Critiques/Reviews
April 13, 2008
Politique de critique : Nous présentons
ici tous les bons disques qui nous sont envoyés. Comme nous ne recevons
pas toutes les nouvelles parutions discographiques, l’absence de critique
ne constitue pas un jugement négatif. Vous trouverez des critiques
additionnelles sur notre site Web www.scena.org.
Review Policy: While we review
all the best CDs we get, we don’t always receive every new release
available. Therefore, if a new recording is not covered in the print
version of LSM, it does not necessarily imply that it is inferior. Many
more CD reviews can be viewed on our Web site at www.scena.org.
HHHHHH indispensable / a must!
HHHHHI excellent / excellent
HHHHII très bon / very good
HHHIII bon / good
HHIIII passable / so-so
HIIIII mauvais / mediocre
$ <
10 $
$$ 10–15
$
$$$ 15–20
$
$$$$ >
20 $
Critiques / Reviewers
AL Alexandre
Lazaridès
FB Francine
Bélanger
JKS Joseph
K. So
LPB Louis-Pierre
Bergeron
PD Pierre
Demers
PMB Pierre
Marc Bellemare
PG Philippe
Gervais
RB René
Bricault
SH Stephen
Habington
MUSIQUE VOCALE
Josquin : Missa Sine nomine et Missa
Ad fugam
The Tallis Scholars/Peter Phillips
Gimell CDGIM039 (68 min 50 s)
HHHHHH
$$$$
Dans le monde fascinant de la musique
de la Renaissance, la parution d’un nouveau disque des Tallis Scholars
constitue un événement en soi. Et pour cause : leur version des deux
seules messes en canon de Josquin des Prés (une de jeunesse, l’autre
de la maturité) frôle la perfection. Certains trouveront le résultat
sonore quelque peu neutre, pour ne pas dire terne, mais la clarté et
la subtilité qui ressortent de ce « défaut » sont exigées par la
musique elle-même. L’intonation et l’équilibre des voix en bénéficient
au point où l’on ne saurait demander mieux. Les chanteurs ont visiblement
appris, sous Peter Phillips, à laisser leur ego de côté au profit
de la partition – et des auditeurs ! L’ajout de deux révisions
de mouvements attribués à Josquin stimule la curiosité et augmente
le plaisir. RB
Guillaume Dufay : Missa Se la face
ay pale
Diabolus in Musica/Antoine Guerber
Alpha 908 (67 min 5 s)
HHHHHH
$$
Guerber nous convie à une expérience
qui dépasse le simple domaine musical. Indépendamment des croyances
religieuses de chacun, personne ne restera insensible à l’élévation
spirituelle dégagée par une telle musique (surtout lorsqu’elle est
aussi brillamment interprétée). Dufay est le plus grand compositeur
du XVe siècle. Il n’a pas tant influencé les musiciens à venir
que résumé toute la musique faite avant lui – celle du Moyen Âge
– qu’il a portée à son pinacle. Sa messe est construite selon
le principe du « cantus firmus » qui veut que les cinq parties de
l’ordinaire (Kyrie, Gloria, Credo, Sanctus, Agnus) partagent
une même source musicale – ici une chanson profane de Dufay intitulée
Se la face ay pale (Thomas Binkley et son Studio der Frühen Musik
ont donné une version remarquable de cette chanson sur l’album
Adieu m’amour paru en 1975, réédité en CD en 1991, mais malheureusement
aujourd’hui introuvable). Pour obtenir une messe complète, Guerber
a rajouté à l’ordinaire le Propre du jour de la fête de la Trinité,
un complément de programme comme on en pratiquait à l’époque de
Dufay. Le choix de chanter a cappella se justifie par le fait
que ni à la chapelle papale ni à la maîtrise de la cathédrale de
Cambrai, lieux où œuvrait Dufay, l’orgue ou d’autres instruments
n’étaient permis. Laissez-vous donc bercer par l’harmonie de ces
huit voix d’homme et vous atteindrez un bien-être peu commun, une
sérénité exquise. Quand la musique touche au mystique PD
Bach : Magnificat / Handel : Dixit dominus
Natalie Dessay; Karine Deshayes; Philippe
Jaroussky; Toby Spence; Larent Naouri; Le Concert d’Astrée/Emmanuelle
Haïm
Virgin Classics 00946395241 2 9 (56 min
6 s)
HHHHHI
$$$
Leur latinité, leur contemporanéité,
une certaine construction en boucle, leur durée équivalente, la large
