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La Scena Musicale - Vol. 13, No. 2 October 2007

Critiques/Reviews

October 3, 2007


Politique de critique : Nous présentons ici tous les bons disques qui nous sont envoyés. Comme nous ne recevons pas toutes les nouvelles parutions discographiques, l’absence de critique ne constitue pas un jugement négatif. Vous trouverez des critiques additionnelles sur notre site Web www.scena.org.

Review Policy: While we review all the best CDs we get, we don’t always receive every new release available. Therefore, if a new recording is not covered in the print version of LSM, it does not necessarily imply that it is inferior. Many more CD reviews can be viewed on our Web site at www.scena.org.

HHHHHH indispensable / a must!

HHHHHI excellent / excellent

HHHHII très bon / very good

HHHIII bon / good

HHIIII passable / so-so

HIIIII mauvais / mediocre

$ < 10 $

$$ 10–15 $

$$$ 15–20 $

$$$$ > 20 $

Critiques / Reviewers

FC Frédéric Cardin

GB Guy Bernard

JKS Joseph K So

PMB Pierre Marc Bellemare

RB René Bricault

OG Olivier Giroud-Fliegner

Musique vocale

Stephen Hartke

The Greater Good of The Passion of Boule de Suif (opéra)

Caroline Worra, John David De Haan, Christine Abraham, Andrew Wentzel, etc. Glimmerglass Opera Orchestra, Stewart Robertson (2006)

Naxos (American Opera Classics) (2CD) - 8.669014-15 - (2h 22 min)

HHHHHI $$$

On connaît la nouvelle de Guy de Maupassant : l’histoire, proprement navrante, d’une prostituée grassouillette et généreuse qui ne se laisse convaincre de racheter la liberté de réfugiés bourgeois tombés aux mains de l’ennemi en accordant ses faveurs à un officier que pour essuyer ensuite le profond mépris de ceux et celles qui devraient lui être éternellement reconnaissants. De cet argument, refondu pour la scène par Philipp Littell, Stephen Hartke (1952-) a tiré un opéra très réussi. Le choix du sujet y est pour beaucoup : le drame, direct et poignant, est d’autant plus intense que l’action en est très concentrée dans le temps et l’espace. Par ailleurs, Hartke a appris de Britten, comme Britten lui-même l’avait appris du Verdi de la maturité, que si l’on sait faire un usage judicieux de l’orchestre, chaque scène d’un opéra peut être structurée comme une composition musicale quasi autonome. Enfin, la veine mélodique et la maîtrise de toute une gamme de styles musicaux dont Hartke fait preuve réussissent à accrocher l’oreille et à l’intéresser jusqu’à la fin. On regrettera seulement que cet enregistrement ne soit qu’un CD et non un DVD, le médium le plus approprié à l’opéra, en particulier à l’opéra contemporain. Le livret en anglais est disponible sur Internet. Pierre Marc Bellemare

Alla Turca : œuvres instrumentales et vocales à la cour de Charles VI à Vienne

Monika Mauch, soprano

Mathias Maute, Ensemble Caprice

Atma ACD2 2347 (72 min 3 s)

HHHHII

La triade de compositeurs représentés au programme de ce disque correspond sensiblement aux goûts en vogue à la cour impériale de Charles VI : l’Allemand Johann Joseph Fux et les Italiens Antonio Caldara et Carlo Agostino Badia. Fux, contrapuntiste rigoureux nommé Kapellmeister en 1715 par l’empereur, occupa ce poste jusqu’à sa mort en 1741. La plus grande partie de son œuvre est occupée par la musique sacrée. Ici, deux Alma Redemptoris, deux Ave Regina, une sonata da chiesa, mais aussi une profane Partita « Turcaria » (décrivant la mise en déroute de l’armée turque par les Viennois en 1683), nous offrent le portrait plutôt positif d’un compositeur savant doué d’une certaine inventivité. Antonio Caldara était particulièrement apprécié de l’empereur. Tellement, en fait, qu’il recevait un meilleur salaire que Fux ! La Sinfonia présentée ici est, en réalité, l’ouverture de son oratorio « La passione di Gesù Signor nostro ». Badia, quant à lui, est représenté ici par sa cantate La Fenice, dont c’est le premier enregistrement. Conforme au type de la cantate napolitaine, où la voix soliste est accompagnée par tout l’ensemble instrumental, cette œuvre apporte une touche d’extravagance bien italienne (et plutôt rafraîchissante) dans un programme où la discipline émotive germanique est la norme.

