Critiques/Reviews
June 7, 2006
Disque du mois
Enescu
Œdipe
Monte Pederson, baryton-basse; Egils
Silins,Goran Simic, Peter Köves, Walter Fink, basses; David Damiani,
Yu Chen, barytons; Michael Roider, ténor; Marjana Lipovsek, Mihaela
Ungureanu, mezzo-sopranos; Ruxandra Donose, soprano
Stage Orchestra of the Austrian Federal
Theatres / Michael Gielen; Vienna Boys Choir; Chorus and Orchestra of
the Vienna State Opera
Naxos 8.660163-64 (128 min 26 s)
****** $$
La courte liste d’œuvres (33 opus
au total!) composées par le génial Georges Enescu est peut-être une
raison de la relative négligence dont il est victime encore aujourd’hui.
Pourtant, d’autres compositeurs avares (tel Varèse) sont joués beaucoup
plus fréquemment. Peu importe, puisque voici un enregistrement magistral
d’un des chef-d’œuvres les plus essentiels de l’opéra moderne.
Articulée autour du sujet bien connu de l’Œdipe grec, la partition
d’Enescu est mouvante et composite, sans hachures artificielles, et
naturellement construite pour porter les voix à leur ultime potentiel
expressif. Moderne, lyrique, post-romantique, onirique, fantastique,
plusieurs épithètes sont nécessaires pour rendre compte de la complexité
de cette musique hallucinante. Des passages lugubres (mais fascinants!)
côtoient d’autres pages absolument sublimes (l’entrée du chœur
Roi Laïos en ta maison sur fond d’un inoubliable duo hautbois/harpe).
Gielen dirige magistralement une palette instrumentale et vocale exceptionnelle!
Essentiel à tout mélomane! Frédéric Cardin
Musique orchestrale / Orchestral
Music
Bruckner, Reger
NDR Orchestra / Carl Schuricht
Music and Arts CD 1172(2) (153 min 46
s)
**** $$$
Fils de facteur d’orgue, Carl Schuricht
a été destiné par la Providence à diriger Bruckner! Cet enregistrement
réalisé lors de deux concerts donnés à Hambourg, l’un en 1954
et l’autre l’année suivante, met en présence l’un des orchestres
les plus accomplis de l’époque avec un chef qui avait déjà l’allure
d’un des rares «spécialistes» de Bruckner (ainsi que de Mahler
d’ailleurs). La rencontre, bien que non dénuée d’imperfections
techniques, surtout chez les cuivres, est importante et fort bien restaurée
par la maison Music and Arts. Schuricht imprime une urgence vibrante
aux symphonies (7e et 8e) de Bruckner, et amène l’orchestre à une
concentration surprenante des contrastes rationalité/spiritualité
dans l’œuvre brucknérienne. Avec Schuricht, un maître de la pâte
orchestrale, la matière sonore se contracte et se relâche avec malléabilité
et assurance. Le programme se termine avec le sublime An die Hoffnung
de Reger, chanté par Christa Ludwig. Le fabuleux appareil vocal de
Mme Ludwig, ici en début de carrière, épouse merveilleusement la
poésie de Hölderlin. Frédéric Cardin
Pitfield
Piano Concertos nos 1 and 2 / Xylophone
Sonata
Anthony Goldstone, piano; Peter Donohoe,
piano; Royal Northern College of Music Orchestra / Andrew Penny
Naxos 8.557291 (54 min 41 s)
**** $
Thomas Pitfield (1903-1999) est un compositeur
largement autodidacte dont les pièces présentées ici témoignent
presque toutes d’un esprit miniaturiste, puisqu’elles sont pour
la plupart divisées en mouvements très courts et très concentrés.
La seule exception est le Concerto pour piano no 1, d’une durée
de 24 minutes. La musique de Pitfield est résolument tonale et mélodique,
s’appuyant manifestement sur des sources folkloriques et populaires,
mais sans simplisme démagogique. Pitfield construit ses thèmes de
façon rythmique, et ses mélodies sont propulsées vers l’avant par
la pulsion soutenue d’un piano utilisé généralement comme instrument
percussif. Cette musique résolument anglaise dans ses harmonies, trahit
parfois certaines influences de Ravel et Poulenc. Notons le magnifique
et surprenant contraste entre un orchestre nerveux et un ample choral
cuivré dans les 2e et 3e mouvements du premier Concerto. Cela
rappelle Britten dans la grandiose finale de son Young Person’s
Guide to the Orchestra. À lui seul, ce passage vaut l’achat de
ce disque, déjà si peu cher! Frédéric Cardin
Prokofiev
Roméo et Juliette; Cendrillon; Symphonie
no 1
London Symphony Orchestra / André Prévin
Brillant Classics 7618 4 CD (276 min)
***
Ce coffret est une réédition
d’enregistrements de 1973 et 1983 faits par EMI et remasterisés sur
support CD en 1987. Légère différence: la version intégrale de
Cendrillon sur Brillant Classics n’apparaît qu’en extraits
dans la version EMI. Section massive de cordes, cuivres exubérants,
bois à la sonorité très large, les amateurs du LSO retrouveront la
signature typique de l’orchestre à travers ces deux ballets. A côté
des versions de l’Orchestre national Russe (avec Mikail Pletnev),
ou de l’Orchestre Symphonique de Cleveland (Vladimir Ashkenazy), cette
version n’est pas un ajout de taille sans être complètement mièvre
pour autant. Il faut aussi mentionner que les longueurs qui se glissent
lors de la simple audition, sans la visualisation du ballet, peuvent
finir par avoir raison de l’auditeur. Le minuscule livret nous informe
(en anglais seulement) sur l’essence de l’argument et de l’historique
des œuvres. Guy Bernard
Sibelius
Symphonies nos 2 et 7
London Philharmonic Orchestra / Paavo
Berglund
LPO 0005 (67 min 51 s)
***** $$$
Paavo Berglund est probablement le plus
grand chef sibélien des 50 dernières années. Son expertise de la
langue symphonique du grand génie finlandais est incontestable. Il
a déjà réalisé trois intégrales des symphonies de Sibelius, et
semble maintenant en voie d’en réaliser une quatrième avec ces prises
«live» du Philharmonique de Londres. Ce qui caractérise la vision
qu’a Berglund de ces chef-d’œuvres, c’est la fabuleuse transparence
et l’incroyable limpidité des textures. Avec lui, toutes les teintes
contrastées de ces tableaux épiques, toutes les oppositions de type
clair / obscur, sont magnifiées jusqu’à leur absolue limite de cohérence.