part accordée aux chœurs, l’absence de récitatifs : tout cela justifie
amplement la juxtaposition discographique de ces deux oratorios. Le
Magnificat débute joyeusement, tel un concerto brandebourgeois,
mais retrouve vite la solennité caractéristique des œuvres sacrées
du cantor de Leipzig. Sans atteindre les sommets architectoniques de
la Messe en si ou de la Passion selon saint Matthieu,
le Magnificat renferme des moments de pure grâce, comme le
Quia respexit, où soprano et hautbois entretiennent un dialogue
mélodique délicieux – ah ! le hautbois chez Bach ! Œuvre de jeunesse,
Dixit dominus déborde d’une vitalité contagieuse. Inspiré par
le psaume, Haendel a su exploiter au mieux les effectifs vocaux et orchestraux
utilisés. Ce disque est une belle réussite. Fondé en 2000 par Emmanuelle
Haïm, Le Concert d’Astrée a connu une progression fulgurante
et figure aujourd’hui parmi les meilleurs orchestres baroques. De
l’excellente équipe de solistes ici réunis, se distingue le contre-ténor
Philippe Jaroussky et sa voix céleste. En insérant le CD dans son
ordi, on peut, via Internet, accéder au club de Virgin Classics et
EMI et avoir droit à des exclusivités, de la musique en ligne et autres
privilèges. PD
Nova Voce : Chœur d’hommes
Nova Voce 2007-1 (58 min 14 s)
HHHHII
$$$
Nova Voce est un nouveau venu
dans le paysage choral canadien. Fondé en Nouvelle-Écosse il y a quatre
ans, le « chœur d’hommes provincial » vient de lancer un premier
album éponyme qui regroupe une sélection éclectique, tirée des grands
succès de l’ensemble. On peut y trouver nombre de pièces rarement
entendues, entre autres de beaux arrangements de chansons folkloriques
des îles britanniques et des Maritimes.
Le tout manque cependant
de variété. On croirait entendre dix fois la même chanson. Les pièces
sont certes belles, mais presque toutes lentes; les harmonies sont riches,
mais bien souvent prévisibles. Certaines ressortent néanmoins du lot,
notamment Fogarty’s Cove du chanteur folkorique Stan Rogers
ainsi que Shenandoah.
Bien qu’incapable de rivaliser
avec les grands ensembles vocaux canadiens sur de nombreux aspects (justesse,
puissance, diction, concision, etc.), Nova Voce se révèle d’une
écoute agréable. L’enthousiasme que ces choristes insufflent à
leur art est inspirant : ces hommes aiment profondément chanter ensemble,
cela se sent et s’apprécie. Dans ces morceaux issus de leur terroir,
ils atteignent par moments de touchants sommets d’intensité.
Le chœur d’hommes Nova
Voce semble remporter un succès considérable dans la communauté
néo-écossaise. Espérons que cet album contribue à le faire connaître
ailleurs au pays et à l’étranger ! LPB
Richard Strauss: Songs of Love and
Death
Hedwig Fassbender, mezzo-soprano; Hilko
Dumno, piano
Naxos 8.570297 (61m 33s)
HHHIII
$$
In the liner notes, Keith Anderson proclaims
that “although Strauss wrote over 200 songs...barely a dozen are well
known to the public.” Excuse me? Of the 22 songs on this disc alone,
at least 15 have been recorded many times over and appear regularly
in recital programs, and that’s not counting the magnificent Vier
letzte Lieder! Perhaps this is nitpicky, but this is the first time
I’ve come across the term “Songs of Love and Death” referring
to something other than Isolde’s “Liebestod”. The singer on this
disc is German mezzo Hedwig Fassbender, who has had a respectable European
career, mostly in France and Germany. I know her voice well as Mother
Marie in the Strasbourg Les dialogues des Carmélites, and in
Wagner. She is a good singer – musical, sensitive, and intelligent,
and in the right repertoire such as Wagner, she sings with beauty of
tone, affecting simplicity and emotional forthrightness. But as is so
often the case with Wagnerian singers, the voice is best heard in large
houses. In the recording studio, little blemishes in the voice are exaggerated
by the sensitive microphone. The tone as recorded here is hard and inflexible.
