his powers. It is an astonishing account and one that amply demonstrates the virtuosity of the LPO of 1983 and its consummate devotion to the fragile and chronically insecure conductor. This is a disc that no self-respecting Mahlerian should be without. Note also that the LPO label also offers an equally impressive 1985 performance of Mahler’s First (LPO-0012) coupled with Lieder eines fahrenden Gesellen sung by Thomas Hampson. WSH

Harry Somers : musique pour piano

Artistes variés

Centredisques CMCCD 14509 (2CD : 125 min 43 s)

HHHHHI $$$$

Cette nouvelle publication de la série A Window on Somers nous fait découvrir l’intégrale des œuvres pour piano solo d’Harry Somers, l’un des plus formidables compositeurs canadiens du XXe siècle. À l’exception de Nothing Too Serious, composé en 1997, soit peu de temps avant sa mort, les autres œuvres ont été écrites entre 1942 et 1957. Nous avons donc affaire à un jeune compositeur fraîchement formé qui possède déjà une forte personnalité musicale (et à un excellent pianiste, si l’on se fie au degré de difficulté technique de certaines pièces). Néanmoins, certaines influences sont présentes : on décèle facilement un rapport à la couleur et à la résonance qui rapproche de nombreuses pièces des impressionnistes français, Debussy en tête, mais aussi un peu de Messiaen. On retrouve certaines harmonies typiques d’un Scriabine et d’un Schoenberg et même certains gestes propres à Chostakovitch. Mais partout le souffle, la direction et un étonnant lyrisme se distinguent et confèrent un caractère original à ce répertoire qui mérite d’être entendu plus souvent. Cette anthologie regroupe des enregistrements transférés pour la première fois sur CD et dans l’ensemble, la qualité sonore est au rendez-vous. Un incontournable pour apprécier à sa juste valeur l’œuvre de Somers. EC

Janitsch : Sonate da camera Vol. 1 – Notturna

Christopher Palameta, hautbois, hautbois d’amour et dir.; Stephen Bard, hautbois; Mika Putterman, traverso; Hélène Plouffe, violon et alto; Kathleen Kajioka, alto; Karen Kaderavek, violoncelle; Erin Helyard, clavecin

Atma classique ACD2 2593

HHHHHI $$$

Si Johann Gottlieb Janitsch est un compositeur inconnu, ce n’est pas faute de talent, mais bien parce que la plus grande partie de son œuvre a disparu lors de la Seconde Guerre mondiale. Heureusement, vingt-sept quatuors survivent, dont Atma entreprend ici l’édition, audacieux projet discographique appelé à faire date. Les œuvres révélées dans ce premier volume, pour la plupart inédites, sont en effet du meilleur cru. Actif à la cour de Frédéric II de Prusse, Janitsch développe un langage personnel raffiné où l’art du contrepoint savant hérité de la tradition côtoie l’esprit galant des frères Graun et le style fantasque de Carl Philip Emmanuel Bach. Pour notre plus grand plaisir, chaque pièce est présentée dans une instrumentation différente et souvent inusitée, voire rarissime, dont la seule mention est déjà prometteuse (flûte traversière, hautbois et hautbois d’amour, deux hautbois et un alto, hautbois d’amour et deux altos et ainsi de suite). Les musiciens du jeune ensemble montréalais Notturna, dont c’est ici le premier disque, maîtrisent parfaitement leurs instruments et en exploitent tout le grain sonore en de savoureux échanges colorés. Néanmoins, l’ajout d’une contrebasse ou d’un basson serait peut-être souhaitable, afin d’insuffler plus de vigueur au continuo, ici un peu en retrait. PG

L’Héritage Beethoven: Horn works by Beethoven, Czerny, Ries, Moscheles

Louis-Philippe Marsolais, horn; David Jalbert, piano

ATMA ACD2 2592

HHHHHI $$$

Louis-Philippe Marsolais produced a revelatory live performance late in 2007 of Beethoven’s Horn Sonata Op. 17 at the Jeunesses Musicales house in Montreal. I dock a star off this stunning ATMA release only because the young Canadian prizewinner has switched the spectrally colourful natural horn he used on that occasion for a modern valve horn. Not to worry: The playing is not only technically impeccable (as one might expect on the easier instrument) but tonally as forthright or lyrical as the musical occasion demands. David Jalbert is an equal partner in a piano part Beethoven clearly wrote with his own virtuoso abilities in mind. If the searching second subject of the first movement is a little more elongated than is considered proper in our neoclassical age, we can still appreciate how well the players have captured the young-Prometheus spirit of this wonderful early score.