On pourrait cependant reprocher à cette version d’être extraordinairement
«propre». Comparé à la version Helsinki, par exemple, le Philharmonique
de Londres est parfait. Velouté, équilibré, puissant, tout est jaugé
et calibré au quart de tour. Mais pourquoi s’en plaindre? Berglund
nous donne des frissons de bonheur, et nous transporte loin d’ici
dans un véhicule luxueux. Un grand plaisir. Frédéric Cardin
Symphonic Dances
Bernstein, Rachmaninov, Gabriella Len
Frank
Utah Symphony / Keith Lockhart
Reference Recordings RR-105 (73 min 16
s)
**** $$$$
Audiophiles should be delighted by the
recent return of Reference Recordings to the marketplace. The Reference
trademark has been a byword for excellence in sound reproduction. This
disc is encoded for High Definition Compatible Digital (HDCD) playback.
This ensures high quality in all CD players and enhanced sonics (comparable
to SACD stereo) if the deck is equipped with a HDCD chip and given decent
amplification. Keith O. Johnson’s engineering yields a remarkably
life-like, full impact recording.
Keith Lockhart is naturally gifted in
the music of Leonard Bernstein. This is stunningly evident in the performance
of the dances from West Side Story. The orchestra is also really
impressive in the Rachmaninov Symphonic Dances. These standards
flank the real gem of the album, Three Latin American Dances
(16’25”) by Gabriela Lena Frank (b. 1972). Lockhart led the Utah
Symphony in the world première performance in April 2004, two days
before this recording was made. Frank orchestrates vividly and there
are strong affinities with the liveliest music of Bernstein. We will
hear more of her. W. S. Habington
Musique vocale /
Vocal
de Kerle
«Da Pacem Domine», messes et motets
Huelgas-Ensemble / Paul van Nevel
Harmonia mundi HMC 91866 (66 min 43 s)
***** $$$$
Les cavernes d’Ali Baba de la musique
ancienne continuent d’être une source apparemment intarissable de
bonheurs auditifs, émotionnels et spirituels particulièrement intenses.
Jacobus de Kerle, qui a vécu approximativement de 1531/32 à 1591,
ne fit l’objet d’une première monographie appréciative qu’en
1913! Pourtant, éclairés que nous sommes maintenant par les plus récentes
découvertes musicologiques, et par des enregistrements précieux comme
celui-ci, il ne fait pas de doute qu’il était l’égal de Clemens
non Papa et de Roland de Lassus. Les lignes musicales de Kerle procèdent
par tourbillons et mélismes, tout en invitant à la méditation. Il
connaissait et maîtrisait admirablement bien le secret du grand art
polyphonique flamand: stimuler l’intellect tout en facilitant le repos
de l’âme (et du corps). La Renaissance avait un autre Maître que
nous connaissions mal. Paul Van Nevel s’est chargé de mettre fin
à cette injustice. Frédéric Cardin
Beethoven: Fidelio
Waltraud Meier, Placido Domingo, Soile
Isokoski, Werner Gura, Falke Struckmann, Rene Pape, Kwangchul Youn;
Staatskapelle Berlin, Daniel Barenboim, conductor
Warner Classics 3984 25249-2 (2 CDs;
157m 50s)
***** $$$$
Recorded in 1999 and previously released
on Teldec, this Fidelio is now reincarnated on Warner Classics.
Its chief interest is Placido Domingo as Florestan, a role that he has
never sung onstage. The high tessitura in the great scena ‘Gott! –
Welch Dunkel hier!’ would be beyond him even in 1999. But in the studio,
with the benefits of retakes and perhaps some engineering wizardry,
he makes a totally convincing Florestan, his unidiomatic German notwithstanding.