Fassbender has good intentions, but there is a pervasive edge to much
of her singing, particularly at the top, where under pressure a pronounced
beat takes over. Interpretively, her performance is also somewhat lacking,
one hears only a generalized emotional expression. Some of the songs
could use greater intensity and a faster tempo – here a more august
and experienced collaborative pianist with a firmer hand could have
helped. As it is, this disc is a pleasant enough account of these wonderful
Strauss songs, but better versions can be found elsewhere. JKS
Couperin et Lalande : Leçons de Ténèbres
Emma Kirkby et Agnès Mellon, sopranos;
Charles Medlam, basse de viole; Terence Charlston, orgue
BIS 1575 (69 min 12 s)
HHHHII
$$$$
Les amateurs de musique ancienne apprécieront.
Les pièces choisies ne sont pas des chefs-d’œuvre du corpus baroque,
mais les deux sopranos ici réunies méritent le plus grand respect.
Kirkby et Mellon sont issues du renouveau dans l’art d’interpréter
le baroque (utilisation d’instruments d’époque, effectifs orchestraux
réduits, diapason baroque, etc.), processus instauré il y a une trentaine
d’années par des musicologues en soif d’authenticité. On peut
citer deux enregistrements historiques qui démontrent l’engagement
des solistes. Tout d’abord, le Messie d’Haendel (1981, L’oiseau-lyre,
400 086-2), inoubliable collaboration de Kirkby avec Christopher Hogwood,
où l’on voulait reproduire des concerts donnés les 5 avril et 15
mai de l’an 1754. Puis l’opéra Atys de Lully (1987, harmonia
mundi, HMC 901257.59), où Mellon joue Sangaride sous la direction de
William Christie, une expérience qui ressuscitait un pan musical du
passé, celui du temps du Roi Soleil. Ces chanteuses ont beaucoup cheminé
par la suite sur la voie de la musique ancienne, en multipliant les
disques de qualité, acquérant une intelligence unique de ce genre
musical, un instinct qui sert la transparence totale des œuvres. Le
présent CD nous fait bénéficier de l’expertise de deux grandes
artistes, et les deux instrumentistes accompagnateurs s’acquittent
bien de leur tâche somme toute modeste. PD
MUSIQUE
INSTRUMENTALE
Prokofiev et Ravel : Concertos pour
piano
Yundi Li, piano; Berlin Philharmoniker/Seiji
Ozawa
Deutsche Grammophon 4776593 (51 min 4
s)
HHHHHI
$$$
Selon maestro Ozawa, l’art pianistique
du jeune prodige chinois, Yundi Li, est un habile mélange de poésie
et de technique. L’écoute du présent CD confirme ses dires. On pourrait
même ajouter que le Prokofiev, par ses cadences difficiles et sa froideur
même, souligne plus particulièrement la dimension technique irréprochable
du pianiste, alors que le Ravel (surtout l’élégiaque adagio) fait
ressortir davantage le côté poétique de son jeu. Mais Li n’est
pas seul avec son clavier : il bénéficie du soutien exceptionnel d’un
grand chef à la tête de l’un des meilleurs orchestres au monde,
ce qui donne deux interprétations à ranger dans les sommets discographiques.
