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La Scena Musicale - Vol. 10, No. 5

Choisir une éducation musicale

Par Danielle Dubois / 15 février 2005


Charles Ives a dit de la musique qu'elle élargissait son esprit et qu'elle l'interpellait à être un vrai individu. N'est-ce pas, après tout, ce que les parents souhaitent pour leurs enfants? Soucieux de leur offrir la meilleure éducation possible, ils sont nombreux à choisir des écoles où, en plus des matières traditionnelles, on offre aux élèves la possibilité d'apprendre un instrument de musique et de développer leurs connaissances musicales. Or, envoyer son enfant dans une école avec un programme de musique n'est pas une décision à prendre à la légère. Nous avons discuté avec quelques parents afin de savoir quels facteurs ont motivé leurs choix.

Pour Rebecca Dyck, il n'a jamais été question de faire autrement. « L'art fait partie de l'existence morale de tous. On ne donne pas le choix à un enfant de six ans d'étudier ou non les mathématiques. Je ne vois pas pourquoi ce serait comme ça avec la musique », explique cette mère de deux enfants qui a fait plusieurs recherches avant de choisir une école. « Ce que je voulais, c'était une éducation alternative, plus libre en ce qui a trait au style.» Ce style d'enseignement, elle l'a trouvé à FACE, Formation artistique au coeur de l'éducation, une école bilingue où l'art dramatique, les arts plastiques, ainsi que la musique vocale et instrumentale font partie du programme académique au même titre que les matières taditionnelles. Ses fils Sasha et Michael ont tous les deux fréquenté l'école de la maternelle au secondaire V.

Jean-Marc Dugré et Françoise Lefebvre vous diront qu'étudier la musique dans un environnement agréable et stimulant fait toute la différence. Participer aux camps de CAMMAC (Canadian Amateur Musicians Musiciens Amateurs du Canada) avec leurs filles Alix et Chloé a longtemps été pour eux une activité de famille. « La musique a ce pouvoir de créer un sentiment d'appartenance où tout passe beaucoup mieux », reconnaît Jean-Marc Dugré, lui-même musicien.

Ce pouvoir qu'a la musique de tisser des liens en est un que Rebecca Dyck a toujours mis en valeur. « La musique est devenue un langage commun pour développer des amitiés », explique-t-elle. Chaque été, elle inscrivait ses fils au Camp musical de Lanaudière et les accompagnait en pratiquant son métier d'infirmière. « Je voulais leur faire voir que partager la musique, c'était aussi naturel que de partager des histoires. C'est quelque chose qu'ils ont appris à l'école aussi où, tout en faisant beaucoup de travail en groupe, on apprenait aux élèves à être indépendants. »

À l'École secondaire Pierre-Laporte, les filles de Caroline Lang, Alexandra et Robin, suivent des cours de solfège, de théorie musicale, de chorale, de littérature musicale, d'info-musique et d'harmonie, et tout ça, en plus des matières régulières. Avec un horaire aussi chargé, il est impératif de savoir bien s'organiser et gérer son temps. « On développe des bonnes habitudes de travail ainsi que la capacité de faire plusieurs choses en même temps », soutient Jean-Marc Dugré, qui est aussi enseignant de musique à FACE.

Les recherches portant sur les bénéfices de l'éducation musicale confirment les propos de ce parent et enseignant : les jeunes qui étudient la musique ont moins de problèmes de discipline ou de drogues, leurs habiletés de raisonnement sont plus développées, et en général, ils ont une meilleure estime de soi que les jeunes qui ne font pas de musique. En voilà assez pour convaincre de nombreux parents que la musique est un moyen de munir ses enfants d'outils qui contribueront à en faire des personne équilibrées, un peu comme peuvent le faire les activités sportives ou autres. Chez les Dyck, en plus de la musique, on faisait des camps de soccer, chez les Lefebvre-Dugré, du canot-camping. Quant aux filles Lang, elles font beaucoup de gardiennage.

Pour plusieurs, une école à vocation musicale est un moyen d'offrir à leurs enfants une éducation musicale qu'ils ne pourraient pas se permettre autrement. Mais il y a quand même des frais. Suite aux coupures de l'an dernier, Caroline Lang a dû débourser près de 600$ par enfant cette année, et ce pour des services réduits. Chaque étudiant avait droit, jusqu'à l'an passé, à une leçon privée de 55 minutes une fois par semaine, rare privilège, même pour une école de musique. Maintenant, la nouvelle formule alloue une leçon de 35 minutes par semaine ou une plus longue leçon de 75 minutes à toutes les deux semaines. Ces incertitudes quant aux subventions préoccupent Caroline Lang, qui se demande si le programme existera toujours quand viendra le temps pour son fils de cinq ans d'entrer au secondaire.

En ce qui concerne le parent, son rôle en est un d'appui et d'encouragement. « Je n'ai jamais forcé mes fils à pratiquer. J'étais là pour le leur rappeler mais c'est tout », partage Rebecca Dyck. Son but a toujours été de développer une appréciation de la musique, tous genres confondus, et non d'imposer à ses fils certains goûts. « Lorsque je cuisinais, ils pouvaient écouter ce qu'ils voulaient, mais quand on se mettait à table, on devait écouter quelque chose de calme et classique », se souvient cette dernière.

Rebecca Dyck n'a pas de doutes quant aux bénéfices de l'éducation reçue par ses fils Sasha et Michael. « Je crois que ce sont des personnes heureuses», dit-elle. Jean-Marc Dugré voit le choses du même oeil. « Notre but n'a jamais été que nos filles deviennent musiciennes professionnelles, explique ce dernier, mais plutôt de faire en sorte que la musique devienne quelque chose qui fait partie de la vie.» Pour le moment, Alix et Chloé ont toutes les deux choisi un programme de double DEC en musique et sciences humaines, question de poursuivre leurs multiples intérêts. Michael Dyck poursuit pour sa part un double DEC en piano jazz et en sciences pures.


(c) La Scena Musicale 2002