As the title of the disc suggests, the other selections are by composers who knew and followed Beethoven. Carl Czerny’s Andante e polacca is eminently hummable and Ferdinand Ries demonstrates how much he had learned from the master in his fresh-tuned and well-constructed Sonata Op. 34. Two sets of variations by Ignaz Moscheles are more than merely entertaining. Coherent at pianissimo or fortissimo and equal to any articulatory demand, Marsolais has the measure of all this music. He sounds very much primed to become an international horn virtuoso. We shall see. AK

Mozart/Brahms: Clarinet Quintets

Scharoun Ensemble Berlin (Karl-Heinz Steffens, clarinet; Guy Braunstein, Christoph Streuli, violin; Ulrich Knörzer, viola; Richard Duven, cello)

Tudor SACD 7137 (70 min 44 s)

HHHHII $$$$

Brahms’ Clarinet Quintet is arguably the finest composition of the composer’s last years. Brahms was inspired by the 35-year-old clarinetist of the Meiningen Court Orchestra – Richard Mühlfeld – to write no fewer than four chamber music works for the instrument in quick succession, but the Quintet is almost in a class by itself. It has autumnal qualities one associates with Brahms’ old age but it has plenty of energy too. Its most sublime moments are probably in the slow movement with its inspired use of gypsy elements. This new recording by members of the Berlin Philharmonic is superb. Clarinetist Karl-Heinz Steffens follows a long line of illustrious predecessors in the BPO including Karl Leister and Sabine Meyer, but easily holds his own. His sound is incredibly pure from top to bottom and his range of dynamics is extraordinary.

The performance of the Mozart is just as good. In both pieces the string players are at one with the soloist and the give and take is consistently engrossing. The sound quality is perhaps a little clinical but the clarity is amazing. PER

Nareh Arghamanyan: Rachmaninov & Liszt

Nareh Arghamanyan, piano

Analekta AN 2 8762 (51 min 49 s)

HHHHHI $$

Nineteen-year-old Armenian Nareh Arghamanyan swept the major prizes at the Montreal International Music Competition (piano edition) in May 2008 and with it a highly coveted chance to make a recording on the Analekta label. This disc of Rachmaninoff and Liszt sonatas is the result. It amply demonstrates all the fine qualities with which Arghamanyan wowed the judges last year. She has chosen two very difficult sonatas – the Rachmaninoff No. 2 and the Liszt B minor. These pieces not only require technical virtuosity, but also a musical maturity and a depth of understanding of the material that is sometimes lacking in very young prizewinners. Arghamanyan meets the daunting demands of these two ultra-Romantic pieces with a combination of technical bravura, singing tone and poetic expression. Her ability to shape a piece in an unhurried fashion is impressive, giving it room to breathe, bringing out all the nuances yet never losing sight of the overall architecture of the work. This applies to both sonatas, but the Liszt is particularly memorable. The recorded sound is clear and has good presence, although I would have liked a warmer sound from the piano. This is a most auspicious debut album, and hopefully the first of many more recordings to come from this artist. JKS

Schindler’s List: Williams & Bloch

Alexandre da Costa, violon; Marc Pantillon, piano; Orchestre Symphonique Bienne/Thomas Rösner

Atma Classique ACD2 2579 (51 min 16 s)

HHHHII $$$

Classical music purists sometimes turn their noses up at film music, which is rather unjustified when it comes to a masterpiece like John Willliams’ Schindler’s List Suite, composed for Spielberg’s film. Few who have heard it played by the great Itzhak Perlman would fail to be moved by the highly evocative and emotional primary theme in the first movement. Here we have the brilliant 30-year-old Canadian Alexandre da Costa, whose singing tone captures the spirit of the piece beautifully, using just the right amount of rubato but not so excessively as to turn into schmaltz. Thomas Rösner and the Orchestre Symphonique Bienne provide appropriately lush orchestral colours. Ernest Bloch’s Hebrew Suite, with its distinctively Jewish folk themes, is a perfect companion piece. The longest work on the disc is Bloch’s Concerto Grosso No. 1. Composed at a time (1925) when “serious” composers exited the tonal idiom en masse, Bloch’s highly romantic musical language was out of fashion. The structure of this piece is more formal and neoclassical than Romantic, with parts of the last movement Fugue sounding almost as if it could be from the Baroque. Too bad Bloch didn’t live to see his music back in style – 2009 marks the 50th anniversary of his death. This is a highly enjoyable disc and a worthwhile purchase for admirers of da Costa and Romantic violin music in general. JKS