Cette version du deuxième concerto de Prokofiev – œuvre peu enregistrée
– se compare aisément à celle de Kun Woo Pak (Naxos 8.550566), autre
pianiste qui marie étroitement l’émotion à la virtuosité. Quant
à la version du Concerto en sol de Ravel, elle se rapproche
de la référence absolue Argerich-Abbado sur Deutsche Grammophon. PD
Forqueray : Pièces de clavecin
Blandine Rannou, clavecin
Zig-Zag ZZT080301.2 (2 CD : 159 min)
HHHHHI
$$$$
Du violiste virtuose Antoine Forqueray,
il ne reste hélas que vingt-neuf pièces, auxquelles s’ajoutent les
trois que composa son fils dans un style très semblable. Pour être
réduit, l’ensemble n’en constitue pas moins un des sommets de la
musique baroque française. Dans le registre tendre comme dans l’expression
des sentiments les plus fougueux, tout porte ici la marque du génie
le plus sublime et le plus singulier. Quasi injouables à la viole tant
elles sont difficiles, ces œuvres furent aussi proposées par Forqueray
fils dans d’admirables transcriptions pour le clavecin qui exploitent
à fond le registre grave de l’instrument. Reconnue pour son toucher
sensible, Blandine Rannou se montre l’interprète idéale de ce répertoire. Certes,
à trop vouloir émouvoir, il lui arrive d’oser des tempos d’une
lenteur discutable : la Mandoline
manque de rebond et d’humour, le Carillon de Passy paraît
sonner le glas et la Sylva se fige quand elle devrait couler
tendrement. Mais pour ces quelques déceptions, que de merveilles ! Quel
sens du théâtre ! Totalement engagée, la claveciniste s’illustre
particulièrement dans les pièces les plus spectaculaires, rendant
très bien le caractère à la fois noble et emporté de la Jupiter
ou de la Portugaise, mieux que ne l’avait fait naguère Christophe
Rousset, handicapé par un instrument sans éclat. En attendant une
intégrale satisfaisante à la viole, voici donc un disque passionnant,
qui pourrait bien faire aimer le clavecin aux plus réticents. PG
Beethoven : Intégrale des symphonies
hr-Sinfonieorchester/Hugh Wolff
hrmj 039-07
HHHHHI
$$$$
La présente intégrale est digne d’intérêt
et saura faire sa place parmi les grandes de la discographie (Philharmonique
de Berlin/Karajan, Orchestre Révolutionnaire et Romantique/Gardiner,
entre autres). Le chef américain Hugh Wolff a mis au service de la
musique ses connaissances acquises en interprétation d’époque :
on retrouve avec joie cors et trompettes naturels, petites timbales
et cordes jouant avec un vibrato minimal. Ceci, sans rien enlever à
l’expressivité de cette musique, en rehausse les timbres; voici certainement
ce que Beethoven avait en tête lorsqu’il composait ses chefs d’?uvre.
Les cuivres ont beau être éclatants (quels effets de bouchés aux
cors !), ils ne sont jamais écrasants. Ceci permet aux bois de jouer
à l’aise sans crainte d’être perdus dans la masse sonore. Wolff
fait ressortir le caractère si personnel de chacune des symphonies
et tire de son orchestre une énergie impressionnante. Dans la 9e symphonie
(Hymne à la Joie), la seule à être captée devant public, les voix
sont solides et justes; on ne perd rien du ch?ur.
Le livret inclus dans le
coffret constitue une belle surprise. On y trouve quantité d’images
d’archives, de portraits du compositeur et de textes informatifs :
chaque symphonie est décortiquée et son contexte éclairci. On comprend
donc mieux le cheminement de Beethoven. Seul regret : le texte n’est
qu’en anglais et en allemand. LPB
Röntgen : Right Through The Bone
ARC Ensemble (Artists of the Royal Conservatory
of Canada)
RCA Red Seal 886971583724 (73 min 10
s)
HHHHII
$$$
La musique de Julius Röntgen a été
délaissée par l’histoire pour cause d’anachronisme : étran-ge
combinaison de Brahms et de Debussy, elle se démarque par une parfaite
maîtrise des qualités propres à chaque instrument. Nous écoutons
ici la musique de chambre d’un excellent orchestrateur (ayant composé
24 symphonies, tout de même), où l’atmosphère règne en maîtresse.
Par contre, son sens mélodique ne réussit pas à s’émanciper des
lieux communs, voire d’une certaine facilité. Bref, voici des œuvres
qui nécessitent un haut calibre d’exécution pour pouvoir « passer
», et c’est heureusement le cas : l’ARC Ensemble du Conservatoire
royal joue fort bien, et la prise de son honore les musiciens tout en
envoûtant l’oreille.RB
Schubert : Drei Klavierstücke / Rachmaninov
: Neuf Études-Tableaux, op. 39
Alain Lefèvre, piano
Analekta AN 2 9278 (75 min 2 s)
HHHIII
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Alain Lefèvre habite avec intensité
le redoutable opus 39 de Rachmaninov, trois quarts d’heure d’émotion
communicative. Il manque cependant des couleurs et des ailes à son
interprétation. Le pianiste a voulu, dit-il, privilégier l’aspect
« tableaux » plutôt que le côté « études » de ces compositions,
mais il y fait régner une atmosphère trop uniment sombre pour rendre
la variété des climats, l’« histoire » que raconte chacune de
ces neuf pièces. La pâte sonore dégagée à fond de clavier, sans
tricherie, ne libère pas les divers plans où s’entrecroisent chant,
contre-chant et accompagnement, tandis que les tempos, plutôt lents,
ne maintiennent pas toujours l’intérêt, en particulier dans les
numéros cinq et sept. Un peu plus d’allant et de pianisme ludique
aurait été tout à fait approprié ici ! Les magnifiques Trois
Pièces posthumes D. 496 de Schubert souffrent de la même pesanteur
à la fois émotive et digitale et en deviennent brahmsiennes avant
la lettre. L’omission de l’épisode andante dans le premier morceau
est regrettable : il contribue à équilibrer la véhémence du thème
principal, même si Schubert l’a biffé sur le manuscrit. AL
Ludwig van Beethoven: Symphonies Nos.