Waltraud Meier (Leonore) is in reliable voice though sounding short
breathed in ‘Abscheulicher’. Soile Isokoski’s luminous soprano
raises the soubrette Marzelline to new heights. She is well partnered
by Werner Gura (Jacquino). Struckmann as Rocco sounds a little old and
wobbly; on the other hand, Kwangchul Youn’s bass is spectacular as
Ferrando. Most of all, this set benefits from the conducting of Barenboim,
leading the Berliner Staatskapelle in a marvelous reading of the score.
The booklet has an essay by the late academic Edward Said, who was professor
of comparative literature at Columbia. Perhaps not in the same league
as many great recordings of the past – how do you beat the likes of
Klemperer and Karajan or Vickers and Ludwig? But it is one of the better
contemporary version. Joseph K. So
de Lassus
Psalmi Davidis
Poenitentialis
Collegium Vocale Gent / Philippe Herreweghe
Harmonia Mundi, HMC 901831.32 (2CD: 120
mn 20 s)
**** $$$$
On attendait beaucoup du retour d’Herreweghe
chez Roland de Lassus, dans cette intégrale des Psaumes de
la pénitence. L’œuvre, en effet, est passée à la légende,
par la beauté du manuscrit et par les soins qu’Albert V de Munich
prit pour s’en assurer l’exclusivité. Elle se compose de sept psaumes
qui exaltent l’état de péché de l’homme, la miséricorde infinie
de Dieu et la pratique fervente de la prière pour en obtenir l’avantage.
Lassus y emploie toute la science du madrigal pour susciter autant la
crainte que l’espoir, mais dans un style austère adapté au sérieux
du propos. Herreweghe livre une version d’une grande beauté formelle
en favorisant l’égalité et l’homogénéité des voix, mais tend
à gommer les dissonances et à imposer un tactus uniforme. Ainsi, une
fois passé l’émerveillement devant la cohérence du chœur et la
qualité de la prise de son, on se lasse de cette lecture trop angélique
qui nous prive des effrois de la damnation. Pascal Lysaught
Monteverdi
Sesto Libro dei Madrigali
La Venexiana / Claudio Cavina
Glossa GCD 920926 (71 min 58 s)
***** $$$$
On ne saurait faire autrement qu’ajouter
sa voix au concert de louanges qui avait accompagné la parution, l’an
dernier, du Sixième Livre des Madrigaux de Monteverdi interprété
par l’ensemble La Venexiana. Publié en 1614, ce recueil revêt, musicalement
parlant, une importance historique du fait de l’abandon de la polyphonie
traditionnelle à cinq voix propre au genre madrigalesque. Monteverdi
en était venu à favoriser une écriture qui lui permettait de combiner
les voix de manière plus diversifiée, afin de mieux dégager les affects
exprimés par les poèmes de Pétrarque, de Rinuccini, de Marino, etc.
En accordant la primauté au mot sur le son, il développait l’action
partout où elle pouvait se trouver. Certains madrigaux sont, en effet,
autant de tableaux dramatiques miniaturisés, à thème généralement
amoureux. Un des mérites de La Venexiana est de ne pas souligner indûment
l’émotion dans les compositions intenses, tels le «Lamento d’Ariana»
ou la «Sestina»; ce sont les plus infimes nuances qui bouleversent
alors d’autant plus sûrement. La direction de Cavina aboutit sans
faute à une transparence d’une délicatesse cristalline. L’auditeur
se sent comblé par tant de beautés. Alexandre Lazaridès
Petitgirard
Joseph Merrick, the Elephant Man
Nathalie Stutzmann, contralto; Nicolas
Rivenq, baryton
Robert Breault, tenor; Marie Devellereau,
soprano; Sophie Koch, mezzo-soprano
Nicolas Courjal, basse; French Opera
Chorus & Monte-Carlo Philharmonic Orchestra / Laurent Petitgirard
Naxos 8.557608-09 (149 min 19 s)
**** $$
Laurent Petitgirard est un compositeur
français né en 1950, mieux connu comme auteur de partitions pour le
cinéma et d’œuvres de concert pour orchestre. Il réalise ici un
exploit en réussissant à créer un opéra résolument tonal, mélodique,
mais aussi moderne et original. Il évite les clichés et réussit admirablement
bien à équilibrer les nombreuses forces en présence. Son langage
musical est très près de celui de Poulenc, harmoniquement, mais également
en ce sens qu’il est fluide et qu’il privilégie des textures instrumentales
variées et suggestives avec une teinte d’onirisme théâtral. À
noter la Prière des malades de l’acte 2, qu’on dirait tout
droit sortie du Stabat Mater de Poulenc. Mélodie inoubliable,
toute en retenue, elle incite au recueillement et restera en mémoire
longtemps. Magnifique initiative de Naxos de nous avoir offert cette
gravure! Frédéric Cardin
Wagner
Die Meistersinger von Nürnberg -
Acte III
Staatskapelle Dresden, Chor der Staatsoper
Dresden / Karl Böhm, Margarete Teschemachen (Eva), Hans Herrmann Nissen