Shostakovich – Symphony No. 15; Hamlet Op. 32

Russian National Orchestra/Mikhail Pletnev

PentaTone SACD PTC 5186 331 (64 min 42 s)

HHHHII $$$$

Les albums les plus décevants ne sont pas nécessairement les pires. On peut s’attendre à tout avec Pletnev, mais les augures semblaient bons avec du Chostakovitch par l’Orchestre national russe. Sans surprise, le résultat est excellent : grande précision dans l’exécution, belles couleurs orchestrales magnifiquement captées par les ingénieurs du son, grands moments de passion (les passages fortissimo des deux adagios en particulier). Malgré tout, l’auditeur reste sur sa faim, car la beauté de la présentation ne peut sauver un plat à la limite du morne. Aucune ironie, aucun modernisme ne pointent à la surface, et pourtant la Quinzième offre beaucoup de possibilités en la matière. Difficile de trouver une version d’aussi bonne qualité sonore… malheureusement. RB

Telemann: 3 Orchestral Suites

Carin van Heerden, recorder, oboe & dir.; L’Orfeo Barockorchester

Cpo 777 218-2 (68 min 50 s)

HHHHHI $$$$

Dans l’immense production instrumentale de Georg Philipp Telemann, il est aisé de choisir des œuvres non seulement plaisantes à jouer et entendre, mais dont l’écriture mettra en valeur la totalité du spectre musical d’un artiste et de son instrument. Ces lumineuses suites (ou « ouvertures », selon la compréhension baroque du terme) sont pleines d’une vie tourbillonnante et scintillante. Elles exhalent un sentiment de bonheur et de ravissement. Elles débordent de couleurs et excitent l’oreille par la richesse des reliefs et des textures. L’Orfeo est un ensemble accompli, maître de son discours, et les divers solistes sont irréprochables. Un délice du début à la fin. FC

DVD

GF Handel: Tamerlano

Plácido Domingo (Bajazet), Monica Bacelli (Tamerlano), Ingela Bohlin (Asteria), Sara Mingardo (Andronico), Jennifer Holloway (Iren), Luigi De Donato (Leone); Orchestra of the Teatro Real (Madrid Symphony Orchestra)/Paul McCreesh

Stage Director: Graham Vick

Video Director: Ferenc van Damme

Opus Arte OA 1006 D (3DVD: 241 min)

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Here is Plácido Domingo at the age of 70 giving the performance of a lifetime. The voice may no longer be the immaculate instrument of the past but Domingo has lost nothing of his ability to project a character on stage. This appearance, in Handel’s most dramatic tenor role, amply confirms his standing as the commanding singer-actor of the era. Tamerlano is a work of annihilating gloom. Bajazet is the Ottoman sultan taken captive by the Oriental tyrant Tamerlano. In the first scene, he is anguished and seeking death (which will take him most of three acts to find). The plot is thickened by a diabolical love quadrangle, the mutually destructive devotion of a father and daughter and attempted regicide. Domingo’s performance is remarkable, yet it is Monica Bacelli, in the title role, who really steals the show. She delivers inspired singing (with an impressive lower register so important in a ‘trousers’ role) in a strikingly kinetic manner. This lady can move to awesome effect. The remainder of the cast is excellent. The sets and costumes designed by Richard Hudson are gorgeous. Paul McCreesh directs a fine account of the orchestral score (on modern instruments), which supplements the momentum created by Graham Vick. An informative interview with McCreesh is included as a special feature on disc 1.

The general entertainment value of baroque opera in general and Handel in particular on DVD has escalated sharply in the past few years. Tamerlano as produced by Jonathan Miller and conducted by Trevor Pinnock in 2001 (Arthaus DVD) looks static and seems a lot longer than four hours when compared to this exciting Madrid production. The trend for the small screen was set in 2005 with David McVicar’s Glyndebourne production of Giulio Cesare (Opus Arte) and continued with a sophisticated Zurich staging of Handel’s Orlando (Arthaus) last year. William Christie conducted both and returned to Zurich with Cecilia Bartoli for Semele, which is being released by Decca. The key point to remember is that Handel illustrated everlasting characters and timeless relationships with his music. The new wave of baroque opera films has taken the works out of dusty archives for presentation in your home theatre. WSH

Mozart: Clarinet Quintet in A major K. 581/Beethoven: String Quartet No. 16 in F major Op. 135

Sabine Meyer, clarinet; Hagen Quartett (Lukas Hagen, Rainer Schmidt, violin; Veronika Hagen, viola; Clemens Hagen, violoncello)