4 & 7
Deutsche Kammerphilharmonie Bremen/Paavo
Järvi
RCA 88697129332 Hybrid SACD (69 min 23
s)
HHHIII
$$$
“Järvi the Younger” kicked off his
Beethoven symphony cycle with vivid, high-impact recordings of Nos.
3 and 8 (RCA Red Seal 88697-13066-2). Therein, he nailed his colours
to the mast: swift, sure, deft articulation and a special bag of tricks
for the kettledrums (Järvi is a percussionist by trade). Grandeur and
rugged good humour in the tradition of Furtwängler and Klemperer are
not on board for the voyage. The present issue is cast in the same mold
and brings a palpable hit and a near miss. Volume 1 earned high praise
in some quarters for the originality of the interpretations. After exhaustive
comparisons it can be reported that Järvi is not doing anything that
Carl Schuricht and Hermann Scherchen (among others) weren’t doing
fifty years ago. What Järvi has going for him is a first-class chamber
orchestra and a state-of-the-art Direct Stream Digital recording.
The Fourth Symphony fits the conductor’s
concept hand in glove. It is a very convincing reading and an
exciting listening experience. The Seventh is another matter. After
the fireworks generated in his account of the Eroica, it really
seems underplayed. The lack of grip may be due to patching from recording
sessions two years apart and wholesale changes in orchestra personnel
during the interval. In terms of other recent recordings, Paavo Järvi
is outclassed by Stanislaw Skrowaczewski (Oehms), Sir Charles Mackerras
(Hyperion) and Mikhail Pletnev (DG). One disc will neither make nor
break a Beethoven symphony cycle but a weak Seventh is a serious obstacle
to success. If SACD surround sound is an absolute necessity, a safer
recommendation would be the continuing cycle from Osmo Vänskä and
the Minnesota Orchestra (BIS). SH
Beethoven : Piano Sonatas, Vol. 1
op. 13, « Pathétique »; op. 26;
op. 57, « Appassionata »; op. 10, no. 3; op. 78; op. 111
Christian Leotta, piano
ATMA Classique ACD2 2486 (2 CD : 142 min
27 s)
HHHIII
$$$$
Le premier volume de cette nouvelle intégrale
des sonates de Beethoven ne convainc pas beaucoup qu’elle a son créneau
dans la pléthore des intégrales existantes, même si le virtuose italien
de vingt-huit ans qui l’interprète l’a déjà donnée, nous dit-on,
une dizaine de fois à travers le monde, y compris à Montréal en 2002.
Le jeu est certes assuré, avec la virtuosité et la projection souhaitables,
mais ne donne pas l’impression qu’une vision est à l’œuvre.
Le pianiste égrène des notes et des sons sans les transformer en phrases
et en discours. Le sens de la transition fait particulièrement défaut
et les maniérismes censés démontrer de la sensibilité n’y peuvent
rien. Le deuxième mouvement de l’« Appassionata » a rarement semblé
aussi long et l’arietta de l’ultime sonate ne rejoint pas les cieux
métaphysiques entendus sous des doigts plus inspirés et expérimentés.