(Sachs), Torsten Ralf (Walther)
Profil Édition Günther Hänssler 2CD
PH05038 (111 min 12 s)
****** $$$
Il ne s’agit pas là, comme on pourrait
le croire, d’un vieux pirate ou de quelque bande obscure récemment
exhumée des archives, mais d’un enregistrement studio de la firme
Electrola. Si le tout ne comporte qu’un acte, c’est que, dans le
contexte technologique de l’époque, seuls les super-riches auraient
pu se permettre l’achat d’une intégrale des Meistersinger. Limité
à un acte (15 disques 78 tours...) au moins le produit restait-il à
la portée des bien nantis... Cette gravure magnifique est unanimement
reconnue comme un sommet de la discographie wagnérienne. Les chanteurs,
presque tous des germanophones «de souche», réalisent à la perfection
l’idéal de théâtre chanté du compositeur. À l’orchestre, le
jeune Karl Böhm est en pleine possession de ses moyens. La prise de
son est à l’avenant, grâce à la technique de pointe allemande,
alors en avance d’au moins une décennie sur la concurrence. La restauration
technique exceptionnelle est signée THS Studio Holger Siedler. Pas
de livret, mais un petit essai très complet sur l’enregistrement
où, cependant, on évite soigneusement la moindre allusion au contexte
«extra-musical» (l’Anschluss, la Kristallnacht...), y compris les
accointances nazies d’au moins la moitié de la distribution (à commencer
par le chef). Pierre Marc Bellemare
Musique de chambre
/ Chamber Music
Arnold
Overtures op.8; Incidental Music to
Macbeth
Toronto Chamber Orchestra / Kevin Mallon
Naxos 8.557484 (76 min 27 s)
**** $
Samuel Arnold était un prolifique compositeur
de musique de scène de Londres de la fin du xviiie siècle (1740-1804),
comme en témoignent les ouvertures présentées ici. Les sujets de
ces petites scènes distrayantes allaient de la fantaisie gothique au
militantisme humaniste (Arnold composa la musique du premier opéra
anti-esclavage!). La musique de cet Anglais mort sans avoir pu compléter
l’édition complète du catalogue de Handel qu’il rédigeait est
vive et enjouée, favorise des tempi rapides et nerveux, et démontre
un excellent sens de la mélodie accrocheuse. Au plan de la technique
d’enregistrement, l’orchestre est assez bien défini, quoiqu’il
aurait pu bénéficier d’un tout petit peu plus de rondeur dans les
basses. Le jeu des torontois est équilibré, précis et très énergique.
Ces derniers se sont fait une «spécialité» de la défense de la
musique anglaise post-handelienne, et apportent ici un autre chapitre
à l’amélioration de notre connaissance de cette période. Frédéric
Cardin
Bach
Das Wohltemperierte Clavier
– 1
Andrei Vieru, piano
Alpha 087 (2 CD: 138 min 49 s)
***** $$$$
The Well-Tempered Clavier
Evelyne Crochet, piano
Music and Arts CD-1180 (4 CD: 259 min
36 s)
*** $$$$
Le Roumain Andrei Vieru nous donne, du
premier cahier du Clavier bien tempéré, une interprétation
qui semble de prime abord sévère, voire austère. Le rythme penche
invariablement vers la modération, sinon la lenteur. Il en résulte
une certaine monotonie lors d’une audition suivie. C’est la réserve
la plus importante qu’on aurait à formuler à l’égard de cette
approche, par ailleurs très intéressante. Car nul doute que Vieru
connaît bien son Bach et son instrument. Le jeu est d’une transparence
polyphonique exceptionnelle et l’auditeur n’a aucune peine à suivre
les entrelacements du sujet d’une fugue dans les diverses voix. Un
jeu de pédale d’une grande subtilité compense la rigueur du phrasé,
en soi impeccable, tandis que la lenteur parfois suffocante des grandes
fugues est un défi que le pianiste réussit à relever par son sens
de l’architecture. Cette approche ne laisse pas indifférent et ne
se laisse guère oublier. Il faut donc la saluer, même si l’on ne
partage pas la vision monolithique du pianiste. Au moins a-t-il le mérite
d’en avoir une! Ce n’est pas le cas de la Française Evelyne Crochet,
installée maintenant à New York où elle enseigne. Son interprétation
trop lisse de l’intégrale du Clavier bien tempéré refuse
toute prise de risque. Au mieux, une honnête version d’initiation.
Alexandre Lazaridès
Buxtehude
Seven Trio Sonatas, op. 2
John Holloway, violon; Jaap ter Linden,
viole de gambe; Lars Ulrik Mortensen, clavecin
Naxos 8.557249 (63 min 13 s)
***** $
Buxtehude est le chaînon manquant entre
Schütz et Bach, et ses sonates en trio sont un bel exemple de la maîtrise
qu’il possédait des différents styles et idées musicales de cette
époque. Des danses stylisées de la Sonate no 1 aux passages presque
improvisés de la no 5, en passant par la science de sa rhétorique
fuguée, ce corpus offre un plaisir musical à renouveler régulièrement.