Frédéric Cardin

Haendel : Nine German Arias ; Three Oboe Sonatas

Carolyn Sampson, soprano

Alexandra Bellamy, hautbois

The King’s Consort

Hyperion CDA67627 (70 min 33 s)

HHHHHI

Les Airs allemands de Haendel, composés dans les années 1720, constituent un ensemble méconnu de son œuvre qui mérite une attention particulière, étant donné leur grande qualité. Sur des textes de Barthold Brocke, ils célèbrent la présence divine dans la nature. Haendel rehausse cette louange pastorale par une musique hédoniste et parfois pétillante qui illumine tout l’ensemble d’une clarté chaleureuse et bienfaitrice. Carolyn Sampson est une parfaite soprano haendélienne. Les phrasés sont précis et d’une grande fluidité. Elle est capable de danser et de jouer avec les mots en leur donnant une vie et une effervescence insoupçonnées, mais elle sait aussi faire preuve d’une remarquable retenue dans les épisodes où l’introspection est de mise. Les trois sonates pour hautbois, interprétées avec beaucoup d’enthousiasme et un brin de fantaisie, complètent ce superbe programme de musique de chambre. FC

Schubert: Schwanengesang

Mendelssohn: Six Lieder sur des textes de Heinrich Heine

Jan Kobow, tenor; Kristian Bezuidenhout, piano

ATMA Classique ACD2 2339 (64m 38s)

HHHHHI $$$$

Discovering a new voice is always a pleasure, especially when it is as beautiful as tenor Jan Kobow’s. Perhaps calling his voice ‘new’ is a little unfair – according to his bio, he has already worked with an impressive list of conductors, including Herreweghe, Gardiner, Tate and Jacobs, as well as having collaborated with such eminent pianists as Graham Johnson and Cord Garben. He is a specialist in early music, but judging from this CD, his tenor, with its fresh and ingratiating timbre, is also perfect in the lieder of Schubert and Mendelssohn. His singing is always musical and tasteful, with commendable attention given to the text. Although one cannot tell for sure from recordings, his voice appears to be a work in progress – it is fairly modest in size and power, and the extremes of his range are not ideally solid, but he uses his gift well. The lyrical songs, such as “Die Taubenpost” with its delightfully lilting melody find the voice at its happiest, the tone relaxed and lovely. On the other hand, the high tessitura of “Der Atlas” finds him sounding tense, with the voice under considerable strain. Rounding out the disc are six songs by Mendelssohn set to the poetry of Heinrich Heine, quite beautifully sung. Even the rather hackneyed “Auf Flügeln des Gesanges” sounds fresh coming from him. Bezuidenhout is a collaborative pianist, playing with technical assurance yet sufficiently self-effacing so as not to take the spotlight from the soloist. Let’s hope we will hear more from Jan Kobow in the future.

Joseph K So

Classic American Love songs

Carole Farley, soprano; John Constable, piano

Naxos 8.559314 (66m 11s)