Disons aussi que le toucher de Christian Leotta ne parvient pas à faire
oublier que le piano possède des marteaux et que le legato y est un
art très difficile à maîtriser. Une intégrale sans doute prématurée. AL
MUSIQUE
CONTEMPORAINE
Wuorinen : The Dante Trilogy (chamber
version)
The Group for Contemporay Music/Oliver
Knussen
Naxos 8.559345 (72 min 10 s)
HHHHII
$
Ce premier enregistrement mondial de
l’intégrale de The Dante Trilogy dans sa version pour ensemble
de chambre a quelque chose d’un tantinet inégal. D’abord, on passe
de deux pianos dans le premier ballet à six musiciens dans le deuxième
et treize dans le troisième –ce qui décourage de facto une
écoute continue. Ensuite, la prise de son passe de géniale (The
Mission of Virgil) à précise mais sèche, voire étouffante (The
Great Procession, The River Of Light). Qu’à cela ne tienne,
nous nous trouvons tout de même devant la crème de la crème : Wuorinen
est l’un des plus grands compositeurs vivants (plus près ici du Stravinsky
tardif qu’à l’accoutumée), Knussen est un magnifique chef de musique
contemporaine et le Group for Contemporary Music est une superbe formation.
Comment rater sa recette avec pareils ingrédients ? RB
Bach / Coltrane
Raphaël Imbert, saxophones, clarinette
basse et dir.; André Rossi, orgue; Jean-Luc Di Fraya, percussions et
voix; Michel Péres, contrebasse; Gerard Lesne (contreténor); Quatuor
Manfred
Zig-Zag Territoires 080101 (72 min)
HHHHHI
$$$$
Voici un tout nouveau CD sur les rayons
depuis fin janvier. Raphaël Imbert a voulu réunir deux grands musiciens
qui semblent si différents, mais qui auront influencé, chacun à sa
manière, de nombreuses générations de créateurs.
Ce disque m’a littéralement
transportée. C’est comme rouler sur une autoroute connue vers une
destination habituelle et tout à coup découvrir d’autres avenues
possibles et avoir la curiosité de les explorer. C’est agréablement
déstabilisant, une aventure qui permet d’aller un peu plus loin en
faisant tomber les frontières des genres et de se laisser porter vers
une rencontre mystique dans l’art musical.
J’ajouterais cependant un bémol
: la photo de la pochette n’évoque en rien les émotions que le disque
provoque. Cet homme qui marche dos courbé semble porter tout le poids
du monde, alors que cette musique nous fait redresser la tête. FB
Vernon Duke : Piano Concerto, Cello
Concerto, Homage to Boston
Scott Dunn, piano; Sam Magill, violoncelle;
Russian Philharmonic Orchestra/Dmitry Yablonsky
Naxos 8.559286 (57 min 30 s)
HHHIII
$
Vladimir Dukelsky (alias Vernon Duke)
aura connu un plus vif succès à Broadway qu’à Carnegie Hall. Son
travail dans le monde des comédies musicales transparaît dans son
œuvre « sérieux », comme en témoignent les pièces ici présentées
: mélange de Tin Pan Alley et de néoclassicisme (mais sans
le mordant stravinskien). Si le genre vous intéresse, le Concerto
pour violoncelle, clairement l’œuvre majeure du disque, ne devrait
pas vous décevoir, avec le timbre gras et costaud de l’instrument
de Magill, les cordes somptueuses du Philharmonique russe et les cuivres
et percussions très…américains. Le Concerto pour piano rappelle
ceux de Bartók et Prokofiev, et la Suite pour piano le jazz
« impressionniste ». Mais en dernière analyse, ceux qui recherchent
complexité et originalité devraient passer leur chemin. RB
Hans-Peter Frehner : Engelchen (d’après
Babel : The Sin of Jesus)
Dorothea Schürch et Daniel Mouthon,
voix; Ensemble Für Neue Musik Zürich/Lukas Langlotz
hat [now] ART 169 (55 min 47 s)
HHHIII
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Hans-Peter Frehner, flûtiste de l’Ensemble
Für Neue Musik Zürich, participe à ce premier enregistrement mondial
(parions que ce sera aussi le seul) de son œuvre Engelchen.