Medici Arts 2072318 (72 min)

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The late Herbert von Karajan had a genius for recognizing musical talent at an early age and nurturing it. Violinist Anne-Sophie Mutter is a prominent example. Another was clarinetist Sabine Meyer. After a series of grueling auditions she was chosen by Karajan to be principal clarinetist of the Berlin Philharmonic in 1981. Unfortunately, members of the orchestra did not agree and voted against the appointment. This was the beginning of a row between conductor and orchestra that Karajan eventually lost. Meyer was not given the position and she went elsewhere to pursue her career. After more than a quarter century it is clear that Meyer became one of the greatest clarinetists of her generation. If you’re wondering if she’s more a soloist than an orchestral player, ask Claudio Abbado. He chose her as a principal player for his Lucerne Festival Orchestra, a hand-picked ensemble of virtuosos if ever there was one.

On this DVD Meyer and the Hagen Quartet give us a Mozart Clarinet Quintet that is impeccably prepared yet joyous and elegant. It is a great performance. Not far behind it is Beethoven’s Op. 135. The Hagens are known for their attention to minute detail. But they can be dramatic and powerful too as in the scherzo movement. This DVD has unobtrusive video and superb sound. PER

Sergei Prokofiev : Guerre et Paix

Nathan Gunn (prince André Bolkonski), Olga Guryakova (Natacha Rostova), Elena Obraztsova (Maria Akhrossimova), Robert Brubaker (comte Pierre Bezoukhov), Anatoli Kotcherga (maréchal Mikhail Koutouzov); Chœur et orchestre de l’Opéra national de Paris/Gary Bertini

Metteur en scène : Francesca Zambello

Réalisateur DVD : François Roussillon

Arthaus Musik 107 029 (289 min)

HHHHII $$$$

Bien des facteurs expliquent que Guerre et Paix de Prokofiev, d’après le roman de Tolstoï, ne soit pas souvent interprété : l’œuvre est colossale, avec pas moins de 62 rôles (en fait 72, cette production-ci ayant effectué quelques coupures), un grand chœur, presque quatre heures de spectacle et des changements de décors des plus saugrenus (champ de bataille, salle de bal, Moscou en flammes). L’amateur lyrique a donc de quoi se réjouir avec ce DVD qui capte la production mise en scène par Francesca Zambello pour l’Opéra de Paris en 2000. Le spectacle est magnifique ! Costumes soignés, décors ingénieux, déploiement de foule saisissant et distribution vocale remarquable, avec en tête Nathan Gunn et Olga Guryakova, tous deux d’une magnifique musicalité et d’une grande expressivité. L’œuvre n’est cependant pas sans défaut. La première partie est musicalement monotone, avec étonnamment peu d’épisodes lyriques saisissants, et il y a ici et là des longueurs qui altèrent notre intérêt. Les musiques de danse et les chœurs patriotiques sont finalement les meilleurs éléments de cette œuvre à grand déploiement qui, sans être un incontournable, mérite le détour. Le tout est complété par un substantiel making-of traitant à la fois du spectacle et des faits historiques relatés. EC

Livre

La vie musicale à Trois-Rivières, 1920-1960

Par Amélie Mainville

Québec : Éditions Septentrion, 2009 (132 p.)

ISBN : 9782894485736

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Quand on évoque aujourd’hui la vie musicale trifluvienne, plusieurs images surgissent spontanément : l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières, les multiples manécanteries, des musiciens de la région reconnus sur la scène nationale ou internationale. Pourtant, avant 1960, la diffusion de la musique classique reposait essentiellement sur les efforts de fervents amateurs qui, bénévolement, à travers fanfares et chorales, œuvraient dans l’ombre. Dans cet ouvrage particulièrement fouillé, mais néanmoins présenté dans un style accessible, enrichi d’une iconographie parfois émouvante, Amélie Mainville retrace le climat si particulier de ces quarante ans pendant lesquels Trois-Rivières est passée de ville boudée par les grands artistes à lieu d’une vitalité certaine. On découvre la petite histoire, souvent fascinante, de la démocratisation de l’accès à la musique classique, qui implique une éducation du public, et qui mènera à l’éclosion d’une nouvelle dynamique, grâce à des pionniers tels J.-Antonio Thompson (qui met sur pied une série de concerts commentés), Anaïs Allard-Rousseau ou Gilles Lefebvre (fondateurs du mouvement des Jeunesses Musicales du Canada). Une page méconnue de notre passé musical à s’approprier d’emblée !


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