HHHIII $$$

One rarely encounters soprano Carole Farley on the North American opera and concert circuits these days, although according to her website (www.carolefarley.com), she continues to appear elsewhere. You can sample her art in her impressively large discography, which covers an unusually eclectic repertoire. She burst onto the scene in the late 1970s as Berg’s Lulu at the Met and elsewhere, including the Canadian Opera in 1980. Her bio mentions that she sang the role over 100 times, but so much atonal music has taken a toll on her voice. Judging by her recent recordings of Bolcom, Rorem, and now Arlen and Gershwin, the voice has lost a great deal of power and range. An intelligent artist, Farley tackles these songs with style and taste, but the way she uses her voice here is an acquired taste. She adopts a thin, little-girl tone, robbing much of the dramatic power of these pieces. Except for a few instances – such as Gershwin’s “What has love done to me” – the voice is reduced to a half-whisper, as if she were “marking.” One gets the feeling that this is a choice borne out of technical limitations rather than an artistic decision. If you don’t mind her rather affected manner, the disc can still be enjoyable. Arlen’s “Fun to be Fooled”, particularly with John Constable’s jazzy piano playing, is lovely. The recorded sound, especially the piano accompaniment, is warm and fuzzy. The mostly languorous tempos adopted by Constable, coupled with Farley’s feather-like touch, give the proceedings a retro feel, as if one were attending an evening of Victorian parlour songs. The booklet has a brief but informative article on the songs, plus artist bios and song texts.

JKS

Morales : Missa de beata virgine

Ensemble Jachet de Mantoue

Calliope CAL 9363 (61 min 5 s)

HHHHHI

Cristobal de Morales composa plusieurs
messes mariales au cours de sa vie, ce qui indique bien la grande dévotion qu’il accordait au culte de la Vierge Marie. Dans la messe présente, publiée à Venise en 1540, il a recours à la technique du trope, qui a pour effet de magnifier et de doter d’une signification particulière certaines parties du texte de la messe ordinaire. Bannis et censurés à une certaine époque, ces textes de source extérieure au canon de la messe nous apparaissent aujourd’hui indissociables de la beauté fabuleuse de cette musique, composée dans le but évident de leur donner un souffle exaltant. L’édifice musical de Morales est non seulement un hommage continuel à la piété, mais surtout une célébration de la vie, ainsi que l’une des plus belles réalisations humaines que la Renaissance (qui ne fut pourtant pas à court de chefs-d’œuvre !) nous ait léguées. FC

Musique instrumentale

Mahler : Symphony no. 5

Simon Bolivar Youth Orch. Of Venezuela / Dudamel

Deutsche Grammophon 4776545

Durée : 69 min 25 s

HHHHHI $$$

Le Venezuela s’est doté d’un système d’éducation musicale qui, à entendre les résultats ici, porte d’excellents fruits… qu’on jalouse même un tantinet ! Que Deutsche Grammophon mette tout l’accent sur les jeunes interprètes-vedettes au détriment du créateur et de sa création m’irrite de plus en plus, mais cela n’enlève rien à la grande qualité de ceux-ci, quel que soit leur âge. Certes, les transitions et changements de tempi sonnent mécaniques, comme si le chef voulait s’assurer de bien placer un ensemble pas encore tout à fait mûr ; les tempi sont en général assez rapides et les cuivres dominent un peu les cordes. N’empêche qu’on se trouve devant l’une des versions les plus dynamiques et excitantes de cette grande Cinquième disponibles actuellement. Pour ajouter au bonheur, l’étiquette prouve une fois de plus sa suprématie en prise de son d’orchestre. RB

Charles-Marie WIDOR,

Symphonies no 5 et 9,

John Grew,

ATMA classique, ACD2 2370,

71 min 53 s

HHHHII $$

Voici un récital Widor enregistré sur un instrument remarquable : le 32 pieds Casavant de l’église Saint-Nom-de-Jésus à Montréal, une tribune très recherchée pour le répertoire d’orgue symphonique, pour la variété de ses jeux de fonds et l’équilibre de ses tutti. On pouvait donc s’attendre à un déploiement de couleurs dans ces 5e et 9e symphonies. Et c’est le cas, sous les doigts de John Grew, professeur d’orgue à l’école de musique Schulich de l’Université McGill, concertiste internationalement réputé. Ici la célèbre 5e Symphonie de Widor est égrenée avec ampleur, les variations du premier mouvement sont plus phrasées que dans bien des enregistrements et la toccata est jouée à un tempo modéré qui rappelle nettement celui de Widor lui-même à Saint-Sulpice, comme on peut l’entendre dans des enregistrements historiques. La 9e Symphonie, la « Gothique », est abstraite et orientée vers le mysticisme, l’autre visage du répertoire d’orgue de Widor.