Ces œuvres sont parfois surprenantes dans leurs tournures imprévues,
parfois rassurantes dans leur prescience du grand Bach à venir. Elles
sont en totalité superbes. Naxos nous fait une faveur en rééditant
ces enregistrements autrefois parus sur étiquette Dacapo, et qui furent
salués par la critique en leur temps. Nous n’hésiterons pas à les
saluer de nouveau. Frédéric Cardin
Corrette
Les délices de la solitude
Les Voix humaines: Susie Napper (viole
de gambe, violoncelle baroque), Margaret Little (viole de gambe), Kate
van Orden (basson baroque), Mathieu Lussier (basson baroque), Pierre
Cartier (contrebasse), Sylvain Bergeron (théorbe), Eric Milnes (clavecin)
Atma ACD2 2307 (73 min 49 s)
***** $$$
C’est une excellente idée qu’ont
eue Les Voix humaines, de consacrer un disque à la musique de Michel
Corrette (1707-1795). Les délices de la solitude, une série
de six sonates pour le violoncelle, la viole ou le basson avec basse
continue sont un véritable régal et montrent bien la variété du
talent de Corrette. Les Voix humaines en proposent des arrangements
(signés Susie Napper) allant de deux à quatre instruments. On ne sera
pas étonné du magnifique résultat de la Sonate VI interprétée
par deux violes de gambe. Mais il faut entendre la Sonate III
jouée par deux bassons! L’arrangement paraît tout à fait naturel.
Le jeu des musiciens est vivant et souple, ce qui rend l’écoute passionnante.
Un must pour tous ceux qui aiment le répertoire français du
xviiie siècle. Isabelle Picard
Debussy
Suite Bergamasque, Children’s corner,
Images
Alain Planès, piano
Harmonia Mundi HMC 901893 (71 min 54
s)
***** $$$$
Artiste raffiné et discret, Alain Planès
a de grandes affinités avec Debussy, dont il explore l’œuvre depuis
longtemps. Après avoir donné il y a quelques années les Préludes
sur un piano Bechstein de 1897, il tente à nouveau ici l’expérience
du clavier à l’ancienne, en adoptant un instrument construit par
la maison Blüthner en 1902. Passée la surprise initiale, le résultat
convainc rapidement: ce piano aux registres contrastants sait peindre
merveilleusement, mais aussi parler sans sécheresse. Les effets de
halo dont plusieurs interprètes usent dans ce répertoire sont atténués
au profit d’une lisibilité accrue: on entend ainsi, dans la Suite
Bergamasque, la mélodie du Clair de lune se découper nettement
sur le fond chaud et boisé des notes graves. Au reste, la variété
des couleurs et la souplesse du jeu de Planès séduisent partout et
ravivent autant l’humour subtil des Children’s Corner
que la densité théâtrale des Images. Une parfaite introduction
à l’univers de Debussy. Philippe Gervais
Krawiec
Journey-Podro?
Works for solo guitar - From Spain to
Poland
M•A Recordings Mo68A (64 min)
***** $$$$
Grzegorz Krawiec est un nouveau venu
sur la scène guitaristique. Il était de passage au Canada durant la
fin de l’année dernière pour présenter une série de concerts dans
le but de faire la promotion de son premier disque, Journey-Podró?.
Malheureusement, il ne présenta aucun concert à Montréal, mais s’il
avait à revenir au Canada, il vaudrait la peine d’aller l’entendre,
peu importe où. Il interprète avec brio chacune des pièces présentées
sur l’album. Le titre le dit, il s’agit d’un voyage à travers
les musiques pour guitare de quatre pays d’Europe. Le répertoire
choisi est particulièrement agréable et on y fait même quelques découvertes.
Par exemple, pour représenter son pays d’origine, la Pologne, le
guitariste propose la pièce Remiscencje du compositeur Sylwester
Lakowski. Parmi les nouveautés, on pourra aussi entendre Due Canzoni
Lidie du compositeur Italien Nuccio D’Angelo. Pour ses 25 ans,
le jeune virtuose fait preuve d’une maturité musicale bien établie.
Mario Felton Coletti
Migot
Le Zodiaque
Stéphane Lemelin, piano
Atma ACD2 2381 (2 CD: 104 min 16 s)
*** $$$
L’œuvre de Georges Migot (1891-1976),
pourtant abondante, ne jouit que d’une maigre représentation discographique.
Son recueil Le Zodiaque, douze études de concert (1931-32)
consiste en autant d’explorations du clavier inspirées par les signes
astrologiques. La visée descriptive y est moins significative que l’atmosphère
à créer. L’écriture, parfois étrange, toujours personnelle, non
sans quelques effluves debussystes, rejette toute affiliation officielle
avec les courants esthétiques de la première moitié du xxe siècle.
Il faut donc savoir gré à Stéphane Lemelin de faire œuvre de pionnier
(une autre version du Zodiaque a paru il y a peu en Europe).
Son interprétation, soignée, donne tout de même l’impression d’une
prise de possession encore trop prudente de cet opus difficile. En complément,
deux brefs recueils datant de 1912 et de 1927, cinq pièces au total,
permettent de mieux comprendre la réelle originalité du Zodiaque.
Cet enregistrement fait partie de la collection «Musique française.
