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L'école FACE:
si les arts vous intéressent…

 

La réputation de l'école primaire et secondaire à vocation artistique FACE (Formation Artistique au Cœur de l'Éducation / Fine Arts Core Education ) semble fermement établie depuis 25 ans. On connaît le haut niveau atteint par les chœurs de l'école, que ce soit le Senior (Senior Treble Choir), dirigé jusqu'à présent par le dynamique Iwan Edwards (qui annoncera sa retraite de l'école en mars), ou le Junior (Junior Treble Choir) sous la houlette de la fougueuse Erica Phare. Pourtant, la mission première de l'école ne vise pas l'ouverture des élèves à une carrière musicale mais bien plutôt l'enrichissement du programme scolaire régulier grâce à quatre disciplines artistiques: le théâtre, les arts visuels, la musique vocale et la musique instrumentale. Contrairement à l'école du Plateau et à l'école secondaire Pierre-Laporte qui offrent un programme spécialisé en musique, l'école FACE ne prône pas les examens de sélection, une entrevue avec l'élève étant privilégiée. La philosophie de l'école reste claire: tous les enfants ont droit à une éducation artistique.

Toujours plus haut

Dès la maternelle, on intègre quatre périodes de musique de 45 minutes chaque semaine; trois seront consacrées aux instruments Orff et à la flûte à bec, une au chant choral. En quatrième année, on propose aux élèves d'apprendre un instrument d'orchestre: violon, flûte, cuivres, clarinette. Si l'enfant a déjà amorcé l'étude d'un instrument à la maison, il choisira un deuxième instrument, histoire d'élargir ses horizons. Chaque session, chacun des 1300 élèves de l'institution doit participer à un concert instrumental (ensemble de flûtes, concert d'orchestre, harmonie, etc. ), une prestation chorale, une pièce de théâtre (une dizaine de pièces, incluant quelques comédies musicales, sont montées chaque année) et un vernissage (sculpture, photographie, peinture, etc.)

Les enseignants privilégient les projets de groupe, aussi bien en sciences, en mathématiques qu'en arts. L'acquisition des compétences transverses, abondamment citée dans la dernière réforme de l'éducation, fait partie depuis toujours du projet éducatif de l'école. Chaque élève fait partie d'une famille (avec un chef de famille) et plutôt que de rester dans la même classe toute la journée, il se déplace, sac au dos, vers les différents locaux des spécialistes, réalité généralement vécue dans les écoles secondaires publiques. L'enfant doit donc posséder (ou acquérir rapidement) un grand sens de l'organisation: il ne s'agit pas d'oublier son violon au vestiaire ou son livre de mathématiques dans la salle de musique!

De tout chœur

Les enseignants forment une équipe soudée et l'enthousiasme est souvent palpable quand on discute avec un ou l'autre des membres du corps professoral. Erica Phare, une responsable de la musique vocale, parle avec chaleur de ses jeunes choristes; « On peut demander une implication quasi sans limite de la part des enfants, c'est beaucoup plus facile qu'avec des adultes en un sens car ils apprennent plus vite. Le seul défi à relever reste bien sûr le contrôle du bavardage! Mais après tout, il n'existe que deux types de gens dans le monde: les grands enfants et les petits! »

Elle privilégie l'utilisation du corps tout entier pour sentir la musique, intégrant ainsi respiration et pulsation. Elle fait également chanter les lignes instrumentales et associe des timbres instrumentaux à la ligne vocale (les connaissances transverses ne sont pas loin ici encore!). Elle propose aux jeunes un répertoire multilingue et multiethnique qui va des pièces sacrées (cantates, oratorios) au folklore international en passant par le jazz, les rythmes africains , les œuvres classiques, les créations contemporaines et les musiques de films. L'année dernière, la chorale Junior ( composée d'élèves en 4e, 5e et 6e années) avait, par exemple, monté de larges extraits du Stabat Mater de Pergolesi. Accompagné d'un orchestre de chambre formé de membres de l'orchestre FACE, ils avaient démontré avec aplomb que ce répertoire qu'on aurait pu croire éloigné des préoccupations enfantines leur convenait au contraire parfaitement. La justesse des voix, l'enthousiasme évident des enfants, leur précision rythmique et tout cela, sans partition, témoignaient sans équivoque de l'inutilité du nivellement par le bas que semble préconiser le système d'éducation public.

De la musique avant toute chose

Autre professeur dévoré par la passion de l'enseignement, Theodora Stathopoulos a mis sur pied à l'automne 1998 un orchestre symphonique de haut calibre qu'elle dirige bénévolement qui sert avant tout un objectif pédagogique. « Je considère cette expérience de chef d'orchestre comme une facette de ma mission d'éducatrice », déclare-t-elle. L'orchestre compte 65 jeunes musiciens, âgés de 10 à 27 ans, un amalgame d'élèves de FACE, d'anciens de l'école et de jeunes musiciens des cégeps et des universités montréalaises. Les membres les plus avancés de l'orchestre dirigent souvent les sectionnelles, devenant ainsi des mentors pour les jeunes de l'école . On les retrouve également régulièrement comme solistes invités dans un mouvement de concerto, leur permettant ainsi de polir leurs interprétations.

Pour la chef, la musique est une matière essentielle à l'épanouissement des jeunes, au même titre que la lecture, l'écriture ou les mathématiques: « Il faut sensibiliser les parents à l'importance de la musique si l'on souhaite qu'elle trouve sa place dans la vie de l'enfant. » L'enrichissement ne s'arrête pourtant pas au curriculum scolaire car elle reste persuadée que le plaisir de jouer de la musique dans un ensemble reste inégalable.

Perpectives d'avenir

En 25 ans, le nombre d'élèves à FACE a pratiquement triplé. La renommée de l'école attire maintenant quelques élèves étrangers (dont certains prodiges) mais le directeur de l'école FACE, Nick Primiano, tire une fierté évidente des accomplissement de tous ses jeunes protégés, et non seulement des futures étoiles . On peut être assuré de sa présence lors de tous les concerts, rayonnant d'un enthousiasme communicatif. Plusieurs élèves de l'école viennent également encourager leurs amis et découvrir de nouvelles œuvres. Bien sûr, tout n'est pas parfait à l'école. Comme partout ailleurs, des jeunes oublient de compléter leurs devoirs, manquent des cours, éprouvent des difficultés académiques, adoptent parfois une attitude de défi envers l'autorité. Pourtant, la force du sentiment d'appartenance des jeunes à leur école est palpable, phénomène assez rare qui vaut la peine d'être souligné, et qui explique sans doute l'absence de phénomène de gangs qui perturbe bon nombre d'autres institutions. Sans doute la musique (et les arts) adoucit-elle les mœurs…

Lucie Renaud