OG

Grieg : Symphony in C Minor – Sigurd Jorsalfar

Malmö Symphony Orch., Bjarte Engeset (dir.)

Naxos 8.557991

Durée : 71 min

HHHIII $

Grieg nous avertit sur la page frontispice de la partition, Naxos le rappelle au verso de la pochette : « Cette symphonie ne doit jamais être jouée. » Cela peut sembler décourageant, mais il faut en comprendre la raison, plus esthétique que technique : Grieg se cherchait encore, il abandonnera la symphonie austro-germanique au profit des formes plus libres et du langage plus personnel qui feront à juste titre sa renommée. Cela dit, si vous aimez les symphonies de l’époque de Schumann ou Mendelssohn, celle-ci, très rarement jouée, devrait vous intéresser. Les autres œuvres au programme, Old Norwegian Romance with variations Op.51 et Three Orchestral Pieces from « Sigurd Jorsalfar » Op.56, sans prétendre au chef-d’œuvre non plus, se rapprochent plus du Grieg que nous connaissons. L’exécution manque peut-être un tantinet de ce pastoral mystère typique du compositeur, mais l’orchestre sonne merveilleusement bien. À ce titre, une mention spéciale doit être accordée aux cuivres, gras et sonores…. un vrai plaisir ! RB

Debussy and Liszt

Jorge Federico Osorio, piano

Cedille Records 90000098

Durée: 119 min. 34 sec.

HHHHII $$$$

Osorio’s integral Debussy Préludes, with his masterful technique, represents an interesting achievement. Crisp and precise articulation suits the awesome technical demands and virtuosity required by the score. Osorio also seems to have a credible understanding of form, even though he lacks Zimerman’s poetry or Rogé’s tone-painting qualities. Excerpts from Liszt’s Années de pélerinage complete the set, and are somewhat uneven: the Jeux d’eau is excellent, the Sonetti del Petrarca, mechanical. The recording quality is acceptable but not extraordinary, due to the rather dry acoustics and bland mastering. There are better deals, even better versions, but Osorio’s work ranks comfortably above average.

RB

Friedrich Wilhelm Marpourg

Pièces de clavecin

Yves Préfontaine, clavecin

ATMA Classique - ACD2 2119 - (59 min)

HHHHHI $$$

Dans ses notes d’accompagnement, Yves Préfontaine nous dit lui-même ce qu’il faut penser de cette musique : « Mon seul but à travers cet enregistrement aura été de faire découvrir une musique charmante et sans prétention, écrite par quelqu’un qui connaissait fort bien son métier. » Friedrich Wilhelm Marpourg (ou Marpurg, 1718-1795) était un fonctionnaire prussien (il devait terminer sa carrière à la direction de la loterie nationale) féru de musique, mais à un point qui dépassait de beaucoup la simple mélomanie. C’est ainsi qu’on doit à ce passionné plusieurs ouvrages sur la théorie musicale et la technique du clavier, une édition de l’Art de la fugue de Bach et pas moins de trois périodiques consacrés à son art de prédilection. Cette littérature, destinée à un public d’amateurs éclairés de classe moyenne, nous révèle un esprit assez peu original, mais alerte et bien renseigné. Ses compositions sont à l’avenant : bien construites, selon les règles du temps, agréablement « à la mode » et très variées, mais rarement surprenantes ou particulièrement inspirées. Leur facture, à l’occasion, rappelle celle des pièces pour clavecin de François Couperin. Il s’agit d’une contribution appréciable à la discographie du calvecin du classicisme naissant et selon toute probabilité il s’agit du premier enregistrement mondial complet des cinq suites de Marpourg PMB