Celle-ci fait appel à la traduction allemande de la nouvelle Le
péché de Jésus d’Isaac Babel (d’où le titre du disque),
que les chanteurs-récitants déconstruisent ici avec une étonnante
virtuosité d’effets (imaginez un Mauricio Kagel s’inspirant du
Pierrot lunaire). Voilà malheureusement l’unique réussite sonore
de ce projet multimédia, car l’accompagnement instrumental, adéquat
mais sans plus, n’a pas le tonus nécessaire pour s’émanciper des
éléments visuels. Cela n’empêche pas l’Ensemble de s’en tirer
honorablement, et les ingénieurs de son méritent nos éloges : clarinette
basse et percussions (en particulier) nous dévoilent toute leur richesse. RB
DVD
Mademoiselle: Nadia Boulanger
A film by Bruno Monsaingeon
Ideale Audience International DVD5DM41
(79 min, B&W)
HHHHHH
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Nadia Boulanger (1887-1979) is arguably
the most celebrated teacher of composition - and certainly the best
known – of the 20th century. Her list of students, running into the
thousands, reads like the Who’s Who of classical music, among them
Aaron Copland, Elliot Carter, Roger Sessions, Phillip Glass, Virgil
Thompson, Ned Rorem, Marc Blitzstein, Thea Mugrave, and Leonard Bernstein
– although in the film, Bernstein claims he never had formal studies
with her. Boulanger’s influence on the development of 20th-century
classical music was profound, though with the rise of serialism in the
1950’s, her adherence to tonal style was considered passé. This documentary
was made in 1977 by filmmaker Bruno Monsaingeon, when Boulanger was
already 90. It was Monsaingeon’s first film, and he has since gone
on to make numerous important documentaries on musicians the likes of
Menuhin, Gould, Richter, Perahia, Oistrakh, Tortelier and Fischer-Dieskau.
Titled Mademoiselle
(as she liked to be addressed), Monsaingeon focuses entirely on Boulanger
the teacher. Even at such a grand age, with her voice shaking and hands
gnarled by age and arthritis, Boulanger remains in full possession of
her faculties. She comes across as quite formidable but not unkind.
The extended footage of her weekly composition lessons held in her salon,
with dozens of students, famous and obscure, crammed into every nook
and cranny, is fascinating. This footage is interspersed with interviews
by Monsaingeon of Igor Markevitch, Bernstein, and Boulanger herself,
where she goes into detail about her pedagogical style and her philosophy
on music in general.
Astoundingly, in one of her
group classes, she has her students sing the opening lines of Schumann’s
“Davidsbünder”, with pianist Charles Fisk at the keyboard, all
the while adding her pearls of wisdom. One also gets to see child prodigy/Bulgarian
pianist Emile Naumoff demonstrating at the piano. Both students went
on to significant performing, teaching and composing careers. The most
poignant moment for me is not in the film, but rather in the accompanying
booklet, wherein Bernstein recounts his last visit to the dying Boulanger.
Gravely ill and in a coma, Boulanger miraculously responded to Bernstein
and the two actually had a brief exchange that absolutely gives me the
shivers. At 54 minutes, the film itself is lamentably short, so a performance
of Mozart’s Prague Symphony conducted by Markevitch is tagged
on, but for no good reason. The picture quality is vintage black and
white, and the sound only so-so. Despite these limitations, Mademoiselle
is an indispensable historical document and a must-see for students
of music theory and composition. JKS
Notes interdites : The Red Baton. Scenes
of Musical Life in Stalinist Russia / Gennadi Rozhdestvensky : Conductor
or Conjuror ?
Bruno Monsaingeon, réalisateur
EuroArts 3073498 (155 min)
HHHHHI
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Dans la première partie de ce documentaire
consacré à la vie musicale russe, Bruno Monsaingeon s’attache à
exposer les conditions difficiles que le stalinisme réservait aux compositeurs
et musiciens soviétiques de l’époque : Chostakovitch, Prokofiev,
Schnittke, Oïstrakh, Richter, etc. Des films d’archives sont entrecoupés
de commentaires d’un humour acerbe de la part du chef Rojdestvenski.
On n’y apprend pas beaucoup de nouveau, la plupart de ces faits étant
déjà connus en Occident. En revanche, la deuxième partie nous fait
découvrir un homme attachant et courageux en la personne de Guennadi
Rojdestvenski. Nous sommes témoins de l’art tout humain et de la
gestique on ne peut plus personnelle avec lesquels il aborde la direction
d’orchestre ou forme des étudiants. On le voit aussi longuement à
l’œuvre dans l’un des deux bonus offerts par ce DVD, dirigeant
à Moscou en 2002 son propre arrangement de la musique pour le film
Les âmes mortes, composée par Schnittke. Cette demi-heure est
un délice pour les yeux autant que pour les oreilles ! AL |