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La Scena Musicale - Vol. 10, No. 9

La cuvée des festivals Millésime 05

by Marc Chénard, Charles Collard, Paul Serralheiro / August 7, 2005


Suoni per Il Popolo

Électrons libres

Depuis sa première édition en 2001, le festival Suoni Per Il Popolo s’efforce de rester fidèle à son mandat, celui de miser sur les musiques de création tous azimuts qui animent autant les scènes locale qu’ internationale. Festival unique à Montréal, il a réussi à fidéliser un public et à se démarquer nettement de la grande affiche jazzistique estivale qu’est le FIJM (voir article dans cette section). Comme par les années passées, il y aura énormément à entendre à la Casa del Popolo et à la Sala Rossa durant le mois de juin. Directeur de la manifestation, Mauro Pezzente a choisi de défendre des artistes féminines libertaires avec sa série « Libératrices : créatrices ». Par ailleurs, il y aura des soirées consacrées aux étiquettes de musiques expérimentales de chez nous. Tout au long du mois, les amateurs de platines pourront s’éclater au son des DJ les plus prometteurs dans une série de spectacles gratuits à chaque lundi et mardi soir.

Parmi les grosses pointures, il y a ceux qui continuent de tout bousculer sur leur passage, l’imposant saxophoniste teuton Peter Brötzmann en tête de liste : le 21, il sera en duo avec le batteur américain Nasheet Waits et le lendemain, avec le guitariste montréalais Sam Shalabi. Tout aussi remarquable, le percussionniste incandescent Milford Graves (voir ci-dessous) et le batteur fou hollandais Han Bennink en donneront plein les oreilles (les 10 et 14 respectivement).

Entre autres prestations attendues, signalons celles du trio DKV de Ken Vandermark (12) et du trio Indigo de la flûtiste Nicole Mitchell (13); après sept ans d’absence, Joëlle Léandre fera son retour en ville en compagnie de la violoniste India Cooke (17), un duo d’improvisation pure et dure (voir chronique de leur disque dans cette section). Lancée l’an dernier, la journée en plein air au Parc Lahaie (carrefour Saint-Joseph et Saint-Laurent) se veut une fête conviviale pour toute la famille avec de l’animation et de la musique en tous genres (11). Enfin, une conférence sur la musique improvisée (avec concerts en soirée) se tiendra le premier week end (du 3 au 5) avec des invités de marque, en l’occurrence le poète Amiri Baraka, le multi-instrumentiste Joe McPhee, les trompettistes Wadada Leo Smith et Bill Dixon, ce dernier présent au Centre canadien d’architecture le dimanche après-midi. CC

Suoni Per Il Popolo V: 1er au 26 juin http://www.suoniperilpopolo.org 514-284-0122

Tambours envoûtants

Milford Graves

À 64 ans, Milford Graves est l’un des batteurs afro-américains les plus créatifs qui soient. Installé à New York en 1964, il accompagne, entre autres, le pianiste Paul Bley dans un enregistrement publié par le mythique label ESP. Par la suite, il rejoint le New York Art Quartet, formation emblématique du free jazz américain de cette période. Mais c’est auprès d’Albert Ayler que sa trajectoire va définitivement se détacher du passé et aboutir à des musiques parmi les plus radicales de l’époque. De nos jours, on a un peu oublié toute la dimension sociale et contestataire de ces années « Free », mais tout ce qui bougeait dans la musique noire possédait aussi une forte connotation spirituelle, cause épousée par Milford Graves pour qui la musique constitue un genre de thérapie primale. En l’an 2000, Graves a pu documenter l’ensemble de ses expériences aux percussions dans un CD en solo paru sur le label Tzadik. Après une longue absence sur scène, sa carrière a pris un nouvel élan depuis et il est au sommet de son art. CC

En concert, le 10 juin en soirée à la Sala Rossa, précédé dun atelier dans laprès-midi.