Sigfrid KARG-ELERT

Ultimate Organ Works vol. 5

Elke Voelker,

Aeolus, CD no AE-10591

64 min 52 s

HHHHHI $$$$

Voici le 5e volume des œuvres pour orgue de Sigfrid Karg-Elert (1877-1933), compositeur allemand qui écrivit également pour orchestre et pour piano. On entendra ici les Chorals-Improvisations op. 65, illustrant des textes de l’année liturgique luthérienne, qui sont tout sauf des pièces rhapsodiques, mais bien les œuvres longuement ciselées par un exceptionnel harmoniste dans la lignée de Bach (il écrivit d’ailleurs une Passacaille Variations et Fugue sur B-A-C-H) et dont la musique d’orgue tient sa place aux cotés de Brahms et Reger. Les quatre premiers volumes de cette intégrale ont déjà tous été interprétés par la talentueuse organiste allemande Elke Voelker, dans une série dont les 2e et 3e volumes ont obtenu plusieurs Diapasons en France. Ce 5e volume, à la présentation particulièrement soignée, est une somptueuse réussite, et se distingue par le choix de l’instrument (un 16 pieds espagnol de facture allemande et au timbre symphonique d’inspiration française : l’orgue Walcker de l’église San Ignacio de Loyola, à San Sebastian), par la qualité de la prise de son vivante où les bruits de la console ne sont pas omis, et bien sûr par une interprétation élégante. Un très beau produit. OG

Baby concerts

Pedro Eustache (fl.) and ensemble

Childish Records CR00018

Duration: 98 min.

HHIIII $$$$

After reading the back cover of this 3-CD box set, you’d think that an array of scientists had worked hard to find the perfect repertoire and arrangements (with an insistence on the instrumental aspect) to help your precious one develop an ear (and mind) for great music. When actually listening, though, what you hear is a bunch of New Age professionals spewing doubtful versions of easy-listening classics and folk tunes on a weekend gig. Kudos for the great guitar and bass playing. Yanni flautist, Pedro Eustache, on the other hand, is aggressively recognizable with his blowing tone, intense key clicking, and nauseating vibrato. The keyboard player doesn’t even bother playing on a real piano when the arrangement asks for it. That alone speaks volumes about the results. RB

Musique contemporaine

Berg : String Quartet – Lyric Suite

New Zealand String Quartet

Naxos 8.557374

Durée : 57 min 28 s

HHHHII $

Cette interprétation du Quatuor Op. 3 de Berg frappe la cible : jeu inspiré, sens du phrasé (très complexe chez ce compositeur), timbre enjôleur. Capable donc de merveilleux moments de musique, le New Zealand String Quartet manque, par contre, un peu de cohésion dans ce chef-d’œuvre qu’est la Suite lyrique, comme en témoignent les accords mal équilibrés de la fin du quatrième mouvement (pourtant d’une capitale importance dramatique) ou encore les pizzicati imprécis du début du sixième mouvement. L’approche interprétative donne l’impression d’un flux assez continu, agréable à l’écoute, mais fait moins ressortir les intentions de la structure d’ensemble (mouvements impairs de plus en plus rapides et délirants, mouvements pairs de plus en plus lents et désolants). Bien que l’ajout d’une troisième œuvre au programme soit fort louable, d’autant plus que la durée totale demeure - même ainsi - plutôt courte, la légère Sérénade italienne de Wolf semble stylistiquement déplacée après tant d’intensité. Un bon achat malgré tout, surtout pour ceux qui désirent découvrir le fascinant monde sonore de Berg. RB

Tsontakis : Man of sorrows

Hough (piano) / Dallas Symphony Orchestra / Litton (dir.)

Hyperion CDA67564

Durée : 68 min

HHHIII $$$$

Man of sorrows, vaste fresque colorée pour piano et orchestre, ressemble à une Turangalîla-symphonie épurée. En effet, on reconnaît sans hésitation le langage de Messiaen, surtout des points de vue harmonique et orchestral, mais écrit dans un style plus calme, éthéré, post-moderne. Nous avons quand même droit à quelques tutti costauds ainsi qu’à une bonne dose de virtuosité dans la partie soliste. Stephen Hough s’en acquitte d’excellente façon, car son jeu, en plus d’être terriblement précis et d’une évidente exactitude esthétique, semble tout à fait sans effort. Il en sera ainsi pour le reste du programme, soit les op. 19 de Schönberg, 1 de Berg et 27 de Webern et enfin la Sarabesque du même Tsontakis. La qualité de production est inférieure à la moyenne des disques de Hyperion, mais rivalise avec la moyenne du marché en général. RB

Allan Gilliland: Collaborations

Various artists

Arktos 200794

Duration: 70 min. 11 sec.