Découvertes 1890-1939» de la maison Atma, une belle initiative pilotée
par Lemelin pour faire place à un répertoire négligé. Alexandre
Lazaridès
Marc-André Hamelin
Dukas: Piano Sonata;
Decaux: Clairs de lune
Hyperion CDA67513 (64 min 59 s)
*** $$$$
Medtner: Forgotten Melodies I, II
Hyperion CDA67578 (74 min 57 s)
**** $$$$
La Sonate en mi bémol mineur
de Paul Dukas a souvent été rapprochée de la «Hammerklavier» en
raison de sa longueur: plus de trois quarts d’heure. Elle tient les
interprètes à distance et est rarement enregistrée. Il faut reconnaître
qu’il est malaisé d’en saisir tant la forme que les intentions.
On comptait donc sur Marc-André Hamelin pour nous éclairer sur ces
énigmes, mais ce n’est pas le cas. On n’est convaincu que par le
troisième mouvement, une sorte de toccata démoniaque marquée «Vivement,
avec légèreté». Les trois autres mouvements, tous de rythme modéré,
restent évasifs. La prise de son, fortement réverbérée, y est pour
quelque chose. Elle métallise les aigus et brouille ou étouffe les
basses, ce qui fait que la distinction des plans sonores n’y est plus.
En revanche, les quatre pièces qui composent Clairs de lune
d’Abel Decaux, la seule œuvre, mais d’une étonnante originalité,
qu’on connaisse de ce contemporain de Dukas, sont rendues de façon
exceptionnelle, dans une prise de son fine qui laisse vibrer les sons
les plus ténus. C’est une révélation qui tient en quelque vingt
minutes très denses. Quant aux Mélodies
oubliées de Nilolai Medtner, elles sont extraites de l’intégrale
des Sonates du compositeur russe parue en 1998. L’interprétation
de Marc-André Hamelin avait été alors saluée comme remarquable.
Elle l’est encore! Alexandre Lazaridès
Autour de Chostakovitch
German Germanovitch Galinin: Concerto
pour piano no 1; Dmitri Chostakovitch: Symphonie de chambre en fa majeur
op. 73a (transcription de R. Barshai du Quatuor no 3, op. 73); Galina
Ivanovna Ustvolskaya: Concerto pour piano
Serhiy Salov, piano; I Musici de Montréal
/ Yuli Turovsky
Analekta AN 2 9898 (76 min 55 s)
**** $$$
C’est un programme entièrement russe,
constitué de trois œuvres de 1946, que propose I Musici de Montréal
sur son plus récent CD. Dès les premières notes du Concerto pour
piano no 1 de Galinin, le ton est donné: I Musici sonne comme un
grand orchestre, avec des sections de bois et cuivres solides. Yuli
Turovsky est en pays connu dans ce répertoire tantôt flamboyant, rythmé,
dansant, et tantôt grave, tragique. Pour la seule découverte du concerto
de Galinin, dont il semble que ce soit le premier enregistrement en
Occident, ce disque vaut déjà d’être écouté. Le soliste Serhiy
Salov (qu’on a connu en tant que Sergeï Salov…) y fait la démonstration
de sa maîtrise et est fort bien appuyé par l’orchestre. La transcription
du Quatuor no 3 de Chostakovitch est un autre point fort de cette
parution. Isabelle Picard
Trumpet Tunes
Œuvres célèbres pour trompette
et orgue
Œuvres de H. Purcell, J. Clarke, J.S.
Bach, G.F. Handel, G.B. Viviani, C. Balbastre, H. Tomasi et G. Delerue
Stéphane Beaulac, trompette; Vincent
Boucher, orgue
Atma ACD2 2369 (57 min 39 s)
**** $$$
Stéphane Beaulac et Vincent Boucher
proposent sur ce disque une sélection des œuvres présentées lors
des récitals qu’ils ont donnés dans le cadre des tournées des Jeunesses
musicales du Canada cette année. Le programme, varié, inclut à la
fois des œuvres archi-connues (Trumpet Tune de Purcell, Trumpet
Volontary de Clarke) et d’autres qui le sont moins (Variations
grégoriennes sur un Salve Regina de Tomasi – peut-être la pièce
la plus intéressante du programme –, Sonate pour trompette et
orgue de Delerue). Le choix du répertoire ne fait pas la part belle
qu’à la trompette: quelques pièces pour orgue seul nous permettent
de prendre la mesure du talent de Vincent Boucher (la célèbre Toccata
et fugue en ré mineur BWV 565 de Bach, notamment). Il n’y a pas
grand chose à redire au jeu de Stéphane Beaulac: sonorité naturelle,
attaques précises mais douces… et, chose étonnante chez un trompettiste,
il n’a rien de tape-à-l’œil. Isabelle Picard
Musique contemporaine /
Contemporary Music
Berio
Canticum novissimi testamenti; A-Ronne
Neue Vocalsolisten Stuttgart; Newears
4 clarinets; Xasax, ensemble de saxophones modulable / Peter Rundel
Wergo WER 6678 2 (59 min 49 s)
**** $$$$
Sequenzas I-XIV
Divers interprètes
Naxos 8.557661-63 (3 CD: 182 min)
****** $$$$
Chamber Music
Ex Novo Ensemble
Black Box BBM1105 (72 min 47 s)
**** $$$$
Le compositeur italien Luciano Berio
(1925-2003) fait partie du peloton de tête des grands défricheurs
du xxe siècle. Sa première œuvre date de 1937, mais c’est surtout
au cours des années 50 qu’il s’inscrit parmi les pionniers, particulièrement
lorsqu’il fonde avec Bruno Maderna le studio de phonologie de la Radio-télévision
italienne. L’un de ses terrains d’exploration préférés a été
la voix, un univers dont il a pu repousser les limites avec l’aide
de sa première épouse, la mezzo-soprano américaine Cathy Berberian.
