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La Scena Musicale - Vol. 11, No. 2

Le Festival du Monde Arabe

Par Bruno Deschênes / 18 octobre 2005

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Le Festival du Monde Arabe nous propose à l'automne sa sixième édition. Commencé un peu dans l'ombre, ce festival a atteint depuis deux ans une notoriété telle qu'il est maintenant devenu un événement majeur à Montréal. Les concerts, expositions et autres événements qui y sont présentés tournent chaque année autour d'un thème particulier. Cette année, ce sera celui du Harem, et plus spécifiquement de la femme. Elle ne sera pas passive ou à l'écart, mais elle sera créatrice.

La programmation des concerts de 2005 débordera des sentiers typiques des musiques du Moyen-Orient. On y découvrira une influence orientale, influence qui s'est d'ailleurs fait sentir dans plusieurs cultures avoisinantes. Par exemple, l'excellente interprète du pipa (luth) chinois Liu Fang jouera de pair avec le joueur de oud tunisien Yousra Dhahbi. On entendra Aki Takahashi, conteuse et interprète du biwa (luth) japonais. La compositrice québécoise Katia Makdissi-Warren présentera un nouveau concert original. L'Orient est bien sûr à l'honneur avec Sima Bina, chanteuse iranienne. Le célèbre oudiste Naseer Shamma rendra un hommage à quelques grandes voix féminines du Moyen-Orient, alors que Simon Shaheen, aussi oudiste, partagera la scène avec Catherine Potter, montréalaise interprète du bansouri (flûte) indien. Le concert de clôture rendra hommage à trois grandes chanteuses d'Orient. Il faut aussi mentionner la nuit de musique et chant de tarab, cette musique d'extase typiquement orientale, qui sera sans aucun doute un événement très particulier.

Mais il y a beaucoup plus à ce festival qu'une belle programmation. J'ai rencontré le directeur de la programmation, Joseph Nakhlé, pour connaître un peu les motivations de cet événement. Au départ, la création et l'organisation d'un festival arabe en Occident n'est pas chose facile à cause de nombreuses réticences tant des paliers gouvernementaux que de la communauté arabe même. D'une part, les événements politiques récents et actuels rendent les gens suspicieux. Les organisateurs doivent se battre plus que bien d'autres pour démontrer le bien-fondé de leur projet. D'autre part, la communauté arabe est très critique, ne le considérant pas vraiment représentatif du Moyen-Orient. Les barrières et préjugés à surmonter sont énormes. Pour Joseph Nakhlé, ce festival est au départ montréalais, créé par des Montréalais originaires du Moyen-Orient. Ce festival ne pourrait exister à Paris ou à New York. Il n'est possible qu'à Montréal et ce, grâce au public de la métropole, qui démontre une énorme ouverture d'esprit.

L'idée de départ était de créer un espace humain où les cultures les plus diverses pouvaient se rencontrer et se connaître, malgré des antinomies flagrantes. Le meilleur exemple est le spectacle «Le cercle de l'extase» qui place sur une même scène deux traditions religieuses et sacrées en apparence divergentes. Ce spectacle a obtenu un succès énorme. Le but n'était pas de mettre ces musiciens ensemble sur une scène et de les faire jouer, mais de permettre à des musiciens de se rencontrer par la musique et de partager cet échange avec un public. La musique n'était qu'un moyen et non le but : les échanges humains entre ces musiciens l'étaient.

C'est une des raisons pour lesquelles ce festival se veut avant tout humain. Les organisateurs prennent des risques et acceptent de se casser le cou. Je crois qu'ils ont le don de faire d'excellentes alliances musicales où chacun assume ses divergences et les exprime par la musique. Comme Joseph Nakhlé l'indique, «avant les cultures, avant les religions, il y avait des êtres humains qui se ressemblaient tout en étant différents». En assumant et en acceptant humainement cette différence, et en misant sur elle, on peut créer des merveilles artistiques. Dans le contexte politique actuel, ce n'est pas une tâche facile. Il m'a enlevé les mots de la bouche en ajoutant que ce festival exige d'eux du courage et un dévouement... humain.

Du 28 octobre au 13 novembre 2005 www.festivalarabe.com

Recueil de l'Ermitage du Prunus
Chen Leiji, cithare qin
Ocora, C 560175 (72 min 43 s)
***** $$$$

Le qin (prononcé tchin) est une cithare sur table chinoise sans chevalets qui a vu le jour il y a près de 2 000 ans. Mesurant environ 120 cm, l'instrument est couché sur une table et le musicien pince les cordes au-dessus de l'instrument. Une des principales particularités du qin est de pouvoir produire une très grande variété de timbres sonores. Cet instrument a été pendant des siècles l'instrument de prédilection de l'élite intellectuelle chinoise. Un grand nombre de traités et de recueils de pièces ont été écrits pour le qin. OCORA nous offre ici une sélection de pièces du Recueil de l'Ermitage du Prunus, publié en 1931, et qui contient l'enseignement de Wang Binlu (1867-1921). Plusieurs de ces pièces datent du VIIIe ou encore du XIIIe, tandis que la date d'écriture de plusieurs autres ne semble pas être connue. L'excellent interprète du qin, Chen Leiji, est accompagné au xiao (flûte droite) dans quelques pièces par François Picard, spécialiste de la musique chinoise.

Milonga d'automne
Norteño, quintette de tango nuevo
Les Productions de l'Anche Libre, CD3917 (59 min 22 s)
***** $$$$

Les musiciens canadiens semblent avoir une affinité toute particulière pour la musique du tango, une musique si langoureuse tout en étant si envoûtante. Norteño est, pour moi, une merveilleuse découverte. Pour que le tango nous arrache le cœur, il faut que les musiciens en fassent tout autant lorsqu'ils l'interprètent. Les musiciens de Norteño répondent très bien à l'appel. Musiciens qui démontrent un grand amour et une grande passion pour cette musique : ils nous arrachent vraiment le cœur et le « pétrissent » sans vergogne. Quelle joie !

Ensemble Constantinople
Carrefour de la Méditerranée II, 13 octobre, 20 h, premier concert de la saison
Salle Pierre-Mercure, 300 de Maisonneuve est, Montréal
Le conseil international de la musique - International Music Council, UNESCO pour la préservation du patrimoine musical mondial http://www.unesco.org/imc/


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