HHHIII $$$

If this disc can be summed up in one word, it’s variety. Not only is the instrumentation eclectic, but the style of each piece adapts itself accordingly: Debussy-meets-folk for two harps, perpetuum mobile for marimba, Ligetian “mechanism gone mad” for two pianos and two percussion instruments (there’s also a brass and percussion fanfare, a jazzy quintet, a piano solo, an electric bass solo and a baroque ensemble!). Sadly, most Canadian composers suffer from having their work badly played and produced on CD. This is not the case here, for the overall quality passes the test. This fun and accessible contemporary music lacks, by these very qualities, the intellectual challenge and vitality required to survive beyond a generation. Its goal is obviously not immortality, but playful communication. RB

DVD

Giuseppe Verdi

Macbeth

Leo Nucci (Macbeth), Sylvie Valayre (Lady Macbeth). Nicolo Pascoli, Roberto Luliano.

Orchestra e Coro del Teatro Regio di Parma / Bruno Bartoletti (2006)

TDK (DVD) - OPMACPA - (2 h 36 min)

HHHHHH $$$$

Macbeth a toujours été un opéra problématique, même pour son compositeur qui, en 1865, en révisa la musique pour produire une nouvelle version, laquelle, n’est pas tellement plus satisfaisante que celle de 1847. Le défaut fondamental, et irrémédiable, de l’œuvre tient à la difficulté d’intégrer les deux rôles principaux, d’une conception dramatique nouvelle et hardie, voire téméraire, à un cadre musical qui, dans l’ensemble, relève encore du bel canto. Les résultats sont inévitablement inégaux, au point que, à écouter les soliloques et scènes d’intimité du couple Macbeth, d’une part, et les scènes d’apparat, d’autre part, on a parfois l’impression d’avoir affaire à deux opéras différents. La solution consiste, comme ici, à instaurer une apparence d’unité en investissant massivement sur tous les fronts. Pour les scènes chorales, il faut un chef en plein contrôle de son orchestre, une mise en scène vivante et inventive, un corps de ballet, des décors et des costumes splendides. Pour le reste, soit l’essentiel, il faut un Macbeth et une Lady Macbeth qui sachent exprimer les passions sataniques qui les dominent en chantant non pas mal, mais « laid », et ce, jusqu’à la limite du supportable. Tous ces atouts (sauf les décors) sont ici réunis et le produit final est sans doute la meilleure version disponible en DVD, avec celle, plus ancienne (1972), de Glyndebourne (Pritchard, sur Arthaus). PMB

Hector Berlioz

La Symphonie fantastique

Orchestra Sinfonica di Torino della RAI / Sergiu Celibidache (1969)

OpusArte (DVD) - OA0977 D - (58 min)

HHHHHI $$$

On compare souvent Celibidache à Glenn Gould, et non sans raison. Tout comme Gould, il adorait allonger les moments lents jusqu’à la limite du supportable, pour ensuite insuffler un dynamisme inouï aux passages vifs et animés. Aux antipodes de Gould, par contre, il fuyait les studios d’enregistrement et refusait même qu’on enregistre ses concerts, sans toutefois activement s’opposer à la présence, pourvu qu’elle soit discrète, de micros et même de caméras dans la salle. En conséquence, ses bandes, préservées comme des reliques, sont assez nombreuses. Ce DVD s’inscrit dans le cadre d’une édition intégrale de ses concerts filmés. Le film est en noir et blanc et la bande sonore monophonique. L’attention de la caméra est concentrée sur le chef plus que sur l’orchestre. « Celi » dirige avec autorité, sans partition. Pour peu qu’on ne se laisse pas trop distraire par la tignasse invraisemblable du maestro, qui apparemment ignorait l’usage du peigne, voire du shampooing, on finit par avoir une excellente idée de sa technique, très sobre et très directe. Quant au résultat artistique, les passages lents sont si lents que même le mélomane qui connaît bien l’oeuvre aura parfois peine à les reconnaître, tandis que ceux que l’on reconnaît sont empreints d’une telle fraîcheur qu’on croirait les entendre pour la première fois. PMB

Livres Books

Robert Schumann: life and death of a musician

John Worthen

Yale University Press, 2007, 496 p.