L’enregistrement Wergo regroupe deux œuvres écrites avec le collaborateur
fréquent Edoardo Sanguineti. Canticum nivissimi testamenti (1989)
met en présence quatre clarinettes, quatre saxophones et huit voix,
le compositeur s’amusant à mêler les textures semblables des 16
musiciens, les voix se détachant du tout par leur seule capacité à
prononcer des mots. Le disque est complété par un documentaire radiophonique
de 1975 «pour cinq acteurs», également de Berio et Sanguineti, certes
plus aride que la précédente. La suite des Sequenzas est sans
doute la plus grande contribution d’un compositeur au répertoire
pour instrument solo. De la flûte (1958) au violoncelle (2002) en passant
par le hautbois, la guitare ou la harpe, Berio y a étendu les possibilités
des instrumentistes à chaque fois. L’intégrale Naxos nous permet
d’entendre, parmi les 16 versions reproduites ici (deux versions alternatives
s’ajoutent à la série) le tromboniste Alain Trudel, le violoniste
Jasper Wood et l’accordéoniste Joseph Petric. Une collection indispensable.
Le mélomane moins gourmand pourra commencer par l’enregistrement
Black Box, qui donne un bon aperçu des Sequenzas (I, IV, VIII,
IXa et XIV) et offre un bel exemple de fusion des intérêts du compositeur
avec Lied (pour clarinette) et Les mots sont allés (un
récitatif pour... violoncelle). On y trouve enfin un bel enregistrement
de Due Pezzi (1951), pour violon et piano, et une délicieuse
Musica Leggera (1974) dédiée à Goffredo Petrassi. Réjean
Beaucage
DVD
Bach
Passion selon Saint-Jean
Gerd Türk, Midori Suzuki, Robin Blaze,
Stephan MacLoad
Bach Collegium Japan, Masaaki Suzuki
EuroArts 2050396 (117 min)
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Réputés pour leurs magnifiques interprétations
des cantates de Bach, Suzuki et ses musiciens ont aussi déjà gravé
sur disque, avec succès, les passions selon Mathieu et selon Jean.
Ils nous proposent à nouveau cette dernière, filmée il y a six ans
dans le vaste Suntory Hall de Tokyo. Le chef, qui tient aussi le clavecin
par moment, impose sa vision, à la fois légère et dramatique. Les
choeurs et l’orchestre offrent une virtuosité sans faille, et la
réputation de Gerd Türk en évangéliste n’est plus à faire: partout,
il sait trouver l’équilibre délicat entre émotion et dignité que
son rôle requiert. Le reste de la distribution, sans être impeccable,
demeure satisfaisant: on retiendra la voix lumineuse de Midori Suzuki,
qui peine cependant à maîtriser l’allemand. Bien que le concert
soit filmé sans grande imagination, et dans un lieu peu inspirant,
la magie finit par opérer et on suit avec grand intérêt, plus aisément
qu’au disque, cette passion riche en contrastes théâtraux. Philippe
Gervais
Berlioz
La Damnation de Faust
The Chicago Symphony Chorus and Orchestra
/ Georg Solti, Anne Sofie von Otter (Marguerite), Keith Lewis (Faust),
José van Dam (Méphistophélès)
Arthaus Musik 102 023 (134 min)
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Cet enregistrement a été réalisé
en 1989 au Royal Albert Hall. Depuis, il n’a cessé d’être encensé
par la critique et avec raison: Mme Von Otter et M. Van Dam étaient
alors au meilleur de leur forme, tandis que le Chicago Symphony et sir
Georg Solti vivaient leurs meilleures années ensemble. Je dois néanmoins
formuler deux réserves: pour ne parler que des solistes, Van Dam est
le seul qui sache clairement énoncer le français; les autres peuvent
faire illusion tant qu’on les écoute les yeux rivés sur les sous-titres
français, mais pas autrement. Pour moi, cela suffit à mettre cet enregistrement,
très comparable à ses meilleurs concurrents modernes, dans une catégorie
inférieure à celle des grandes gravures françaises de Coppola, Munch,
Monteux et Markévitch. L’autre réserve a trait au fait que l’oeuvre
est présentée en version concert. Sans doute La Damnation est-elle
un ouvrage hybride qui ne se prête pas naturellement à la représentation
scénique. Pierre Marc Bellemare
Haendel
Giulio Cesare
Orchestra of the Age of Enlightenment
and the Glyndebourne Chorus / William Christie; mise en scène: David
McVicar; réalisation vidéo: Ferenc van Damme. Avec Sarah Connolly,
Patricia Bardon, Angelika Kirchschlager, Danielle de Niese, Christophe
Dumaux et Christopher Maltman.