OFF Festival Jazz

L’aventure se poursuit

L’an dernier, les organisateurs du Off Festival de Jazz de Montréal ont devancé d’une semaine la tenue de leur événement, tirant leur révérence au moment où le grand Goliath du FIJM eût envahi le pourtour de la Place des Arts. Sage décision, parce que les francs succès remportés en 2004 les ont encouragés à revenir à pareille date pour une sixième édition, soit du 24 juin au 3 juillet prochain. En tout et partout 33 groupes se produiront, répartis entre trois scènes, la plus importante étant celle du Lion d’Or (1678, rue Ontario est). À l’exception d’une soirée de relâche le 2 juillet, deux séries de concerts y seront présentées chaque soir — la première payante et à 20 h, la seconde gratuite à 23 h. En soirée d’ouverture, une seule performance sera à l’affiche, une rencontre entre jazzmen et poètes, spectacle-concept qui compte maintenant parmi les signatures de l’événement. En fin d’après-midi, le Quai des Brumes (4481, Saint-Denis) présentera huit ensembles, oscillant entre le groove et le mainstream. À deux pas de là, au Patro Vys (356, Mont-Royal Est) une dernière série (payante) se tiendra à compter de 21 h 30 (avec relâches le 24 juin et le 3 juillet).

Ayant fondé un collectif de musiciens montréalais dans le but de défendre la cause des artistes de chez nous, le Off reste toujours fidèle à sa vocation. Toutefois, cette édition s’engage sur quelques nouveaux sentiers. Comme l’explique le pianiste François Marcaurelle, le président du comité organisateur, le Off se renouvelle depuis deux ans suivant une passation graduelle des pouvoirs de ses instigateurs (Normand Guilbeault et Jean Vanasse) à des plus jeunes, notamment aux bassistes Alex Bellegarde et Joël Prenovault, appuyés aussi par le trompettiste Ivanhoe Jolicoeur.

Côté programmation, signalons les événements du 30 juin au Lion d’Or. Soirée internationale, celle-ci s’ouvrira avec le duo du fabuleux violoniste Mark Feldman et de sa conjointe, la pianiste helvétique Sylvie Courvoisier. Ce duo présentera, entre autres, plusieurs morceaux de l’éminent John Zorn, inscrits dans son grand projet Masada. Suivant ce duo intimiste, la saxophoniste Christine Jensen présentera le quintette Nordic Connect avec sa sœur, la trompettiste Ingrid, le batteur John Wikan et deux invités de Suède, la pianiste Maggi Olin et le bassiste Mattias Wellin. À l’instar de ce dernier concert, le Off promet beaucoup plus de rencontres entre des musiciens d’ici et d’ailleurs (surtout du reste du Canada). Tel sera le cas de la plupart des concerts au Patro, l’un d’entre eux unissant la pianiste de la relève Marianne Trudel et le saxo Philippe Lauzier à deux confrères européens de talent, le batteur français Toma Gouband et le trompettiste Niels Ostendorf. Pour clôturer le tout, une finale toute montréalaise se passera au Lion (3), commençant avec l’inénarrable Guy Nadon, se poursuivant avec un Yannick Rieu électrifié et le tout virant à la jam session jusqu’aux petites heures du matin. Marc Chénard

http://www.lofffestivaldejazz.com

Tél. : 514-570-0722

Molto Piano : Sylvie Courvoisier

Native de Lausanne (en 1968), mais vivant à New York depuis sept ans déjà, la pianiste Sylvie Courvoisier est du nombre de ces artistes montantes. Outre le duo avec Feldman (qui devient le trio Abaton avec l’ajout du violoncelliste Eric Friedlander), elle évolue aussi dans le trio Mephista avec la batteure Susi Ibarra et l’électronicienne Ikue Mori. Influencée autant par la musique contemporaine que par la libre improvisation, elle déborde de l’habituel cadre mélodico-rythmique jazz pour explorer davantage les timbres instrumentaux. Pourtant, dans le contexte de ce duo, elle sollicite les harmonies mineures propres aux musiques juives sans pour autant se limiter à ses colorations ni se cantonner dans un rôle traditionnel d’accompagnement. Marc Chénard


(c) La Scena Musicale