HHHHII $$$$

In short, this book is an imposing, apparently well-documented, generously annotated biography (no musical analysis whatsoever) of Schumann, with a single original goal in mind: to prove that the importance of the composer’s mental illness is grossly overestimated. A refreshing perspective indeed, although it seems to border on obsession. Given the quality of the author’s rigorous research, however, the reader feels that his interpretation is less biased than previous ones. Written in fluid and accessible prose, striving to cram as much biographical information as possible in its nearly 500 pages, it may well become a new reference for Schumann scholars and aficionados. RB

American Aria: Encore

Sherrill Milnes, with contributions by Dennis McGovern

Amadeus Press 2007 www.amadeuspress.com pp.370 $22.95 (US)

ISBN-10:157-467160-X; ISBN-13:978-157-467160-5

This is a substantially revised and updated version of the Sherrill Milnes autobiography published some years ago. This genre of diva/divo-speak can be highly variable in quality and readability, but this one is definitely a winner. In his prime, Milnes possessed an authentic Verdi baritone of uncommon beauty, range and power. Always a generous artist, Milnes gave unstintingly, and an evening in the theatre with him in a lead role was always a pleasurable experience. Despite having an international career, Milnes was first and foremost an American singer – note the Prologue, where he traces his ancestry back to the American Revolution of 1776! The book begins with his youth on the farm in the Midwest; his early years as a chorister with the Chicago Symphony, getting his feet wet with the Boris Goldovsky Opera Company, doing voice-overs in commercials, and graduating to big roles in regional companies in Cincinnati, Central City, and San Diego. His big break came when he auditioned for Rudolf Bing at the Met in 1965, where he became a huge star and a fixture for over three decades. Milnes tells his story in a down-to-earth manner, with humour and sincerity mixed with a liberal dose of self-assurance and pride befitting his larger-than-life persona. He pulls no punches when it comes to his battle with the Met in his last years there – one can almost taste the bitterness of what he considers unjust treatment of a loyal artist by the management. Also fascinating is his account of a decade-long struggle with bleeding vocal cords that almost put an end to his career. The last chapters are devoted to his current activities as a teacher and adjudicator of vocal competitions, and in particular his participation, together with his third wife, mezzo Maria Zouves, in VOICExperience, a non-profit organization that offers guidance and support to young singers. The book is liberally illustrated with black and white photos, plus a detailed Met performance chronology. Unfortunately, details of his non-Met performances are limited to six sketchy pages, and concert/recital details are completely absent. Still, this is a highly enjoyable read and an indispensable reference. JKS

Pavarotti en DVD

Pavarotti avait, on le sait, la réputation d’être assez mauvais acteur. Au début de sa carrière, le reproche était justifié, mais à force de gros efforts, les choses ont fini par s’améliorer. Le meilleur exemple du « Pavarotti dramatique » sur DVD est sans doute son interprétation, à certains égards problématique, du rôle de Canio dans la production de Zeffirelli des Pagliacci, au Met, en 1994, aux côtés de Teresa Stratas (Deutsche Grammophon 000476909).