Opus Arte OA 0950 D (3 DVD: 305 min)
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Orquestra Simfònica i Cor del Gran Teatre
del Liceu / Michael Hofstetter; mise en scène: Herbert Wernicke; réalisation
vidéo: Toni Bargallo. Avec Flavio Oliver, Elena de la Merced, Ewa Podles,
Maite Beaumont et Jordi Domènech
TDK DVWW-OPGCES (2 DVD: 216 min)
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L’opéra baroque est devenu un lieu
d’expérimentation pour les metteurs en scène. Au nom de la modernisation,
ils entremêlent les incongruités et les anachronismes avec des résultats
très variables. Mis en scène par l’audacieux David McVicar et dirigé
amoureusement par William Christie, le Giulio Cesare in Egitto
donné l’été dernier au festival de Glyndebourne est une réussite
exceptionnelle. La distribution est proche de l’idéal, mais il semble
bien que ce soit la Cléopâtre déchaînée de l’Américaine Danielle
de Niese qui vole la vedette. McVicar a situé l’action dans un lieu
utopique (ce pourrait être l’Égypte) où les siècles classiques
se chevauchent jusqu’à la Première Guerre. Il s’amuse, et nous
amuse avec lui, mais nous fait comprendre aussi combien le bonheur tout
autant que les malheurs des grands de ce monde sont invariablement payés
par les plus faibles, les peuples colonisés en l’occurrence. Un spectacle
qui s’adresse aux oreilles autant qu’aux yeux et à l’intelligence,
et trois heures qui passent trop vite! C’est tout le contraire du
Giulio Cesare barcelonais de juillet 2004. Ici, les personnages
sont soumis à d’étranges contorsions dans un décor abstrait aux
prétentions confuses. La distribution est inégale, surtout du côté
masculin, alors que le chef paraît dépassé par les exigences du style
haendélien. Alexandre Lazaridès
Günter Wand Edition Part II
Works by Beethoven, Brahms, Bruckner
and Schubert
NDR Symphony Orchestra/Günter Wand
Live at the Schleswig-Holstein Musik
Festival 1990-1999
Video Director: Hugo Käch
TDK DVWW-COWANDBOX2 (322 min - 4 DVDs)
Sound 2.0
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Part 1 of the Günter Wand Edition set
a new standard for concert video productions and the present issue is
also of the highest quality. The set provides six outstanding performances
from the conductor’s core repertory. It immediately enters the realm
of historical relevance because the full presentation in sound and vision
is further irrefutable evidence of a long life dedicated to the music
and Wand’s masterful technique in recreating it. Despite increasing
frailty through the 1990s, he became a tower of strength each time he
mounted the podium and great music seems to flow from his gestures in
an artistic triumph of instinctive willpower. The NDR SO are more than
equal to their conductor laureate’s challenge of excellence. Wand
made several distinguished audio recordings with the BPO in his last
years, but as an example of an orchestra’s devotion to inspirational
leadership, the Hamburg players must be seen.
Definitive accounts of Bruckner 5, 6,
8 and 9 are included in Part 1 of the edition. Blazing performances
of Nos 4 and 7 may be the primary attractions here but the Beethoven,
Brahms and Schubert cannot be discounted. In deference to the integrity
of complete performances, Schubert’s Unfinished makes a second
appearance in the edition. It is fascinating to compare the 1997 account
and that of 2001 included in Part 1 as a preface to Bruckner’s Ninth.
W. S. Habington
Livres /
Books
The Words and Music of Frank Zappa
Kelly Fisher Lowe
Praeger, The Praeger Singer-Songwriter
Collection
2006, 259 p.
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Voici le genre de livre que l’on attend
depuis longtemps sur le compositeur américain Frank Zappa, dont l’univers
créatif éclaté et pluristylistique voue toute tentative de description
à l’inexhaustivité. Lowe se concentre particulièrement sur les
textes de Zappa; c’est déjà énorme et ça comble une lacune. Ce
qui est magnifique, c’est que l’auteur ne cherche pas à utiliser
le corpus zappien pour mettre en valeur ses propres théories fumeuses
ou sa propre petite personne, comme c’est trop souvent le cas dans
les études ou biographies parues jusqu’à maintenant. L’auteur
est un universitaire spécialiste des American cultural studies
et son ouvrage peut certes prétendre à une certaine objectivité,
même si certaines de ses interprétations pourront faire tiquer l’amateur
(sa propension à chercher la satire partout, comme si Zappa ne pouvait
pas, à l’occasion, explorer un style musical pour le simple plaisir
de le faire, finit par lasser). Mais ce point négatif (qui s’inscrit
après tout dans le projet de départ qui consiste à décortiquer l’œuvre)
s’efface devant la somme de points positifs qu’offre l’étude.
L’œuvre de Zappa (1940-1993) est immense, et Lowe arrive à en faire
le tour en mettant en parallèle ses propres observations, généralement
d’une grande justesse, avec celles de nombreux autres critiques, témoins
d’époque ou exégètes (Ben Watson, Kevin Courrier, etc.).
Une discographie à jour et une bibliographie critique contribuent à
faire de l’ensemble un ouvrage complet. Un très beau travail qui
jette un regard nouveau sur le personnage. Réjean Baucage |
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