Mais le point tournant de cette dimension de sa carrière demeure son interprétation du rôle du duc de Mantoue dans le beau film pour la télévision que Jean-Pierre Ponnelle a tiré de Rigoletto en 1982. Au lieu d’essayer de dissimuler les rondeurs du ténor sous d’amples tuniques, comme on le faisait dans les maisons d’opéra des cinq continents, Ponnelle s’est attaqué de front au problème de crédibilité dramatique, à vrai dire insoluble, du séducteur éléphantesque, mais néanmoins irrésistible, en jouant à fond de train la carte de l’humour. Les résultats sont du plus haut comique et en même temps curieusement convaincants. La critique était enchantée et un quart de siècle plus tard, cet enregistrement demeure l’un des meilleurs vendeurs dans la catégorie opéra en DVD (Deutsche Grammophon 000658109).

Pavarotti s’est lui-même laissé prendre au jeu, au point de se croire devenu une sorte de vedette de cinéma. Il en a résulté Yes, Giorgio, une comédie larmoyante, indisponible en DVD, où il joue le rôle, qu’il devait plus tard interpréter dans la vraie vie, d’un chanteur d’opéra marié qui tombe en amour avec une femme plus jeune et plus jolie que son épouse. C’est un navet de première classe, un de ces films qu’on n’avouera jamais avoir vu, même à son meilleur ami.

Pavarotti a compris et il n’a pas répété
l’expérience. Pierre Marc Bellemare

Some Favourite

Pavarotti Recordings.

Among a horde of recordings by Luciano Pavarotti that I couldn’t live without, two stand out. I remember thinking that I had discovered the most beautiful contemporary tenor voice in existence when hearing his first solo recital LP for Decca, which featured operatic arias by Verdi and Donizetti. The natural beauty of the timbre, the perfect and fluid Italian diction and one of the most remarkable vocal techniques heard in generations were particularly evident in a gorgeous – and fiendishly difficult – aria from Donizetti’s Il Duca d’Alba. His singing of “Angelo casto e bel” haunts me still, as does his recording of Bellini songs accompanied by orchestra. Pavarotti may not have been a great musician but few if any could sing more musically. He captured the simple melodic beauty and fleeting nostalgia of such songs as “Malinconia,” “Ma rendi pur contento” and “Bella Nice” perfectly with his “voice touched by the finger of God.” Richard Turp

My most memorable Pavarotti “live” moment was a recital he gave in Massey Hall in Toronto in the mid 1970s. The voice in person was not as big as I had imagined, but totally focused and beautiful in timbre, with a clarion ring. There was such a sunny quality to his sound - one could almost feel the Mediterranean heat. The formal program was mostly songs, but he sang something like seven arias as encores! As expected, the audience went absolutely wild. My favorite recording of his is “Che gelida manina”, from the complete La Bohème on Decca conducted by von Karajan. When Pavarotti passed away, I got out the LPs, blew off the dust, and played the aria as my little tribute to him. Joseph So

I love the aria from Daughter of the Regiment. It is the best representation of that aria ever and he sings it with the most effortless high C’s ever. Also, I was inspired by his rendition of “Nessun dorma.” A lot of critics are tired of that one but I am sorry, it is exciting every time I hear it. Richard Margison

Pavarotti a chanté beaucoup de rôles d’opéra, mais son fort n’était sans doute pas la caractérisation des personnages. Aussi les airs où la splendeur vocale doit l’emporter sur toute autre considération sont-ils parmi ses plus réussis, dont Nessun dorma de Turandot, sous la baguette de Mehta. Le dernier « Vincerò ! », d’une tenue impériale, fait frémir. Alexandre Lazaridès

Lulu: Alban Berg

Exit les Danse macabre et autres Nuit sur le mont chauve. Rien ne peut effrayer autant que Lulu, l’opéra inachevé (éventuellement complété en 1979 par Friedrich Cerha) d’Alban Berg. Tiré de deux pièces de Frank Wedekind, La boîte de Pandore et L’esprit de la terre, Lulu dépeint l’ascension sociale puis la déchéance d’une femme tourmentée. Mariage, adultère, remariage, meurtre, suicide, maladie et prostitution se donnent rendez-vous dans ce grand musical sanglant.

À cela s’ajoute une kyrielle de personnages tous plus sombres les uns que les autres. Pour plus de frissons, l’opéra est dodécaphonique. GB


(c) La Scena Musicale